Diagnostiquer une insuffisance veineuse chronique et/ou des varices.
Argumenter l'attitude thérapeutique et planifier le suivi du patient.

Introduction

L’insuffisance veineuse chronique regroupe l’ensemble des manifestations fonctionnelles et des signes physiques cutanés secondaires à une stase veineuse. Il s’agit d’une entité clinique et physiopathologique. Les affections veineuses chroniques regroupent l’ensemble des pathologies veineuses chroniques, qu’elles soient ou non liées à l’insuffisance veineuse chronique. Une varice se définit comme une veine sous-cutanée d’un diamètre supérieur ou égal à 4 mm en position debout, dont le trajet devient tortueux, entraînant une circulation pathologique.
L’objectif de cette question est d’aider l’étudiant à appréhender le lien entre les différentes affections veineuses chroniques indûment résumées à la notion de varices et l’insuffisance veineuse chronique.

Épidémiologie

Fréquence

Les affections veineuses chroniques sont fréquentes. Ainsi, dans une étude écossaise en population générale, 80 % des hommes et 85 % des femmes avaient des télangiectasies, 40 % et 16 % des varices, 7 et 16 % des œdèmes variqueux des membres inférieurs et 1 % avaient ou avaient présenté un ulcère variqueux. L’impact des maladies veineuses sur la santé est important compte tenu de leur prévalence. En France, les manifestations d’insuffisance veineuse toucheraient au moins 18 millions de personnes, dont 10 millions avaient des varices. Il existe une corrélation significative entre la dégradation de la qualité de vie et la sévérité de la maladie veineuse, d’une part, et son coût d’autre part. Ce dernier est estimé entre 1 à 3 % du budget de la santé des pays industrialisés.

Facteurs de risque

Les facteurs de risque d’insuffisance veineuse chronique sont nombreux, comme pour toute maladie multifactorielle. Les principaux sont l’âge, les antécédents familiaux de varices et d’ulcère des membres inférieurs, l’obésité, la grossesse, la station debout prolongée, la grande taille. Le sexe féminin est classiquement retrouvé comme facteur de risque, mais ceci pourrait n’être que la conséquence d’un biais de recrutement, les femmes ayant tendance à consulter plus facilement devant un tableau d’insuffisance veineuse chronique.

Physiopathologie

Rappels anatomiques

Le retour veineux au niveau des membres inférieurs est assuré à 90 % par le réseau veineux profond (veines satellites des artères dont elles partagent le même nom) et à 10 % par le réseau veineux superficiel (veine grande saphène, veine petite saphène et leurs affluents). Le réseau veineux superficiel se draine dans le réseau profond par l’intermédiaire des veines perforantes et des crosses saphéniennes (saphéno-fémorale pour la grande veine saphène et saphéno-poplitée pour la petite veine saphène). Les veines perforantes permettent de relier les différentes zones du réseau veineux superficiel. Des valvules, bicuspides, empêchent le sang de refluer et agissent comme un système antigravitaire. Elles sont particulièrement nombreuses à l’étage sous-poplité.

Mécanisme physiopathologique de l’insuffisance veineuse chronique

La pression dans les veines est déterminée par deux composantes, l’une hydrostatique (poids de la colonne sanguine) et l’autre hémodynamique (résultant de la contraction musculaire). En position debout immobile, la pression veineuse est d’environ 80 mmHg au niveau de la cheville. Lors de l’initiation de la marche, l’association de la contraction musculaire via la semelle plantaire de Lejars (dépendant de la statique plantaire et du déroulement du pas), de la pompe musculaire du mollet et du système abdomino-diaphragmatique permet de faire rapidement diminuer cette pression à moins de 30 mmHg, sous réserve d’un bon fonctionnement valvulaire. Malgré le large spectre de manifestations cliniques, il est vraisemblable que tous les symptômes d’insuffisance veineuse soient la conséquence d’une hyperpression veineuse prolongée qui serait responsable d’une inflammation chronique avec développement d’une microangiopathie entraînant in fine des troubles trophiques. Qu’elle soit consécutive à une altération primitive de la veine et de ses valves ou secondaire à une dysfonction de la pompe veino-musculaire (compression des veines par le système musculo-aponévrotique, principalement au mollet, propulsant le sang des membres inférieurs vers la veine cave), l’insuffisance veineuse entraîne une dégradation et un remodelage de la paroi veineuse, parallèlement à une dilatation (varices) avec auto-aggravation des troubles en vertu de la loi de Laplace. Trois mécanismes principaux contribuent à la défaillance du retour veineux et à la stase qui en résulte : la maladie variqueuse, le syndrome post-thrombotique et l’insuffisance veineuse fonctionnelle.

