Nombreux sont les patients porteurs de sonde vésicale pendant une période limitée ou non. Le sondage vésical à demeure est indiqué en cas de mauvaise vidange vésicale ou de rétention d’urines lorsque aucune autre prise en charge ne peut être envisagée.
Quelle que soit l’indication, la surveillance doit être rigoureuse, pour limiter les complications. Elle est partagée entre patient, médecin généraliste, infirmière et spécialiste. L’intérêt du sondage, établi par l’urologue, doit été réévalué régulièrement.

Asepsie et système clos : impératifs

La pose d’une sonde vésicale à demeure nécessite une asepsie stricte, en système clos et stérile afin de limiter le plus possible les complications infectieuses, les plus fréquentes.
On utilise le plus souvent des sondes en silicone, moins pourvoyeuses d’irritations et de cystite polypoïde que celles en latex1. Pour mémoire, les recommandations nationales et internationales recommandent de réduire l’usage du latex au minimum, beaucoup de centres ayant adopté une politique de suppression.
Le ballonnet est préférentiellement gonflé par de l’eau stérile (réduction du risque de cristallisation). Le volume maximal pouvant être contenu dans le ballonnet est indiqué sur la valve de la sonde. En pratique courante, on évite de dépasser 15 ml². Des codes couleur permettent de reconnaître le calibre de la sonde exprimé en unité Charrière (CH) ou French gauge (FG) [exemple de conversion Charrière/diamètre : 1 CH = 1/3 mm de diamètre, donc une sonde CH 12 correspond à un diamètre de 4 mm].3
Des poches collectrices stériles doivent être utilisées lors de la pose, pour respecter le système clos. Lors des changements de poche effectués par le patient (utilisation de matériel non stérile), le système clos n’est plus assuré.2
Le remplacement de la poche collectrice n’est préconisé qu’en cas de souillure ou de fuites, conformément aux dernières recommandations, et n’est donc plus systématique.4
Des poches de jambe peuvent être proposées aux patients autonomes : elles ont l’avantage d’être plus discrètes pour un usage à long terme. Le patient doit alors poser la poche collectrice la nuit, en prolongation de la poche de jambe, pour augmenter la capacité de collecte et éviter la vidange nocturne.
Il n’existe pas de consensus sur le délai entre deux changements de sonde. Habituellement, une durée de quatre à six semaines est proposée. Cependant, les dernières recommandations du comité d’infectiologie de l’Association française d’urologie (AFU) préconisent de ne pas programmer les remplacements, mais de les adapter en fonction du patient, du type de sonde et des complications.5
L’entretien quotidien de la sonde, réalisé par le patient, se limite à un lavage à l’eau et au savon lors de la toilette (sonde, méat et organes génitaux externes).

Distinguer infection et colonisation

Une sonde urétrale constitue un accès permanent des germes à l’appareil urinaire.1
Trois mécanismes principaux d’infection urinaire peuvent être incriminés :
– contamination de la vessie lors du cathétérisme par des germes de l’urètre antérieur non supprimés par la toilette avant sondage : environ 20 % des patients sont déjà colonisés dès le sondage ;
– propagation des micro-organismes cutanés à partir du méat urétral le long de la sonde ;
– diffusion des germes dans la lumière même de la sonde, ce qui souligne l’intérêt de maintenir clos le système de drainage. On a montré ainsi qu’à l’occasion des changements, la numération des germes était plus élevée sur l’ancienne sonde que sur la nouvelle. Une fois installée, l’infection est pérennisée par la présence de la sonde, qui induit des lésions inflammatoires au niveau de la muqueuse cervicale et urétrale pouvant être à l’origine d’incrustations calcaires (elles apparaissent dès la première semaine après la pose de la sonde), voire de calculs, qui représentent autant de foyers bactériens.
Les sondages de longue durée sont associés à un plus haut risque d’infection, de même que la faible diurèse, la stase urinaire, l’âge et les comorbidités. Les infections sont aussi plus fréquentes chez la femme, pour des raisons anatomiques.
Deux tableaux se distinguent :
– la bactériurie asymptomatique (ou colonisation) : elle est diagnostiquée sur les examens cytobactériologiques des urines (ECBU) sans symptômes vésicaux ou généraux ;
– l’infection symptomatique, qui nécessite un diagnostic rapide pour une prise en charge adaptée. Chez l’homme, il s’agit d’épididymite, d’orchite ou de prostatite, aisément suspectées à l’examen clinique. Le diagnostic peut être plus difficile chez la femme. Ces infections sont fréquemment accompagnées d’hyperthermie.
L’ECBU sur sonde nécessite un prélèvement rigoureux pour qu’il soit interprétable. Il est réalisé après clampage et désinfection avec une seringue au niveau de la chambre de prélèvement. Il faut tout faire pour ne pas rompre le système clos. Par ailleurs, même en l’absence d’infection avérée, il peut exister une leucocyturie à l’ECBU, du fait de la présence d’un corps étranger. Le prélèvement est au mieux réalisé sur une sonde propre, si celle-ci peut être changée, afin d’éviter de recueillir le dépôt se constituant sur la sonde plutôt que les urines vésicales.

