Devant une fièvre de l’enfant, les dosages de certains biomarqueurs de l’inflammation comme la CRP peuvent être utilisés pour discriminer une infection bactérienne d’une virale et éviter la prescription inutile d’antibiotiques. Une méta-analyse, parue dans le Lancet, fait le point sur leurs performances diagnostiques. 

En cas de fièvre chez un nourrisson, des biomarqueurs de l’inflammation, tels que la protéine C-réactive (CRP) ou la procalcitonine (PCT), peuvent être utilisés pour évaluer le risque d’infection bactérienne et orienter la décision. Les guidelines américaines et européennes recommandent de préférer le dosage de la PCT, qui a montré de meilleures valeurs prédictives que celui de la CRP dans les études observationnelles ; mais, en pratique, elle est souvent moins facilement disponible que ce dernier. De plus, la méta-analyse la plus récente sur les performances de la PCT date d’il y a 10 ans et ne contenait aucune étude la comparant à celle de la CRP ; la différence entre la précision diagnostique de ces deux dosages n’est donc pas claire.

Pour la première fois, une revue systématique avec méta-analyse a comparé directement la précision diagnostique du dosage de la PCT et de la CRP chez des nourrissons de moins de 90 jours emmenés aux urgences pour fièvre (≥ 38 °C). Elle a inclus 14 études avec un total de 7 755 nourrissons.

La méta-analyse a permis de comparer la sensibilité et la spécificité de chacun de ces dosages dans le diagnostic, d’une part, d’infection invasives bactériennes et, d’autre part, d’infections bactériennes graves – une infection pouvant être grave sans être invasive. Sur les 7 755 nourrissons inclus, 161 ont eu un diagnostic d’infection invasive bactérienne, confirmé par la présence du pathogène dans le sang ou le liquide céphalorachidien. Pour les infections bactériennes graves, en revanche, il n’existait pas une définition consensuelle entre les différentes études, ce qui a introduit un biais important.

Pour effectuer ces comparaisons, les valeurs seuil reconnues internationalement ont été adoptées, à savoir 0,5 ng/mL pour la PCT et 20 mg/L pour la CRP.

Les résultats de sensibilité et de spécificité de chaque étude servaient ensuite à constituer une courbe exprimant le lien entre le taux de faux positifs et la sensibilité pour chaque biomarqueur, puis le calcul de l’aire sous la courbe permettait de connaître, pour chacun, la précision diagnostique globale (une valeur plus importante signifiant une meilleure performance). Les résultats de l’analyse groupée des données étaient aussi renseignés.

La procalcitonine a une meilleure précision diagnostique

Pour le diagnostic d’une infection invasive bactérienne :

  • le dosage de la PCT avait une sensibilité de 0,78 (IC95 % : 0,69 - 0,88) et une spécificité de 0,85 (IC95 % : 0,84 - 0,86), et l’aire sous la courbe était de 0,72 (IC95 % : 0,56 - 0,79) ;
  • le dosage de la CRP avait une sensibilité de 0,65 (IC95 % : 0,49 - 0,82) et une spécificité de 0,80 (IC95 % : 0,74 - 0,85), et l’aire sous la courbe était de 0,28 (IC95 % : 0,17 - 0,61).

Pour le diagnostic d’une infection bactérienne grave :

  • le dosage de la PCT avait une sensibilité de 0,51 (IC95 % : 0,43 - 0,59) et une spécificité de 0,91 (IC95 % : 0,88 - 0,94) ;
  • le dosage de la CRP avait une sensibilité de 0,66 (IC95 % : 0,59 - 0,72) et une spécificité de 0,85 (IC95 % : 0,82 - 0,88) ;
  • il n’y avait pas de différence significative entre les deux valeurs de l’aire sous la courbe (respectivement 0,55 et 0,54).

Enfin, d’autres analyses leur ont permis de déterminer qu’une valeur seuil plus pertinente pour détecter une infection invasive bactérienne par le dosage de la CRP serait de 13 mg/L, inférieure à celle actuellement utilisée.

Les auteurs en ont conclu que, aux valeurs seuil de 0,5 ng/mL pour la PCT et 20 mg/L pour la CRP, le dosage de la PCT était significativement plus performant que celui de la CRP pour détecter une infection invasive bactérienne. Ce n’était pas le cas pour les infections bactériennes graves étudiées dans ces travaux, ce qui reflète en partie la difficulté d’identifier cette entité en l’absence de définition consensuelle.

Ils préconisent ainsi de considérer avec précaution la recommandation actuelle d’utiliser de façon interchangeable la CRP et la PCT lorsque l’accès à un dosage de la PCT n’est pas disponible, ou d’envisager une valeur seuil de CRP < 20 mg/L. Ils avertissent toutefois que leurs conclusions peuvent ne pas être généralisables (cette étude a été réalisée aux urgences, non en ville, et dans des pays à hauts revenus).

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