Objectifs

Expliquer la physiopathologie de l’urticaire et des dermatites atopique et de contact.
Diagnostiquer une hypersensibilité cutanéo-muqueuse aiguë et/ou chronique chez l’enfant et chez l’adulte.
Connaître les grands principes de la prise en charge.
Identifier le caractère professionnel d’une dermatose allergique : démarche diagnostique, étiologique, éviction du risque.

Urticaire

L’urticaire est une maladie fréquente, puisqu’on estime que 20 % de la population mondiale a, au cours de sa vie, une poussée d’urticaire.

Diagnostic

Le diagnostic d’urticaire repose sur l’interrogatoire et l’examen clinique. On distingue deux types de lésions : l’urticaire superficielle et l’urticaire profonde, fréquemment associées. L’urticaire peut aussi être classée, selon la durée d’évolution, en urticaire aiguë ou chronique.
L’urticaire superficielle (fig. 1) correspond à une éruption de papules prurigineuses, mobiles et fugaces (chaque lésion durant classiquement moins de 24 heures), typiquement décrites comme des lésions ortiées, par référence aux urticaires survenant au contact de l’ortie. La raison de leur caractère mobile et fugace est qu’il s’agit de lésions liées à un transfert de plasma du contenu intravasculaire vers le derme, à la différence des papules par infiltration cellulaire, qui sont fixes. Les papules d’urticaire peuvent être d’aspect variable, petites plaques punctiformes ou grandes plaques confluentes. Il y a parfois des plaques en anneaux ou en forme d’arc (annulaires ou arciformes). Alors que le prurit est féroce, il n’y a en général pas de lésions de grattage. Il ne faut pas hésiter, en cas de doute diagnostique, à dessiner la périphérie des lésions et à revoir le malade à vingt-quatre heures pour confirmer le caractère mobile et fugace de l’éruption.
L’urticaire profonde (fig. 2) ou angio-œdème se manifeste par un œdème localisé ou plus diffus, d’importance variable, de la peau ou des muqueuses. L’œdème est blanc rosé, de consistance ferme. Il siège préférentiellement sur le visage, les extrémités des membres, les organes génitaux. Il est en général non prurigineux, les patients se plaignant surtout d’une tension cutanée. Cette urticaire profonde peut s’associer aux plaques d’urticaire superficielle ou survenir de façon isolée (dans 10 % des cas environ). Les signes en faveur d’un angio-œdème laryngé sont une dysphonie, une dyspnée laryngée avec stridor et des troubles de la déglutition.
L’urticaire chronique spontanée se définit classiquement par des poussées, survenant plusieurs fois par jour ou par semaine, évoluant depuis plus de six semaines et sans facteurs favorisants identifiés. Les patients peuvent ne présenter que des plaques superficielles, plus rarement uniquement des angio-œdèmes. L’association de plaques et d’angio-œdèmes est fréquente. Si le diagnostic d’urticaire chronique est simple devant une évolution continue ou quasi continue depuis plus de six semaines, ­celui-ci peut être plus difficile à poser devant des urticaires intermittentes ou récurrentes. Il faut savoir rechercher à l’interrogatoire la récurrence de quelques plaques d’urticaire seulement, le patient ayant tendance à ne signaler que les grandes poussées généralisées. La distinction entre urticaire aiguë et urticaire chronique est importante, car la prise en charge est bien différente.
L’urticaire aiguë correspond, par définition, à toute urticaire dont la durée est inférieure à 6 semaines.

Physiopathologie

La lésion d’urticaire correspond à un œdème dermique, dans l’urticaire superficielle, ou dermohypodermique dans l’urticaire profonde. Cet œdème est dû à une vaso­dilatation avec augmentation de la perméabilité capillaire consécutive à un afflux de médiateurs inflammatoires. Le mastocyte est la cellule clé de l’urticaire, sa dégranulation entraîne la libération de médiateurs pré- formés et néoformés dont l’histamine, les leucotriènes et la tryptase, à l’origine des manifestations. Cette dégranulation peut répondre à des mécanismes immunologiques ou non immunologiques (fig. 3).
Les mécanismes immunologiques sont secondaires à l’activation de récepteurs spécifiques à la surface des mastocytes. En premier lieu, le récepteur de haute affinité des immunoglobulines E (IgE), le FcεRI, qui lie des complexes IgE-antigène : c’est l’allergie immédiate de type I dans la classification de Gell et Coombs.
Une activation des mastocytes se fait aussi parfois via d’autres voies et d’autres stimuli comme des IgG, des complexes immuns circulants, les lymphocytes.
Les mécanismes non immunologiques sont dus aux infections, aux neuropeptides, aux protéines de la coagulation ou à certains médicaments. Dans ce cadre, ce ne sont pas des complexes immuns qui aboutissent à l’activation mastocytaire, entraînant la dégranulation avec libération d’histamine, mais plutôt des agents pharmacologiques comme des leucotriènes et prostaglandines, certains médicaments (en particulier les anti-­infammatoires non stéroïdiens, les produits de contraste iodés, l’aspirine…) ainsi que des cytokines et chimiokines, voire certains aliments pris en grande quantité.

Diagnostics différentiels

Tout ce qui est érythémateux et prurigineux n’est pas nécessairement de l’urticaire ! Le caractère fugace et migrateur et la disparition des lésions d’urticaire sans lésions ni cicatrices sont des signes cliniques fondamentaux au diagnostic d’urticaire.
Les angio-œdèmes bradykiniques (anciennement appelés œdèmes angioneurotiques héréditaires) peuvent être héréditaires ou acquis et, dans ce cas, parfois liés à certaines prises médicamenteuses. Les médicaments classiquement inducteurs sont les œstrogènes, les inhibiteurs de l’enzyme de conversion (IEC) et les sartans. Il faut savoir évoquer ce diagnostic devant un patient présentant des angio-œdèmes à répétition, classiquement sans association à une urticaire superficielle, a fortiori s’il existe des antécédents familiaux d’œdèmes ou de décès par œdèmes, s’ils sont de durée prolongée, s’ils s’associent à des douleurs abdominales et que les antihistaminiques à posologie augmentée (4 cp/j), voire les corticoïdes, sont inefficaces. Le diagnostic est d’autant plus important qu’il existe un risque de décès par œdème laryngé asphyxique. Un bilan biologique avec dosage quantitatif et qualitatif de l’inhibiteur de la C1 estérase peut confirmer ce diagnostic. Des mutations peuvent aussi être recherchées dans les centres spécialisés. Ces patients requièrent une prise en charge spécialisée pour décider de l’indication d’un traitement de fond et/ou la prescription d’un traitement en cas de crise.
La vascularite dans le cadre d’une urticaire systémique (vascularite urticarienne) doit être évoquée devant une évolution prolongée des plaques d’urticaire supérieure à vingt-quatre heures avec des séquelles pigmentées (fig. 4). Une biopsie cutanée doit alors être réalisée. Celle-ci met classiquement en évidence une vascularite leucocytoclasique. Il existe fréquemment un syndrome inflammatoire et d’autres anomalies cliniques et biologiques pouvant amener à porter un diagnostic de maladie systémique (lupus érythémateux systémique, syndrome de Goujerot-Sjögren, vascularite urticarienne hypocomplémentémique de McDuffie).
D'autres maladies auto-inflammatoires peuvent être évoquées : maladie de Still, dysglobulinémies telles que cryoglobulinémies des hépatites C et hémopathies lymphoïdes, syndrome de Schnitzler (IgM monoclonale). L’urticaire est alors souvent atypique, fixe, peu, voire pas, prurigineuse, de disposition symétrique et associée à des arthralgies, des douleurs osseuses et de la fièvre.
L’exanthème maculopapuleux par allergie médicamenteuse ou d’origine infectieuse (essentiellement virale) peut être difficile à distinguer d’une urticaire. La fixité des lésions est ici caractéristique.

Urticaire aiguë

Il est important de ne pas méconnaître une cause « allergique » devant une urticaire aiguë. Néanmoins, cette éventualité est en général largement surestimée. Il faut garder en mémoire qu’urticaire n’est pas synonyme d’allergie.
 

Quand faut-il évoquer une cause allergique devant une urticaire aiguë ?

