Évaluer son importance chez l’angineux stable, la dépister chez le sujet à risque.
L’ischémie myocardique est le plus souvent consécutive à une sténose coronaire significative. Élément pronostique central, elle fait poser l’indication soit d’un traitement médical, soit d’une revascularisation coronaire : percutanée ou chirurgicale.1
Le premier objectif de l’imagerie est de ne pas manquer le diagnostic chez les patients authentiquement coronariens ; sa valeur prédictive négative doit donc être la plus élevée possible pour éliminer un maximum de faux négatifs. Il faut pour cela distinguer la documentation de l’ischémie elle-même de la visualisation directe des coronaires (coroscanner ou coronarographie). En effet, cette dernière peut conduire à un « réflexe oculo-sténotique » du cardiologue interventionnel (appréciation à vue d’œil, subjective, du degré de sténose) et à une revascularisation, alors que la sténose n’est pas responsable de la souffrance myocardique.

Tests en stress

Les principaux examens sont l’épreuve d’effort, l’échographie de stress (effort ou injection de dobutamine), la scintigraphie myocardique (effort ou injection de dipyridamole, Persantine) et l’IRM de stress (dipyridamole, adénosine ou dobutamine). Leur objectif est de provoquer une ischémie : soit en accélérant la fréquence cardiaque (le plus souvent via l’effort ou une catécholamine), soit en créant un vol coronaire (détournement du flux sanguin par dipyridamole ou adénosine).
L’accélération cardiaque doit être suffisante pour que l’examen soit interprétable. Il faut que le cœur atteigne au moins 85 % de sa fréquence maximale théorique (FMT) pour les patients non traités par médicament chronotrope négatif (test dit « non maquillé ») ; ou 75 % de la FMT pour les coronariens sous traitement (test « maquillé »). Dans ce cas, l’objectif est d’évaluer son efficacité et/ou une éventuelle resténose intrastent coronaire.
Plus la fréquence cardiaque est proche des 100 % de la FMT, plus la sensibilité de l’examen, donc la valeur prédictive, est bonne. Globalement, à l’exception du test d’effort simple moins performant, les sensibilités et spécificités des techniques sont équivalentes, aux alentours de 90-97 %. Chacune ayant ses limites propres, il faut bien les connaître.2

Épreuve d’effort

Elle consiste à enregistrer l’ECG au cours d’un exercice physique calibré à l’aide d’un ergomètre qui permet de fixer différents paliers de puissance (en watts). Il peut s’agir d’un cyclo-ergomètre (le plus fréquent) ou d’un tapis roulant inclinable.
L’examen débute par un tracé au repos et la prise de PA qui sera monitorée toute la durée du test. Le protocole est établi selon l’état du patient : les paliers progressent généralement toutes les 2 minutes. Critères d’arrêt : l’obtention de la FMT, l’épuisement musculaire, la positivité électrique définie par un sous-décalage de 2 mm (horizontal ou descendant) du segment ST, un trouble du rythme cardiaque grave ou un malaise lié à une hypotension artérielle.
Principal avantage de ce test : sa disponibilité ; mais sa sensibilité et sa spécificité restent faibles (70 % chez l’homme, moins chez la femme), sans explication claire.3

Échographie de stress

Elle consiste à acquérir des images échographiques pendant un « stress » provoqué soit par un effort (toujours préférable), soit pharmacologique (dobutamine et atropine) en cas d’incapacité : artériopathie des membres inférieurs, limitation mécanique par arthrose de genoux. Comme pour le test d’effort « simple », le patient est surveillé : ECG (enregistrement permanent) et PA (à intervalles réguliers).
Si l’effort est possible, le patient est installé sur un vélo allongé (ergomètre), légèrement penché sur la gauche pour faciliter l’imagerie (fig. 1).
S’il n’est pas possible, l’injection de dobutamine et d’atropine (en l’absence de contre-indication) accélère la fréquence cardiaque. La récupération est ensuite obtenue en administrant un bêtabloquant (ou un inhibiteur calcique si le bêtabloquant est contre-indiqué).
L’acquisition des images a lieu au repos, en début d’effort (ou faible dose de dobutamine), à l’effort maximal (ou dose maximale de dobutamine + atropine), lors de la récupération précoce (à l’arrêt de la dobutamine) et tardive (après injection du « ralentisseur » cardiaque).
L’épaississement myocardique est étudié à chaque palier. S’il diminue (hypokinésie), disparaît (akinésie) ou même se fait « dans le mauvais sens » (dyskinésie), l’ischémie est avérée. Son étendue étant un élément déterminant l’urgence de la prise en charge, le myocarde est artificiellement divisé en 17 segments. Le diagnostic est posé lorsque l’hypokinésie (ou akinésie ou dyskinésie) touche au moins 2 segments contigus.4
L’échogénicité du patient est bien entendu déterminante. C’est la principale limite de cette technique qui peut être contournée par une injection de produit de contraste (type SonoVue).