Étiologie de l’insuffisance veineuse chronique (fig. 1)

Maladie variqueuse

Une varice a une définition anatomique. Il s’agit d’une veine sous-cutanée d’un diamètre supérieur ou égal à 4 mm en position debout, dont le trajet devient tortueux, entraînant une circulation pathologique.
Lors de la caractérisation des varices, il convient de distinguer si elles sont :
– systématisées (développées aux dépens des réseaux grande et petite saphènes ou de leurs proches affluents) ou diffuses (non développées aux dépens d’un réseau anatomique précis) ;
– essentielles ou primaires (d’origine multifactorielles lorsque les seuls facteurs favorisants retrouvés sont un terrain familial de varices, l’âge, des grossesses, une obésité, une sédentarité ou une station debout prolongée…) ou secondaires à une altération pariétale, principalement à une maladie post-thrombotique ou plus rarement constitutionnelle (agénésie ostiale ou valvulaire, hypoplasie…).
Les varices sont à distinguer des :
– télangiectasies, confluence de veinules intradermiques dilatées dont le calibre n'excède pas 1 mm et qui, en dehors de la corona phlebectatica de siège périmalléolaire, sont rarement liées à l’insuffisance veineuse mais davantage à une imprégnation hormonale ;
– veines réticulaires, veines sous-dermiques, bleutées, dilatées et sinueuses d’un diamètre compris entre 1 et 3 mm.
Cette définition exclut les veines superficielles du sportif ou du sujet maigre qui sont des veines normales saillantes ou très visibles du fait de l’atrophie du tissu adipeux sous-cutané.

Syndrome post-thrombotique

Entre 20 et 50 % des patients présentant une thrombose veineuse profonde développeront un syndrome post-thrombotique. Le syndrome post-thrombotique est donc une insuffisance veineuse secondaire à une thrombose veineuse profonde. Le risque de développer un syndrome post-thrombotique est d’autant plus élevé que la thrombose veineuse profonde est proximale, qu’il s’agit d’une récidive homolatérale, que le patient est obèse ou âgé. La qualité du traitement anticoagulant en phase initiale de thrombose veineuse profonde constitue un élément déterminant dans le développement d’un syndrome post-thrombotique. Le délai de survenue du syndrome post-thrombotique peut être retardé, jusqu’à plusieurs années après la survenue de la thrombose veineuse profonde. Le diagnostic de syndrome post-thrombotique est clinique, associant les signes et symptômes d’insuffisance veineuse habituels : douleur, œdème, chaleur, démangeaisons, crampes, brûlures, aggravés par la marche et la station debout et soulagés par le repos et la surélévation du membre. À ces symptômes peuvent s’associer des signes cliniques (qui peuvent être isolés). Cette symptomatologie est la conséquence d’une hyperpression veineuse par obstruction veineuse (le plus souvent) ou insuffisance valvulaire (destruction valvulaire). Le diagnostic est clinique et le mécanisme précisé par l’écho-Doppler. Sa prévention en cas de thrombose veineuse profonde repose sur : 1) le port de bas de compression élastique dont la durée, la force et même l’efficacité sont débattues. Après une thrombose veineuse profonde, l’utilisation de la compression est suggérée pour soulager les symptômes aigus de thrombose veineuse profonde et recommandée pour traiter toute manifestation d’Insuffisance veineuse chronique. L’usage de la compression ne doit donc pas être systématique, notamment en cas de thrombose veineuse profonde asymptomatique ; 2) une anticoagulation optimale en phase aiguë de thrombose veineuse profonde ; 3) une thrombectomie pharmaco-mécanique, dont l’indication reste rare, décidée au cas par cas, chez des patients présentant une thrombose veineuse profonde extensive proximale (ilio-fémorale) avec syndrome obstructif important. En cas de syndrome post-thrombotique constitué, le traitement, comme pour toute insuffisance veineuse, repose sur le port d’une compression élastique dont la force est à adapter à la réponse clinique et à la tolérance au traitement. L'utilisation des vénotoniques ne se conçoit pas en première intention, et leur usage ne doit pas faire surseoir au port de bas de contention. Des études sont en cours afin d’évaluer l’efficacité de la recanalisation endovasculaire en cas de syndrome post- thrombotique invalidant proximal obstructif chronique (i.e. lié à une occlusion résiduelle chronique par opposition à un syndrome post-thrombotique lié à un mécanisme de reflux).

