La transmission de la grippe a lieu généralement pendant l’hiver dans les zones tempérées, avec des différences en termes de chronologie et de génotypes circulants. Durant la saison 2018-19, les virus de type A ont prédominé, avec un sous-type dominant selon les pays.
Dans l’hémisphère Nord, l’épidémie a débuté dès la fin septembre 2018 au Qatar et en Arabie saoudite, fin octobre en Asie orientale, en novembre aux États-Unis et Canada, et en décembre en Europe. Elle a culminé mi-janvier 2019 en Asie, de mi-janvier à mi-février en Europe et de mi-février à mi-mars jusqu’à fin avril aux États-Unis et Canada. Un 2e pic a été détecté en mai 2019 en Arabie saoudite. Les souches A(H1N1)pdm09 ont prédominé ou co-circulé avec les A(H3N2) dans les pays d’Europe du Nord et de l’Est, en Afrique du Nord (Maroc) et en Asie, la proportion des A(H3N2) augmentant au cours du temps. Ces derniers ont été majoritaires dans le Sud-Ouest de l’Europe, en Amérique du Nord et dans certains pays d’Asie et d’Afrique. Pour les États-Unis et le Canada, les souches A(H1N1)pdm09 ont prédominé en début de saison puis les A(H3N2) ont circulé plus largement en 2e partie. Très peu d’influenza B, sauf en Chine, notamment lors du 2e pic.

Impact en France

L’épidémie a commencé début janvier 2019 pour atteindre un pic début février et finir, pour toutes les régions, mi-mars. De courte durée, elle a été caractérisée par la co-circulation de virus A(H1N1)pdm09 (34 %) et A(H3N2) (65 %), les types B étant extrêmement rares.
La part relative des virus A(H3N2) a progressivement augmenté pour devenir majoritaire après la semaine 05/2019 (figure), avec notamment deux clades circulants, génétiquement et antigéniquement distincts.1
La sévérité a été importante avec 10 723 hospitalisations après recours aux urgences pour syndrome grippal. La surmortalité a été estimée à 8 100 décès dont 84 % survenus chez des personnes de 75 ans et plus. Le taux d’attaque le plus élevé était constaté chez les enfants, mais la majorité (62 %) des patients hospitalisés avaient plus de 65 ans.
Parmi les 1 886 cas graves admis en réanimation (signalés à Santé publique France), la majorité avait au moins un facteur de risque : âge  65 ans (52 % des cas) ou une pathologie chronique pour les plus jeunes (pulmonaire, cardiaque, diabète ; 29 %). Un syndrome de détresse respiratoire aiguë (SDRA) a été observé chez 45 % des patients et 4 % ont eu besoin d’une oxy­génation par membrane extracorporelle (vs 1 % en 2016-17 et 7 % en 2015-16). Parmi les 335 décès répertoriés chez les sujets admis en réanimation, 90 % avaient au moins un facteur de risque. Les personnes infectées par un virus A(H3N2) étaient plus âgées et susceptibles de faire des complications, alors que celles contaminées par A(H1N1)pdm09 ont eu davantage de SDRA.2

Baloxavir-marboxil : bilan au Japon et aux États-Unis

Malgré les recommandations de la HAS (encadré), l’oséltamivir est peu prescrit en France. Le baloxavir-marboxil, qui cible une des protéines du complexe polymérase et inhibe la transcription de l’ARN viral, a montré une efficacité supérieure à celle de l’oséltamivir.2 Utilisé en monodose au Japon et aux États-Unis depuis 2018, il a toutefois l’inconvénient de sélectionner des variants résistants, notamment pour les virus A(H3N2), chez l’adulte (environ 10 %) et l’enfant (20 %), potentiellement transmissibles. Une administration répétée pendant 3 jours pourrait limiter cela.Des essais sont en cours pour évaluer l’intérêt de la bithérapie oséltamivir + balo­xavir-marboxil.
D’autres antiviraux (pimodivir) sont aussi étudiés en France.3

Quelle efficacité vaccinale ?

En Europe, le vaccin aurait eu une efficacité de 59 %, tous virus confondus pour l’ensemble des groupes à risque : 71 % contre le virus A(H1N1)pdm09 et - 3% contre le A(H3N2). L’absence d’efficacité contre cette souche, ainsi que la couverture vaccinale toujours insuffisante bien qu’en légère hausse par rapport aux années précédentes (estimée à 46,8 % chez les personnes ciblées), ont probablement contribué à la sévérité de cette épidémie.
Remerciements au centre coordonnateur du Centre national de référence des virus des infections respiratoires de l’Institut Pasteur, à l’ensemble des équipes de surveillance de la grippe, au réseau Sentinelles et à Santé publique France.
Encadre

Grippe : quand prescrire l’oséltamivir ?

(chez l’adulte : 75 mg x 2/j pendant 5 jours) :

• sujets symptomatiques, quel que soit l’âge, jugés à risque de complications ciblées par la vaccination, y compris les femmes enceintes ;

• ayant une grippe grave d’emblée ou dont l’état clinique s’aggrave, même au-delà des 48 heures après le début des symptômes ;

• dont l’état justifie une hospitalisation pour grippe.

(dose curative pendant 5 jours, 75 mg x 2/j ; posologie adulte) : chez les personnes encore asymptomatiques mais jugées à risque très élevé de complications, quel que soit l’âge, et en contact étroit avec un cas confirmé ou cliniquement typique de grippe.

(75 mg x 1/j pendant 10 jours ; posologie adulte) :

• chez les individus à risque de complications, âgés de 1 an et plus, y compris les femmes enceintes, ciblés par la vaccination, après un contact étroit datant de moins de 48 heures avec un cas confirmé ou ayant une symptomatologie typique ;

• en collectivités de personnes à risque (surtout sujets âgés).

Le traitement doit être initié le plus précocement possible sans attendre la confirmation virologique du cas ou du contact étroit.

Références
1. Surveillance de la grippe en France, saison 2018-2019. BEH 2019(n° 28):552-63. https://bit.ly/2OGNUMe
2. Hayden FG, Sugaya N, Hirotsu N, et al. Baloxavir Marboxil for Uncomplicated Influenza in Adults and Adolescents. N Engl J Med 2018;379:913-23.
3. Finberg RW, Lanno R, Anderson D, et al. Phase 2b Study of Pimodivir (JNJ-63623872) as Monotherapy or in Combination With Oseltamivir for Treatment of Acute Uncomplicated Seasonal Influenza A: TOPAZ Trial. J Infect Dis 2019;219:1026-34.

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essentiel

Prédominance des virus influenza de type A.

due à une co-circulation de A(H1N1)pdm09 et A(H3N2).

a une plus grande efficacité que l’oséltamivir mais il sélectionne aussi des virus résistants.