La dissection spontanée de l’artère coronaire (DSAC) est une cause rare de syndrome coronaire aigu (SCA). Elle est définie comme une dissection d’une artère coronaire non associée à l’athérosclérose, à un traumatisme ou à une cause iatrogène. La DSAC touche principalement les sujets jeunes (30-60 ans), des femmes dans 9 cas sur 10, sans athérosclérose coronaire ni facteurs de risque d’athérosclérose.
Sa prévalence exacte est incertaine, en raison d’un sous-diagnostic, mais il est estimé qu’elle pourrait être la cause d’entre 1 % et 4 % des cas de SCA. Elle serait responsable de jusqu’à 35 % des cas d’infarctus du myocarde des femmes de moins de 50 ans, et elle est la cause la plus fréquente (43 %) d’infarctus du myocarde associés à la grossesse.
Bien qu’il y ait eu des progrès dans la compréhension de la DSAC ces dernières années, elle reste mal comprise (manque de données, méconnaissance des facteurs de risque spécifiques…). Récemment, une étude de l’Inserm conduite au Paris Centre de recherche cardiovasculaire (PARCC) a permis une grande avancée dans la compréhension des mécanismes génétiques et biologiques de cette pathologie. Ses résultats viennent d’être publiés dans Nature Genetics.
Il s’agit d’une méta-analyse de 8 études d’association pangénomique (genome-wide association study) qui a permis, grâce à la comparaison des données génétiques de plus de 1 900 patients atteints de DSAC et d’environ 9 300 sujets contrôle, d’identifier 16 régions génomiques (loci) associées à un risque accru de DSAC – les causes génétiques prédisposant à ce risque étant donc très nombreuses et réparties sur l’ensemble du génome.
En particulier, un locus contenant le gène F3 qui code le facteur de coagulation tissulaire paraît spécifiquement associé au risque de DSAC : en effet, les résultats de l’étude suggèrent qu’un défaut d’expression de F3 est souvent retrouvé chez ces patient(e)s, ce qui constitue une cause potentielle d’une mauvaise réparation des artères, pouvant aboutir à leur déchirure.
Par ailleurs, les chercheurs ont mis en évidence un lien génétique entre l’infarctus dû à la DSAC et l’infarctus athéromateux, puisque les résultats montrent une coïncidence entre un grand nombre de régions génomiques prédisposant à chacune de ces conditions. Toutefois, même si les variantes génétiques mises en évidence étaient les mêmes, les allèles plus fréquents chez les patients atteints de DSAC étaient systématiquement décrits comme moins fréquents chez les sujets atteints d’infarctus athéromateux : « un résultat très surprenant, car il montre que […] les causes génétiques et les mécanismes biologiques associés à ces infarctus peuvent être opposés », conclut le Dr Nabila Bouatia-Naji, la coordinatrice de ces travaux.
Enfin, les auteurs ont mis en évidence un lien robuste entre une pression artérielle élevée et le risque de DSAC (tout en confirmant que le cholestérol élevé, le surpoids et le diabète de type 2 ne sont pas des facteurs de risque de DSAC), incitant à une surveillance accrue des patientes hypertendues, d’autant plus si elles ont une prédisposition génétique.