objectifs
Décrire la prise en charge immédiate d’une personne victime d’une exposition sexuelle ou d’une exposition accidentelle au sang.
Connaître la conduite à tenir et les principes de suivi face à un accident exposant aux risques de transmission du VIH, du VHB et du VHC.
Introduction
Les expositions accidentelles aux liquides biologiques correspondent schématiquement :
- soit à un contact avec du sang ou un liquide biologique contenant du sang, par effraction cutanée ou projection sur une muqueuse ;
- soit à un rapport sexuel non ou partiellement protégé.
Le terme « expositions accidentelles aux liquides biologiques » englobe ainsi l’ensemble de ces situations :
- dans le premier cas de figure (exposant au virus de l’immunodéficience humaine [VIH] et aux virus des hépatites B [VHB] et C [VHC]), il s’agit d’accidents d’exposition au sang (AES), qui concernent majoritairement les professions de santé, mais aussi les usagers de drogue par voie veineuse (en cas de partage de matériel d’injection). Les contacts percutanés avec d’autres liquides biologiques (liquide céphalorachidien, liquide pleural…) sont assimilés à des AES, même en l’absence de sang visible ;
- dans le second cas de figure (accidents d’exposition sexuelle), il peut s’agir d’un rapport sexuel (vaginal, anal, buccogénital ou bucco-anal) non protégé par un préservatif, ou d’un rapport sexuel initialement protégé mais marqué par une rupture ou un glissement du préservatif. Dans tous les cas, il expose à un risque de transmission de toute infection sexuellement transmissible (IST).
Même si elles ont diminué, les expositions accidentelles restent fréquentes chez les professionnels de santé, malgré les consignes de respect des précautions standard (en pratique, 30 % des accidents percutanés recensés en France en 2014 auraient dû être évités par l’application de ces mesures). Les consultations après risque sexuel sont elles aussi toujours nombreuses. En revanche, très peu d’usagers de drogue par voie injectable consultent après un partage de matériel. Ainsi, une enquête réalisée en 2014 par le Groupe d’étude sur le risque d’exposition des soignants (GERES), en collaboration avec des comités de coordination régionale de la lutte contre l’infection par le VIH (COREVIH) d’Île-de-France, a recensé 2 688 AES dans 13 hôpitaux de la région, dont 39 % d’expositions au sang professionnelles et 42 % d’expositions sexuelles.
Risque de transmission
Il convient de rappeler que le risque moyen de transmission du VIH lors d’une blessure avec du matériel souillé est faible, estimé à 0,32 %, alors qu’il est plus élevé pour le VHC (1,8 %) et surtout pour le VHB (jusqu’à 30 %). Le partage du matériel d’injection (seringue et/ou aiguille) chez les usagers de drogue expose, quant à lui, à un risque de transmission du VIH de 0,63 %, nettement plus faible lors du partage du petit matériel (le risque de transmission reste néanmoins plus important pour le VHC et le VHB).
Le risque de transmission sexuelle du VIH dépend du type de rapport sexuel, il est le plus élevé pour un rapport anal réceptif, puis peut être classé par ordre décroissant : vaginal réceptif avec éjaculation, anal insertif, vaginal insertif, fellation réceptive. Il est 35 fois plus élevé pour un rapport anal réceptif que pour un rapport vaginal insertif. La présence de sang de la personne source, ou de lésions génitales ulcérées (surtout si elles sont liées à une IST), augmente le risque de transmission. La circoncision diminue environ de moitié le risque de transmission hétérosexuelle au sujet circoncis, du fait d’une kératinisation de la muqueuse. Le risque de transmission du VHC est rare chez les hétérosexuels, mais il est significatif chez les hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes (HSH), dont les pratiques sexuelles sont parfois plus traumatiques. Le risque de transmission sexuelle du VHB est estimé entre 30 et 40 %.
Enfin, le traitement antirétroviral des personnes vivant avec le VIH est un moyen de prévention majeur de la transmission du virus (« Tasp » : treatment as prevention) ; ainsi, en cas de suppression virologique (charge virale [CV] plasmatique indétectable) confirmée chez la personne source infectée par le VIH, le risque de transmission est nul, que ce soit par effraction cutanée ou rapport sexuel, ce qui a donc des implications immédiates dans la gestion de l’accident d’exposition aux liquides biologiques.
Conduite à tenir en cas d’exposition au sang
Mesures immédiates
Il convient d’assurer les premiers soins dans les plus brefs délais.
