Après 5 ans de L-dopa, plus de 50 % des patients ont des fluctuations motrices.
* Centre expert Parkinson, hôpital Henri-Mondor, AP-HP, 94010 Créteil Cedex. gilles.fenelon@aphp.fr
La L-dopa est le traitement de référence de la maladie de Parkinson (MP). Elle est plus efficace que les agonistes dopaminergiques (AD) et mieux tolérée, cf. infra. Mais ces derniers donnent moins de complications motrices à long terme. Trois d’entre eux (ropinirole, pramipexole, rotigotine) sont disponibles sous une forme à libération prolongée. Les dérivés de l’ergot de seigle, dont le chef de file est la bromocriptine, sont quasiment abandonnés. L’apomorphine, AD puissant mais à part, ne s’utilise que par voie sous-cutanée. Certains agonistes ont une AMM dans des affections autres que la MP (tableau).
La L-dopa est le traitement de référence de la maladie de Parkinson (MP). Elle est plus efficace que les agonistes dopaminergiques (AD) et mieux tolérée, cf. infra. Mais ces derniers donnent moins de complications motrices à long terme. Trois d’entre eux (ropinirole, pramipexole, rotigotine) sont disponibles sous une forme à libération prolongée. Les dérivés de l’ergot de seigle, dont le chef de file est la bromocriptine, sont quasiment abandonnés. L’apomorphine, AD puissant mais à part, ne s’utilise que par voie sous-cutanée. Certains agonistes ont une AMM dans des affections autres que la MP (tableau).
Complications motrices de la L-dopa
Après quelques années d’utilisation, l’inter- action entre L-dopa et MP expose à 2 types de complications motrices.1
Fluctuations motrices
Cette réapparition transitoire des signes parkinsoniens sous traitement traduit les variations de son efficacité. Les plus précoces surviennent en fin de dose, avant la prise suivante. Lorsque la maladie s’aggrave, d’autres manifestations de ce type sont possibles, corrélées ou non aux prises médicamenteuses (akinésie matinale, nocturne, nycthémérale, plutôt l’après-midi…). S’y associent fréquemment des symptômes non moteurs : cognitifs, psychiatriques (anxieux ++), végétatifs ou douloureux.
Dyskinésies
Mouvements anormaux induits par la L-dopa, souvent d’allure choréique, ils ont parfois une composante dystonique. Ils peuvent toucher les membres, le tronc, et le visage. Lorsqu’ils sont sévères, ils sont à l’origine d’une gêne fonctionnelle et psychologique. Les plus fréquents marquent le maximum de l’action de la L-dopa (dyskinésies de pic ou milieu de dose). Des formes plus rares surviennent au début ou à la fin de son action (dyskinésies de début ou de fin de dose). Elles sont plus brèves et plus intenses que celles de milieu de dose.
Ces complications sont de traitement délicat. Afin de retarder leur survenue, surtout chez les patients les plus jeunes, une stratégie est de repousser le recours à ce médicament. Elle reste débattue, en raison de l’efficacité plus grande de la L-dopa et des effets indésirables des AD.
Ces complications sont de traitement délicat. Afin de retarder leur survenue, surtout chez les patients les plus jeunes, une stratégie est de repousser le recours à ce médicament. Elle reste débattue, en raison de l’efficacité plus grande de la L-dopa et des effets indésirables des AD.
Effets indésirables des AD
La plupart2 s’observent aussi avec la L-dopa mais plus rarement et s’ils surviennent ils sont en règle moins sévères. Ce sont des effets de classe, sans différence entre les divers produits. Ils ont la même fréquence dans les indications autres que la MP.
Nausées et vomissements
Ils peuvent accompagner l’instauration des AD. La prévention passe par une titration lente et, au moins au début, une prise avant le repas. Si besoin, on peut recourir transitoirement à la dompéridone, en suivant les recommandations de l’Ansm sur la prévention du risque cardiaque lié à cette molécule (allongement du QT, arythmie ventriculaire, mort subite). Il faut donc la prescrire à la dose la plus faible et pour une période la plus courte possible. Métoclopramide et métopimazine sont contre-indiqués car ils majorent le syndrome parkinsonien.
