Alors qu’il n’y a pas eu de nouveauté thérapeutique dans ce domaine depuis plus de 30 ans, l'Agence européenne du médicament vient d’autoriser une nouvelle molécule, le daridorexant, chez les patients insomniaques chroniques. Cet hypnotique innovant aurait un profil de tolérance bien meilleur que celui des benzodiazépines.

Quelle prise en charge aujourd’hui ?

Le traitement de l’insomnie est d’abord non pharmacologique : mesures hygiénodiététiques dans la journée (sport, régularité des repas, sevrage tabagique…) et réaménagement des habitudes de sommeil (régularité des horaires et diminution du temps passé au lit sans dormir, contrôle des écrans le soir, suppression des excitants et de l’alcool…).

Les thérapies cognitivo-comportementales (TCC) adaptées à l’insomnie ont le plus haut niveau de preuve d’efficacité à court, moyen et long termes.

En parallèle, le traitement des éventuelles comorbidités est essentiel : dépression, troubles anxieux, syndrome d’apnées du sommeil, syndrome des jambes sans repos…

En cas d’échec, les traitements médicamenteux ont un intérêt ponctuel et limité. Ceux disponibles à l’heure actuelle en France sont les hypnotiques (somnifères) : benzodiazépines et apparentés. Il est préconisé de les prescrire à la dose efficace la plus faible, sans dépasser 4 semaines de traitement, en raison du risque de dépendance. Ces médicaments ne sont pas recommandés dans le traitement des insomnies chroniques (> 3 mois). Les hypnotiques peuvent être un facteur d’entretien de l'insomnie en raison du rebond d’insomnie qu’ils induisent à l'arrêt.

Daridoxerant : efficace dans l’insomnie chronique ?

Tout récemment autorisé par l’Agence européenne du médicament (EMA), le daridorexant (Quviviq) est indiqué chez l’adulte lorsque l’insomnie a persisté pendant au moins 3 mois et a des répercussions sur le fonctionnement diurne du patient.

Son mécanisme est différent de celui des benzodiazépines et médicaments en Z, qui agissent sur le système nerveux central via le récepteur GABA-A : il s’agit d’un double antagoniste des récepteurs de l’orexine (OX1R et OX2R). Or, l’orexine est un neuropeptide impliqué dans la régulation des rythmes veille-sommeil, produite pendant l’éveil, et peu dans le sommeil paradoxal. En bloquant son action, le daridorexant aiderait donc les patients à retrouver plus vite le sommeil et à dormir plus longtemps. 

Deux essais de phase III randomisés contre placebo, publiés en février dans The Lancet Neurology, ont en effet montré qu’à des doses de 25 mg et 50 mg (1 prise tous les soirs), le daridorexant augmentait le temps de sommeil des participants. Avec un traitement d’une durée de 3 mois, les personnes ayant pris ce médicament à la dose de 50 mg (la plus efficace) ont vu leur temps passé éveillés par nuit réduit de 29 minutes en moyenne, contre 11 minutes dans le groupe contrôle. À 3 mois, les participants s’endormaient plus rapidement, de 35 minutes en moyenne, par rapport à leur temps d'endormissement avant le traitement (versus un gain de 23 minutes sur la latence d’endormissement dans le groupe placebo). 

Encore mieux, et donnée rarement apportée dans ce type d’études, le traitement améliore les paramètres diurnes, évalués à l’aide du score IDSIQ, qui prend en compte les trois dimensions associées à l’éveil : vigilance/cognition, humeur et somnolence.

Enfin, dans ces essais, aucune dépendance, insomnie de rebond ou effet de sevrage n’ont été observés à l’arrêt brutal du traitement, à 3 mois. Uneétude d’extension (suivi de neuf mois supplémentaire) est en cours.

Posologie et durée recommandées par l’EMA

Le daridorexant est disponible en comprimés de 25 mg et 50 mg : la dose recommandée est de 50 mg à prendre 30 minutes avant le moment du coucher ; une dose réduite, de 25 mg, est possible, à évaluer en fonction des patients (pathologies du foie, polymédication…).

Le traitement doit être pris pendant la durée la plus courte possible, et réévalué dans les 3 mois.

Attention : son effet peut être diminué s’il est pris avec le repas ou immédiatement après.

Risques et contre-indications

La plupart des effets indésirables rapportés sont légers à modérés. Les plus fréquents (touchant jusqu’à 10 % de patients) sont : céphalées et rhinopharyngite.

Contre-indications : patients prenant des médicaments inhibiteurs du CYP3A4 ; narcoleptiques ; allergiques à l’un des composants.

D’après :
EMA. Quviviq. 3 mai 2022. Lecrubier A. L’EMA recommande l’autorisatin du daridorexant dans l’insomnie.Medscape 18 mars 2022.
À lire aussi :
Royant-Parola S, Poirot I. Insomnie chronique.Rev Prat Med Gen 2019;33(1026);605.
Dauvilliers Y. Dossier Insomnie.Rev Prat 2017;67(8):845-76.

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