La schizophrénie est une pathologie du neurodéveloppement de l’adulte jeune qui entraîne un handicap psychique souvent invalidant. Les troubles cognitifs sont au cœur de ce handicap, ils ont pour effet une réduction de l’autonomie et compromettent l’insertion sociale et professionnelle.
Si les traitements pharmacologiques sont la pierre angulaire de la prise en charge en psychiatrie, ils n’apportent qu’une résolution partielle des troubles, avec peu ou pas d’action sur la désorganisation clinique ou sur les symptômes négatifs. Les thérapies psychosociales, et en particulier la remédiation cognitive, peuvent améliorer ces difficultés, si elles sont inscrites dans un parcours de réhabilitation psychosociale. Ce parcours va mettre la personne dans une position d’empowerment, le patient retrouvant le pouvoir d’agir, cette position devant mener au rétablissement.1
Si les traitements pharmacologiques sont la pierre angulaire de la prise en charge en psychiatrie, ils n’apportent qu’une résolution partielle des troubles, avec peu ou pas d’action sur la désorganisation clinique ou sur les symptômes négatifs. Les thérapies psychosociales, et en particulier la remédiation cognitive, peuvent améliorer ces difficultés, si elles sont inscrites dans un parcours de réhabilitation psychosociale. Ce parcours va mettre la personne dans une position d’empowerment, le patient retrouvant le pouvoir d’agir, cette position devant mener au rétablissement.1
Une pathologie de la cognition
Au cours de la schizophrénie, les altérations concernent la plupart des fonctions cognitives, avec des tailles d’effet allant de modéré à large,2 des déficits plus prononcés au niveau de la vitesse de traitement et de la mémoire épisodique ; par ordre de fréquence, les fonctions les plus souvent atteintes concernent l’attention, la mémoire et la planification.
Par ailleurs, il existe aussi des altérations de la cognition sociale3 qui entraînent un isolement et un retrait social très tôt dans la maladie et s’ajoutent aux troubles neurocognitifs.
Par ailleurs, il existe aussi des altérations de la cognition sociale3 qui entraînent un isolement et un retrait social très tôt dans la maladie et s’ajoutent aux troubles neurocognitifs.
Qu’est-ce que la remédiation cognitive ?
C’est un ensemble de techniques inspirées de la neuropsychologie, et de la thérapie comportementale, permettant de réduire le déficit cognitif et de fournir des stratégies pour pallier ce dernier, avec un bénéfice parfois clinique, mais surtout observé sur l’autonomie, l’insertion et la qualité de vie.
Les programmes de remédiation cognitive reposent sur trois principes :
1. la stimulation cognitive avec un nombre massif d’exercices ciblant les fonctions cognitives altérées ;
2. ces programmes doivent être de complexité graduelle ;
3. il faut fournir des stratégies pour résoudre les problèmes complexes : verbalisation des instructions, réduction, simplification, catégorisation de l’information…
Les programmes de remédiation cognitive durent de 3 à 6 mois, avec parfois 2 séances par semaine et souvent des exercices à faire à la maison.
Pour que la remédiation cognitive soit efficace, il est nécessaire de veiller au transfert des acquis sur le quotidien. Dans cette perspective, plusieurs stratégies sont envisagées : exercices qui ciblent directement des gestes de la vie quotidienne, tâches à domicile centrées sur différentes activités journalières, immersion dans des univers virtuels pour apprendre à planifier le quotidien.4
Les programmes de remédiation cognitive reposent sur trois principes :
1. la stimulation cognitive avec un nombre massif d’exercices ciblant les fonctions cognitives altérées ;
2. ces programmes doivent être de complexité graduelle ;
3. il faut fournir des stratégies pour résoudre les problèmes complexes : verbalisation des instructions, réduction, simplification, catégorisation de l’information…
Les programmes de remédiation cognitive durent de 3 à 6 mois, avec parfois 2 séances par semaine et souvent des exercices à faire à la maison.
Pour que la remédiation cognitive soit efficace, il est nécessaire de veiller au transfert des acquis sur le quotidien. Dans cette perspective, plusieurs stratégies sont envisagées : exercices qui ciblent directement des gestes de la vie quotidienne, tâches à domicile centrées sur différentes activités journalières, immersion dans des univers virtuels pour apprendre à planifier le quotidien.4
Évaluation multidisciplinaire, médicale
La remédiation cognitive n’est envisagée qu’après une évaluation multidisciplinaire, médicale, neuropsychologique et fonctionnelle. L’évaluation médicale consiste à vérifier que la personne est stable cliniquement, avec un traitement bien ajusté, qu’elle souhaite s’engager sur un programme relativement long et demandant un réel effort cognitif, avec une esquisse de projet pour une réalisation de soi : retour aux études, reprise d’un travail, stage professionnel ou reprise d'une vie en communauté… La remédiation cognitive ne peut donc s’envisager sans articulation sur la réhabilitation psychosociale. L’évaluation neuropsychologique va établir les compétences et faiblesses de la personne et guider le choix des techniques de remédiation cognitive. Les fonctions explorées : attention, mémoire, fonctions exécutives dans ses trois domaines principaux, à savoir inhibition, flexibilité cognitive et planification, vitesse de traitement, mémoire de travail verbale et visuospatiale, fonctions instrumentales ainsi que les différentes composantes de la cognition sociale (théorie de l’esprit, reconnaissance des émotions, biais attributionnels, empathie…). Enfin, l’évaluation fonctionnelle effectuée par une infirmière ou ergothérapeute va faire le lien entre fonctions cognitives et difficultés au quotidien.