Les urticaires allergiques sont en général rarement isolées, et les autres signes de l’anaphylaxie associés font alors toute la gravité du tableau (douleurs abdominales, dyspnée, atteinte laryngée, tachycardie, hypotension artérielle…).
Une origine allergique est suspectée :
  • en cas de contact avec un allergène potentiel dans un délai court, en général inférieur à deux heures (le plus souvent même inférieur à une heure) : ceci implique que la poussée d’urticaire survenant en pleine nuit ou constatée le matin au réveil n’est qu’exceptionnellement d’origine allergique alimentaire car beaucoup trop éloignée d’une prise alimentaire. Les allergènes potentiels sont les aliments, les médicaments, les venins par piqûres d’hyménoptères (guêpe, abeille, bourdon, frelon) et les urticaires de contact allergiques (latex, par exemple) ;
  • en cas de résolution rapide de cette urticaire en moins de vingt-quatre heures ;
  • en présence d’une notion de rechute en cas de nouveau contact avec l’allergène suspecté, d’intensité plus forte et apparaissant plus rapidement après le contact avec l’allergène.
 

Cas particuliers d’urticaire aiguë allergique à ne pas méconnaître

L’anaphylaxie alimentaire induite par l’effort (food-dependent exercise induced anaphylaxis [FDEIA], pour les Anglo-Saxons) est un tableau à connaître. Les manifestations, pouvant aller jusqu’au choc anaphylactique, surviennent à l’effort lorsqu’il y a eu consommation dans les quatre à cinq heures précédentes d’un aliment auquel le patient est sensibilisé. L’aliment est fréquemment le blé (en Europe) avec positivité des IgE spécifiques anti-oméga 5 gliadine, mais d’autres aliments peuvent être en cause. Ces réactions ne surviennent que lorsqu’il y a conjonction de la prise alimentaire et de l’effort physique, le plus souvent intense (course à pied). Des cofacteurs comme la prise d’anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS), d’alcool ou d’aspirine dans les heures qui précèdent peuvent aussi aggraver ou précipiter les manifestations cliniques.
Les urticaires de contact immunologiques apparaissent dans les minutes suivant le contact d’une substance avec la peau non lésée. Les lésions peuvent rester localisées à la zone de contact, se généraliser, voire s’accompagner de manifestations systémiques pouvant aller jusqu’au choc anaphylactique. Le mécanisme est IgE-médié, comme pour le latex, nécessitant une sensibilisation préalable.
L’allergie à Anisakis simplex, nématode parasitant des poissons, est responsable de manifestations allergiques survenant quelques heures après la consommation de poissons crus ou insuffisamment cuits. Le dosage d’IgE spécifiques Anisakis simplex permet de confirmer le diag­nostic. Cette cause reste rare en France, elle est surtout liée à des habitudes alimentaires de consommation de poissons crus, marinés ou peu cuits.
 

Diagnostic d’une urticaire allergique

En cas de suspicion d’allergie, des explorations allergologiques permettent de mettre en évidence l’allergène inducteur par la réalisation de tests cutanés orientés (prick-tests et/ou tests par intradermoréaction [IDR]) complétés par des dosages d’IgE spécifiques. Ce bilan doit être pratiqué à distance de l’épisode supposé allergique : entre quatre et six semaines après (fig. 5).
La conduite à tenir repose ensuite sur l’éviction de tout nouveau contact avec l’allergène inducteur, seul moyen d’éviter la récidive des manifestations. Dans certains cas, le patient se voit prescrire une trousse de secours contenant une seringue auto-injectable d’adrénaline.
Une désensibilisation, ou immunothérapie spécifique, peut être proposée en cas d’allergie à un venin d’hyménoptères. Il existe aussi des protocoles d’accoutumance médicamenteuse pour certains médicaments indispensables.
 

Autres causes d’urticaire aiguë

Le contexte infectieux : de nombreux virus peuvent s’accompagner d’une poussée d’urticaire, particulièrement chez l’enfant (dont la mononucléose infectieuse). Une urticaire aiguë peut survenir à la phase préictérique d’une hépatite virale B ou lors d’une parasitose digestive.
Les prises médicamenteuses, particulièrement d’aspirine et d’AINS du fait de leur activité anti-COX-1, surtout chez les patients atteints d’urticaire chronique, mais pas seulement. Les inhibiteurs de l’enzyme de conversion et, dans une moindre mesure, les sartans peuvent être à l’origine d’épisodes d’angio-œdèmes isolés par un mécanisme pharmacologique. Ces œdèmes peuvent être sévères en cas d’atteinte de la sphère ORL, avec un risque de décès.
Une urticaire de contact non immunologique, dont la plus banale est liée au contact avec les orties. De nombreuses sub­stances peuvent être responsables d’urticaire de contact. Le diagnostic différentiel étant l’urticaire de contact immunologique. L’interrogatoire sur les circonstances de survenue permet en général d’évoquer le diagnostic.
De nombreuses poussées d’urticaire restent inexpliquées, mais elles peuvent constituer le premier stade d’une urticaire chronique intermittente.
 

Traitement d’une urticaire aiguë

Le traitement d’une urticaire aiguë (fig. 5) repose sur les antihistaminiques, en expliquant bien au patient que l’urticaire risque de continuer à apparaître et disparaître pendant plusieurs jours, avant de disparaître totalement. La corticothérapie générale au stade aigu d’une urticaire est très largement utilisée dans les services d’urgence et en médecine générale sans que cette pratique ne repose sur des preuves irréfutables. Elle n’est donc pas recommandée ici.
Le traitement du choc anaphylactique repose sur l’injection précoce d’adrénaline par voie intramusculaire à la posologie de 0,01 mg/kg.
Les corticoïdes, du fait de leur délai d’action, ne constituent pas le traitement d’urgence du choc ana­phylactique.

Urticaire chronique

La distinction entre urticaire aiguë et urticaire chronique est fondamentale, car leurs orientations étiologiques diffèrent. L’urticaire chronique est une maladie dermatologique sans cause allergique dans l’immense majorité des cas. Elle correspond, selon les concepts récents, à une « excitabilité » ou fragilité des mastocytes responsable de leur dégranulation avec la survenue des manifestations urticariennes. Les terrains favorisants connus sont les maladies auto-immunes, en particulier les dysthyroïdies, et le terrain atopique. Son incidence est de l’ordre de 1 %. De nombreux facteurs déclenchant les poussées sont décrits : contexte infectieux viral, facteurs physiques (froid, chaud, frottement, effort physique, pression, soleil, mais aussi, beaucoup plus rarement, les vibrations et les urticaires adrénergiques), certaines prises médicamenteuses (particulièrement l’aspirine et les AINS) responsables chez plus de 30 % des urticariens chroniques d’une poussée fréquemment œdémateuse, et stress.
Le rôle des aliments « riches en histamine » ou « histaminolibérateurs » ainsi que des conservateurs et des additifs, très fréquemment incriminés par les patients, sont loin de faire l’unanimité. Ainsi, la recherche systématique d’une allergie alimentaire et la prescription de régimes pauvres en tyramine ou en histamine ne sont actuellement pas recommandées dans la prise en charge de l’urticaire chronique selon les dernières recommandations internationales d’experts sur l’urticaire (Zuberbier T. Allergy 2018).
 

