L’exposition aux écrans a des effets négatifs, directs et indirects, sur la santé des enfants et adolescents : c’est le constat du rapport de la commission d’experts mandatée par le gouvernement, composée de nombreux professionnels de la santé et l’éducation. Synthèse de leurs conclusions et des leurs recommandations, avec des outils pratiques pour les parents et les praticiens.

En France, les données de la cohorte nationale Elfe sur près de 14 000 enfants nés en 2011 révèlent que le temps d’écran quotidien moyen des enfants était de 56 min à 2 ans, 1 h 20 min à 3 ans et demi et 1 h 34 min à 5 ans et demi (surtout télévision et tablette). Seuls 13,7 % des enfants n’étaient pas du tout exposés aux écrans à l’âge de 2 ans. Chez les enfants âgés de 10 ans et demi, la dernière enquête, conduite en 2022, a montré que ces derniers passaient en moyenne 2 h 36 min/j devant les écrans (en moyenne : 59 min de télévision, 33 min de jeu vidéo, 29 min de tablette, 19 min de smartphone et 16 min d’ordinateur).

Une commission de travail sur l’exposition des enfants et adolescents aux écrans avait été missionnée par l’Élysée en janvier pour évaluer les retentissements de cette exposition et fournir aux adultes un guide des bons usages. Présidée par deux médecins, le Dr Servane Mouton (neurologue, spécialiste des troubles des apprentissages scolaires) et le Dr Amine Benyamina (psychiatre addictologue), elle a remis son rapport au gouvernement le 30 avril 2024.

Après une révision de littérature, les experts ont notamment souligné :

  • un consensus sur les effets négatifs, directs et indirects, des écrans sur le sommeil, la sédentarité et le manque d’activité physique, sur les risques de surpoids et d’obésité et sur la vue ;
  • que, si les études disponibles sur les liens entre écrans et neurodéveloppement des enfants sont encore sujettes à de nombreux biais méthodologiques, d’autres éléments incitent à limiter l’exposition des enfants de moins de 6 ans aux écrans récréatifs, en résonnance avec les recommandations de l’OMS et des sociétés savantes. En effet, des signaux remontés par des professionnels de la petite enfance (pédiatres, orthophonistes, médecins de PMI…) depuis des années font état de difficultés du langage et de la communication, ou encore de l’alimentation, chez des enfants surexposés aux écrans ;
  • qu’une vigilance est requise par rapport à leur usage excessif pour éviter l’amplification des symptômes liés aux troubles du neurodéveloppement – TDAH ou trouble du spectre de l’autisme – bien que rien ne permette d’affirmer aujourd’hui que l’exposition aux écrans soit à l’origine de ces troubles ;
  • que, en matière de santé mentale, l’utilisation des réseaux sociaux semble être un facteur de risque de dépression et d’anxiété lorsqu’il y a une vulnérabilité préexistante.

3, 6, 11, 13, 15 ans : les différents âges clés

La commission préconise :

  • pour les enfants de moins de 3 ans : pas d’exposition aux écrans
  • entre 3 et 6 ans : usage déconseillé, ou limité, occasionnel, en privilégiant les contenus éducatifs avec un adulte ;
  • à partir de 6 ans : exposition modérée et contrôlée, trouvant sa juste place parmi des activités qui doivent être diversifiées ;
  • avant 11 ans : pas de téléphone portable ;
  • avant 13 ans : pas de téléphone portable avec internet ;
  • avant 15 ans : pas d’accès aux réseaux sociaux  ; ensuite, accès uniquement aux réseaux sociaux « éthiques ».
 

Elle recommande aussi de :

  • protéger les moins de 6 ans de l’exposition aux écrans dans les lieux d’accueil, comme les crèches, assistantes maternelles, école maternelle, etc. ;
  • de former et informer les élèves, dès l’école élémentaire et tout au long de leur scolarité, aux contenus, usages, opportunités et dangers du numérique ;
  • d’élaborer une politique d’aide et de soutien aux parents et enseignants ;
  • de déployer une stratégie de communication massive, récurrente et grand public pour informer et sensibiliser sur les enjeux de santé, d’éducation et d’environnement liés aux écrans ;
  • faire émerger un standard réglementaire européen pour proscrire les pratiques délétères en matière de conception des plateformes numériques (algorithmes addictogènes) et mieux protéger les enfants des contenus inappropriés.

Outils pour les professionnels

Les recommandations de bons usages des écrans rejoignent celles émises par l’Association française de pédiatrie ambulatoire, qui ajoute également la règle des 4 « pas » : pas le matin, pas avant de se coucher dans la chambre de l’enfant et pas pendant les repas.

Elle a élaboré plusieurs guides qui peuvent être téléchargés et distribués aux parents sur leur site : https ://afpa.org/dossier/ecrans/ ; entre autres :

 

À visionner aussi : les capsules vidéo de La Revue du Praticien sur le sujet :

Pour en savoir plus
Gouvernement. Pas d’écran avant trois ans. 2 mai 2024.
Tisseron S. Les écrans et l’enfant. AFPA avril 2024.

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