Les liens entre rein et cancer sont étroits. La fonction rénale impacte la prise en charge et les traitements du cancer et, inversement, les traitements du cancer peuvent détériorer la fonction rénale. Enfin, les patients insuffisants rénaux sont plus exposés aux pathologies cancéreuses, et la maladie cancéreuse peut avoir une expression paranéoplasique rénale.
Prévalence de la maladie rénale chez les patients traités pour cancer
Les atteintes rénales sont fréquentes chez les patients traités pour cancer et ont des conséquences défavorables sur la prise en charge. Il peut s’agir d’une insuffisance rénale aiguë portant sur la filtration glomérulaire et/ou les fonctions tubulaires ou exclusivement de troubles hydroélectrolytiques.
L’insuffisance rénale aiguë peut prendre toutes les formes connues : fonctionnelle et/ou organique, ciblant le glomérule (glomérulopathies), le tubule (nécrose tubulaire aiguë), l’interstitium (néphropathies interstitielles aiguës) ou les vaisseaux rénaux (syndrome hémolytique et urémique, hypertension artérielle sévère ou maligne).1
Une maladie rénale chronique peut être une séquelle de ces événements aigus après lesquels la fonction rénale ne revient pas systématiquement à la normale.
L’insuffisance rénale aiguë est grave car elle a un impact sur le pronostic du patient et sa capacité à recevoir ultérieurement le traitement initialement prévu.2, 3
On utilise la définition des Kidney disease: improving global outcomes (KDIGO) pour définir l’insuffisance rénale aiguë (tableau 4).
Dans une étude danoise portant sur 1,2 million d’habitants, 27 % des 32 267 patients traités pour cancer entre 1999 et 2006 ont développé en 5 ans une insuffisance rénale aiguë (définie par une augmentation de 50 % de la créatinine).5 Parmi ces patients, 7,6 % ont eu une forme sévère, nécessitant éventuellement de recourir à la dialyse. Ce chiffre est confirmé par une autre étude conduite au Canada, en Ontario, où 10 % des patients recevant une chimiothérapie ou une thérapie ciblée ont eu une insuffisance rénale aiguë ayant nécessité une hospitalisation ou le besoin de dialyse aiguë entre 2007 et 2014.6
Une étude française s’est intéressée au risque d’insuffisance rénale aiguë pour des patients en unité de soins intensifs et traités pour des cancers solides. L’insuffisance rénale aiguë classée KDIGO 3 était observée chez 28 % des patients, et 42 % d’entre eux sont décédés.7
L’insuffisance rénale aiguë peut être liée à différents mécanismes, mais il n’y a pas en règle générale de traitement en dehors des traitements symptomatiques. Il est donc particulièrement important de faire de la prévention, de connaître les facteurs de risque qui favorisent la survenue d’une insuffisance rénale aiguë dans ce contexte et de les évaluer avant le début du traitement.
L’insuffisance rénale aiguë peut prendre toutes les formes connues : fonctionnelle et/ou organique, ciblant le glomérule (glomérulopathies), le tubule (nécrose tubulaire aiguë), l’interstitium (néphropathies interstitielles aiguës) ou les vaisseaux rénaux (syndrome hémolytique et urémique, hypertension artérielle sévère ou maligne).1
Une maladie rénale chronique peut être une séquelle de ces événements aigus après lesquels la fonction rénale ne revient pas systématiquement à la normale.
L’insuffisance rénale aiguë est grave car elle a un impact sur le pronostic du patient et sa capacité à recevoir ultérieurement le traitement initialement prévu.2, 3
On utilise la définition des Kidney disease: improving global outcomes (KDIGO) pour définir l’insuffisance rénale aiguë (
Dans une étude danoise portant sur 1,2 million d’habitants, 27 % des 32 267 patients traités pour cancer entre 1999 et 2006 ont développé en 5 ans une insuffisance rénale aiguë (définie par une augmentation de 50 % de la créatinine).5 Parmi ces patients, 7,6 % ont eu une forme sévère, nécessitant éventuellement de recourir à la dialyse. Ce chiffre est confirmé par une autre étude conduite au Canada, en Ontario, où 10 % des patients recevant une chimiothérapie ou une thérapie ciblée ont eu une insuffisance rénale aiguë ayant nécessité une hospitalisation ou le besoin de dialyse aiguë entre 2007 et 2014.6
Une étude française s’est intéressée au risque d’insuffisance rénale aiguë pour des patients en unité de soins intensifs et traités pour des cancers solides. L’insuffisance rénale aiguë classée KDIGO 3 était observée chez 28 % des patients, et 42 % d’entre eux sont décédés.7
L’insuffisance rénale aiguë peut être liée à différents mécanismes, mais il n’y a pas en règle générale de traitement en dehors des traitements symptomatiques. Il est donc particulièrement important de faire de la prévention, de connaître les facteurs de risque qui favorisent la survenue d’une insuffisance rénale aiguë dans ce contexte et de les évaluer avant le début du traitement.
Facteurs de risque d’atteinte rénale
La défaillance des fonctions rénales chez un patient traité pour un cancer peut être favorisée par des facteurs liés au patient lui-même, à la maladie cancéreuse, au traitement chimiothérapique utilisé ou encore aux complications du traitement.
Facteurs liés au patient
Le facteur le plus important à rechercher est l’insuffisance rénale chronique préexistante ou maladie rénale chronique. Il s’agit d’un facteur non spécifique puisqu’il favorise globalement toutes les situations d’insuffisance rénale aiguë.
