C’est un trouble de la mémoire rare et habituellement bénin. Toute-fois, sa survenue est souvent vécue comme un traumatisme par les patients et leur entourage. Les victimes s’interrogent notamment sur le risque de récidiver ou de développer une maladie neurodégénérative ou cérébrovasculaire.
De quoi parle-t-on ?
L’ictus amnésique bénin (IAB) [transcient global amnesia dans la littérature anglo- saxonne] correspond à la survenue soudaine d’un épisode de trouble isolé de la mémoire antérograde (des faits récents) auquel peut s’associer une amnésie rétrograde (faits passés) de quelques semaines (exceptionnellement mois ou années). La mémoire des connaissances acquises est préservée, comme les autres fonctions cognitives.
L’incidence annuelle globale est de l’ordre de 3,4 à 10,4/100 000, mais elle est plus élevée chez les sujets d’âge mûr (50-75 ans) où elle atteindrait 23,5/ 100 000.
L’incidence annuelle globale est de l’ordre de 3,4 à 10,4/100 000, mais elle est plus élevée chez les sujets d’âge mûr (50-75 ans) où elle atteindrait 23,5/ 100 000.
Faire le diagnostic
Les critères, bien établis (encadré ), permettent d’écarter d’autres étiologies de trouble transitoire de la mémoire, en particulier l’épilepsie et les accidents ischémiques transitoires (AIT). Le début est soudain, sans cause évidente. Il est néanmoins souvent précédé par un facteur précipitant comme le stress, l’effort physique ou une douleur intense. Il peut s’accompagner d’une anxiété plus ou moins marquée, le patient répétant sans cesse les mêmes questions dont il oublie aussitôt les réponses. L’examen neurologique est normal. La régression est spontanée, progressive, en moins de 24 heures, le plus souvent en 4 à 6 heures. Les fonctions mnésiques reviennent à la normale dans cet intervalle, même si des tests fins peuvent montrer de légères anomalies pendant quelques jours ou semaines. Le patient conserve une amnésie lacunaire portant sur la période de l’ictus.
Face à un tableau typique, aucun examen complémentaire n’est en théorie nécessaire (n’apportant pas d’argument positif). L’utilité d’une IRM en phase aiguë est discutée. Le plus souvent, elle est normale.
En séquence de diffusion (plus rarement en FLAIR), on observe parfois de façon transitoire des hypersignaux hétérogènes, ponctués, au niveau de l’hippocampe (uni- ou bilatéraux), associés à un hyposignal en séquence ADC (coefficient de diffusion apparent).1, 2 Dans certains cas, cet aspect peut faire évoquer à tort un AVC ischémique. Toutefois, la sémiologie particulière et le contexte permettent d’éviter cette erreur, de même que la régression rapide des images.
La moindre atypie doit faire pratiquer un bilan, à la recherche d’un diagnostic différentiel (tableau ). Certaines formes d’épilepsie peuvent se manifester par des amnésies transitoires. Il s’agit d’épisodes brefs, de moins de 1 heure, généralement accompagnés d’autres signes comme des automatismes buccaux, des hallucinations olfactives ou gustatives. Des récidives rapprochées sont très évocatrices (en particulier le même jour), ainsi qu’un état confusionnel associé ; ils imposent des enregistrements EEG et la recherche en imagerie d’une pathologie focale causale (tumeur, séquelle d’AVC).
Une étiologie cérébrovasculaire doit être suspectée soit lorsque les épisodes sont de quelques minutes (AIT), soit au contraire lorsqu’ils sont durables et/ou s’accompagnent d’autres signes neurologiques ou cognitifs. L’IRM est indispensable. Un hypersignal étendu en diffusion et ADC est évocateur, surtout s’il est associé à l’apparition retardée d’un hypersignal FLAIR. Le contexte, la sémiologie et les examens biologiques permettent de reconnaître des amnésies d’origine psychogène, métabolique (hypoglycémie) ou toxique (effet indésirable de certains hypnotiques ou inducteurs du sommeil, comme le zolpidem, le lormétazépam…).
La physiopathologie reste à ce jour très débattue. Un terrain migraineux étant fréquemment retrouvé, l’hypothèse d’une ischémie par trouble transitoire de la régulation régionale du débit sanguin (semblable à la migraine) a été avancée. La diffusion d’une « éclipse » de l’activité électrique corticale a également été suggérée. Autre mécanisme possible (mais très controversé) : une perturbation du drainage veineux profond des lobes temporaux, expliquant le lien avec les situations d’effort physique à glotte fermée type Valsalva.
Un épisode d’IAB ne requiert aucun traitement spécifique.1
Face à un tableau typique, aucun examen complémentaire n’est en théorie nécessaire (n’apportant pas d’argument positif). L’utilité d’une IRM en phase aiguë est discutée. Le plus souvent, elle est normale.
