L’endocardite infectieuse est une pathologie rare mais grave : incidence annuelle d’environ 3 à 4 cas pour 100 000 habitants ; mortalité de l’ordre de 20 % à la phase aiguë et de 40 % à 5 ans.
Les principaux micro-organismes responsables sont les staphylocoques (30-40 % des cas) – notamment Staphylococcus aureus (20 à 30 % des cas), à porte d’entrée généralement cutanée – et les streptocoques, principalement ceux de la cavité orale (20 %) et d’origine digestive (10 %).
La prophylaxie (primaire ou secondaire) vise à réduire le risque d’infection quand il existe un risque de bactériémie. Ses indications reposent sur l’identification des facteurs favorisants, liés d’une part à certaines cardiopathies et d’autre part à des situations ou gestes reconnus comme provoquant des bactériémies impliquant des germes à tropisme cardiaque. Elle se fonde sur :
- des mesures d’hygiène générale, notamment buccodentaire chez les sujets atteints de cardiopathies ;
- la prise d’antibiotiques avant les procédures à risque, pour ceux à haut risque d’endocardite (v. encadré). Si les indications d’antibioprophylaxie formulées dans les précédentes recommandations sont inchangées dans ces nouvelles guidelines, le niveau de cette recommandation est renforcé (classe I) compte tenu de nouvelles données étayant son bénéfice chez les patients à haut risque.
Les médecins généralistes jouent un rôle essentiel dans la diffusion et le rappel régulier des messages de prévention, mais aussi dans la coordination du parcours de soins, notamment pour la surveillance cardiologique et buccodentaire.
Mesures générales : indispensables
Ces mesures concernent tous les sujets, qu’ils soient à risque élevé ou intermédiaire d’endocardite (v. encadré) :
- Hygiène orale rigoureuse : un brossage des dents au moins 2 fois par jour est essentielle ; suivi systématique par un chirurgien-dentiste, recommandé 2 fois par an chez les sujets à haut risque et 1 fois par an si risque modéré. En outre, un bilan buccodentaire est indispensable avant la pose programmée d’une prothèse valvulaire.
- Hygiène cutanée rigoureuse : traitement optimal des pathologies chroniques de la peau ; désinfection des plaies ; limitation des effractions des barrières cutanéomuqueuses et des pratiques traumatiques (tatouage et piercing sont déconseillés, prudence avec l’acupuncture qui doit être suivie d’une surveillance clinique appropriée).
- Restriction de l’usage de cathéters de perfusion et des procédures invasives aux situations où il est indispensable, en particulier chez les sujets à risque.
- Antibiothérapie curative pour tout foyer d’infection bactérienne ; insister sur l’importance pour le patient de ne pas s’automédiquer avec des antibiotiques.
Antiobioprophylaxie : quelles modalités ?
Chez les patients à haut risque, elle n’est recommandée que lors de gestes buccodentaires jugés à risque : extractions dentaires, chirurgie buccale (y compris chirurgie parodontale, chirurgie implantaire et biopsies buccales), gestes impliquant une manipulation de la région gingivale ou périapicale des dents (y compris détartrage et traitement du canal radiculaire).
Elle n’est pas recommandée chez les patients à risque intermédiaire, faute de preuves.
Elle est à administrer 30 à 60 minutes avant les soins dentaires, en une dose unique : amoxicilline (2 g per os chez l’adulte) ou ampicilline (2 g, IM ou IV).
En cas d’allergie, les alternatives sont : céphalexine (2 g per os) ; azithromycine ou clarithromycine (500 mg per os) ; doxycycline (100 mg per os) ; céfazoline ou ceftriaxone (1 g, IM ou IV).
La clindamycine n’est plus recommandée en raison des effets indésirables associés.
Une nouveauté, concernant les interventions non buccodentaires : les experts de l’ESC considèrent que, malgré les limites des études observationnelles disponibles, l’antibioprophylaxie peut aussi être envisagée chez les patients à haut risque avant une procédure invasive (diagnostique ou thérapeutique) touchant le système respiratoire, gastrointestinal, musculosquelettique ou le tractus génito-urinaire (recommandation de classe IIb ; niveau de preuve C).
Patients à risque d’endocardite infectieuse
Haut risque (justifiant une antibioprophylaxie en cas de geste à risque) :
- antécédent d’endocardite infectieuse ;
- porteurs de prothèse valvulaire mécanique ou biologique, y compris celles implantées par voie percutanée (TAVI sur valve aortique ou TMVI sur valve mitrale) ;
- cardiopathies congénitales cyanogènes non opérées, ou opérées avec mise en place d’un matériel prothétique (durée limitée à 6 mois après la procédure en l’absence de fuite ou de shunt résiduel).
Risque intermédiaire (ne justifiant pas d’antibioprophylaxie en cas de geste à risque) :
- valvulopathies dégénératives, rhumatismales, congénitales… ;
- porteurs d’un stimulateur cardiaque (pacemaker, défibrillateur) ;
- cardiomyopathie hypertrophique.