En cas d’effraction cutanée (piqûre, coupure) :
- ne pas faire saigner ;
- laver immédiatement à l’eau courante et au savon, puis rincer ;
- assurer l’antisepsie avec une solution chlorée, idéalement du Dakin, ou à défaut de l’alcool à 70 °, ou de la polyvidone iodée, avec un temps de contact d’au moins 5 min.
En cas de projection sur une muqueuse (oculaire le plus souvent en pratique), pratiquer un rinçage abondant au sérum physiologique (5 min au moins), ou à défaut à l’eau courante.
Ces informations, ainsi que l’ensemble de la procédure de prise en charge, doivent être affichées en un lieu facilement visible par tous les soignants, dans toute unité de soins.
Évaluation du risque de transmission
Cette étape comporte toujours deux parties : 1) l’analyse des circonstances de l’accident pour en déterminer le niveau de risque, et 2) la détermination du statut sérologique du patient source.
Circonstances de l’accident
Une fois les mesures immédiates effectuées, une première consultation (médecin de proximité de la victime de l’accident, donc le plus souvent un praticien du service dans lequel la victime travaille) évalue le risque de transmission virale en analysant les circonstances de l’exposition :
- profondeur de la blessure ;
- matériel avec lequel la personne s’est blessée (aiguille, en précisant son calibre s’il s’agit d’une aiguille creuse, lame de bistouri…) ;
- geste effectué (injection intravasculaire ou prélèvement veineux ou artériel, ou injection intramusculaire ou sous-cutanée) ;
- présence ou non de sang sur le matériel ;
- facteur de réduction du risque tel le port de gants ou de lunettes.
Cette analyse permet de définir un niveau de risque de transmission : important, intermédiaire ou faible (
Ceci n’est malheureusement pas toujours possible :
- les soignants peuvent se blesser avec une aiguille d’un conteneur, la nature de l’instrument piquant ou coupant n’est donc pas toujours identifiable, et le patient chez lequel le matériel a été utilisé non plus ;
- dans le cas d’une piqûre par une aiguille abandonnée, le risque est à considérer comme faible, car la charge virale diminue rapidement en milieu inerte.
Recherche du statut sérologique du patient source
Il convient ensuite de déterminer le statut sérologique VIH et des hépatites B et C du patient source lorsqu’il est identifié, et en cas d’infection virale chronique connue, le résultat de la dernière charge virale disponible, et les traitements en cours.
Plusieurs cas de figure peuvent se présenter :
- patient source connu comme étant infecté par le VIH, avec une charge virale détectable : le TPE est alors recommandé sauf en cas de risque faible ;
- patient source connu comme étant infecté par le VIH, mais avec une charge virale indétectable depuis au moins 6 mois : le risque de transmission est alors nul. En l’absence de résultat récent, ou en cas de doute sur l’observance, une charge virale en urgence peut être proposée au patient source, mais ne doit pas retarder la mise en route éventuelle d’un TPE ;
- statut virologique du patient source inconnu : des sérologies VIH, VHB et VHC en urgence sont réalisées, après obtention de son accord (sauf dans les situations où il est impossible de l’obtenir, par exemple en cas de trouble de la conscience). S’ils sont disponibles, des tests rapides d’orientation diagnostique (TROD) VIH peuvent être utilisés. Dans les CHU, voire dans d’autres établissements, des tests ELISA de 4e génération pour les 3 virus sont réalisables 24 heures sur 24.