En séquence de diffusion (plus rarement en FLAIR), on observe parfois de façon transitoire des hypersignaux hétérogènes, ponctués, au niveau de l’hippocampe (uni- ou bilatéraux), associés à un hyposignal en séquence ADC (coefficient de diffusion apparent).1, 2 Dans certains cas, cet aspect peut faire évoquer à tort un AVC ischémique. Toutefois, la sémiologie particulière et le contexte permettent d’éviter cette erreur, de même que la régression rapide des images.
La moindre atypie doit faire pratiquer un bilan, à la recherche d’un diagnostic différentiel (
Une étiologie cérébrovasculaire doit être suspectée soit lorsque les épisodes sont de quelques minutes (AIT), soit au contraire lorsqu’ils sont durables et/ou s’accompagnent d’autres signes neurologiques ou cognitifs. L’IRM est indispensable. Un hypersignal étendu en diffusion et ADC est évocateur, surtout s’il est associé à l’apparition retardée d’un hypersignal FLAIR. Le contexte, la sémiologie et les examens biologiques permettent de reconnaître des amnésies d’origine psychogène, métabolique (hypoglycémie) ou toxique (effet indésirable de certains hypnotiques ou inducteurs du sommeil, comme le zolpidem, le lormétazépam…).
La physiopathologie reste à ce jour très débattue. Un terrain migraineux étant fréquemment retrouvé, l’hypothèse d’une ischémie par trouble transitoire de la régulation régionale du débit sanguin (semblable à la migraine) a été avancée. La diffusion d’une « éclipse » de l’activité électrique corticale a également été suggérée. Autre mécanisme possible (mais très controversé) : une perturbation du drainage veineux profond des lobes temporaux, expliquant le lien avec les situations d’effort physique à glotte fermée type Valsalva.
Un épisode d’IAB ne requiert aucun traitement spécifique.1
Risque de récidive
La majorité des sujets ne font qu’un seul épisode.1, 3, 5 Le risque annuel de récidive varie considérablement en fonction des études, entre 2,9 % et 23,8 %.3 Cela s’explique par l’emploi de critères diagnostiques plus ou moins stricts, et les durées différentes du suivi.
Les estimations les plus réalistes semblent plutôt basses : de 8 à 18 % sur 6 à 7 ans dans l’étude Quinette,5 5,4 % dans Arena.3 Chez 80-94 % des sujets, un seul épisode est rapporté.3, 5 Il semble exceptionnel pour un patient de faire plus d’une récurrence, bien que certains malades puissent en faire 4 à 6 (dans Quinette5).
Le délai de survenue est habituellement long (en moyenne 4,2 ans dans Arena3), mais des rechutes plus rapides (entre 1 mois et 1 an) ont été décrites.5 Des récidives rapprochées et/ou fréquentes font remettre en cause le diagnostic.
à ce jour, il n’y a aucun moyen de prédire le risque de récidive. Il a été suggéré que les patients ayant des lésions hippocampiques préalables à l’ictus (telles que sclérose hippocampique, séquelles de contusion ou d’AVC), ou bien secondaires aux épisodes déjà subis seraient plus à risque. Toutefois, cette hypothèse semble réfutée à la fois par des études prospectives3 et des travaux en IRM classique et fonctionelle.2, 4
Les estimations les plus réalistes semblent plutôt basses : de 8 à 18 % sur 6 à 7 ans dans l’étude Quinette,5 5,4 % dans Arena.3 Chez 80-94 % des sujets, un seul épisode est rapporté.3, 5 Il semble exceptionnel pour un patient de faire plus d’une récurrence, bien que certains malades puissent en faire 4 à 6 (dans Quinette5).
Le délai de survenue est habituellement long (en moyenne 4,2 ans dans Arena3), mais des rechutes plus rapides (entre 1 mois et 1 an) ont été décrites.5 Des récidives rapprochées et/ou fréquentes font remettre en cause le diagnostic.
à ce jour, il n’y a aucun moyen de prédire le risque de récidive. Il a été suggéré que les patients ayant des lésions hippocampiques préalables à l’ictus (telles que sclérose hippocampique, séquelles de contusion ou d’AVC), ou bien secondaires aux épisodes déjà subis seraient plus à risque. Toutefois, cette hypothèse semble réfutée à la fois par des études prospectives3 et des travaux en IRM classique et fonctionelle.2, 4
Maladie neurodégénérative ou cérébrovascu laire ?
Dans l’état actuel des connaissances,1 la survenue d’un IAB, même récidivant, n’est liée à aucune majoration du risque d’AVC ou de toute autre maladie vasculaire (infarctus du myocarde, pathologie vasculaire périphérique telle l’AOMI).
Les données récentes de l’étude Arena3 confirment ce résultat. Chez un sujet ayant déjà fait un IAB, il faut cependant rester vigilant, car la tranche d’âge concernée est exposée au risque d’AVC.
