Vaccin Moderna
Le laboratoire Moderna a présenté les données préliminaires (non encore publiées ni relues par les pairs) de son essai de phase II/III d’un nouveau candidat vaccin bivalent : mRNA-1273.214, dont la composition combine l’antigène contenu dans son vaccin actuel (Spikevax ou mRNA-1273) et un ciblant spécifiquement le variant omicron.
L’étude a recruté 814 participants au total. Les titres géométriques d’anticorps neutralisants anti-omicron ont été comparés entre les personnes (séronégatives pour le SARS-CoV-2 à l’inclusion) ayant reçu une 3e dose de mRNA-1273.214 et celles ayant reçu une 3e dose du vaccin originel mRNA-1273 (doses de 50 µg), après un schéma primovaccinal avec ce dernier vaccin dans les deux cas.
Ainsi, 1 mois après l’injection, les titres d’anticorps neutralisant le variant omicron étaient de 2 372 (IC à 97,5 % : 2 071-2 718) dans le premier groupe, contre 1 473 (IC à 97,5 % : 1 271-1 708) dans le second.
La non-infériorité de la réponse contre la souche ancestrale (mutation D614G) a également été vérifiée : les titres d’anticorps étaient de 5 977 avec le rappel bivalent mRNA-1273.214, versus 5 649 avec le rappel avec le vaccin originel. Enfin, il apparaissait que les titres d’anticorps de liaison étaient aussi plus élevés contre d’autres variants testés (alpha, bêta, gamma, delta) dans le groupe ayant reçu le vaccin bivalent mRNA-1273.214, par rapport au groupe ayant reçu le vaccin originel.
Davantage de données seront recueillies à 3 mois de l’injection (soit pendant l’été), pour vérifier la durabilité de ces titres d’anticorps dans le temps.
D’après le communiqué de presse, le rappel avec mRNA-1273.214 était bien toléré chez les 437 participants l’ayant reçu, avec un profil de sécurité et réactogénicité similaire à celui observé avec un rappel du vaccin originel (sans précision toutefois des effets indésirables les plus fréquents).
Le laboratoire a annoncé vouloir soumettre les données aux autorités sanitaires dans les semaines à venir, dans l’espoir d’obtenir une autorisation pour un rappel vaccinal spécifique contre omicron à l’automne 2022.
Toutefois, aucune donnée n’existe encore sur la protection que ce nouveau candidat vaccin conférerait contre les sous-lignages BA.4 et BA.5 (qui, en France, deviendront sans doute majoritaires dans les semaines ou mois à venir), car sa formulation a été conçue avec le lignage omicron qui circulait en début d’année. Le laboratoire a déclaré, en conférence de presse, qu’un très petit échantillon de l’essai suggérait que la capacité neutralisante des anticorps produits après l’injection du vaccin mRNA-1273.214 était deux à trois fois plus faible contre BA.4 et BA.5 que contre omicron « originel » (tout en demeurant à des niveaux satisfaisants…). Les données spécifiques à ces variants seraient en cours de recueil.
D’autres essais sont en cours
Moderna n’est cependant pas le seul à développer un vaccin spécifique contre omicron. Pfizer avait également annoncé en début d’année avoir commencé un essai clinique pour un vaccin omicron sur plus de 1 400 participants, mais les résultats n’ont pas encore été communiqués.
D’autres études sont en cours, avec des résultats disponibles majoritairement en preprint. Un essai préclinique sur modèle murin vient, quant à lui, d’être publié dans Nature Communications. Les auteurs de cette étude – des chercheurs de l’université de Yale aux États-Unis – ont conçu un vaccin à ARNm à nanoparticule lipidique, dont l’antigène est la protéine Spike du variant omicron (lignage B.1.1.529).
Ils ont ensuite évalué l’immunogénicité de plusieurs schémas vaccinaux sur des souris naïves. Tout d’abord, ils leur ont administré deux doses de 10 µg du vaccin omicron à 2 semaines d’intervalle. Des tests ELISA et de neutralisation avec virus vivant (omicron), faits 2 semaines après la dernière injection, ont montré une forte réponse d’anticorps spécifiques contre ce variant.
Dans un second temps, une 3e dose de vaccin omicron a été administrée à un groupe de souris 100 jours après un schéma primovaccinal (à deux doses) ayant utilisé le vaccin « souche ancestrale » (boost hétérologue), tandis qu’un deuxième groupe a reçu une 3e dose de vaccin « souche ancestrale » après ce même schéma primovaccinal (boost homologue).
Alors qu’une baisse considérable des titres d’anticorps avait été constatée 3 mois après le schéma primovaccinal, particulièrement des anticorps dirigés contre omicron, les doses de rappel – qu’elles soient homologues ou hétérologues – ont restauré ces niveaux, et les titres d’anticorps anti-omicron étaient plus importants (de 10 à 20 fois supérieurs) dans le groupe ayant eu le rappel hétérologue, spécifique contre omicron, que dans le groupe ayant eu le schéma homologue.
De plus, ce schéma hétérologue générait également des titres d’anticorps neutralisants comparables contre delta, et aussi contre la souche ancestrale WA-1.
À suivre…
Fang Z, Peng L, Filler R, et al. Omicron-specific mRNA vaccination alone and as a heterologous booster against SARS-CoV-2.Nat Comm 2022;13:3250.