Traitement post-exposition (TPE) VIH
À l’issue de cette évaluation en 2 temps, l’indication de mise en route d’un traitement post-exposition est retenue, ou non. S’il est indiqué, il doit être débuté en urgence, idéalement dans les 4 heures suivant l’exposition, au plus tard dans les 48 heures (étant inefficace au-delà). Il est prescrit par un médecin référent VIH, ou à défaut par un urgentiste (lequel peut prendre un avis auprès du référent VIH, certaines structures assurant toujours une astreinte téléphonique 24 heures sur 24). Les indications de mise en route du traitement post-exposition sont précisées dans le
Le traitement post-exposition est une association de 3 antirétroviraux (2 inhibiteurs nucléosidiques de la transcriptase inverse [INTI] + un 3e agent). Les associations d’inhibiteurs nucléosidiques de la transcriptase inverse sont soit ténofovir-disoproxil fumarate [TDF]-emtricitabine [FTC], soit ténofovir-alafénamide[TAF]-emtricitabine ; TDF et TAF sont actifs contre le VHB (il en est de même du FTC, mais des résistances du VHB sont possibles), le TAF a une moindre toxicité rénale et osseuse que le TDF. Le 3e agent recommandé en France est la rilpivirine (inhibiteur non nucléosidique de la transcriptase inverse), caractérisée par une bonne tolérance, un faible risque d’interaction médicamenteuse, et son moindre coût ; elle est contre-indiquée avec les inhibiteurs de la pompe à protons, et doit être prise préférentiellement avec des aliments (ce qui n’empêche pas la première prise dès la fin de la consultation, même si la personne est à jeun, afin de ne pas retarder l’initiation du traitement). Ténofovir disoproxil fumarate ou ténofovir alafénamide, associés à emtricitabine et rilpivirine, sont disponibles en comprimé unique (Eviplera et Odefsey respectivement, efficacité équivalente, moindre coût du second, qui tend donc à être davantage utilisé). La durée totale du traitement post-exposition est de 28 jours. Un starter kit (4 comprimés, soit 4 jours de traitement) doit être disponible aux urgences, la personne traitée étant alors revue par un médecin référent VIH dans les 4 jours, pour réévaluer l’indication et, le cas échéant, prescrire la suite du traitement post-exposition.
Lorsque le patient source est connu comme étant infecté par le VIH, traité, mais que l’indication de traitement post-exposition est retenue, le choix de celui-ci est adapté à la situation du patient source ; il est donc essentiel de connaître l’historique thérapeutique, l’existence d’éventuelles résistances du VIH aux antirétroviraux, le recours au référent VIH est ici indispensable.
D’autres situations peuvent influencer le choix du traitement post-exposition : une atteinte rénale préexistante, pour laquelle il faudra éviter le ténofovir disoproxil fumarate, ou une grossesse, où l’on préférera un inhibiteur de protéase boosté plutôt que la rilpivirine.
Autres traitements (VHC, VHB)
Hépatite C
Il n’y a pas de traitement post-exposition du VHC, aucune étude n’ayant démontré un bénéfice, et une hépatite C aiguë post-exposition chez la victime peut être rapidement traitée par des anti-VHC modernes bien tolérés, de prise simple, avec une efficacité (guérison) proche de 100 %.
Hépatite B
En ce qui concerne le VHB (
En l’absence de vaccination, une sérovaccination complète doit être proposée (au mieux dans les 72 heures, éventuellement jusqu’à J7).
Pour les personnes non répondeuses à la vaccination, une injection d’immunoglobulines spécifiques par voie intramusculaire est indiquée, lorsque le patient source est infecté par le VHB (antigène HBs positif) ; cette injection n’est pas nécessaire lorsque l’ADN du VHB est indétectable chez le patient source, et que le traitement post-exposition comporte du ténofovir disoproxil fumarate ou du ténofovir alafénamide. La posologie est de 500 UI, la délivrance uniquement hospitalière, l’injection se fait dans un délai de 72 heures (voire 1 semaine après l’exposition), et nécessite une surveillance clinique de 30 minutes (rares réactions d’hypersensibilité).
Suivi après une exposition au sang (tableau 3)
Modalités
En cas d’accident professionnel, le suivi est habituellement assuré par le service de médecine du travail de l’établissement dans lequel la victime travaille. Il peut aussi être réalisé par le médecin traitant, notamment pour les professionnels libéraux, ou lorsque l’accident d’exposition aux liquides biologiques n’est pas d’ordre professionnel, ou enfin par le médecin référent VIH lorsqu’un traitement post-exposition est prescrit.
VIH
Une sérologie VIH initiale est prélevée (dans les 7 jours suivant l’exposition).
Lorsque le patient source est infecté par le VIH avec une charge virale indétectable, le suivi n’est pas nécessaire.
Il en est de même si la personne source est VIH négative au moment de l’accident d’exposition aux liquides biologiques, sauf s’il existe un risque de primo-infection chez la source.
Si la personne source est infectée par le VIH avec une charge virale détectable ou inconnue, ou si son statut VIH est inconnu, un contrôle sérologique VIH à 6 et 12 semaines est indiqué (en théorie suffisant à S6 en l’absence de traitement post-exposition, mais nécessaire du fait de la réglementation).
VHB
Le suivi VHB n’est pas nécessaire lorsque la victime est immunisée contre le VHB.
Lorsque le titre d’anti-HBs est inconnu au moment de l’accident d’exposition aux liquides biologiques (soignant vacciné, ou personne non vaccinée), il est nécessaire de le déterminer à J0.