Scintigraphie myocardique

Elle analyse la perfusion myocardique d’un radiotraceur, en comparant les images immédiatement après un effort maximal et en phase de récupération.
Le patient est placé sur un vélo droit ou un tapis roulant. Si l’intensité atteinte est insuffisante, l’examen peut être combiné à une injection de dipyridamole (réalisée seule si effort impossible). ECG et PA sont surveillés.
Le produit radioactif (thallium ou MIBI-technétium) est administré au maximum de l’effort (ou en fin d’injection de dipyridamole) suivi d’une acquisition des images par gamma-caméra (caméra à scintil- lation).
L’ischémie est établie par une diminution de la perfusion visible à la différence de couleur entre l’effort et la récupération (fig. 2). En cas d’anomalies, les patients repassent « tardivement » sous la gamma-caméra (plusieurs heures après).
Ses 2 principales limites sont son caractère irradiant (même s’il est nettement amoindri par les techniques actuelles) et sa durée, souvent plusieurs heures. Il est contre-indiqué chez les femmes enceintes en raison du produit radioactif injecté. Un examen de médecine nucléaire ne met pas l’entourage en danger. Prudence toutefois vis-à-vis des enfants et des femmes enceintes.

IRM de stress

L’agent « stresseur », vasodilatateur (adénosine ou dipyridamole), multiplie par 4 à 5 le débit coronaire versus l’état basal.
Une sténose coronaire est dépistée par la majoration significative du gradient de pression de part et d’autre de son rétrécissement. Les séquences dynamiques après injection d’un produit de contraste de type gadolinium sont réalisées au pic de stress pharmacologique. Sa diffusion sanguine rehausse successivement les cavités cardiaques droites puis gauches, puis le muscle cardiaque (de l’épicarde vers l’endocarde) formant une image homogène du myocarde s’il est sain.
Un défaut de perfusion se voit à une lacune du rehaussement myocardique sous forme d’hyposignal, et témoigne d’une ischémie coronaire.5 Dans certains centres, quand le test à l’adénosine est positif, on injecte de la dobutamine à la recherche d’un trouble de la contractilité dans la zone hypoperfusée, afin d’accroître la puissance diagnostique. Cette IRM à la dobutamine n’est pas de pratique courante, en raison de sa durée prolongée et de sa mauvaise tolérance clinique.
références
1. Rogers WJ, Bourassa MG, Andrews TC, et al. Asymptomatic Cardiac Ischemia Pilot (ACIP) study: outcome at 1 year for patients with asymptomatic cardiac ischemia randomized to medical therapy or revascularization. The ACIP Investigators. J Am Coll Cardiol 1995;26:594-605.

2. Marwick TH, Case C, Short L, Thomas JD. Prediction of mortality in patients without angina: use of an exercise score and exercise echocardiography. Eur Heart J 2003;24:1223-30.

3. Gianrossi R, Detrano R, Mulvihill D, et al. Exercise-induced ST depression in the diagnosis of coronary artery disease. A meta-analysis. Circulation 1989;80:87-98.

4. Arnese M, Fioretti PM, Cornel JH, et al. Akinesis becoming dyskinesis during high-dose dobutamine stress echocardiography: a marker of myocardial ischemia or a mechanical phenomenon? Am J Cardiol 1994;73:896-9.

5. Costa MA, Shoemaker S, Futamatsu H, et al. Quantitative magnetic resonance perfusion imaging detects anatomic and physiologic coronary artery disease as measured by coronary angiography and fractional flow reserve. J Am Coll Cardiol 2007;50:514-22.

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essentiel

Patients symptomatiques stables. Pas de dépistage en cas de syndrome coronaire aigu avec sus- ou sous-décalage de ST. Ces angineux connus doivent bénéficier d’emblée d’une coronarographie.

➜ Patients asymptomatiques à risque. Intermédiaire : score de Framingham de 6 à 20 %, ou au moins 1 facteur de risque en dehors du diabète. élevé : prévention secondaire ou Framingham > 20 % ou athérosclérose diffuse ; ou risque unique mais sévère : diabète non insulinodépendant, PA > 180/90 mmHg, LDL-C > 2,4 g/L.

➜ Score de prédiction de maladie coronaire (Marburg Heart Score) : femmes ≥ 65 ans, hommes ≥ 55 ans : 1 point ; pathologie vasculaire connue : 1 point ; douleur provenant du coeur : 1 point ; augmentant à l’effort : 1 point ; non reproductible à la palpation : 1 point. Résultats : 0-2 points : risque faible (< 15 %) ; 3 points : intermédiaire (15-85 %) ; 4-5 points : élevé (> 85 %)