Urticaires inductibles

Les urticaires inductibles peuvent être isolées ou associées entres elles, voire associées à des poussées d’urticaire chronique spontanée.
Des tests spécifiques pour les mettre en évidence peuvent être réalisés.
Le dermographisme se caractérise par l’apparition de lésions urticariennes linéaires secondaires à la friction appliquée sur la peau. Une friction de la peau avec une pointe mousse permet de l’objectiver en trois à cinq minutes. Le dermographisme n’a aucune cause allergique et ne requiert aucun bilan étiologique spécifique (fig. 6).
L’urticaire au froid doit être évoquée lors de sa survenue après un bain de mer mais aussi lors d’activités phy- siques en plein air au contact du vent. Pour l’objectiver, un test au glaçon peut être réalisé (fig. 7). Ce test consiste à appliquer un glaçon placé dans un sac en plastique sur la peau (au niveau de l’avant-bras) pendant cinq minutes, avec lecture dix minutes après. Dans certains cas, la durée de contact peut être prolongée jusqu’à vingt minutes. Des manifestations oropharyngées à l’ingestion de glaces ou d’aliments froids sont possibles, quoique rares. Le patient doit être informé du risque de survenue de poussée généralisée avec malaise lors de la baignade.
L’urticaire au chaud peut être testée en appliquant une source de chaleur de 45 °C pendant cinq minutes sur l’avant-bras avec lecture dix minutes après le test.
L’urticaire retardée à la pression : la pression sur la peau fait apparaître, quatre à huit heures plus tard, une lésion œdémateuse plus douloureuse que prurigineuse. Les  localisations typiques sont les épaules, les fesses, les mains et les pieds. Dans certains cas, les poussées peuvent s’accompagner de fièvre, de douleurs articulaires et de sensation de malaise. Un test à la pression peut être réalisé pour l’objectiver avec certitude. Il consiste au port d’un poids de 7 kg sur l’épaule pendant quinze minutes (fig. 8). Cette forme d’urticaire répond en général assez mal aux antihistaminiques et peut être invalidante.
L’urticaire solaire est définie par l’apparition de plaques d’urticaire dans les minutes suivant l’exposition solaire. Un test de provocation peut être réalisé avec irradiation d’UVA, UVB et lumière visible.
L’urticaire aquagénique est une forme rare, correspondant à l’apparition de plaques d’urticaire au contact de l’eau, quelle que soit sa température. Un test à la ­compresse imbibée d’eau à 35 °C peut la mettre en évidence.
L’urticaire cholinergique correspond à un tableau clinique stéréotypé survenant lors d’un effort physique, avec classiquement un semis de petites papules localisées en général sur le torse (fig. 9). D’autres circonstances telles qu’un bain chaud, un stress ou une sudation peuvent déclencher le même type de manifestations. L’urticaire cholinergique est à distinguer de l’anaphylaxie à l’effort induite par un aliment ou un médicament.
 

Bilan étiologique devant une urticaire chronique

L’interrogatoire est primordial dans l’urticaire chronique ; il permet d’en poser le diagnostic, de mettre en évidence les facteurs déclenchants ou favorisants (stress, froid, chaud, exercice physique, pression sur la peau, contexte infectieux, prises médicamenteuses, en particulier aspirine et anti-inflammatoires non stéroïdiens, responsables d’une poussée d’urticaire chez plus de 30% des patients urticariens chroniques).
Concernant les explorations biologiques, les recommandations internationales sur l’urticaire actualisées en décembre 2020 préconisent un bilan très limité et d’éviter les examens extensifs ; un hémogramme et un dosage de la protéine C réactive (CRP) sont recommandés.
D’autres examens complémentaires peuvent être proposés, guidés par les signes d’appel de l’interrogatoire et/ou de l’examen clinique. Leur intérêt est d’éliminer un diagnostic différentiel et des comorbidités éventuellement associées, en particulier une dysthyroïdie. Une auto-immunité de la thyroïde est donc à rechercher et, en cas de positivité, à compléter par un dosage de la TSH.
L’urticaire chronique spontanée (UCS) n’est pas une maladie allergique, il n’y a aucune place pour un bilan allergologique.
Il n’y a pas lieu de rechercher un allergène alimentaire ou mycosique au cours de l’UCS. En effet, les publications sur les liens entre urticaire chronique et allergènes fongiques, en particulier Candida albicans, datent de plus de vingt ans. Cela est bien précisé lors des deux dernières conférences de consensus internationales.
 

Prise en charge thérapeutique

L’urticaire chronique a un réel impact sur la qualité de vie des patients, les poussant à rechercher la cause de la maladie, alors que cette maladie est multifactorielle. Plusieurs études ont montré que les patients atteints d’urticaire chronique avaient une importante altération de leur qualité de vie. De plus, dans 48 % des cas, l’urticaire chronique est associée à des troubles psychiatriques : anxiété, syndrome dépressif, troubles émotionnels, pouvant requérir une prise en charge spécialisée. Certaines équipes proposent des séances d’éducation thérapeutique en apportant une information claire et détaillée au patient et en évaluant le retentissement de l’urticaire chronique sur la vie quotidienne. Cette démarche peut améliorer l’adhésion thérapeutique et la prise en charge globale. Il existe un nomadisme médical important chez les patients atteints d’urticaire chronique. Il est donc essentiel, une fois le diagnostic posé, de fournir des explications claires et compréhensibles au malade sur la chronicité, sur le caractère bénin de la maladie – même s’il existe un fort retentissement sur la qualité de vie – et sur l’absence de traitement curatif actuellement.
Le traitement reste uniquement symptomatique. Le contrôle des facteurs aggravants ou déclenchants est important. Le traitement médicamenteux de première intention repose sur les antihistaminiques, et le plus sou- vent un temps de latence est nécessaire avant de constater l’efficacité (ou non) d’une molécule. Un document explicatif téléchargeable, en accès libre, sur l’urticaire chronique peut être remis au patient ; il est disponible sur le site de la Société française de dermatologie (https://www.sfdermato.org/upload/fiche/tryptique-urticaire-couleur-96f22adbd8100bd76e000f4a6ea2c306.pdf).
Le rôle de l’alimentation dans la survenue de l’UCS, bien que fréquemment incriminé, ne fait pas l’unanimité parmi les experts de l’urticaire à travers le monde.
Une étude chez des patients urticariens chroniques n’a retrouvé aucun bénéfice chez 50 % des patients ayant un régime strict d’éviction de tous les aliments riches en histamine et en additifs alimentaires pendant trois semaines, une aggravation de l’urticaire chez 16 % et une amélioration de l’urticaire chez un tiers d’entre eux. Plusieurs études montrent l’influence positive d’un régime pauvre en allergènes sur le nombre de poussées d’UC.
En pratique, très peu d’études de bonne qualité méthodologique ont été réalisées, et les critères de jugement sont variables d’une étude à l’autre, rendant leur interprétation difficile. Les dernières conférences de consensus internationales sur l’urticaire rappellent qu’en raison des niveaux de preuve très faibles de l’intérêt de ces régimes pauvres en histamine et/ou tyramine et en pseudo-­allergènes et compte tenu du peu d’études sur le sujet de bonne qualité méthodologique, de tels régimes ne sont pas recommandés dans la prise en charge thérapeutique de l’urticaire chronique spontanée.
 

