Données épidémiologiques des patients transfusés

En France

En France, les données sur les patients transfusés et les pratiques transfusionnelles ont été évaluées dans une étude nationale un jour donné pendant une période de 24 heures choisie au hasard en 2011.1 Parmi les 10 794 produits sanguins labiles demandés, 8 688 étaient des concentrés de globules rouges, 842 des concentrés de plaquettes et 1 264 des plasmas frais congelés.
Les 4 720 patients transfusés, 45,5 % de femmes et 54,4 % d’hommes, avaient un âge médian de 70 ans, et 28,7 % des patients avaient plus de 80 ans. L’âge moyen de 65 ans était comparable à celui observé dans l’étude américaine, 66 ans pour les hommes et 69 ans pour les femmes.2
Presque la moitié des patients (46 %) étaient transfusés pour des pathologies hématologiques et cancéreuses, au sein desquelles les tumeurs solides et hématologiques étaient les pathologies les plus fréquentes (14,6 et 14,5 % respectivement), suivies de la traumatologie et de la pathologie orthopédique (12,2 %), des pathologies gastro-entérologiques et hépatologiques (11,7 %), puis des pathologies cardiovasculaires (9,7 %). La répartition des pathologies était différente selon l’âge des patients transfusés. Dans toutes les tranches d’âge, les tumeurs solides et hématologiques étaient les plus fréquentes, sauf chez les sujets de plus de 80 ans chez qui la traumatologie-pathologie orthopédique était la pathologie à l’origine de la transfusion la plus fréquente (21 %). La tranche des enfants (moins de 15 ans) était particulière par la proportion élevée de patients transfusés pour anémie héréditaire (hémoglobinopathie) [15,5 %] en faisant la deuxième cause de transfusion.
La majorité des transfusions (34 %) se sont déroulées en contexte chirurgical (incluant la chirurgie, les suites chirurgicales, les procédures invasives et la transplantation d’organe), ce contexte n’étant spécifié que pour 55,2 % des patients transfusés.
De nombreux patients transfusés recevaient des médicaments ayant un impact transfusionnel, principalement des antiplaquettaires et/ou des anticoagulants (29,6 % des patients transfusés). Leur proportion variait : avec le type de produit transfusé, plus élevée chez ceux recevant des concentrés de globules rouges ou du plasma frais congelé que chez ceux recevant des concentrés de plaquettes (1/3 et 1/5 des patients respectivement) ; avec le contexte de séjour (presque la moitié des patients transfusés étaient en contexte chirurgical) ou avec l’âge des patients, atteignant 44 % des patients de plus de 80 ans.

Aux États-Unis

Aux États-Unis, les caractéristiques démographiques et épidémiologiques des patients transfusés ont été étudiées à partir de la base des receveurs du programme REDS-III, base utilisant les données électroniques de santé de 12 hôpitaux universitaires et communautaires.2 La chirurgie, la réanimation et la néonatalogie étaient sur-représentées. Les données des patients transfusés, qu’ils soient hospitalisés ou en ambulatoire, ont été analysées sur la période du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2014.
Pendant ces deux ans, 80 362 patients hospitalisés (12,5 %) ont été transfusés, principalement avec des concentrés de globules rouges (10,9 %), plus rarement avec des concentrés de plaquettes ou du plasma frais congelé (3,2 % et 2,9 % respectivement).
L’incidence de la transfusion était la plus élevée entre 80 et 89 ans et 70 et 79 ans chez les hommes et les femmes respectivement.
La mortalité des patients transfusés était beaucoup plus élevée (6,9 %) que celle des non transfusés (1,4 %), parti- culièrement pour les receveurs de concentrés de plaquettes (12,6 %) ou de plasma frais congelé (14,8 %), seuls ou en combinaison, comparée à la mortalité après transfusion de concentrés de globules rouges seuls ou en combinaison (6,6 %). La mortalité augmentait avec l’âge, pour être la plus élevée aux âges extrêmes (< 1 an et > 70 ans) et aussi avec le nombre de produits transfusés, excédant 20 % quand plus de 8 unités de n’importe quel type de produit sanguin labile étaient transfusées.

Utilisation des produits sanguins labiles, pratiques transfusionnelles

En France

En France, des échanges téléphoniques ont eu lieu entre la structure transfusionnelle de l’Établissement français du sang et le service de soins ou le prescripteur pour 22,3 % des prescriptions et ont abouti dans 36,2 % des cas à des modifications de la prescription.1 C’est le conseil transfusionnel.
Les concentrés de globules rouges sont majoritairement prescrits pour anémie (67,9 %), plus rarement pour hémorragie aiguë (21,8 %) et saignement distillant et hémolyse (10,3 %). En contexte d’hémorragie, l’âge des patients transfusés est différent de celui des receveurs de l’étude, la population des 15-44 ans étant la plus importante et celle des plus de 80 ans la plus faible. Les pratiques transfusionnelles sont en accord avec les recommandations de la Haute Autorité de santé : près de la moitié des transfusions ayant été effectuées avec un taux d’hémoglobine inférieur à 8 g/dL et celles avec un taux supérieur à 10 g/dL ne l’ont été quasiment qu’en contexte chirurgical.
De même pour les concentrés de plaquettes, les seuils observés sont cohérents avec ceux attendus : 56,9 % et 86,6 % des transfusions ont été prescrites avec des numérations plaquettaires inférieures à 20 G/L et à 50 G/L respectivement ; les transfusions avec des taux de plaquettes supérieurs à 50 G/L et à 100 G/L ont été effectuées en contexte chirurgical dans 63 % et 100 % des cas respectivement.
Pour les unités de plasma frais congelé consommées, la médiane est plus élevée en cas d’échange plasmatique, de 6 et 10 unités en contexte chirurgical ou non chirurgical respec- tivement. En dehors des échanges plasmatiques et du contexte chirurgical, la prescription de plasma frais congelé est sous-dosée, le nombre médian de plasmas étant de 2 unités pour un adulte, soit environ une dose de 8 à 10 mL/kg, inférieure à celle recommandée de 10 à 15 mL/kg.

Aux États-Unis

Aux États-Unis, un concentré de globules rouges a été transfusé par épisode transfusionnel pour la plupart des types de services et des diagnostics. Le taux médian d’hémoglobine prétransfusionnel était de 7,6 g/dL et l’augmentation par concentré de globules rouges tranfusé de 1,4 g/dL2.

Évolutions prévisibles

Le vieillissement de la population française fait consensus, les plus de 75 ans représenteront 10 % de la population en 2020 et 13,5 % en 2035 (estimations de l’Institut national de la statistique et des études économiques). Cela modifie les besoins transfusionnels, cette population ayant des spécificités, une fréquence accrue de pathologies traumatiques et orthopédiques et de la prise de traitements anticoagulants. L’augmentation de la population d’origine afro-antillaise a conduit à l’augmentation annuelle de 6 % des patients drépanocytaires dans la dernière décennie en France.3 Cette tendance devrait se poursuivre. 
Références
1. Fillet AM, Desmarets M, Assari S, et al. Blood products use in France: a nationwide cross-sectional survey. Transfusion 2016;56:3033-41.

2. Karafin M, Bruhn R, Westlake M, et al. Demographic and epidemiologic characterization of transfusion recipients from four US regions: evidence from the REDS-III recipient database. Transfusion 2017;57:2903-13.

3. Institut de veille sanitaire, Santé publique France. La drépanocytose en France : des données épidémiologiques pour améliorer la prise en charge. Bull Epidemiol Hebdo 2012;27-28. http://invs.santepubliquefrance.fr ou https://bit.ly/2RkzotE

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