En l’absence de protection, un suivi à 12 semaines est indiqué si la personne source est infecté par le VHB (Ag HBs positif) ou de statut inconnu.
En cas de vaccination après l’accident d’exposition aux liquides biologiques, un contrôle des anti-HBs 1 mois après la fin de la vaccination est indiqué.
VHC
Un suivi sérologique VHC est indiqué si la personne source a une infection VHC virémique (ARN du VHC positif), ou est de statut sérologique inconnu, sachant qu’une sérologie VHC initiale doit être faite tout comme pour le VIH.
Le suivi comporte une sérologie VHC à 12 semaines, à laquelle on ajoute un ARN du VHC, et le dosage de l’ALAT, à 6 semaines, lorsque la source est virémique pour le VHC.
Déclaration
Lorsque l’exposition au sang survient dans un contexte professionnel, elle doit être déclarée par la victime à son employeur, dans un délai de 48 heures au maximum, et un certificat médical initial doit être adressé à la caisse primaire d’assurance maladie. Les professionnels non salariés doivent souscrire une « assurance volontaire : accident du travail et maladies professionnelles » auprès de leur CPAM ; en cas d’accident d’exposition aux liquides biologiques, la victime doit envoyer une déclaration d’accident du travail (Cerfa 14463*01), accompagné du certificat médical initial de l’unité de gestion des risques professionnels (UGRP) de la Caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) et déclarer cet accident à son assurance.
Accident d’exposition aux liquides biologiques chez les usagers de drogues
En pratique, très peu d’usagers de drogues consultent après avoir partagé et/ou échangé du matériel d’injection ; le risque, on l’a vu, est de 0,63 % en cas de partage de seringue ou d’aiguille, plus faible en cas de partage de petit matériel (coton/filtre, récipient, cuillère, eau de rinçage). Il convient d’analyser le type de matériel partagé, afin d’évaluer le risque de transmission, et de poser, ou non, l’indication de traitement post-exposition (
Conduite à tenir en cas d’exposition sexuelle
Évaluation du risque de transmission sexuelle
De la même manière qu’après exposition au sang, cette évaluation repose 1) sur l’analyse du type d’exposition sexuelle, et 2) sur le statut sérologique du ou de la partenaire sexuel(le).
Analyse des circonstances de l’exposition sexuelle
L’interrogatoire de la personne qui consulte doit préciser le type de rapport sexuel : rapport anal, vaginal ou orogénital, caractère insertif ou réceptif, présence ou non d’un saignement (règles, rapport traumatisant, agression sexuelle) ; le risque est par ailleurs augmenté en cas d’éjaculation. Le risque de transmission est le plus élevé lors d’un rapport anal réceptif, et le plus faible en cas de fellation. Cette consultation initiale doit se dérouler dans un climat de confiance, sans porter aucun jugement ni reproche. Il convient de préciser la date et l’heure de l’exposition, le traitement post-exposition n’ayant plus aucun bénéfice s’il est initié plus de 48 heures après.
Recherche du statut sérologique du partenaire sexuel
L’évaluation du risque, et donc la décision d’instaurer un traitement post-exposition, repose ensuite sur le statut sérologique du ou de la partenaire sexuel(le). Plusieurs cas peuvent se présenter :
- en cas d’infection par le VIH connue chez ce/cette partenaire, avec une charge virale indétectable depuis au moins 6 mois, sous traitement antirétroviral, le risque de transmission est nul, le traitement post-exposition n’est donc pas indiqué. Il n’est pas nécessaire de vérifier la charge virale en urgence, sauf si la dernière charge virale indétectable date de plus de 6 mois ou s’il existe des doutes sur l’observance ;
- si le ou la partenaire, à l’inverse, a une charge virale quantifiable, le traitement post-exposition est indiqué sauf en cas de fellation insertive, ou réceptive sans éjaculation ;
- si le statut sérologique du ou de la partenaire est inconnu et que celui ou celle-ci est accessible, il convient de lui faire, avec son accord, un dépistage du VIH, avec un test rapide d’orientation diagnostique (TROD) si disponible ou un test ELISA si faisable en urgence. Cette situation est en fait rare, le dépistage est parfois réalisé à distance, ce qui permet, en cas de négativité, d’interrompre le traitement post-exposition qui aurait été initié. Si le statut sérologique de la personne source ne peut être obtenue (situation en pratique la plus fréquente), il convient d’essayer de préciser si elle appartient à un groupe à prévalence élevée, ce qui fait alors poser l’indication de traitement post-exposition (sauf fellation insertive, ou réceptive sans éjaculation). Sont considérés comme faisant partie d’un groupe à prévalence élevée : les HSH ayant des partenaires sexuels multiples, les travailleurs ou travailleuses du sexe, les usagers de drogues injectables, les personnes originaires de régions où la prévalence du VIH est > 1 % (Afrique subsaharienne, Caraïbes, dont les Antilles françaises, Asie, Amérique du Sud, dont la Guyane) ;
- un traitement post-exposition est aussi indiqué après une agression sexuelle (majoration du risque de transmission dans ce contexte).