Traitement médicamenteux

Les traitements utilisés dans l’urticaire chronique spontanée ou inductible sont uniquement suspensifs ; actuellement, aucun traitement curatif n’a fait la preuve de son efficacité dans cette pathologie.
La corticothérapie générale n’a pas de place en traitement continu dans la prise en charge d’une urticaire chronique. En effet, il existe un risque important et impré­visible de développer une corticodépendance. Il semble même pouvoir survenir une résistance transitoire au traitement antihistaminique des urticaires chroniques ayant été traitées régulièrement par cortico­thérapie générale, selon des auteurs français.
Les antihistaminiques H1 de deuxième génération prescrits en continu sont le traitement de première intention de l’urticaire chronique. Ils sont plus sélectifs et ont moins d’effets cholinergiques et sédatifs que ceux de première génération. Il n’a pas été montré de supériorité d’un antihistaminique H1 (anti-H1) par rapport aux autres.
Les antihistaminiques H1 de deuxième génération disponibles en France ayant l’AMM dans l’urticaire sont la bilastine, la cétirizine, la desloratadine, l’ébastine, la fexofénadine, la lévocétirizine, la loratadine, la mizolastine et la rupatadine.
En cas de réponse insuffisante à la monothérapie anti­histaminique, les recommandations internationales privilégient la majoration d’une seule molécule jusqu’à 4 cp/j afin d’augmenter l’effet thérapeutique avec un bon profil de tolérance. Les données publiées de majoration de doses des anti-H1 concernent les molécules suivantes : desloratadine, fexofénadine, lévocétirizine, cétirizine, rupatadine, bilastine. Il n’est pas recommandé de dépasser quatre fois la dose d’antihistaminique H1.
L’efficacité des antihistaminiques H1 de deuxième génération dans l’urticaire chronique spontanée a été évaluée dans une méta-analyse de la littérature récente, montrant une efficacité chez 39 % des patients à la dose préconisée par l'autorisation de mise sur le marché (dose AMM) soit 1 cp/j, et 63 % des patients non répondeurs s’améliorent lors des augmentations de dose. Le profil de tolérance des antihistaminiques H1 de deuxième génération est bon. La question du risque de toxicité cardiaque et notamment d’allongement du QT reste un sujet de préoccupation, en particulier lors de la prescription hors AMM à dose majorée. Une revue récente centrée sur le risque cardiaque concluait en l’absence de risque de cardio­toxicité même à quatre fois la dose AMM pour bilastine, cétirizine, lévocétirizine, ébastine, fexofénadine, loratadine, desloratadine, mizolastine et rupatadine, sous réserve de l’absence de potentiel facteur de risque de cardio­toxicité (syndrome du QT long, personne âgée, maladie cardiovasculaire, hypokaliémie ou hypomagnésémie et association médicamenteuse allongeant le QT ou inhibant le métabolisme des anti-H1).
L’omalizumab (Xolair) peut être prescrit en association aux antihistaminiques H1 en cas d’échec de ceux-ci seuls. L’omalizumab est un anticorps monoclonal recombinant humanisé IgG1 kappa anti-IgE. Il est commercialisé en France pour le traitement de l’urticaire chronique spontanée en cas de réponse insuffisante au traitement antihistaminique H1 chez l’adulte et l’adolescent à partir de 12 ans depuis novembre 2015.
Son mécanisme d’action dans l’urticaire chronique spontanée n’est pas clairement élucidé. La seule contre-indication est l’hypersensibilité au principe actif ou à l’un des excipients. L’omalizumab s’administre par voie sous-cutanée à la dose de 300 mg toutes les quatre semaines. Il s’agit, au même titre que les antihistaminiques, d’un traitement symptomatique suspensif et non curatif, dont la durée n’est actuellement pas définie. La prescription initiale de l’omalizumab est hospitalière, annuelle, et son renouvellement est réservé aux spécialistes en dermatologie, pédiatrie, allergologie ou médecine interne. Les trois premières injections doivent être réalisées par un professionnel de santé ; à partir de la quatrième injection, l’auto-injection par le patient peut être réalisée.
Un traitement par immunosuppresseur de type ciclo­sporine peut être proposé en cas d’échec de l’omalizumab.

Particularités de l’urticaire chez l’enfant

L’enfant est particulièrement sujet aux urticaires aiguës, satellites d’une cause infectieuse, pouvant même survenir par petites « épidémies » dans la fratrie. L’urticaire aiguë d’origine allergique alimentaire est beaucoup plus rare, évaluée à moins de 7 % des cas d’urticaire. Ce diagnostic ne doit être évoqué que devant certaines circonstances de survenue : moins d’une heure après une prise alimentaire et évolution inférieure à vingt-quatre heures. Dans ce contexte, un bilan allergologique comportant des tests alimentaires ciblés, complétés par des dosages d’IgE spécifiques, a un intérêt pour confirmer le diagnostic et mettre en place l’éviction alimentaire.
En effet, il est important de diagnostiquer une allergie vraie alimentaire à l’origine d’une urticaire aiguë, s’accompagnant généralement d’autres manifestations anaphylactiques. Les aliments les plus incriminés dans l’allergie alimentaire de l’enfant sont par ordre de fréquence : les protéines de lait de vache, les œufs, le kiwi, l’arachide, les poissons, les fruits à coque, les fruits de mer (crevettes en particulier). Mais la relation entre urticaire et allergie alimentaire doit être clairement démontrée avant d’instituer un régime restrictif d’éviction alimentaire. En effet, de nombreux aliments peuvent être à l’origine de réactions urticariennes non allergiques, appelées « pseudo-allergies » ou « intolérances » qui correspondent à des poussées urticariennes chez des individus ayant déjà eu de l’urticaire plus ou moins favorisées par certains aliments.
La prévalence de l’urticaire chronique chez l’enfant n’est pas connue. Elle semble plus rare que chez l’adulte ; elle est évaluée entre 0,1 et 13 % selon les études. Les poussées d’urticaires satellites d’épisodes infectieux chez un enfant connu pour avoir une urticaire chronique et les urticaires physiques (ou inductibles) y sont particulièrement représentées, comme le dermographisme, l’urticaire au froid et l’urticaire cholinergique. Les maladies auto-immunes pouvant être associées à l’urticaire chez l’adulte, en particulier les dysthyroïdies, sont apparemment moins fréquemment retrouvées chez l’enfant. Très peu d’études existent sur l’urticaire chronique de l’enfant ; une des seules études publiées rapporte que 78,4 % des enfants ont des lésions en plaques d’urticaire superficielle isolées, 6,6 % des angio-­œdèmes isolés et, dans 15 % des cas, l’association de plaques et d’angio-œdèmes.
La prise en charge thérapeutique de l’urticaire chronique de l’enfant ne diffère pas de celle de l’adulte et repose sur les antihistaminiques de deuxième génération, qu’il faut préférer à ceux de première génération.

Dermatite atopique

Définition

La dermatite atopique, ou eczéma atopique, est une maladie cutanée inflammatoire, prurigineuse, chronique, survenant fréquemment dans les familles où l’on retrouve les autres maladies atopiques que sont l’asthme et/ou la rhinoconjonctivite allergique. L’atopie est une prédisposition héréditaire du système immunitaire à privilégier des réactions d’hypersensibilité médiées par les immunoglobulines E (IgE) vis-à-vis d’antigènes communs dans l’alimentation, l’environnement extérieur ou domestique.

Épidémiologie

La prévalence de la dermatite atopique est estimée entre 15 et 30 % chez les enfants et 2 à 10 % chez les adultes. Son incidence a été multipliée par 2 à 3 durant les trente dernières années, sans que la raison de cette augmentation n’ait été réellement expliquée. Chez l’enfant, la dermatite atopique survient dans 45 % des cas pendant les six premiers mois de vie, 60 % durant la première année et 85 % des patients sont affectés avant l’âge de 5 ans.

Physiopathologie

Les mécanismes physiopathologiques à l’origine de la dermatite atopique incluent des facteurs génétiques, des facteurs immunologiques et des anomalies de la barrière cutanée.
 

Facteurs génétiques

Cinquante à 70 % des patients atteints de dermatite atopique ont un parent au premier degré atteint de dermatite atopique, d’asthme ou de rhinite allergique, en comparaison avec 20 à 35 % pour les sujets non atopiques. Il existe, de plus, une concordance de 72 % chez les jumeaux homozygotes, contre 23 % chez les jumeaux dizygotes. Les avancées récentes concernent la découverte de mutations sur le gène de la filaggrine, gène impliqué dans la fonction barrière de la couche cornée. Vingt-cinq à 50 % des patients atteints de dermatite atopique ont des mutations hétérozygotes de la filaggrine. Les mutations de ce gène sont donc à l’origine d’une prédisposition génétique à développer une dermatite atopique.
 

Anomalies de la barrière cutanée

Les altérations de la barrière épidermique sont multiples, liées à des facteurs génétiques et environnementaux : déficit en filaggrine (protéine permettant l’agrégation des fibrilles de kératine dans le stratum corneum et l’établissement du pH du stratum corneum, qui devrait être idéalement acide à 5,5), hyperactivité des protéases (kallicréines) dégradant les cornéodesmosomes (soit génétique, soit par élévation intempestive du pH du stratum corneum [neutre ou alcalin]), déficit en inhibiteur des kallicréines, protéases exogènes (acariens, cafards, pollens, staphylocoques), anomalie des céramides, excoriations cutanées par le grattage chronique. Les anomalies de la barrière cutanée favorisent ainsi la pénétration des allergènes, des bactéries et des virus et augmentent les pertes insensibles en eau, responsables de la xérose cutanée, qui est un signe majeur de dermatite atopique.
 