Dans le contexte de la chimiothérapie du cancer, une maladie rénale chronique préalable peut être à l’origine d’un surdosage ou d’un risque de toxicité médicamenteuse. Il convient donc en première intention d’évaluer précisément le débit de filtration glomérulaire (DFG) du patient (encadré ) et de porter une attention particulière à l’adaptation éventuelle des doses thérapeutiques proposées.
L’existence d’une maladie rénale chronique (DFG < 60 mL/min/1,73 m2) est très fréquente chez les patients traités pour cancer. Elle est estimée entre 12 et 25 % des patients,8 mais peut être plus importante chez ceux ayant un carcinome rénal (entre 22 et 29 % des patients)9, 10 ou un cancer de la vessie (> de 50 % des patients).11
La toxicité des chimiothérapies est variable et couvre l’ensemble des formes possibles d’atteintes rénales. Elle n’est pas toujours liée à la dose reçue mais dans tous les cas une attention particulière doit être portée à l’adaptation de l’estimation de la fonction rénale et à la prescription adaptée, à l’état d’hydratation du patient souvent exposé à une hypovolémie d’origine digestive et aux coprescriptions ou comorbidités.
Dans le contexte de la chimiothérapie du cancer, une maladie rénale chronique préalable peut être à l’origine d’un surdosage ou d’un risque de toxicité médicamenteuse. Il convient donc en première intention d’évaluer précisément le débit de filtration glomérulaire (DFG) du patient (
L’existence d’une maladie rénale chronique (DFG < 60 mL/min/1,73 m2) est très fréquente chez les patients traités pour cancer. Elle est estimée entre 12 et 25 % des patients,8 mais peut être plus importante chez ceux ayant un carcinome rénal (entre 22 et 29 % des patients)9, 10 ou un cancer de la vessie (> de 50 % des patients).11
La toxicité des chimiothérapies est variable et couvre l’ensemble des formes possibles d’atteintes rénales. Elle n’est pas toujours liée à la dose reçue mais dans tous les cas une attention particulière doit être portée à l’adaptation de l’estimation de la fonction rénale et à la prescription adaptée, à l’état d’hydratation du patient souvent exposé à une hypovolémie d’origine digestive et aux coprescriptions ou comorbidités.
Facteurs liés au type de cancer
Dans l’étude danoise, les patients ayant un cancer du foie, du rein ou un myélome étaient le plus souvent concernés par l’insuffisance rénale aiguë.5 Dans l’étude canadienne, on note également un risque supérieur en cas de myélome, de cancer de la vessie et du rein et dans les leucémies aiguës.6
Facteurs liés à la chimiothérapie
Il est évident que certaines chimiothérapies sont plus toxiques pour les reins que d’autres. Le cisplatine,12 le méthotrexate13 utilisé à forte dose, l’ifosfamide14 ou le pémétrexed15 sont sans doute de loin les molécules les plus toxiques intrinsèquement, induisant des atteintes de type nécrose tubulaire et néphropathie cristalline (pour le méthotrexate). Les thérapies ciblées16 sont également fréquemment associées à une hypertension artérielle, à des syndromes hémolytiques et urémiques atypiques, et à des atteintes glomérulaires de type hyalinose segmentaire et focale.
Enfin, l’immunothérapie apparaît comme une classe thérapeutique susceptible d’induire des atteintes immunologiques se traduisant par des néphropathies inter-stitielles aiguës associées ou non aux autres effets indésirables plus fréquents (atteinte cutanée ou digestive).
Enfin, l’immunothérapie apparaît comme une classe thérapeutique susceptible d’induire des atteintes immunologiques se traduisant par des néphropathies inter-stitielles aiguës associées ou non aux autres effets indésirables plus fréquents (atteinte cutanée ou digestive).
Facteurs liés aux traitements ou comorbidités associées
Il ne faut pas omettre le rôle des thérapies associées aux chimiothérapies et qui peuvent avoir une toxicité intrinsèque comme les bisphosphonates (pamidronate ou acide zolédronique). De la même façon, les patients traités pour cancer sont fréquemment exposés aux produits de contraste iodés.
Enfin, il faut souligner l’importance de l’évaluation de l’état d’hydratation du patient (clinique et ionogramme urinaire) et de sa capacité à réguler ses apports alimentaires et en boissons au décours des troubles digestifs liés à la chimiothérapie. Une éducation spécifique est parfois utile, permettant d’éviter les erreurs diététiques (jus de fruits ou lait en cas de diarrhée) et de donner les bons conseils, par exemple de consommer des eaux alcalines et riches en sel pour assurer le maintien de la volémie.
Enfin, il faut souligner l’importance de l’évaluation de l’état d’hydratation du patient (clinique et ionogramme urinaire) et de sa capacité à réguler ses apports alimentaires et en boissons au décours des troubles digestifs liés à la chimiothérapie. Une éducation spécifique est parfois utile, permettant d’éviter les erreurs diététiques (jus de fruits ou lait en cas de diarrhée) et de donner les bons conseils, par exemple de consommer des eaux alcalines et riches en sel pour assurer le maintien de la volémie.
Conclusion
Le traitement du cancer implique de bien évaluer la fonction rénale et de choisir la dose de chimiothérapie adaptée. La surveillance de l’état d’hydratation, des co prescriptions et de tous les autres toxiques potentiels pour les reins doit permettre de faire bénéficier les patients du traitement optimal en diminuant le risque d’impact sur la fonction rénale.
Références
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