Traitement post-exposition au VIH
À l’issue de cette évaluation, une décision d’instaurer ou non un traitement post-exposition est prise (
Autres traitements (VHB, VHC, IST)
Hépatite B
- Si la personne exposée n’est pas immunisée contre le VHB, une sérovaccination est indiquée (mêmes modalités qu’après exposition au sang).
- Si la personne source est infectée par le VHB (Ag HBs positif), l’administration d’immunoglobulines spécifiques se discute (
tableau 4 ) ; elle n’est cependant pas nécessaire si la personne source n’est pas virémique (ADN du VHB indétectable), et que le traitement post-exposition comporte du TDF ou du TAF.
- Lorsque le statut VHB de la personne source est inconnu, cas le plus fréquent, une vaccination seule est le plus souvent effectuée, complétée par des Ig spécifiques seulement en l’absence de TDF ou TAF dans le traitement post-exposition (situation très rare), et de partenaire à risque (originaire de zone géographique de haute endémicité [Afrique subsaharienne, Asie] ou moyenne endémicité [départements d’outre-mer, Moyen-Orient, Afrique du Nord, Europe de l’Est et du Sud, Amérique du Sud, sous-continent indien] pour le VHB, usager de drogues par voie veineuse, HSH multipartenaire).
Hépatite C
En cas d’exposition au VHC, aucun traitement préventif n’est indiqué, en l’absence d’étude ayant montré un bénéfice. La prise en charge repose sur une surveillance biologique identique à celle décrite lors des accidents d’exposition aux liquides biologiques professionnels, afin de dépister rapidement une éventuelle primo-infection.
Contraception
En cas d’exposition sexuelle chez une femme n’ayant pas de contraception, il convient de proposer une contraception d’urgence, au plus tard dans les 72 heures. Par ailleurs, pendant toute la durée de suivi, il est souhaitable d’éviter une grossesse (risque de contamination, toxicité potentielle des antirétroviraux), en poursuivant une contraception efficace ; en cas de contraception hormonale, il est indispensable de vérifier l’absence d’inter- action médicamenteuse avec les antirétroviraux (qui existe, notamment avec le ritonavir et le cobicistat, boosters des inhibiteurs de protéase, et l’elvitégravir, inhibiteur de l’intégrase, certes non recommandés en première intention). La contraception mécanique reste la plus sûre dans ce contexte.
Autres infections sexuellement transmissibles (IST)
D’autres IST (syphilis, gonocoque, Chlamydia) que le VIH ou les virus des hépatites B et C peuvent être transmises en cas d’exposition sexuelle ; il convient de les chercher lors du bilan initial, et du suivi : sérologie de la syphilis, PCR combinée gonocoque-Chlamydia sur urines (pas de miction dans l’heure précédent le prélèvement) chez l’homme et autoprélèvement vaginal chez la femme (un prélèvement pharyngé et/ou anal est proposé selon les pratiques sexuelles). Une antibiothérapie préventive de syphilis, ou de l’un des 2 agents d’urétrite, n’est pas recommandée, en l’absence d’étude ayant démontré un rapport bénéfice/risque favorable.
Suivi après une exposition sexuelle
Modalités
Il est assuré par le médecin référent VIH, particulièrement en cas de traitement post-exposition, mais peut aussi l’être par le médecin traitant, ou directement prescrit par le référent VIH lors de la première visite. Le bilan initial comporte dans tous les cas des sérologies VIH, VHB (anticorps anti-HBs si vaccination, complété de l’Ag HBs et l’anti-HBc en l’absence de notion de vaccination), VHC, syphilis, une recherche de Chlamydia et gonocoque par PCR, une mesure de l’ALAT et la créatinine, ainsi qu’enfin un test de grossesse chez la femme en cas de traitement post-exposition. Le plus souvent, il n’y a pas de contrôle biologique à effectuer durant les 4 semaines de traitement post-exposition (sauf en cas de comorbidité).