Insuffisance veineuse fonctionnelle

L’insuffisance veineuse fonctionnelle est la conséquence d’un retour veineux défaillant malgré des veines morphologiquement normales. Cette situation se rencontre en cas d’altération de l’hémodynamique veineuse par le biais d’une diminution de la fonction musculaire : défaut de marche (station debout immobile prolongée) ou d’ankylose de la cheville (gênant les amplitudes articulaires et diminuant de ce fait le retour veineux via la semelle plantaire de Lejars), amyotrophie des muscles du mollet, altération de la dynamique respiratoire. La dysfonction de la pompe du mollet est le principal pourvoyeur d’insuffisance veineuse chronique notamment chez le sujet âgé.

Syndromes veineux compressifs

Il s’agit :
– du syndrome de Cockett par compression de la veine iliaque gauche par l’artère iliaque droite et qui peut se compliquer de thrombose veineuse profonde, notamment au cours de la grossesse ;
– du syndrome du soléaire, par compression du pédicule tibio-fibulaire par l’arcade du soléaire ;
– de compressions veineuses extrinsèques par des tumeurs ou des adénopathies pelviennes.

Autres causes

Enfin, il existe d’autres causes beaucoup plus rares d’insuffisance veineuse (1-3 % des cas) :
– dysgénésies valvulaires (hypoplasies, agénésies) responsables d’insuffisance veineuse chronique sévère chez le sujet jeune ;
– angiodysplasies ;
– fistules artérioveineuses congénitales ou acquises.

Manifestations cliniques de l’insuffisance veineuse chronique

Les manifestations cliniques de l’insuffisance veineuse chronique peuvent être limitées à des signes fonctionnels subjectifs ou au contraire se manifester par des signes cutanés avec troubles trophiques (fig. 2 et 3).

Signes fonctionnels

Ils sont fréquents, variés et peu spécifiques. Il s’agit classiquement de jambes lourdes ou douloureuses, de crampes, de démangeaisons. Le caractère veineux de la symptomatologie est suspecté en cas de majoration au cours de la journée, après stations debout/assise prolongées, par la chaleur (ou en été), au cours de la grossesse, de la prise d’estroprogestatifs ou en période prémenstruelle ; et par leur amélioration en cas d’exercice physique, de contention/compression veineuse, de surélévation des membres inférieurs, d’exposition au froid (ou hiver).
Certains signes d’insuffisance veineuse sont moins fréquents, moins connus et peuvent induire des errements diagnostiques :
– impatience nocturne (besoin impérieux de mobiliser les jambes), faisant suspecter un syndrome des jambes sans repos ;
– brûlures et rougeur du pied nocturnes, soulagées par le froid, réveillant le patient et pouvant faire suspecter une érythermalgie (l’érythermalgie touche parfois les quatre membres, mais prédomine aux membres inférieurs) ;
– claudication veineuse intermittente en cas d’Insuffisance veineuse chronique secondaire à une obstruction chronique, généralement proximale, ilio-cave. La douleur augmente au cours de la marche du fait de l’obstacle et ne cède que lentement à l’arrêt et après mise en décubitus avec surélévation du pied. Les principaux diagnostics différentiels sont les claudications d’origine artérielle (i.e. artériopathie oblitérante des membres inférieurs) ou neurologique (i.e. canal lombaire étroit, etc.).

