Cette dernière décennie, l’échographie thoracique s’est imposée auprès des cliniciens comme un outil indispensable à la prise en charge de nombreuses pathologies thoraciques, avant tout pleurales. L’intérêt de son apprentissage étant évident, celui-ci est désormais intégré dans le diplôme d’études spécialisées de pneumologie et dans celui de médecine d’urgence.
Les os des côtes et l’air du poumon constituant un obstacle aux ultrasons, l’échographie thoracique n’a pas connu un grand essor en imagerie. Les progrès technologiques ont toutefois permis le développement de l’outil échographique, notamment sa miniaturisation. Ainsi, les informations données par l’interface pulmonaire – et plus encore par la fenêtre acoustique que représente le liquide pleural des pleurésies – améliorent la prise en charge des pathologies thoraciques. L’échographie est rapidement devenue un outil incontournable pour la prise en charge des pathologies pleurales.

Les pleurésies

L’échographie est mieux adaptée que la radiographie thoracique pour le diag­nostic des pleurésies, en particulier para­pneumoniques. Elle permet un suivi évolutif en évaluant de manière plus précise l’abondance de la pleurésie (fig. 1).
Lors d’une ponction, d’une biopsie ou d’un drainage, l’échographie améliore la sécurité des abords pleuraux. Fortes d’une littérature abondante et concordante sur la réduction des complications, deux sociétés savantes internationales recommandent la pratique d’une échographie thoracique avant tout abord pleural pour une pleurésie.1,2 En effet, seul l’échorepérage réalisé au moment de la ponction permet une réduction des risques.
Les biopsies échoguidées de nodules pleuraux ou pulmonaires sont venues enrichir les techniques diagnostiques. Ces techniques sont préférables aux biopsies scanoguidées en termes de sécurité, du fait de la visualisation en temps réel de l’aiguille.

Le pneumothorax

La pleurésie est une indication évidente pour l’échographie, du fait de la fenêtre acoustique que représente le liquide. Cependant, l’échographie permet aussi facilement de faire la différence entre l’air présent dans le poumon et l’air libre dans la cavité thoracique d’un pneumothorax.
L’échographie ne peut explorer que la surface du poumon, mais celle-ci a des caractéristiques bien connues qui permettent de la distinguer d’un pneumothorax : les petites irrégularités de la surface pulmonaire glissent sous la surface lors de la respiration – c’est le signe du glissement, qui affirme la présence du poumon et élimine un pneumothorax (fig. 2).
De nombreuses études montrent la supériorité de l’échographie clinique par rapport à la radiographie thoracique dans le diagnostic du pneumothorax résiduel après drainage ou dans le diag­nostic du pneumothorax iatrogène secondaire aux gestes thoraciques (cathéter veineux central, ponction pleurale, biopsie pulmonaire…).3 La surveillance d’un pneumothorax spontané à l’échographie permet d’économiser de nombreuses radios et l’irradiation qui s’ensuit.

Le poumon

Le poumon, qui était considéré comme non explorable par l’échographie, donne malgré tout de nombreuses informations dès qu’il est pathologique. Dès qu’une structure tissulaire ou hydrique arrive à la surface du poumon, elle est visible en échographie.
C’est le cas des pneumonies : l’air des alvéoles est remplacé par des sécrétions, du pus, des cellules inflammatoires, et cette condensation est facilement visible à l’échographie (fig. 3). Différentes études montrent que la quasi-totalité des pneumonies touchent la périphérie du poumon et ont une traduction échographique. L’échographie aux urgences a une sensibilité équivalente ou supérieure à la radiographie thoracique dans les diag­nostics de pneumonies.4
L’échographie permet la visualisation de signes spécifiques de pathologies inter­stitielles, que ce soit pour une pneumonie virale, un œdème pulmonaire ou une pneumopathie interstitielle diffuse : irrégularité de la ligne pleuropulmonaire aérée, nombreuses lignes B (lignes verticales naissant de la ligne pleuro-pulmonaire) qui sont des artéfacts du tissu interstitiel et nodules sous-pleuraux.
Plusieurs études ont clairement montré la corrélation du nombre de lignes B avec la présence d’eau intrapulmonaire dans le diagnostic et le suivi des insuffisants cardiaques, des insuffisants rénaux dialysés, des éclampsies.5 Les expériences récentes montrent une grande sensibilité de l’échographie pour le diag­nostic des pneumonies associées à la Covid-19, à l’instar des pneumonies grippales.6

Quelle place en médecine générale ?

