La granulomatose éosinophilique avec polyangéite, ex-syndrome de Churg-Strauss, est une vascularite systémique, nécrosante, des vaisseaux de petit calibre, appartenant au groupe des vascularites associées aux anticorps anti-cytoplasme des polynucléaires neutrophiles (ANCA). Elle se distingue des autres vascularites associées aux ANCA, d’une part par sa présentation clinique particulière associant un asthme d’apparition tardive, corticodépendant, et une hyperéosinophilie sanguine et tissulaire, d’autre part par la présence d’ANCA chez seulement un tiers des patients. C’est la plus rare des vascularites associées aux ANCA, avec une prévalence en France estimée, en 2000, à 11 cas par million d’adultes. Elle partage des similitudes physiopathologiques avec l’asthme, avec les maladies à éosinophiles, et avec les autres vascularites à ANCA. Les études physiopa-thologiques la concernant sont très rares, ce qui explique pourquoi les avancées thérapeutiques sont en retard comparativement aux autres vascularites associées aux ANCA.
Les facteurs causaux spécifiques sont in-connus ; on suggère l’existence d’une acti-vation lymphocytaire T déclenchée par des allergènes et/ou antigènes spécifiques.
Concernant l’agression de l’épithélium respiratoire, le rôle physiopathologique des éosinophiles est largement retenu. L’hypothèse est celle d’une augmentation réactionnelle du taux d’éosinophiles aux taux élevés d’IL-5. Ainsi, les anticorps ciblant l’IL-5 comme le mépolizumab sont une stratégie thérapeutique de choix. L’essai prospectif international MIRRA (2017) a démontré la supériorité du mépolizumab comparé au placebo pour contrôler la granulomatose éosinophilique avec polyangéite chez des patients considérés comme réfractaires ou en rechute. Très prochainement va débuter une nouvelle étude ciblant la même population de patients que l’essai MIRRA, visant à démontrer la non-infériorité du benralizumab comparé au mépolizumab. Le benralizumab, anticorps monoclonal ciblant le récepteur de l’IL-5, a l’avantage d’induire une déplétion directe des éosinophiles par apoptose, aux niveaux sanguin et tissulaire, ce que ne fait pas le mépolizumab.
La réponse lymphocytaire Th1 pourrait favoriser la formation du granulome extravasculaire qui caractérise la granulomatose éosinophilique avec polyangéite. Les lymphocytes Th17, connus pour leur rôle dans la défense contre les pathogènes extracel-lulaires, pourraient être impliqués dans l’inflammation bronchique et les exacer-bations d’hyperréactivité bronchique.
La présence chez un tiers des patients d’ANCA anti-myélopéroxydase (anti-MPO) confère un phénotype clinique particulier à la granulomatose éosinophilique avec polyangéite, caractérisé par la présence plus fréquente d’une atteinte rénale, d’une hémorragie intra-alvéolaire ou de lésions cutanées.
L’activation des éosinophiles est à l’origine de la libération des protéines dites cationiques, contenues dans leurs granules. Tous les organes peuvent être touchés, notamment les voies respiratoires, le système gastro-intestinal ou les nerfs périphériques, mais le coeur est la principale cible, avec un risque de cardiomyopathie et de fibrose endomyocardique.
Cette vascularite est complexe et ses mécanismes sont mal connus, ce qui explique que le traitement validé à ce jour repose sur des médicaments peu spécifiques, comme les corticoïdes et les immunosuppresseurs. L’utilisation de thérapies ciblées est en cours d’évaluation.
Benjamin Terrier, hôpital Cochin, Paris
8 octobre 2019