Après une analyse de la littérature, le Collège national des généralistes enseignants (CNGE) remet en cause les recommandations actuelles de supplémentation de vitamine D chez l’enfant.

Actuellement, les recos de supplémentation en vitamine D pour les 0 - 18 ans se fondent sur un consensus des sociétés de pédiatrie rédigé en 2022 et aligné sur les guidelines européennes. Elles préconisent un apport de 400 à 800 UI par jour entre 0 et 2 ans, que l’enfant soit allaité ou non ; le même dosage est recommandé entre 2 et 18 ans en l’absence de facteurs de risque (obésité, peau noire, absence d’exposition solaire, régime végétalien), mais si ces derniers sont présents, la dose est doublée.

Dans un avis paru fin mars 2024, le conseil scientifique du CNGE considère que l’indication de supplémentation systématique en vitamine D pour la population pédiatrique s’est construite sur des observations épidémiologiques historiques (réduction de l’incidence du rachitisme) et non sur des données issues d’essais randomisés de qualité suffisante. Or, en Europe, le rachitisme est devenu exceptionnel, avec une incidence d’environ 3 pour 100 000 enfants tous âges confondus, bien que la prévalence de la carence (taux de 25(OH)D < 12 ng/mL) soit supérieure à 10 %. Cette maladie affecte aujourd’hui surtout les enfants allaités qui n’ont pas reçu de supplémentation vitaminique avant l’âge de 5 ans et, dans une moindre mesure, ceux ayant des facteurs de risque de carence. En l’absence de ces derniers, le niveau de preuve serait insuffisant pour conclure à une efficacité clinique, ce qui conduit le CNGE à recommander de supplémenter les enfants avec parcimonie.

En pratique, ils recommandent de maintenir la supplémentation systématique de 400 à 800 UI/jour chez les < 1 an en cas d’allaitement maternel ou en présence de facteurs de risque, même si le bénéfice clinique individuel est actuellement impossible à démontrer tant l’incidence du rachitisme est faible.

Pour les autres situations cliniques, ils jugent que les données actuelles ne permettent pas de conclure à une balance bénéfice/risque favorable :

  • chez les 1 - 5 ans, aucun essai comparatif randomisé de qualité suffisante évaluant le risque de rachitisme ou la fragilité osseuse n’a été identifié par le CNGE ;
  • chez les 5 - 13 ans, les essais n’ont pas montré de résultats probants sur la réduction du risque de rachitisme ; notamment, un essai randomisé en double insu mené chez près de 9 000 enfants de 6 à 13 ans n’a pas montré de différence d’effet d’une supplémentation pendant 3 ans sur le risque fracturaire ;
  • chez les adolescents jusqu’à l’âge de 18 ans, les résultats sont discordants sur les bénéfices en termes de densité osseuse.

Quant aux les effets extra-osseux (pathologies atopiques, infections, croissance, composition corporelle, développement pubertaire…), les données seraient également insuffisantes.