Anomalies immunologiques

À la phase aiguë, les kératinocytes lésés synthétisent de la TSLP (thymic stromal lymphopoietin), de l’interleukine 33 [IL-33] et de l’IL-25, qui induisent une réponse de type Th2. L’activation lymphocytaire Th2 entraîne la production de nombreuses cytokines, dont les interleukines IL-4, IL-13, IL-5, IL-9, IL-31. La réponse Th2 provoque une synthèse d’IgE et un infiltrat éosinophile. La diffusion de TSLP vers l’arbre respiratoire explique en partie l’évolution vers un asthme dans le cadre de la marche atopique. La phase chronique est, elle, liée à une réponse combinée Th1 et Th2.
 

Modification du microbiote

Il existe des différences dans les microbiomes cutanés et digestifs chez les enfants atopiques et non atopiques. En effet, concernant le microbiote cutané, il y a une plus grande diversité de souches bactériennes commensales à la surface de la peau des enfants atopiques.
Par ailleurs, la plupart des études mettent en évidence une dysbiose intestinale chez les nouveau-nés atopiques, qui présentent une plus faible diversité du microbiome digestif.

Diagnostic

Le diagnostic de la dermatite atopique est clinique et anamnestique. Les critères anciens de J. Hanifin et G. Rajka ont été revus par H. C. Williams et al. (tableau 1). Il n’y a pas de marqueur biologique pathognomonique, et aucun examen biologique n’est nécessaire au diag­nostic.
L’élévation des IgE totales ou la détection de sensibilisations IgE-médiées par les tests cutanés ne sont pas toujours présentes chez les patients atteints de dermatite atopique. Une distinction est faite dans la littérature entre dermatite atopique intrinsèque (sans sensibilisation IgE) et dermatite atopique extrinsèque (avec sensibilisation IgE).
Cliniquement, les lésions d’eczéma peuvent être aiguës (lésions vésiculeuses, suintantes et plaques érythémateuses et papuleuses), subaiguës (plaques épaisses et excoriées) ou chroniques (lichénification, hyperpigmentation). Dans tous les cas et à tout âge, le prurit parfois intense domine le tableau clinique, retentissant gravement sur la qualité de vie. Le phénotype de la dermatite atopique varie selon l’âge. On distingue trois périodes : la petite enfance, l’enfance, l’adolescence/âge adulte.
 

Dermatite atopique de la petite enfance

Les signes apparaissent en général au cours du 2e ou 3e mois, sous forme de lésions eczématiformes prurigineuses des joues avec respect de la zone médio-faciale (fig. 10). Le prurit est intense et insomniant. Il existe une atteinte des convexités des membres, tandis que la zone sous la couche est en général respectée. À la phase aiguë, les lésions sont érythémateuses, suintantes, puis croûteuses. Dans 20 à 30 % des cas, les lésions disparaissent à la fin de la deuxième année de vie.
 

Dermatite atopique de l’enfance

La xérose s’associe à des lésions qui atteignent les plis de flexion des coudes, du cou, des poignets, des chevilles mais aussi la nuque, le dos des pieds ainsi que les mains (fig. 11). Les signes « mineurs » peuvent aider au diagnostic : pli sous-palpébral de Dennie-Morgan (fig. 12), pigmentation sous-orbitaire, xérose, ichtyose vulgaire, kératose pilaire, hyperlinéarité palmaire, pityriasis alba (dartres), pâleur faciale, dermographisme blanc.
 

Dermatite atopique de l’adolescence et de l’âge adulte

La dermatite atopique peut continuer à l’adolescence, mais l’évolution naturelle de la dermatite atopique se fait vers la guérison dans près d’un cas sur deux vers l’âge de deux ans. La persistance de lésions intermittentes après cette date concerne un tiers des enfants. Le risque de voir apparaître un asthme chez l’enfant porteur de dermatite atopique est évalué entre 30 et 40 %.
La dermatite atopique peut parfois apparaître de novo à l’âge adulte. Les atteintes typiques restent alors les plis de flexion, l’extrémité céphalique (périlabiale et péri­oculaire surtout) et le cou. Les lésions sont le plus souvent de type chronique, donc lichénifiées, papuleuses avec des stries quadrangulaires en surface et remaniées par le prurit chronique (fig. 13). Elles peuvent devenir érythémateuses et suintantes à la faveur des poussées aiguës. Il peut y avoir des adénopathies périphériques (liées à la stimulation des aires ganglionnaires de drainage), une hyperéosinophilie. Cette forme de l’adulte peut être diffuse, sévère et invalidante. Elle peut se manifester par des lésions excoriées diffuses à l’origine de la forme appelée « prurigo-like ». Une autre forme clinique de dermatite atopique se caractérise par une atteinte prédominante à la face et au cou, appelée dermatite atopique cervico-céphalique (head and neck atopic dermatitis, pour les Anglo-Saxons) [fig. 14]. Elle apparaît fréquemment à l’adolescence. Sa physiopathologie serait en particulier liée à la prolifération de Malassezia.

Complications

Les surinfections cutanées sont au premier plan des complications de la dermatite atopique. La surinfection bactérienne par Staphylococcus aureus est responsable d’une impétiginisation des lésions qu’il faut savoir distinguer de l’aspect suintant de l’eczéma aigu (fig. 15). La surinfection à virus Herpes simplex est à évoquer devant toute poussée aiguë inhabituelle avec cliniquement des lésions vésiculeuses arrondies (fig. 16). L’évolution de cette surinfection herpétique peut être grave et est appelée syndrome de Kaposi-Juliusberg ou Eczema herpeticum et constitue une urgence thérapeutique.
Des molluscum contagiosum, maladie infectieuse auto- et hétéro-inoculable induite par un Poxvirus, sont souvent présents sur les plaques d’eczéma chez l’enfant. Ils sont propagés par le grattage et peuvent provoquer eux-mêmes un eczéma surajouté.
Un retard de croissance peut survenir dans les cas de dermatite atopique sévère diffuse.
Des allergies de contact, favorisées par les anomalies de la barrière cutanée et les applications répétées de topiques, peuvent survenir. Il faut savoir les évoquer devant des localisations persistantes ou inhabituelles de l’eczéma.
Des complications oculaires potentiellement liées à la maladie ou à ses traitements, à type de kérato-conjonctivite, kératocône, cataracte, hypertonie oculaire, doivent être connues.

Prise en charge thérapeutique

La prise en charge thérapeutique de la dermatite atopique repose sur la suppression des facteurs aggravants, le traitement de la xérose et le traitement des poussées inflammatoires. L’éducation thérapeutique du patient ou de ses parents lorsqu’il s’agit d’un enfant a ici toute sa place. En effet, il existe fréquemment un nomadisme médical à la recherche de la « guérison ».
Les messages clés à faire passer concernent le caractère chronique de la dermatose, la nécessité de soins locaux adaptés, le caractère efficace et sans danger des dermocorticoïdes lorsqu’ils sont bien utilisés. Il existe, en effet, fréquemment une corticophobie délétère à la bonne prise en charge thérapeutique.
 

Suppression des facteurs aggravants et traitement de la xérose

Les soins d’hygiène sont :
  • le lavage avec des produits doux adaptés, type syndet, pour ne pas décaper le film hydrolipidique de la peau, bain court, séchage doux sans frotter, puis application d’émollients ;
  • le port de vêtements en coton à privilégier, éviter le contact direct avec la laine ou les textiles irritants ;
  • les émollients quotidiens (1 ou 2 fois/j), qui constituent le traitement de fond de la xérose. Il en existe de très nombreux, il faut privilégier des produits non parfumés pour prévenir le risque de sensibilisation aux molécules parfumantes.
En cas de surinfection bactérienne manifeste, une anti­biothérapie peut être nécessaire ; locale si elle est peu étendue, par voie orale dans le cas contraire.
 