Signes physiques

Ils n’accompagnent pas nécessairement les symptômes et surviennent généralement de façon graduée, en rapport avec l’ancienneté et la sévérité de la dysfonction veineuse. Ils doivent être recherchés chez un malade en position debout. Ils comprennent des signes de stase puis des troubles trophiques cutanés et sous-cutanés.

Signes de stase

Œdème du pied : blanc, mou, prenant le godet, initialement au niveau de la cheville et respectant l’avant-pied. Cet œdème est à prédominance vespérale et disparaît après un repos allongé. Il est lié à une augmentation de la filtration plasmatique au niveau de l’unité microcirculatoire du fait de l’augmentation de la pression veineuse. Une fraction du plasma passe dans le tissu inter­stitiel sans être complètement réabsorbée par le versant veineux du capillaire et le système lymphatique. Il n’y a pas de rétention hydrosodée et donc pas de prise de poids. La fibrose tissulaire induite par l’œdème et les surinfections favorisées par l’accumulation des toxines, macromolécules et débris cellulaires peuvent secondairement altérer le système lymphatique. L’œdème prend alors les caractéristiques d’un œdème lymphatique ou lymphœdème avec peau épaissie et cartonnée et atteinte de l’avant-pied avec orteils boudinés (lymphœdème). C’est une complication tardive et inconstante.
Corona phlebectatica : varicosités bleues en couronne péri-malléolaire interne et paraplantaire directement corrélées au degré d’hyperpression veineuse.

Signes du retentissement tissulaire

Dermite ocre (fig. 2) : conséquence de l’extravasation des hématies dans le derme et de l’oxydation de l’hème. Cette lésion indélébile apparaît au début sous forme d’un piqueté ocre périmalléolaire puis sous forme de plaques brunâtres. Elle peut être associée à des éléments purpuriques au cours des poussées évolutives de la maladie.
Eczéma : dermatite érythémateuse, localisée au tiers inférieur de jambe, responsables de vésicules, d’un suintement ou de squames. Elle est souvent exclusivement secondaire à l’insuffisance veineuse chronique mais peut être aussi la conséquence d’un eczéma de sensibilisation lié à l’utilisation de topiques locaux.
Dermo-hypodermite de stase (lipodermatosclérose) : localisée au tiers inférieur de jambe, elle complique des épisodes d’hypodermites de stase ou infectieuses, engendrant une sclérose engainante et rétractile des tissus progressive qui s’étend peu à peu en circonférence et en hauteur et donne un aspect en mollet de coq. Un enraidissement de la cheville et du tiers inférieur du membre s’installe progressivement, entraînant un cercle vicieux. C’est un tournant évolutif de la maladie car elle altère définitivement la dynamique du retour veineux.
Atrophie blanche de Millian : plaque scléro-atrophique, porcelaine, lisse, de siège essentiellement périmalléolaire. Elle correspond à une zone d’ischémie localisée par raréfaction capillaire au sein d’un tissu fibreux et fait le lit des ulcères.
Ulcère variqueux : stade évolutif ultime de l’Insuffisance veineuse chronique. Il est classiquement indolore, non creusant, à fond humide et de distribution périmalléolaire.

Classification de l’insuffisance veineuse (CEAP)