L’échographie clinique est de plus en plus développée dans les cabinets de médecine générale et aux urgences. De nombreuses circonstances permettent d’orienter rapidement un patient en améliorant la sensibilité de l’examen clinique.
Premier exemple : un patient âgé tousse, a de la fièvre et peut éventuellement se plaindre d’une douleur thoracique. L’échographie fait rapidement le diag­nostic d’une pneumonie. Le patient reste fébrile malgré le traitement : l’échographie est le meilleur examen pour faire le diagnostic d’une pleurésie parapneumonique.
Deuxième exemple : un patient a une dyspnée d’apparition progressive. L’échographie retrouve de nombreuses lignes B, des bases avec une ligne pleurale normale : il s’agit probablement d’une insuffisance cardiaque. Si la ligne est irrégulière, la possibilité d’une pathologie interstitielle chronique débutante est soulevée.
Troisième exemple : un jeune patient se plaint d’une douleur thoracique brutale. L’échographie affirme ou élimine rapidement un pneumothorax.
L’échographie intégrée à l’examen clinique améliore les certitudes diagnostiques et permet de mieux orienter les patients ou de suivre leur traitement.7 En revanche, comme tout nouvel outil, une formation adaptée et spécialisée est nécessaire, en particulier pour bien connaître les limites de cet examen.
De nombreuses formations existent, orientées vers les urgences, la réanimation ou la pneumologie (formations du G-ECHO-SPLF*), qu’elles soient en ligne ou en présentiel, cette dernière modalité étant fortement recommandée pour apprendre correctement à tenir une sonde et à mener un examen complet avec l’aide direct du formateur.
* Le G-ECHO est un groupe de travail de la Société de pneumologie de langue française (SPLF).
* Le G-ECHO est un groupe de travail de la Société de pneumologie de langue française (SPLF).
Références
1. Havelock T, Teoh R, Laws D, Gleeson F. Pleural procedures and thoracic ultrasound: British Thoracic Society pleural disease guideline 2010. Thorax 2010;65(Suppl 2):i61‑76.
2. Dancel R, Schnobrich D, Puri N, Franco-Sadud R, Cho J, Grikis L, et al. Recommendations on the Use of Ultrasound Guidance for Adult Thoracentesis: A Position Statement of the Society of Hospital Medicine. J Hosp Med 2018;13(2):126‑35.
3. Alrajhi K, Woo MY, Vaillancourt C. Test characteristics of ultrasonography for the detection of pneumothorax: a systematic review and meta-analysis. Chest 2012;141(3):703‑8.
4. Chavez MA, Shams N, Ellington LE, Naithani N, Gilman RH, Steinhoff MC, et al. Lung ultrasound for the diagnosis of pneumonia in adults: a systematic review and meta-analysis. Respir Res 2014;15(1):50.
5. Soldati G, Demi M. The use of lung ultrasound images for the differential diagnosis of pulmonary and cardiac interstitial pathology. J Ultrasound 2017;20(2):91‑6.
6. Benchoufi M, Bokobza J, Anthony Chauvin A, Dion E, Baranne M-L, Levan F, et al. Lung injury in patients with or suspected COVID-19 : a comparison between lung ultrasound and chest CT-scanner severity assessments, an observational study [Internet]. Radiology and Imaging; 2020 [cité 3 mai 2020]. Disponible sur: http://medrxiv.org/lookup/doi/10.1101/2020.04.24.20069633
7. Cibois-Honorat I. Échographie en médecine générale. Sauramps Médical. Montpellier; 2018. 271 p.

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essentiel

L’échographie thoracique est indispensable à la prise en charge des pathologies pleurales.

Tous les abords pleuraux doivent être réalisés après un échorepérage et un échoguidage au moment du geste.

L’échographie a une place grandissante dans le diagnostic et le suivi du pneumothorax et des pneumonies.

Cette technique nécessite un apprentissage par une formation spécifique.