Traitement anti-inflammatoire local

Deux classes thérapeutiques sont disponibles, les dermo­corticoïdes et inhibiteurs de la calcineurine topiques.
Dermocorticoïdes : le choix doit être adapté à l’âge du patient et à la zone à traiter. Une application vespérale suffit en général jusqu’à disparition de l’inflammation, en moyenne en quatre à huit jours sans décroissance à l’arrêt (v. Conférence de consensus sur la prise en charge de la dermatite atopique de l’enfant). Cette durée peut être prolongée jusqu’à disparition de la poussée. À cette thérapie curative peut être associée ultérieurement une thérapie préventive consistant en l’application de dermocorticoïdes deux fois par semaine sur les zones usuellement atteintes, en cas de rechutes fréquentes.
Concernant la quantité de dermocorticoïdes à appliquer, il est utile d’expliquer au patient la méthode de « l’unité phalangette » : la quantité de dermocorticoïde sur la dernière phalange de l’index doit pouvoir couvrir les deux paumes des mains et correspond à 1,25 g.
Il est très important d’évaluer le nombre de tubes de dermocorticoïdes utilisés par les patients.
Il n’y a pas de nombre de tube maximal à ne pas dépasser lors d’une poussée, néanmoins la dose utilisée en traitement d’entretien ne doit pas dépasser deux tubes par mois de dermocorticoïdes forts ; si c’est le cas, un traitement systémique est indiqué.
Inhibiteurs de la calcineurine topique : seul le tacrolimus pommade 0,1 % ou 0,03 % est disponible en France. Sa prescription, à faire sur une ordonnance d’exception, est réservée aux dermatologues et aux pédiatres. Il n’est indiqué qu’en deuxième intention, mais a un intérêt tout particulier dans des topographies où l’on peut craindre les répercussions de la corticothérapie locale répétée ou prolongée, comme les paupières, le visage, où il peut alors être utilisé en première intention. Le tacrolimus topique avec un dosage à 0,03 % est réservé à l’enfant de plus de deux ans tandis que le dosage à 0,1 % est utilisé à partir de seize ans et chez l’adulte.
Là encore, après une thérapeutique curative pour traiter les poussées à raison de deux applications quotidiennes pendant trois semaines en général jusqu’à obtenir le blanchiment, on peut ensuite associer une thérapie préventive à raison d’une application deux fois par semaine pour prévenir les rechutes lorsque celles-ci sont fréquentes. Cette attitude est à réévaluer après quelques mois.
 

Autres traitements

Les antihistaminiques n’ont pas fait la preuve de leur efficacité dans la réduction du prurit dans la dermatite atopique. Ils peuvent être indiqués dans la prise en charge d’une rhinoconjonctivite associée.
En cas d’échec ou de résistance au traitement bien conduit, la prise en charge par des équipes spécialisées doit être envisagée afin de discuter le recours aux traitements systémiques, comme la photothérapie, la ciclo­sporine, le dupilumab (anticorps monoclonal anti-IL-4 et anti-IL-13), le tralokinumab (anticorps monoclonal anti-­IL-13) ou encore les inhibiteurs de JAK.
La corticothérapie orale dans la dermatite atopique n’est pas recommandée.

Quelle place pour les explorations allergologiques devant une dermatite atopique ?

La place de l’allergie dans la dermatite atopique est un sujet très largement débattu. La littérature sur le sujet est abondante mais parfois contradictoire. La réalisation d’un bilan allergologique ne doit pas retarder la prise en charge thérapeutique.
 

Quand faut-il faire des explorations allergologiques dans une dermatite atopique ?

S’il existe des manifestations rhinoconjonctivales ou de l’asthme, pour rechercher une sensibilisation aux pneumallergènes (acariens, pollens, phanères d’animaux…) associée.
S’il existe des manifestations évocatrices d’allergie alimentaire, telles qu’une urticaire généralisée dans les minutes suivant l’ingestion d’un aliment, ou des manifestations oropharyngées évocatrices de syndrome oral dit de ­Lessof (prurit pharyngopalatin survenant dans les minutes suivant l’ingestion de certains fruits ou légumes crus par allergie croisée avec certains pollens).
S’il existe une suspicion d’eczéma allergique de contact sur­ajouté (topographie persistante inhabituelle, récurrence fréquente et rapide malgré le traitement bien conduit).
Éventuellement, lorsqu’il y a une dermatite atopique sévère résistante au traitement médical bien conduit. Chez l’enfant, cela se traduit par une stagnation ou une cassure de la courbe de poids.
Il existe une demande fréquente des parents d’enfants atteints de dermatite atopique ou des adultes atteints de cette même pathologie, de réalisation d’explorations allergologiques, à la recherche d’une cause curable. Il faut garder en mémoire qu’un test positif (cutané ou sanguin) ne signe pas l’allergie et que l’évaluation de la pertinence des tests positifs, particulièrement dans le cas de la dermatite atopique, est capitale. De plus, les lésions d’eczéma elles-mêmes peuvent rendre difficiles voire irréalisables les tests sur les bras ou dans le dos.
 

Quels tests allergologiques peuvent être réalisés ?

Prick-test et dosage d’IgE spécifiques pour l’exploration des manifestations allergiques immédiates (rhinoconjonctivite, asthme, urticaire aiguë d’origine alimentaire).
Patch-tests en cas de suspicion d’eczéma allergique de contact surajouté. Ces tests sont de réalisation délicate chez le patient atopique, car ils peuvent déclencher une poussée de la maladie rendant la lecture des tests difficile.

Eczéma allergique de contact ou dermatite allergique de contact

La dermatite allergique de contact (DAC) affecte 20 % de la population générale en Europe. Elle est deux fois plus fréquente chez la femme que chez l’homme, et une part importante concerne des allergies de contact professionnelles. La dermatite atopique, du fait des anomalies de la barrière cutanée, est un facteur de risque de sensibilisation de contact.

Physiopathologie

L’eczéma allergique de contact correspond à une hyper­sensibilité cellulaire retardée de type Th1 du fait du profil des cytokines produites par les lymphocytes spécifiques de l’allergène (IFNγ, TNF). On distingue classiquement deux phases, une phase de sensibilisation et une phase de révélation.
 

Phase de sensibilisation

Cette phase est cliniquement muette, et elle peut durer de quelques jours à plusieurs années. L’allergène est en général un haptène, c’est-à-dire une petite molécule non immunogène qui nécessite le couplage avec une protéine porteuse pour constituer un allergène. Les allergènes sont pris en charge par les cellules dendritiques épidermiques (cellules de Langerhans) et dermiques qui migrent jusqu’à la zone paracorticale des ganglions de drainage lymphatique. Pendant cette migration, elles subissent une maturation leur permettant d’activer des lymphocytes T « naïfs ». Ces lymphocytes T prolifèrent et se différencient alors en lymphocytes « mémoires » circulants.
 

Phase de révélation

Lors d’un nouveau contact avec l’allergène, chez un sujet préalablement sensibilisé, la présentation des allergènes par les cellules de Langerhans aux lymphocytes T mémoires spécifiques entraîne leur prolifération et la sécrétion de cytokines pro-inflammatoires (interleukine 2, tumor necrosis factor) recrutant des cellules mononucléées inflammatoires responsables de l’eczéma cliniquement et histologiquement (spongiose et exocytose épidermiques).

Tableaux cliniques

Il existe une grande variation selon les sites, selon les aller­gènes, selon le caractère aigu ou chronique de l’eczéma.
 

Eczéma aigu

Les lésions s’accompagnent d’un prurit, elles débutent et prédominent en général au site de contact mais peuvent s’étendre à distance. L’évolution naturelle en cas d’arrêt du contact avec l’allergène est la guérison en quelques jours.
On distingue classiquement différentes phases successives :
Phase érythémateuse : l’érythème est diffus, mal limité ou émietté. Il s’accompagne d’un œdème, qui peut être au premier plan, particulièrement dans des sites comme le visage ou les organes génitaux.
Phase vésiculeuse : des vésicules apparaissent au site de l’érythème. Le toit des vésicules peut se rompre facilement, faisant apparaître de petites érosions, et laisser la place à un suintement jaunâtre translucide, à distinguer d’une éventuelle surinfection (fig. 17). L’eczéma aigu peut prendre aussi un aspect bulleux résultant de la confluence des vésicules.
Phase croûteuse (liée à la coagulation des protéines plasmatiques), suivie de la guérison.
 

Eczéma chronique

Lorsque les contacts avec l’allergène persistent, l’eczéma de contact peut devenir chronique. Les vésicules ne sont plus au premier plan mais sont remplacées par une xérose avec hyperkératose, lichénification (augmentation du quadrillage de la peau) et fissures, particulièrement au niveau des mains. Le prurit est important.
 