VIH
Un suivi VIH n’est pas nécessaire si la/le partenaire est non infecté par le VIH (sauf s’il existe un risque de primo-infection), ou infecté par le VIH avec une charge virale indétectable. Dans les autres cas, une sérologie VIH à 6 semaines est suffisante en l’absence de traitement post-exposition, mais est complétée par un dernier contrôle sérologique à 12 semaines en cas de traitement.
VHB
En l’absence d’immunisation contre le VHB, le suivi comporte (si la personne source est porteuse de l’Ag HBs ou de statut VHB inconnu) à 12 semaines une mesure de l’ALAT et la recherche des marqueurs VHB. En cas de vaccination VHB effectuée dans les suites de l’exposition, un contrôle des anti-HBs est fait 1 mois après la dernière injection vaccinale.
VHC
Un suivi VHC est indiqué après exposition sexuelle chez les HSH, ou lorsque la personne source est virémique connue pour le VHC, et dans les situations d’agression sexuelle ; il comporte une sérologie VHC avec ALAT à 12 semaines (et charge virale VHC à 6 semaines si virémie chez la personne source).
Autres infections sexuellement transmissibles
Enfin, le contrôle à 6 semaines comporte une sérologie de la syphilis, et une recherche de Chlamydia et gonocoque par PCR, sur urines chez l’homme et autoprélèvement vaginal chez la femme (+ sites pharyngé et/ou anal selon les pratiques à risque).
POINTS FORTS À RETENIR
La survenue d’une exposition au sang ou sexuelle reste fréquente, il convient de poursuivre et renforcer les messages de prévention.
Après exposition sexuelle, le risque de transmission est d’autant plus élevé que la personne exposée est en situation réceptive. En cas d’exposition professionnelle, les risques les plus importants sont liés aux piqûres profondes, avec aiguille creuse ou matériel intravasculaire.
Dans tous les cas d’exposition, le risque est d’autant plus élevé que la charge virale de la personne source est élevée ; à l’inverse, en cas de charge virale indétectable, le risque est nul.
Le traitement post-exposition, lorsqu’il est indiqué, doit être débuté idéalement dans les 4 heures suivant le risque, au plus tard 48 heures après (inefficacité au-delà). Ainsi, un starter kit de 4 jours doit être disponible dans les services d’urgence et les services référents VIH.
Le choix préférentiel de traitement post-exposition est une trithérapie associant 2 analogues nucléosidiques (ténofovir DF ou TAF, et emtricitabine) à un inhibiteur non nucléosidique de la transcriptase inverse (rilpivirine), la durée totale de ce traitement post-exposition est de 28 jours.
Ténofovir DF ou TAF, et emtricitabine ont l’avantage d’avoir en outre une activité sur le VHB ; en l’absence d’immunisation, il faut largement proposer la vaccination contre le VHB.
La durée du suivi post-exposition, lorsqu’il est indiqué, est de 6 semaines en l’absence de traitement post-exposition, 12 semaines en cas de traitement.
Exposition accidentelle aux liquides biologiques
Si un dossier d’ECNi semble difficilement pouvoir porter entièrement sur ce chapitre, il peut facilement faire l’objet de quelques questions dans un dossier progressif, ou encore de questions isolées.
L’étudiant doit avoir un ordre d’idée (en termes de pourcentage) des risques de transmission des virus VIH, VHC et VHB, lors d’un accident d’exposition aux liquides biologiques sexuel ou par effraction cutanée. Il doit connaître les facteurs qui augmentent ou diminuent ce risque. Les mesures immédiates de prise en charge de l’accidenté sont essentiellement des mesures de bon sens. Les questions d’examen peuvent surtout porter sur l’indication et les modalités du traitement post-exposition du VIH, la conduite à tenir face au risque lié à l’hépatite B, et enfin le suivi biologique du patient exposé. Ceci suppose d’avoir bien compris comment évaluer le risque de la situation d’exposition. En cas d’accident d’exposition aux liquides biologiques sexuel, par exemple, il faut savoir déterminer si le sujet source appartient au groupe dit « à risque ». La nature du traitement post-exposition de première intention (trithérapie comprenant deux inhibiteurs nucléosidiques et un inhibiteur non nucléosidique) peut être demandée, et il faut connaître les molécules qui ont aussi une action contre le VHB. Les adaptations en cas de situations particulières dépassent les objectifs de l’examen.