Hypotension orthostatique
Symptôme dysautonomique fréquent à un stade tardif – sensations vertigineuses, voire malaises et chutes –, elle est aggravée par les dopaminergiques et par les anti-hypertenseurs. Il faut alléger le traitement et utiliser les « petits moyens » de lutte : bas de contention, surélévation de la tête du lit… Si cela ne suffit pas, on peut recourir à la midodrine. Les formes les plus sévères nécessitent une prise en charge spécialisée.
Somnolence diurne excessive
Elle fait partie de l’évolution naturelle de la maladie, surtout chez des patients âgés ayant des troubles cognitifs. Favorisée ou induite par les AD, plus rarement la L-dopa, elle se manifeste par des « coups de barre », voire des endormissements brutaux, dangereux si le sujet conduit. Il faut prévenir le patient de ce risque et l’inviter à consulter si cela survient. Il est parfois utile de rechercher un syndrome d’apnées du sommeil.
Troubles du contrôle des impulsions (TCI)
Ces comportements compulsifs et répétitifs sont favorisés ou déclenchés par les traitements dopaminergiques, en premier lieu les AD (lien bien établi avec effet-dose).
Dans la plus grande étude transversale publiée, leur prévalence atteignait 14 %.3 Les 4 principaux sont l’addiction aux jeux d’argent sous toutes leurs formes (cartes à gratter, PMU, jeux en ligne), les achats pathologiques, l’hypersexualité et les troubles du contrôle alimentaire : grignotage dans la journée (sucreries), plus rarement accès boulimiques. On y associe l’addiction à la L-dopa (prises excessives au prix de dyskinésies gênantes) et le « hobbyisme » (loisir envahissant).
Souvent accompagnés d’un trouble de l’humeur (dépression, hypomanie), les TCI sont graves par leurs conséquences financières, familiales, voire médico-légales. Les facteurs de risque sont une MP débutée jeune et des antécédents prémorbides de TCI ou d’addiction (tabac).
La prévention est essentielle : informer patients et aidants et en garder une trace écrite. Le fascicule « Vous et… vos médicaments dopaminergiques » est, par exemple, disponible sur le site de l’Ansm.
Les TCI sont à rechercher systématiquement à chaque consultation, même en l’absence de plainte, car fréquemment occultés.
La prise en charge est urgente, en lien avec le neurologue et si besoin le psychiatre, d’abord par réduction progressive des doses.
Dans la plus grande étude transversale publiée, leur prévalence atteignait 14 %.3 Les 4 principaux sont l’addiction aux jeux d’argent sous toutes leurs formes (cartes à gratter, PMU, jeux en ligne), les achats pathologiques, l’hypersexualité et les troubles du contrôle alimentaire : grignotage dans la journée (sucreries), plus rarement accès boulimiques. On y associe l’addiction à la L-dopa (prises excessives au prix de dyskinésies gênantes) et le « hobbyisme » (loisir envahissant).
Souvent accompagnés d’un trouble de l’humeur (dépression, hypomanie), les TCI sont graves par leurs conséquences financières, familiales, voire médico-légales. Les facteurs de risque sont une MP débutée jeune et des antécédents prémorbides de TCI ou d’addiction (tabac).
La prévention est essentielle : informer patients et aidants et en garder une trace écrite. Le fascicule « Vous et… vos médicaments dopaminergiques » est, par exemple, disponible sur le site de l’Ansm.
Les TCI sont à rechercher systématiquement à chaque consultation, même en l’absence de plainte, car fréquemment occultés.
La prise en charge est urgente, en lien avec le neurologue et si besoin le psychiatre, d’abord par réduction progressive des doses.