La classification CEAP permet de classer en différents stades la maladie veineuse chronique en fonction de critères cliniques, étiologiques, anatomiques et physiopathologiques (tableau). Cette classification, d’usage compliqué, est utilisée en consultation spécialisée de phlébologie et en recherche clinique afin d'avoir des critères objectifs de comparaison entre les études. Il convient de noter que la CEAP est la classification des affections veineuses chroniques. Le terme insuffisance veineuse chronique est réservé aux seuls patients ayant une maladie évoluée œdème (C3), altérations cutanées (C4), ulcères veineux (C5-C6).
Les complications propres aux varices, indépendamment de l’évolution de l’insuffisance veineuse chronique vers un ulcère des membres inférieurs sont les suivantes.
Complications thrombotiques
Thromboses veineuses superficielles, dont il conviendra de déterminer si elles sont :
  • localisées (segmentaires), avec un potentiel thrombo-embolique modeste. Leur traitement en phase aiguë nécessite des anticoagulants à posologie préventive avec une AMM spécifique pour le fondaparinux 2,5 mg s.c. pendant 6 semaines. Le rivaroxaban 10 mg per os une fois par jour a récemment démontré sa non-infériorité par rapport au fondaparinux 2,5 mg sous-cutané dans cette indication mais ne dispose pas encore d’AMM spécifique dans cette indication en France ;
  • extensives à proximité des crosses (< 3 cm du réseau profond) : le risque de thrombose veineuse profonde (et d’embolie pulmonaire) est alors considéré comme suffisamment élevé pour justifier la mise en route d’un traitement anti­coagulant à dose curative (i.e. comme pour les thromboses veineuses profondes). À distance de l’épisode thrombotique aigu il faudra envisager une prise en charge phlébologique de la veine vari­queuse.
Thromboses veineuses profondes, dont la prise en charge est traitée dans l’item iECN 224 (i.e. principalement traitement anticoagulant à posologie curative).
Complications hémorragiques
Rupture d’une ampoule variqueuse, nécessitant une surélévation du membre et une compression locale. Un traitement chirurgical ou par sclérose de la veine est alors en règle générale nécessaire pour prévenir les récidives.

Diagnostic d’insuffisance veineuse chronique

Interrogatoire

Celui-ci renseigne l’âge, le sexe, le motif de consultation (plainte fonctionnelle, esthétique…), les antécédents personnels ou familiaux de varices ou de thrombose veineuse, recherchera des facteurs aggravants (profession, tabac, obésité…) ou modifiant la prise en charge tel un désir de grossesse ultérieur.

Examen physique

Il est réalisé en position debout, avec une lumière suffisante, idéalement sur un escabeau de phlébologie, le membre en légère flexion et rotation externe pour la grande veine saphène. Il doit être bilatéral et comparatif, associant la recherche des manifestations cliniques d’insuffisance veineuse précédemment citées et la palpation des trajets des veines saphènes. En présence de varices, on recherchera leur caractère systématisé ou non et une atteinte pelvienne associée. On s’attachera à rechercher une ankylose de cheville.
À l’issue de cet examen clinique, on est en mesure d’affirmer ou non la présence d’une insuffisance veineuse. Le Doppler continu et l’écho-Doppler couleur (fig. 4) éventuellement réalisés en préciseront le mécanisme.
Il conviendra, bien entendu, de ne pas oublier de palper les pouls et de réaliser un examen neurologique simple des membres inférieurs afin de ne pas méconnaître un diagnostic différentiel ou un facteur aggravant associé.

Examens complémentaires

En l’absence de symptômes et en présence de seules télangiectasies, il n’y a pas d’indication formelle à la réalisation d’examens complémentaires. Dans les autres situations cliniques, on réalisera (un Doppler continu et) un écho-Doppler pulsé en position allongée puis debout qui confirmera le diagnostic et en précisera le mécanisme.

Doppler continu

Cet examen, moins réalisé de façon isolée de nos jours avec le développement des appareils écho-Doppler, peut être réalisé en même temps que l’examen clinique. Il permet de mettre en évidence un reflux veineux pathologique (par insuffisance valvulaire ou ostiale), une incontinence au niveau des perforantes et une possible obstruction.

Écho-Doppler veineux

Cet examen représente la méthode de choix pour diagnostiquer un reflux veineux ou mettre en évidence un syndrome obstructif. Il se pratique initialement en décubitus dorsal pour l’exploration morphologique, à la recherche d’une avalvulation profonde, de séquelles post-thrombotiques ou de malformations veineuses, puis en position debout, sur l’escabeau de phlébologie, pour l’exploration hémodynamique du réseau veineux superficiel, sans oublier les jonctions saphéno-fémorale, saphéno-poplitée et les veines perforantes. Il confirmera le diag­nostic de varice, permettra de mesurer les diamètres veineux et de rechercher un reflux pathologique (par insuffisance valvulaire ostiale ou tronculaire) et une incontinence de veine perforante. Ainsi, de manière générale, une veine est dite incontinente si elle présente un reflux supérieur à 0,5 seconde au niveau de la grande ou de la petite veine saphène. Cet examen permet la réalisation d’une carto­graphie veineuse précise répertoriant l’état morphologique et hémodynamique du patient afin de guider la thérapeutique.

