Deux camps s’opposent dans la presse, sur les réseaux et les ondes. D’un côté les auteurs d’une violente tribune publiée en mars 2018 dans Le Figaro : « L’appel de 124 professionnels de la santé contre les médecines alternatives ». Les signataires visaient l’institution ordinale et en appelaient à la raison et aux pouvoirs publics. Face à eux, les médecins homéopathes soutenus par les trois entreprises concernées ainsi que par une majorité de pharmaciens d’officine. Et les médias de rappeler que de nombreux praticiens non homéopathes ne sont nullement contre cette pratique, de même qu’une majorité de la population française.
Il faut ici faire la part entre deux polémiques. La première est aussi vieille, ou presque, que l’homéopathie, élaborée à la fin du XVIIIe siècle par Samuel Hahnemann. Après la raison confrontée à la magie, le conflit a pris aujourd’hui la forme de l’affrontement entre la médecine « basée sur les preuves » et les trois préceptes originels : celui des « similitudes » (soigner le mal par le mal) et ceux des « hautes dilutions » et de leur « dynamisation ».
La seconde polémique trouve son origine dans la publication, il y a 35 ans, d’un arrêté signé par Georgina Dufoix. La ministre de la Solidarité nationale obtenait alors de faire rembourser à 65 % nombre de spécialités homéopathiques n’ayant jamais fait la preuve de leur efficacité…
Rien ou presque, en 1984, dans la presse. On crut la polémique enterrée, les arguments des rationalistes étant balayés par l’engouement croissant pour les médecines alternatives ou complémentaires. À dire vrai l’affrontement ne devait jamais cesser. Vingt ans plus tard, le taux de remboursement fut abaissé à 35 % par Jean-François Mattei, alors ministre de la Santé. Quinze ans ont passé et la polémique ressurgit de plus belle. Après la publication de la tribune du Figaro, Agnès Buzyn assurait que le remboursement serait maintenu, quand bien même l’efficacité des spécialités ne résulterait que de l’effet placebo. « Les Français y sont attachés. Si cela peut éviter le recours à des médicaments toxiques, je pense que nous y gagnons collecti- vement. Voilà, ça ne fait pas de mal ! », expliquait la ministre.
Puis volte-face et saisine de la HAS pour qu’elle examine les médicaments homéopathiques « en prenant en compte leur efficacité et leurs effets indésirables, leur place dans la stratégie thérapeutique (notamment au regard des autres traitements disponibles), la gravité des affections auxquelles ils sont destinés et leur intérêt pour la santé publique ». Les conclusions de la Commission de la transparence sont d’autant plus attendues qu’Agnès Buzyn a annoncé qu’elle les suivrait. Ainsi, dans ce dossier, le centre de gravité d’une décision éminemment politique se déplace vers une institution scientifique.
Le processus n’arrivera pas à son terme avant juillet prochain, mais plusieurs fuites médiatiques ont révélé que la Commission de la transparence avait, pour l’heure, émis un « projet d’avis négatif » qui, sauf énorme surprise, le restera. Un document dans lequel on apprend que 6,7 millions de Français ont en 2018 bénéficié de prises en charge d’un médicament homéopathique – avec environ trois remboursements dans l’année.1 Soit – selon l’Assurance-maladie – 118 millions d’unités (tubes de granules) remboursés.
Ces prescriptions émanent essentiellement des médecins généralistes. Dans plus de la moitié des cas, elles étaient associées à des traitements conventionnels, précise la HAS. Au total, un poids relativement modeste dans les dépenses de l’Assurance maladie : 126,8 millions d’euros en 2018, sur un total de 19,9 milliards d’euros de médicaments remboursés, soit environ 1 % du budget médicaments. Quelles seront les conséquences d’un déremboursement pour les patients, les prescripteurs et les pharmaciens ? Autre question sans réponse : l’effet placebo ne devrait-il pas être, en partie, pris en charge par la collectivité ?
phanie
Il faut ici faire la part entre deux polémiques. La première est aussi vieille, ou presque, que l’homéopathie, élaborée à la fin du XVIIIe siècle par Samuel Hahnemann. Après la raison confrontée à la magie, le conflit a pris aujourd’hui la forme de l’affrontement entre la médecine « basée sur les preuves » et les trois préceptes originels : celui des « similitudes » (soigner le mal par le mal) et ceux des « hautes dilutions » et de leur « dynamisation ».
La seconde polémique trouve son origine dans la publication, il y a 35 ans, d’un arrêté signé par Georgina Dufoix. La ministre de la Solidarité nationale obtenait alors de faire rembourser à 65 % nombre de spécialités homéopathiques n’ayant jamais fait la preuve de leur efficacité…
Rien ou presque, en 1984, dans la presse. On crut la polémique enterrée, les arguments des rationalistes étant balayés par l’engouement croissant pour les médecines alternatives ou complémentaires. À dire vrai l’affrontement ne devait jamais cesser. Vingt ans plus tard, le taux de remboursement fut abaissé à 35 % par Jean-François Mattei, alors ministre de la Santé. Quinze ans ont passé et la polémique ressurgit de plus belle. Après la publication de la tribune du Figaro, Agnès Buzyn assurait que le remboursement serait maintenu, quand bien même l’efficacité des spécialités ne résulterait que de l’effet placebo. « Les Français y sont attachés. Si cela peut éviter le recours à des médicaments toxiques, je pense que nous y gagnons collecti- vement. Voilà, ça ne fait pas de mal ! », expliquait la ministre.
Puis volte-face et saisine de la HAS pour qu’elle examine les médicaments homéopathiques « en prenant en compte leur efficacité et leurs effets indésirables, leur place dans la stratégie thérapeutique (notamment au regard des autres traitements disponibles), la gravité des affections auxquelles ils sont destinés et leur intérêt pour la santé publique ». Les conclusions de la Commission de la transparence sont d’autant plus attendues qu’Agnès Buzyn a annoncé qu’elle les suivrait. Ainsi, dans ce dossier, le centre de gravité d’une décision éminemment politique se déplace vers une institution scientifique.
Le processus n’arrivera pas à son terme avant juillet prochain, mais plusieurs fuites médiatiques ont révélé que la Commission de la transparence avait, pour l’heure, émis un « projet d’avis négatif » qui, sauf énorme surprise, le restera. Un document dans lequel on apprend que 6,7 millions de Français ont en 2018 bénéficié de prises en charge d’un médicament homéopathique – avec environ trois remboursements dans l’année.1 Soit – selon l’Assurance-maladie – 118 millions d’unités (tubes de granules) remboursés.
Ces prescriptions émanent essentiellement des médecins généralistes. Dans plus de la moitié des cas, elles étaient associées à des traitements conventionnels, précise la HAS. Au total, un poids relativement modeste dans les dépenses de l’Assurance maladie : 126,8 millions d’euros en 2018, sur un total de 19,9 milliards d’euros de médicaments remboursés, soit environ 1 % du budget médicaments. Quelles seront les conséquences d’un déremboursement pour les patients, les prescripteurs et les pharmaciens ? Autre question sans réponse : l’effet placebo ne devrait-il pas être, en partie, pris en charge par la collectivité ?
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1. Santi P. Déremboursement de l’homéopathie : Boiron en première ligne. Le Monde, 17 mai 2019. https://bit.ly/2HORJuX