Hallucinations chroniques et « psychose »
Touchant plus de 50 % des parkinsoniens traités au long cours, les hallucinations sont généralement visuelles, il s’agit plus rarement d’idées délirantes. Le rôle favorisant de la L-dopa est possible, celui des AD est bien établi. Les antiparkinsoniens (anticholinergiques, amantadine), psychotropes ou antalgiques de classe II ou III sont aussi impliqués. Principaux facteurs de risque : grand âge et troubles cognitifs. Les manifestations psychotiques, anxiogènes et/ou comportementales, peuvent nécessiter (entre autres) la réduction des AD. Dans les formes sévères, le seul antipsychotique ayant l’AMM est la clozapine (prescription médicale restreinte).
Autres effets des AD
Les œdèmes des membres inférieurs sont une complication sous-estimée de cette classe. L’apomorphine (discontinue en sous-cutané au stylo ou continue à la pompe) a des complications spécifiques ajoutées aux risques précités, tels que des nodules sous-cutanés aux sites d’injection (50 % des patients). Les accidents hématologiques (anémie hémolytique, hyperéosinophilie) sont en revanche exceptionnels. Rares aussi et liées aux AD ergotés, les fibroses pleuropulmonaires et rétropéritonéales sont graves, expliquant le quasi abandon de ces molécules. La cabergoline, réservée au traitement des hyperprolactinémies, expose à une valvulopathie restrictive ; elle requiert un bilan initial et une surveillance cardiovasculaires.
Syndrome de sevrage à l’arrêt des AD
Les effets indésirables imposent le plus souvent une réduction des doses, voire l’arrêt du traitement. Cela doit être très progressif afin d’éviter des troubles au sevrage.4 Survenant dans 15 à 20 % des cas, ils sont physiques (sueurs, hypotension, douleurs) et psychiques (agitation, anxiété, dépression, manque). L’augmentation compensatrice de L-dopa ne les dissipe pas, ce qui complique la prise en charge. De fortes doses d’AD et un TCI associé exposeraient à un risque plus élevé de survenue de ce syndrome. l
➜ Traitement le plus efficace et le mieux toléré, la L-dopa se complique à long terme de fluctuations motrices et de dyskinésies.
➜ Les effets indésirables des AD les plus fréquents et dangereux sont : somnolence diurne excessive et troubles du contrôle des impulsions.
➜ Les patients doivent être prévenus et ces effets régulièrement dépistés.
➜ Il ne faut pas arrêter brutalement un traitement dopaminergique à cause du risque d’aggravation motrice.
➜ La réduction rapide ou l’arrêt brusque d’un AD exposent à un syndrome de sevrage potentiellement sévère.
➜ Traitement le plus efficace et le mieux toléré, la L-dopa se complique à long terme de fluctuations motrices et de dyskinésies.
➜ Les effets indésirables des AD les plus fréquents et dangereux sont : somnolence diurne excessive et troubles du contrôle des impulsions.
➜ Les patients doivent être prévenus et ces effets régulièrement dépistés.
➜ Il ne faut pas arrêter brutalement un traitement dopaminergique à cause du risque d’aggravation motrice.
➜ La réduction rapide ou l’arrêt brusque d’un AD exposent à un syndrome de sevrage potentiellement sévère.
références
1. Kalia LV, Lang AE. Parkinson’s disease. Lancet 2015;386:896-912.
2. Antonini A, Tolosa E, Mizuna Y, Yamamoto M, Poewe WH. A reassessment of risks and benefits of dopamine agonists in Parkinson’s disease. Lancet Neurol 2009;8:929-37.
3. Weintraub D, Claassen DO. Impulse control and related disorders in Parkinson’s disease. Int Rev Neurobiol 2017;133:679-717
4. Yu XX, Fernandez HH. Dopamine agonist withdrawal syndrome: a comprehensive review. J Neurol Sci 2017;374:53-5.
2. Antonini A, Tolosa E, Mizuna Y, Yamamoto M, Poewe WH. A reassessment of risks and benefits of dopamine agonists in Parkinson’s disease. Lancet Neurol 2009;8:929-37.
3. Weintraub D, Claassen DO. Impulse control and related disorders in Parkinson’s disease. Int Rev Neurobiol 2017;133:679-717
4. Yu XX, Fernandez HH. Dopamine agonist withdrawal syndrome: a comprehensive review. J Neurol Sci 2017;374:53-5.