Situations particulières

Eczéma des paupières : la peau des paupières est la plus fine de l’organisme. En cas d’eczéma allergique de contact au niveau des paupières, l’allergène peut être appliqué directement (maquillage, collyre, par exemple), aéroporté, voire manu­porté (vernis à ongles, par exemple).
Eczéma « par procuration » : il s’agit d’une situation diag­nostique difficile, car la personne qui présente l’eczéma n’est pas celle qui utilise le produit (conjoint, enfant…).
Eczéma de contact systémique : cliniquement, l’éruption prédomine dans les plis et au niveau des fesses, d’où la terminologie ancienne de « syndrome babouin ». Ce tableau correspond à l’administration systémique (orale ou parentérale) d’un allergène auquel le sujet a préalablement été sensibilisé par voie cutanée ou muqueuse. La survenue est rapide, quelques heures en général après administration de l’allergène. Il s’agit le plus souvent de métaux comme le nickel ou le mercure, ou des médicaments.
Dermatites de contact professionnelles : dans les pays industrialisés, les dermatites de contact professionnelles représentent 70 à 90 % des dermatoses professionnelles. Les dermatites irritatives sont plus fréquentes que les dermatites allergiques, mais les deux tableaux sont fréquemment associés au niveau des mains.
La dermatite irritative est favorisée par le travail en milieu humide, le port de gants prolongé ou les lavages fréquents des mains. La dermatite atopique et les anomalies de mutation de la filaggrine sont des facteurs de risque de développer une dermatite de contact professionnelle, surtout la dermatite de contact d’irritation. Il peut être difficile de distinguer cliniquement la dermatite d’irritation de la dermatite allergique, voire d’une dermatite atopique sous-jacente, l’atteinte étant souvent multifactorielle. La rythmicité par rapport au travail est un élément essentiel pour évoquer une dermatite professionnelle. Les domaines professionnels particulièrement concernés sont la coiffure et l’esthétique, l’agroalimentaire, la construction, le nettoyage, la mécanique, la métallurgie, le secteur de la santé, l’industrie chimique, l’électronique et l’agriculture. La réalisation du bilan allergologique orienté selon l’activité professionnelle permet de confirmer le diagnostic d’eczéma allergique de contact. Les principaux allergènes professionnels sont les agents vulcanisants des caoutchoucs, les métaux (nickel, chrome, cobalt), les biocides, les composants des matières plastiques et les colorants capillaires. Les procédures administratives pour la réparation des maladies professionnelles comportent plusieurs étapes : la déclaration, la reconnaissance et l’indemnisation. Il existe actuellement 52 tableaux de maladies professionnelles, permettant de reconnaître et de réparer des maladies allergiques. Les tableaux 65 et 95 du régime général, par exemple, reconnaissent respectivement « les lésions eczématiformes de mécanisme allergique » et « les affections professionnelles de mécanisme allergique provoquées par les protéines du latex (caoutchouc naturel) ».
Photoallergie de contact : dans le cas d’une photoallergie de contact, il faut l’adjonction du rayonnement solaire au contact avec l’allergène. Là encore, ce type de réaction nécessite une sensibilisation initiale. Les lésions cliniques sont le plus souvent eczématiformes prurigineuses. Elles prédominent sur les zones exposées aux ultraviolets. Les filtres solaires , certains médicaments comme le kétoprofène topique et certains végétaux sont des photoallergènes classiques. La confirmation repose sur la réalisation de photopatch tests.
Il faut distinguer les photoallergies des réactions phototoxiques survenant chez la majorité des personnes exposées à la substance et responsables cliniquement d’un « coup de soleil » limité aux zones d’exposition, en contact avec la substance phototoxique.
Eczéma aéroporté : dans ce cas, les allergènes sont transportés dans l’air. Les zones atteintes sont souvent les zones découvertes, notamment le visage et les paupières.
 

Cas particulier de l’enfant

Chez l’enfant, ce diagnostic est souvent méconnu, au profit du diagnostic de dermatite atopique. Or 20 % des dermatites de l’enfance seraient des dermatites de contact.
En cas de terrain atopique, il faut savoir évoquer la possibilité d’une allergie de contact, en particulier devant les situations cliniques suivantes de dermatite atopique (d’après M. Vigan, Annales de dermatologie et de vénéréologie, 2009) :
  • absence d’antécédents familiaux ;
  • absence de sensibilisation IgE-médiée ;
  • début après l’âge de 1 an ;
  • localisations inhabituelles : sous-ombilicales, asymétriques, face d’extension des membres, sous la zone des couches, isolées aux pieds, péribuccales isolées ;
  • aggravation avec un topique médicamenteux ou un émollient ;
  • aggravation saisonnière autre qu’hivernale ;
  • non-guérison et récidive rapide avec un traitement bien conduit.
Les patch-tests peuvent être réalisés chez l’enfant, la batterie standard doit être alors adaptée en supprimant certains allergènes forts.

Diagnostic

Le diagnostic se fait en plusieurs étapes, mais repose sur l’examen clinique – permettant de valider qu’il s’agit bien d’un eczéma –, l’interrogatoire – pour rechercher les contacts avec des allergènes potentiels –, et la réalisation d’une enquête allergologique.
 

Examen clinique

Le diagnostic d’eczéma est en général facile si les lésions sont constatées. Il peut être plus difficile a posteriori, mais le recours de plus en plus répandu aux photos via les smartphones est souvent d’une grande aide. Le caractère prurigineux, la présence de vésicules ou la notion de suintement, l’évolution vers la guérison avec desquamation en plusieurs jours permettent d’évoquer ce diagnostic.
 

Interrogatoire

L’interrogatoire « policier » recherche des contacts avec des allergènes potentiels sur la zone d’apparition de l’eczéma dans les heures ou jours précédant la survenue des manifestations. Ceci peut être difficile en cas de contact chronique.
 

Enquête allergologique

L’enquête allergologique repose sur la réalisation de tests épicutanés, ou patch-tests, et l’évaluation de leur pertinence. Les tests épicutanés consistent en l’application, sur la peau du dos le plus souvent, d’allergènes sous occlusion de cupules en plastique ou en métal favorisant la pénétration, dans le but de déclencher la réaction d’hypersensibilité de l’individu. Ces tests sont laissés en place quarante-­huit heures et deux lectures sont réalisées à quarante-huit heures et soixante-douze ou quatre-vingt-seize heures le plus souvent. En cas de suspicion d’allergie aux corticoïdes topiques, une lecture plus tardive à J7 est nécessaire.
La batterie de base (ancienne batterie standard européenne) regroupe les trente allergènes les plus fréquents (tableau 2). Des batteries complémentaires peuvent être associées selon les suspicions (batteries regroupant les allergènes usuels de cosmétiques, des produits de coiffure, des produits utilisés en dentisterie, des colorants et apprêts textiles, plastique et colles, parfums…). Il est aussi important de tester les produits suspects, comme les produits cosmétiques, médicaments topiques, voire des morceaux de gant, etc., en plus des batteries d’allergènes. En cas de négativité, un test d’application répété des produits sur les bras peut venir compléter l’exploration. La lecture des tests est standardisée en croix, selon l’International Contact Dermatitis Research Group (ICDRG, tableau 3), et ne prend pas en considération l’importance de la réponse mais son intensité (fig. 18).
L’étape importante de cette enquête allergologique est l’évaluation de la pertinence des résultats. En effet, une positivité peut avoir une pertinence ancienne et ne pas être responsable des manifestations actuelles.
Le patient doit être informé des résultats et des mesures d’éviction à prendre pour éviter les rechutes.

Diagnostics différentiels

Dermatite d’irritation

La dermatite d’irritation de contact est beaucoup plus fréquente que la dermatite allergique de contact. La confusion entre les deux est fréquente. Néanmoins, certains éléments orientent le diagnostic (tableau 4). Il faut garder en mémoire que l’irritation fait le lit de l’allergie.
 

Dermohypodermite bactérienne

Le caractère très inflammatoire, unilatéral, non prurigineux et l’absence de vésicules permettent assez aisément de distinguer les deux tableaux.
 

