Véritable fait sociétal, l’information voire la surinformation envahit de plus en plus notre quotidien. La presse écrite regorge de publications dans tous les domaines. La radio est omniprésente au domicile, en voiture et de plus en plus souvent maintenant via les smartphones. Pour leurs journalistes, la primauté de l’information passe parfois avant la vérification des sources, concurrence oblige ! Pour la télévision – avec un peu plus de retenue – c’est la même chose, avec le choc des images en prime ! Que dire des reportages dits d’investigation où pudiquement la caméra cachée a fait place à la caméra discrète généralisant certaines déviances, certes condamnables, mais souvent ponctuelles jetant le discrédit, par exemple, sur toute une profession sans véritable droit de réponse. Et puis, fait nouveau, les réseaux sociaux aux informations non contrôlées et surtout incontrôlables qui participent et amplifient cette véritable bulle d’informations ! Simples constats, la liberté de la presse existe et doit être maintenue car c’est un droit mais à la condition de respecter un certain devoir déontologique.
Face à ce flot d’informations descendantes et souvent discordantes, chacun ne retient que ce qui lui semble être bon pour lui sans toutefois prendre le recul nécessaire et sans œil critique. Les informations grand public suscitées ces derniers mois par le coronavirus en sont, malheureusement, un parfait exemple. Incertitudes des scientifiques vis-à-vis des spécificités de ce nouveau virus, communication fluctuante des politiques face à la gestion des matériels disponibles, divergences sur l’impact des mesures prises par les structures hébergeant les personnes âgées, vrais ou faux espoirs donnés par les laboratoires pharmaceutiques sur le développement de leurs vaccins, reportages sur les aléas du port du masque alternant avec les recommandations officielles des mesures barrières, les très nombreux interviews de médecins donnant trop souvent des avis personnels plus ou moins alarmants au regard de leur vécu pas toujours généralisables et parfois plus graves encore, des protocoles infondés, une pseudoscience ne servant qu’à flatter l’ego de leurs promoteurs !
En fonction de cette pléthore d’informations et de la cacophonie qu’elle engendre, on peut comprendre le manque de repères de nos concitoyens mais aussi parfois leur désarroi expliquant parfaitement la disparité des comportements actuels envers le coronavirus. Certains, en particulier les jeunes, profitent de la levée du confinement pour reprendre des activités festives, rattraper le temps perdu ! D’autres font la queue devant les laboratoires d’analyses médicales pour s’assurer de leur négativité PCR-Covid pourtant aussi illusoire que temporaire ! Enfin, les plus inquiets s’interdisent toute vie sociale ! Une disparité de comportements de nature post-traumatique dont il est difficile de mesurer les conséquences plus ou moins lointaines sur la santé mentale de nos patients.
En tant que médecins, la gestion médiatique de cette crise sanitaire doit nous faire réfléchir sur l’attitude à adopter à l’égard des organes de presse. Se taire est illusoire, voire contre-productif car une de nos missions est bien d’être des acteurs de la santé publique. Informer, guider la population est donc indispensable. Il ne s’agit pas de rassurer ou d’alarmer mais de proposer ce qui, dans l’instant, est le plus partagé par la communauté scientifique. Même si la gestion de l’incertitude fait partie de notre pratique quotidienne, notre devoir est de minimiser le doute ou la confusion en restant le plus possible factuel et surtout de ne pas donner de faux espoirs à nos concitoyens. Les auditions et plaintes actuelles ne nous grandissent pas…