Qu’est-ce que l’hypnose ?
Le terme « hypnose » désigne aussi bien l’état de conscience spécifique (appelé transe hypnotique) que le procédé pour l’induire, qui repose sur un mode de communication (la technique hypnotique) et une interaction particulière (la relation hypnotique).
Le thérapeute aide le patient à y entrer dans un but thérapeutique. L’attention peut être focalisée sur une sensation, une perception ou un mouvement. Le sujet reste conscient, et tous ses sens sont en éveil. Cet état est propice à produire de façon intense des phénomènes corporels (mouvement d’un bras, anesthésie…), émotionnels (joie, sérénité, confiance…), psychologiques (perception altérée du temps, souvenirs, régression en âge, nouvelles idées, solutions…). C’est une technique où le soignant fournit, propose des outils au sujet en transe pour induire des changements (rejet de l’intoxication tabagique, détente, sentiment de contôle...), transformer un contexte (et aussi un vécu) négatif en quelque chose de positif.
L’objectif est de lui faciliter l’accès à des ressources inconscientes : dévier l’attention ou la focaliser différemment, rehiérarchiser autrement les perceptions, les pensées, expérimenter profondément d’autres sensations, ressentir ses forces, ses capacités… Applications médicales : hypnosédation (à visée sédative, utilisée en anesthésie), hypnoanalgésie (apaisement de la douleur) et hypnothérapie (à but psychothérapeutique)
Hypnoanalgésie : indication reine
Avantages par rapport à d’autres moyens thérapeutiques : éviter les effets secondaires des antalgiques ; rendre le patient capable d’autogérer sa douleur (via l’autohypnose).
Une multitude d’applications
En peropératoire, l’hypnose a démontré son efficacité pour diminuer la quantité d’antalgiques et/ou de sédatifs administrés. Elle aurait aussi potentiellement certains effets positifs : réduire la détresse émotionnelle, stabiliser des paramètres physiologiques, raccourcir le temps opératoire et le délai de rétablissement.
Dans le syndrome du côlon irritable résistant au traitement médical, les bénéfices sont bien établis. Dans la dyspepsie, l’hypnothérapie serait même supérieure au traitement médicamenteux.
En obstétrique, son efficacité n’a pas été clairement démontrée dans la prise en charge de la douleur pendant l’accouchement ni sur l’augmentation du taux de naissances par voie basse spontanée. Un critère de jugement comme le vécu subjectif des femmes serait à privilégier pour démontrer son intérêt, car l’hypnose contribuerait à rendre l’expérience plus positive (davantage de sentiment de capacité, de contrôle, moins d’anxiété).
En revanche, elle serait efficace contre les bouffées de chaleur à la ménopause (moins fréquentes).
En cancérologie : elle diminue la douleur, mais aussi les vomissements dus à la chimiothérapie.
Dans l’asthme, l’autohypnose peut aider le patient à gérer les symptômes respiratoires, la sévérité et/ou la fréquence des crises.
De nombreux dentistes sont formés et pratiquent quotidiennement cette méthode pour l’analgésie lors des soins, réduire le saignement et pour prendre en charge l’anxiété.
Les troubles anxieux (attaques de panique et phobies) et le stress post-traumatique sont des cibles particulièrement intéressantes. En revanche, il y a moins de preuves dans la dépression. Des psychothérapies intégratives associant hypnose, thérapies brèves et cognitivo-comportementales, méditation de pleine conscience et EMDR (Eye Movement Desensitization and Reprocessing) sont particulièrement prometteuses.
Autres applications étudiées mais moins de niveau de preuve : arrêt du tabac, de l’alcool, dermatoses (eczéma, psoriasis…), rétention urinaire, éjaculation précoce, impuissance, incontinence par instabilité du détrusor, énurésie, migraine, Parkinson.
Pour tous les patients ?
Aucun effet secondaire grave n’a été rapporté. Céphalées, vertiges, nausées, anxiété sont rares.
Au niveau éthico-juridique, un risque de manipulation psychologique ou de création de faux souvenirs serait le fait de thérapeutes malveillants ou incompétents. C’est pourquoi, dans la plupart des pays, la pratique de l’hypnose est réservée aux médecins, psychologues et dentistes ayant suivi une formation validée. Cela n’est pas le cas en France.
Mieux communiquer
De plus en plus de généralistes se forment à l’hypnose et en tirent profit pour leur exercice quotidien ; 30 DU existent, parfois trop théoriques, mais aussi des formations indépendantes très pratiques (préférer celles gérées par des médecins ; adhérents à la CFHTB p. ex.).
Hypnose : la réalité à l’épreuve des fausses croyances
Les fausses croyances
• L’hypnose est autoritaire
• Le thérapeute a le pouvoir, il subjugue ?
• Le patient est passif, inconscient, « sous influence », il dort…
• Le but est de comprendre, remonter à la source du problème
• C’est de la relaxation, de la méditation
• C’est un état de sommeil
• C’est un phénomène que s’imaginent les personnes suggestibles
La réalité
• L’hypnose est permissive
• C’est le patient qui entre en hypnose
• Le patient est actif, il ne perd pas conscience, il active des ressources pour provoquer un changement
• Le but est de susciter la résilience, trouver ressources et solutions
• On vise un changement actif, pas juste la détente ou l’acceptation passive
• C’est un état plutôt d’hyperéveil
• C’est un phénomène cérébral particulier, psychologique, de mieux en mieux identifié par les études d’imagerie
2. Del Casale A, Ferracuti S, Rapinesi C, et al. Hypnosis and pain perception: An Activation Likelihood Estimation (ALE) meta-analysis of functional neuroimaging studies. J Physiol Paris 2015;109:165-72.
3. Guéguen J, Barry C, Hassler C, et al. Évaluation de l’efficacité de la pratique de l’hypnose. Rapport Inserm. Juin 2015. https://bit.ly/2NXgetz
4. Häuser W, Hagl M, Schmierer A, Hansen E. The Efficacy, Safety and Applications of Medical Hypnosis. Dtsch Arztebl Int 2016;113:289-96.
5. Aïm P. Écouter, parler : soigner. Guide de communication et de psychothérapie à l’usage des soignants. Paris: Estem; 2015: 255 p.