Tout nouvel épisode atypique doit impérativement alerter et faire contacter le centre 15 pour un transfert vers l’unité neurovasculaire la plus proche.
Si les critères diagnostiques sont bien respectés, un IAB même récidivant n’entraîne aucun sur-risque d’épilepsie.1, 3 En revanche, en cas de récurrences rapprochées et fréquentes, surtout si les épisodes sont de brève durée, il faut adresser le patient à une unité d’épileptologie pour des examens appropriés (EEG prolongé ou de sommeil, EEG vidéo).
L’hippocampe étant une structure particulièrement atteinte dans la maladie d’Alzheimer (MA), il est légitime de s’interroger sur le risque de MA chez ces patients. Cette question semble d’autant plus justifiée que des troubles mnésiques persistants ont été rapportés parfois plusieurs mois après un épisode d’IAB, des sujets pouvant même répondre aux critères du MCI (Mild Cognitive Impairement), considéré comme une MA prodromale. Toutefois, selon des études récentes,1-3 l’incidence des démences chez les sujets ayant fait un ou plusieurs épisodes d’IAB serait la même que celle de la population générale. La durée du suivi est néanmoins encore insuffisante pour écarter formellement ce risque à plus long terme.
Les données récentes de l’étude Arena3 confirment ce résultat. Chez un sujet ayant déjà fait un IAB, il faut cependant rester vigilant, car la tranche d’âge concernée est exposée au risque d’AVC.
Tout nouvel épisode atypique doit impérativement alerter et faire contacter le centre 15 pour un transfert vers l’unité neurovasculaire la plus proche.
Si les critères diagnostiques sont bien respectés, un IAB même récidivant n’entraîne aucun sur-risque d’épilepsie.1, 3 En revanche, en cas de récurrences rapprochées et fréquentes, surtout si les épisodes sont de brève durée, il faut adresser le patient à une unité d’épileptologie pour des examens appropriés (EEG prolongé ou de sommeil, EEG vidéo).
L’hippocampe étant une structure particulièrement atteinte dans la maladie d’Alzheimer (MA), il est légitime de s’interroger sur le risque de MA chez ces patients. Cette question semble d’autant plus justifiée que des troubles mnésiques persistants ont été rapportés parfois plusieurs mois après un épisode d’IAB, des sujets pouvant même répondre aux critères du MCI (Mild Cognitive Impairement), considéré comme une MA prodromale. Toutefois, selon des études récentes,1-3 l’incidence des démences chez les sujets ayant fait un ou plusieurs épisodes d’IAB serait la même que celle de la population générale. La durée du suivi est néanmoins encore insuffisante pour écarter formellement ce risque à plus long terme.
Encadre
Critères diagnostiques d’un ictus amnésique
Présence d’un témoin fiable pendant la majeure partie de l’épisode
Nette atteinte de la mémoire antérograde pendant l’épisode
Trouble cognitif limité à l’amnésie, sans syndrome confusionnel ni perte de l’identité personnelle
Pas de signe neurologique focal d’accompagnement pendant l’épisode ou son décours immédiat
Absence de caractéristique épileptique
Résolution en moins de 24 heures
Exclusion des patients ayant eu un traumatisme crânien récent ou une épilepsie active
références
1. Arena JE, Rabinstein AA. Transient global amnesia. Mayo Clin Proc 2015;90:264-72.
2. Auyeung M, Tsoi TH, Cheung CM, et al. Association of diffusion weighted imaging abnormalities and recurrence in transient global amnesia. J Clin Neurosci 2011;18:531-4.
3. Arena JE, Brown RD, Mandrekar J, Rabinstein AA. Long-Term Outcome in Patients With Transient Global Amnesia: A Population-Based Study. Mayo Clin Proc 2017;92:399-405.
4. Moon Y, Moon WJ, Han SH. The structural connectivity of the recurrent transient global amnesia. Acta Neurol Scand 2016;134:160-4.
5. Quinette P, Guillery-Girard B, Dayan J, et al. What does transient global amnesia really mean? Review of the literature and thorough study of 142 cases. Brain 2006;129(Pt 7):1640-58.
2. Auyeung M, Tsoi TH, Cheung CM, et al. Association of diffusion weighted imaging abnormalities and recurrence in transient global amnesia. J Clin Neurosci 2011;18:531-4.
3. Arena JE, Brown RD, Mandrekar J, Rabinstein AA. Long-Term Outcome in Patients With Transient Global Amnesia: A Population-Based Study. Mayo Clin Proc 2017;92:399-405.
4. Moon Y, Moon WJ, Han SH. The structural connectivity of the recurrent transient global amnesia. Acta Neurol Scand 2016;134:160-4.
5. Quinette P, Guillery-Girard B, Dayan J, et al. What does transient global amnesia really mean? Review of the literature and thorough study of 142 cases. Brain 2006;129(Pt 7):1640-58.