Traitement de l’insuffisance veineuse chronique

Principes du traitement

Son objectif est de soulager la symptomatologie fonctionnelle et de prévenir l’apparition de troubles trophiques. L’insuffisance veineuse chronique est la conséquence d’une stase veineuse, et son traitement repose sur le port d’une compression élastique qui fait disparaître la stase veineuse et l’œdème toujours complété par des mesures hygiéno-diététiques. Les autres traitements se discutent au cas par cas, notamment en fonction du mécanisme initial de l’insuffisance veineuse et des résultats du bilan phlébologique.

Règles hygiéno-diététiques

Le respect de certaines règles simples d’hygiène de vie ayant pour objectif de favoriser le retour veineux est fondamental en matière d’insuffisance veineuse chronique, et il est indispensable de bien les expliquer au patient : lutte contre la sédentarité et le piétinement, éviter la station debout immobile prolongée, la position assise jambes pendantes et/ou croisées, réduire toute surcharge pondérale, marche régulière en déroulant le pas, éviter l’exposition prolongée à la chaleur et le chauffage par le sol, surélever les pieds, notamment la nuit pour assurer un drainage postural, et bien sûr porter des bas de compression élastique dès le lever.

Compression élastique

La compression élastique présente de multiples effets bénéfiques sur l’insuffisance veineuse chronique et agit à plusieurs niveaux en exerçant une pression tissulaire continue au repos et lors de l’effort musculaire : elle réduit la dilatation des veines et augmente ainsi le débit sanguin ; elle diminue le volume du membre avec un effet anti-œdémateux en augmentant la pression interstitielle, ce qui diminue l’augmentation de filtration capillaire liée à l’hyperpression veineuse ; elle améliore l’efficacité de la pompe musculaire du mollet lors de la marche. Les bandes et les bas de compression élastique constituent la pierre angulaire efficace et indispensable de la prise en charge de l’insuffisance veineuse chronique.
Il existe 4 classes de compression, classées de façon croissante en fonction de la pression exercée au niveau de la cheville :
  • compression faible, classe I (10-15 mmHg), prévention des thromboses veineuses profondes et de l'insuffisance veineuse chronique fonctionnelle ;
  • compression moyenne, classe II (15-20 mmHg) : varices, thrombose veineuse profonde ;
  • compression forte, classe III (20-36 mmHg) : thrombose veineuse profonde, syndrome post-thrombotique ;
  • compression très forte, classe IV (36-49 mmHg) : insuffisance lymphatique.
La prescription de la classe de compression dépend de son indication mais aussi de la tolérance du patient et la réponse clinique. Les classes européennes sont décalées d’une classe vers le haut. Le port de la compression élastique est contre-indiqué en cas d’artériopathie évoluée des membres inférieurs (indice de pression systolique < 0,6), de micro-angiopathie diabétique évoluée, de phlegmatia caerulea, de thrombose veineuse septique, de pontage vasculaire infrapoplité, de peau fragile.

Traitements spécifiques

Ces traitements ne se conçoivent qu’en complément des règles hygiéno-diététiques et du port de la contention.

