En octobre 2022, The Lancet a publié un rapport concernant les répercussions du changement climatique sur la santé, signé par 99 experts de 51 institutions.1 Les auteurs estiment, en supposant une extra­polation linéaire de l’évolution de la mortalité, que les décès liés à la chaleur en Europe pourraient doubler en trente-quatre ans !


À quels risques sanitaires le changement climatique, et plus globalement la pollution, nous exposent-ils donc ?


Pour le changement climatique : risques d’accidents directement liés aux catastrophes météorologiques ; risques associés à l’exposition à la chaleur, en particulier aux âges extrêmes de la vie (10 420 décès en excès durant l’été 2022, selon Santé publique France) ; majo­ration du risque infectieux (la durée de transmissibilité du paludisme a augmenté de 14,9 à 31,2 % selon les régions depuis les années 1950 puisque le climat lui est plus favorable), etc.


Pour les polluants : accroissement des maladies cardiovasculaires (400 000 décès annuels prématurés en France du fait de la pollution atmosphérique, dont 80 % par maladies cardiovasculaires2) et respiratoires (exposition post-natale à la pollution d’origine automobile liée aux maladies respiratoires allergiques durant l’enfance3) mais également du risque infectieux (exposition au formaldéhyde associée à la survenue des infections respiratoires basses sifflantes de l’enfant4), etc.
Nous n’en sommes donc plus à l’étape des postulats sur d’éventuels futurs effets, rendant abstraits les enjeux. Nous sommes « dans l’œil du cyclone », au sens détourné de l’expression : cibles immédiates de tous les dangers.


Or, au-delà de l’engagement de chacun dans les petits gestes quotidiens, notamment dans nos cabinets,5 les mesures d’ampleur efficaces existent ! Par exemple, le BEH estime que baisser les niveaux de pollution de l’air sous les « valeurs guides » de l’OMS (limites moyennes fixées à 5 µg/m3/an pour les particules fines et à 10 µg/m3/an pour le NO2) permettrait d’éviter près de 8 000 décès annuels en moyenne.6


Déconvenue… la Commission européenne vient de proposer des normes de pollution de l’air à atteindre d’ici à 2030 deux fois supérieures à ces valeurs.
L’OMS avait déjà déclaré, lors de la COP24, conférence mondiale sur le climat de 2018, que « le changement climatique [était] le plus grand défi du XXIe siècle, et [menaçait] tous les aspects de la société dans laquelle nous vivons ».7 La COP27 était (enfin) présentée comme la conférence de la mise en œuvre, passant des promesses aux actes. Pourtant, malgré la création attendue d’un fonds pour les pertes et dommages au bénéfice des pays en développement, les accords conclus en novembre dernier restent décevants, selon les observateurs.


Agir en faveur d’« une seule santé » (One Health) devrait pourtant être une évidence depuis longtemps au vu des données qui s’accumulent…

Références

1. van Daalen KR, et al. The 2022 Europe report of the Lancet Countdown on health and climate change: towards a climate resilient future. Lancet Public Health 2022;7(11):e942-65.
2. Fondation Recherche cardiovasculaire. Réchauffement climatique et maladies cardiovasculaires : un lien brûlant [en ligne, consulté le 28/11 /22]. Disponible sur http://bit.ly/3U92WJD.
3. Momas I, et al. Impact de l’exposition à la pollution atmosphérique d’origine automobile sur la morbidité respiratoire et allergique au cours de l’enfance : leçons de la cohorte Paris. Bull Epidemiol Hebd 2022;(23):410-9. 
4. Roda C, et al. Impact de l’exposition domestique précoce à des polluants chimiques sur la morbidité respiratoire du nourrisson : résultats de la cohorte Paris. Bull Epidemiol Hebd 2022;(23):400-9.
5. Baras A. Guide du cabinet de santé écoresponsable. Rennes : Presses de l’EHESP ; 2021.
6. Host S, et al. Mortalité attribuable à la pollution atmosphérique en Île-de-France. Quelle évolution depuis 10 ans et quels bénéfices d’une amélioration de la qualité de l’air dans les territoires ? Bull Epidemiol Hebd 2022;19-20:326-35. 
7. Campbell-Lendrum D, et al. World Health Organization COP24 Special report on health and climate change. WHO; 2018.