Infections symptomatiques : antibiothérapie adaptée

En cas de simple colonisation, l’antibiothérapie n’est pas recommandée. Elle n’apporterait qu’une stérilisation temporaire des urines et majorerait le risque d’émergence de bactéries multi­résistantes. Néanmoins, certaines situations nécessitent le traitement de ces colonisations, en préopératoire d’une chirurgie urologique après changement de la sonde vésicale et chez les patients pour lesquels elle est potentiellement source de complication : patients immunodéprimés, neutropéniques et femmes enceintes. Les candiduries asymptomatiques sont traitées par un changement de sonde vésicale.
Les infections symptomatiques sur sonde vésicale nécessitent une antibiothérapie adaptée à l’antibiogramme avec une bonne pénétration dans les voies urinaires. La durée est fonction du type d’infection, par exemple 14 jours en cas de prostatite. Il est également recommandé de changer la sonde.

Complications non infectieuses

Paraphimosis. Fréquent, il survient quand le patient n’est pas recalotté après le sondage. Dès que le diagnostic est posé, il est important de le réduire le plus rapidement possible, un retard de prise en charge majorant l’œdème et rendant la réduction plus difficile. Dans les cas les plus évolués, il y a risque de nécrose du prépuce.
Obstruction. Le patient se plaint de douleurs pelviennes et il y a des fuites autour de la sonde. Dans ce cas, faire des lavages de vessie à la seringue et augmenter les boissons. Si la sonde ne peut être débouchée, il faut la remplacer.
Déplacement. La longueur visible de la sonde est anormalement longue, le patient se plaint de douleurs (chez l’homme, les sondes font usuellement 38 cm) ; il y a aussi des fuites. Dans ce cas, la sonde doit être changée.
Arrachement. Ceci provoque une urétrorragie importante. Il faut remettre une sonde en place et la mettre en traction si le saignement persiste : tirer sur la sonde et nouer une compresse au contact du méat urétral. Cette traction ne doit pas être maintenue plus d’une heure, car il y a risque d’escarre du méat.
Fuites. La sonde est bouchée ou déplacée. Il faut vérifier sa perméabilité et la changer si nécessaire. Il peut s’agir de contractions involontaires de la vessie. Après avoir vérifié la perméabilité de la sonde, le médecin prescrit des anti­spasmodiques ou des anticholinergiques (oxybutynine, solifénacine, chlorure de trospium, fésotérodine). Il a même été décrit pour certains patients l’utilisation de la toxine botulique A intradétrusorienne. Le but est toujours de supprimer les contractions sur sonde, facteur de destruction urétrocervicale, reflux vésico-­urétéral, douleurs et fuites.
Hématurie. Elle peut être due à une inflammation chronique de la vessie (liée elle-même à la présence de la sonde) ou à une pathologie (tumeur de vessie, calcul...). Dans ce cas, il faut pratiquer des lavages de vessie à la seringue et augmenter les boissons. Si l’hématurie persiste, il faut prévenir le médecin. Un dépistage systématique de tumeur de vessie doit être effectué chez tout patient avec une sonde vésicale en place depuis plus de dix ans.
Références
1. Phé V, Rouprêt M. Malade porteur d’une sonde vésicale à domicile. EM Consulte. Disponible sur: https://www.em-consulte.com/article/300238/malade-porteur-d-une-sonde-vesicale-a-domicile
2. Vallée M, Robert G, Rigaud J, et al. Technique et gestion du sondage vésical chez l’homme. Progrès en Urologie 2018;28(14):783‑9.
3. Recommandations CODIMS AP-HP, décembre 2009. Bon usage des dispositifs médicaux utilisés dans le drainage et le sondage vésical. Disponible sur http://comedims.aphp.fr
4. Pose et surveillance des sondes urinaires. HAS 2009. Disponible sur: https://www.has-sante.fr/upload/docs/application/pdf/2009-08/su.pdf
5. Révision des recommandations de bonne pratique pour la prise en charge et la prévention des infections urinaires associées aux soins (IUAS) de l’adulte. [Internet]. 2018. Disponible sur: https://www.urofrance.org/base-bibliographique/revision-des-recommandations-de-bonne-pratique-pour-la-prise-en-charge-et-la prévention des infections urinaires associées aux soins (IUAS) de l’adulte

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essentiel

L’hygiène et l’asepsie de tous les intervenants diminuent le risque d’infection.

Les bactériuries asymptomatiques ne nécessitent pas de traitement.

Les infections symptomatiques sont traitées par antibiothérapie adaptée et changement de la sonde.

Réduire au minimum la durée du sondage : toute pose de sonde vésicale doit d’emblée faire indiquer sa durée, ses conditions d’ablation et faire remettre en cause sa présence régulièrement.