Maladie variqueuse

En présence de varices, l’objectif de prévention primaire est d’éviter la survenue d’une insuffisance veineuse chronique. En prévention secondaire, on essaie de diminuer ou d’éviter l’aggravation des signes d’insuffisance veineuse chronique. Les traitements spécifiques aux varices sont :
– la sclérose (injection d’un produit sclérosant pour traiter des varices ou en complément d’un éveinage) ;
– l’écho-sclérose à la mousse et le laser endovasculaire (tous deux permettant de traiter même des varices systématisées) ;
– la phlébectomie ambulatoire au crochet, ou chirurgie classique (éveinage par stripping de varices systématisées).
Le principe commun est l’exclusion du tronc veineux variqueux. Avant tout traitement de ce type, il est indispensable d’avoir réalisé un examen écho-Doppler exhaustif analysant la continence des réseaux veineux superficiels, profonds mais aussi des perforantes. Il conviendra aussi de bien peser l’indication d’un éveinage saphène, surtout chez un patient à risque cardiovasculaire dont les saphènes pourraient servir pour un éventuel pontage. Enfin, une veine vicariante qui assure la suppléance du drainage veineux en cas d’occlusion des troncs veineux profonds est une contre-indication à ces traitements qui aggraveraient l’obstacle au drainage.
Dans les cas plus rares d’avalvulation, des techniques chirurgicales de reconstruction valvulaire ont été développées mais sont pour l’heure réservées à des équipes très spécialisées.

Maladie post-thrombotique

Son traitement repose principalement, d’un point de vue préventif, sur le respect d’une anticoagulation efficace et, de façon désormais moins consensuelle, sur le port d’une compression élastique.
En présence d’un syndrome post-thrombotique avéré, l’attitude thérapeutique la plus courante comme pour toute insuffisance veineuse est le port d’une compression élastique en n’hésitant pas à adapter le traitement à la réponse clinique (i.e. augmenter la force de compression en cas de réponse clinique insuffisante). Des thérapeutiques endovasculaires pour traiter les syndromes obstructifs proximaux sont à l’heure actuelle en cours de développement et d’évaluation.

Insuffisance veineuse fonctionnelle

Le traitement d'appoint spécifique repose sur la kinésithérapie afin de lutter contre l'ankylose de la cheville, à remuscler le mollet, avec si besoin une aide diététique en cas de dénutrition associée.

Autres traitements


Veinotoniques

Ces molécules sont réputées pour avoir notamment un effet hémodynamique et anti-inflammatoire veineux. Leur utilisation doit être limitée à la prise en charge des symptômes fonctionnels de l’insuffisance veineuse chronique, et ce de façon discontinue par cures de courtes périodes. On ne doit pas associer deux veinotoniques entre eux, et ces traitements ne dispensent pas du port de la compression.

Crénothérapie

Certaines stations thermales sont agréées pour la prise en charge notamment d’insuffisance veineuse chronique sévères avec troubles trophiques, mais elles restent d’indication rare.•
Points forts

Insuffisance veineuse chronique. Varices

L’Insuffisance veineuse chronique est une affection fréquente, consécutive à une stase veineuse.

L’étiologie de l’insuffisance veineuse chronique peut être fonctionnelle, post-thrombotique ou secondaire à une maladie variqueuse.

L’examen clinique se fait patient en position debout dans un endroit bien éclairé.

Une présentation clinique caractéristique est suffisante pour poser un diagnostic positif. L’écho-Doppler veineux des membres inférieurs permet de confirmer le diagnostic clinique d’insuffisance veineuse chronique (en cas de présentation atypique) et d’en préciser le mécanisme pour guider le traitement via la réalisation d’une cartographie veineuse.

L’ulcère variqueux est le stade ultime des complications cutanées de l’insuffisance veineuse chronique.

Le traitement de l'insuffisance veineuse chronique repose sur le port d'une compression élastique complété des règles d’hygiène de vie associées ou non à des mesures spécifiques traitant le mécanisme de l’insuffisance veineuse chronique.

Message auteur

Message de l'auteur

Le cas clinique le plus classique serait un dossier de thrombose veineuse profonde se compliquant à distance d’une maladie post-phlébitique et d’un ulcère dont il faudrait discuter et argumenter le diagnostic (veineux) et la prise en charge (ambulatoire, contention, etc.). En dehors de ce type de cas clinique, les principales questions susceptibles d’être posées sur le thème de l’insuffisance veineuse et les varices concerneraient un diagnostic différentiel de claudication des membres inférieurs, un dossier de démarche diagnostique devant un ulcère des membres inférieurs.

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