Dermatite atopique

En règle générale, la topographie des lésions d’eczéma, l’antériorité des poussées, les éventuelles autres manifestations du terrain atopique (asthme et/ou rhinoconjonctivite allergique) permettent de différencier dermatite allergique de contact et dermatite atopique. Néanmoins, une dermatite allergique de contact peut mimer une dermatite atopique, notamment chez l’enfant. Enfin, une dermatite allergique de contact peut venir compliquer une dermatite atopique.
 

Zona

Là encore, le caractère unilatéral, la topographie métamérique, l’aspect de vésicules groupées en bouquet, l’absence de prurit au profit de douleurs permettent aisément de distinguer un zona d’un eczéma allergique de contact.
 

Angiœdème

Un eczéma aigu œdémateux des paupières ou du visage peut être pris à tort pour un angio-œdème . La présence de signes épidermiques avec desquamation et l’évolution sur plusieurs jours font récuser l’angio-­œdème.

Principaux allergènes de contact

Métaux

Nickel : l’allergie au nickel concerne environ 11,4 % de la population générale. La directive européenne sur le nickel, en application depuis 2001, limite le relargage du nickel dans les objets au contact de la peau (bijoux, montres, bracelets de montre, montures de lunettes, fermoirs de montre, zips, boutons, rivets, boucles de ceinture...). Cette réglementation a été renforcée en 2005 avec l’inclusion d’une réglementation identique pour les téléphones portables et pour les objets métalliques traversant la peau (piercings, boucles d’oreilles). Cette réglementation a eu des effets favorables sur la prévalence de la sensibilisation au nickel, avec une diminution constatée chez les jeunes. L’allergie au nickel est le plus souvent cliniquement évidente, par exemple en cas d’eczéma en regard d’une boucle de ceinture.
Chrome : les deux grandes sources d’allergie au chrome sont le ciment, responsable d’une dermatose professionnelle (mains) et le contact avec des objets en cuir tannés avec du chrome, particulièrement les chaussures (fig. 19-21).
 

Parfums

L’allergie aux parfums est fréquente, sa prévalence est estimée entre 1 et 9 % dans la population générale. Les parfums comportent de très nombreuses substances potentiellement allergéniques.
Le diagnostic de routine de l’allergie au parfum repose sur des tests avec des mélanges de substances parfumantes (mix), fragrance mix 1 et fragrance mix 2, comportant respectivement huit et cinq allergènes. Une réglementation en application depuis 2005 impose l’étiquetage de 82 allergènes des parfums dès que leur concentration dépasse 0,001 % dans les produits non rincés et 0,01 % dans les produits rincés.
 

Caoutchoucs

Les additifs du caoutchouc les plus incriminés sont les accélérateurs de vulcanisation appartenant aux familles des thiurams, dithiocarbamates, benzothia­zoles et thiourées. Ils peuvent être responsables d’eczéma allergique de contact, particulièrement aux gants, constituant une maladie professionnelle. Il est important de différencier l’eczéma de contact aux agents de vulcanisation des caoutchoucs de l’allergie immédiate IgE-médiée aux protéines de latex, pouvant entraîner au maximum un choc anaphylactique.
 

PPD et allergènes de la coiffure

La paraphénylènediamine (PPD) est l’allergène phare des teintures capillaires permanentes d’oxydation. Néanmoins, de nombreux autres allergènes existent dans les teintures capillaires, comme la toluène 2,5-diamine avec une fréquente réaction croisée avec la PPD, le résorcinol… On estime que 0,2 à 2,5 % de la population européenne et jusqu’à 20 % des coiffeuses souffrent d’allergie aux teintures capillaires.
La vogue des tatouages éphémères au « henné noir » a entraîné des sensibilisations à la PPD, celle-ci étant adjointe illégalement au henné pour lui donner sa couleur noire. Ceci concerne tout particulièrement des enfants ou des adolescents, présentant ensuite, lors de leur première teinture capillaire, des eczémas explosifs, très œdémateux, les faisant prendre à tort pour des « œdèmes de Quincke ».
 

Conservateurs

Dans les cosmétiques, ils sont régulièrement responsables de vagues d’allergies de contact amenant parfois à des limitations dans leur utilisation, voire à des abandons.
Les isothiazolinones, et notamment la méthylisothiazolinone qui a été élue allergène de l’année en 2013, ont été responsables de très nombreux cas d’eczéma de contact du fait de leur présence dans les cosmétiques mais aussi dans les peintures à l'eau.
Les restrictions de réglementation en vigueur depuis 2017 interdisent, en Europe, la méthylisothiazolinone dans les cosmétiques non rincés et limitent son utilisation à 0,0015% dans les cosmétiques rincés.
 

Médicaments topiques

Différents topiques médicamenteux peuvent être responsables d’eczéma allergique de contact comme des antiseptiques (par exemple la biseptine), des collyres, des antifongiques, etc. Les dermocorticoïdes peuvent aussi entraîner des sensibilisations de contact, parfois difficiles à diagnostiquer. La notion d’aggravation sous dermocorticoïdes doit faire évoquer ce diagnostic. La molécule responsable en cas d’allergie à un médicament topique pouvant être le principe actif ou les excipients comme le propylène glycol par exemple. Les patch-tests requièrent dans ce cas des lectures tardives à J7 pour ne pas passer à côté d’une positivité.
 

Colorants vestimentaires

Certains colorants et apprêts vestimentaires sont responsables de dermatite allergique de contact prédominant dans les plis et aux zones de frottement.

Prise en charge thérapeutique

La prise en charge thérapeutique comprend le traitement de l’eczéma à proprement parler et l’arrêt des contacts avec l’allergène déclencheur s’il est identifié.
Le traitement de l’eczéma repose sur l’application de dermocorticoïdes dont le choix est fonction de l’âge du patient et du site anatomique à traiter. En général, une application le soir pendant huit à quinze jours suffit.
Le traitement préventif des rechutes consiste, quant à lui, une fois l’enquête allergologique réalisée, en l’éviction des contacts avec le ou les allergènes identifiés. Il n’y a pas de désensibilisation possible pour les eczémas allergiques de contact. Il faut aussi que le patient reçoive une information claire et compréhensible sur ses allergies de contact et sur les situations à risque de survenue. Des conseils d’éviction sont à donner au patient, accompagnés si besoin d’un support (listes d’éviction). L’étiquetage de la composition des cosmétiques en dénomination INCI (International Nomenclature of Cosmetic Ingredients) permet de vérifier la présence des allergènes auxquels le patient est sensibilisé. Ce type d’allergie de contact n’expose pas à un risque de choc anaphylactique en cas de nouveau contact avec l’allergène.
En cas d’eczéma allergique de contact professionnel, il faut rédiger un certificat de maladie professionnelle et effectuer la déclaration de maladie professionnelle.
Les auteurs remercient le Pr Selim Aractingi.
Points forts
Hypersensibilités et allergies cutanéo-muqueuses chez l’enfant et l’adulte. Urticaire, dermatites atopique et de contact

L’urticaire superficielle est une maladie pour laquelle la lésion élémentaire correspond à une papule, prurigineuse, mobile et fugace, disparaissant la plupart du temps en moins de vingt-quatre heures sans laisser de trace. L’urticaire profonde est responsable de l’apparition d’un œdème.

L’urticaire chronique est une urticaire évoluant depuis plus de six semaines. On parle d’urticaire aiguë lorsqu’elle dure moins de six semaines.

Urticaire n’est pas synonyme d’allergie, ce diagnostic n’étant pas le plus fréquent.

Il faut suspecter une allergie devant une urticaire aiguë si elle survient dans un délai court après contact avec un allergène potentiel, si elle dure moins de vingt-quatre heures et s’il y a rechute lors des nouveaux contacts avec l’allergène.

L’aspirine et les AINS sont de grands pourvoyeurs de poussées d’urticaire avec œdème, par un mécanisme pharmacologique.

L’urticaire chronique est une dermatose inflammatoire chronique sans cause allergique.

Le traitement d’une urticaire chronique repose sur la prise continue d’antihistaminiques ; la corticothérapie générale prolongée n’a pas sa place dans sa prise en charge.

Le traitement du choc anaphylactique repose sur l’injection d’adrénaline. Les corticoïdes, du fait de leur délai d’action, ne constituent pas le traitement d’urgence.

Dans cet article

Ce contenu est exclusivement réservé aux abonnés