Ces évaluations doivent être envisagées avant et après le programme de remédiation cognitive pour attester l’amélioration de la cognition ; cependant, ce bénéfice devra aussi se maintenir, lors d’une évaluation envisagée 6 mois après la fin de la remédiation cognitive.
Ces évaluations doivent être envisagées avant et après le programme de remédiation cognitive pour attester l’amélioration de la cognition ; cependant, ce bénéfice devra aussi se maintenir, lors d’une évaluation envisagée 6 mois après la fin de la remédiation cognitive.
Remédiation cognitive et parcours personnalisé
Les techniques de remédiation cognitive les plus efficaces doivent être complètement adaptées au profil cognitif du patient : il existe des programmes validés en français, en individuel ou en groupe, par ordinateur, réalité augmentée, ou support papier, neurocognitifs ou de cognition sociale. Cette efficacité est optimisée et amplifiée si la remédiation s’inscrit dans un parcours de réhabilitation : insertion professionnelle, reprise des études, reprise d’une activité professionnelle en milieu ordinaire ou protégé. Le bénéfice cognitif ne persistant que 6 à 8 mois après le programme, la remédiation cognitive est un tremplin pour lancer le patient dans son projet de réhabilitation, survenant dans la foulée. Cela suppose un bon maillage médico-social afin que, dès l’étape d’éligibilité, on ait une idée du projet précis et de l’adressage du patient en fin de programme, pour le préparer au mieux et cibler les exercices en fonction non seulement de son profil cognitif mais aussi du type de ressources cognitives requises pour son projet de réhabilitation.4
Les acquis de la remédiation cognitive
Les méta-analyses montrent un bienfait cognitif incontestable mais modeste. Ce bienfait est potentialisé par un programme d’insertion et de réhabilitation psychosociale.1 Par ailleurs, la remédiation cognitive stimule la neuroplasticité et réactive des zones cérébrales qui avaient été inactivées par la pathologie.5 Doublée d’un accompagnement au travail, elle optimise les chances de trouver rapidement et de se maintenir dans un travail et augmente le nombre d’heures travaillées. Dans le premier épisode de schizophrénie, une équipe américaine montre qu’on épargne par patient 2,79 dollars pour 1 dollar dépensé, à l’aide d’un programme, EpiCenter, combinant éducation thérapeutique, soutien aux familles, prise en charge pour recours aux substances addictives, remédiation cognitive et soutien à l’emploi.6
Indication de la remédiation cognitive et parcours intégratif
Dans la schizophrénie, la remédiation cognitive doit être proposée avant l’éclosion des troubles, chez des sujets à haut risque de développer une psychose et ayant des altérations cognitives. Plus généralement, ces programmes doivent être largement proposés en psychiatrie lors de déficits cognitifs ou de cognition sociale avérés : troubles bipolaires, troubles du spectre de l’autisme…4
Mais toute personne ayant une schizophrénie n’est pas forcément éligible : si la personne n’est pas stable, ou est dans un déni des troubles, alors ce type de programme est impossible à mettre en place. Dans ces conditions, un parcours intégratif et coordonné doit être envisagé : éducation thérapeutique permettant de mieux comprendre sa maladie et les types de traitements administrés, entretiens motivationnels, afin de faire émerger une demande, gestion du stress au préalable dans des parcours de thérapie comportementale et cognitive, aide aux aidants pour mieux soutenir le patient, activité physique adaptée, yoga ou relaxation pour un abord corporel et une réduction du stress psychologique, avant remédiation cognitive... dans la coconstruction du projet d’insertion avec le patient.4
Mais toute personne ayant une schizophrénie n’est pas forcément éligible : si la personne n’est pas stable, ou est dans un déni des troubles, alors ce type de programme est impossible à mettre en place. Dans ces conditions, un parcours intégratif et coordonné doit être envisagé : éducation thérapeutique permettant de mieux comprendre sa maladie et les types de traitements administrés, entretiens motivationnels, afin de faire émerger une demande, gestion du stress au préalable dans des parcours de thérapie comportementale et cognitive, aide aux aidants pour mieux soutenir le patient, activité physique adaptée, yoga ou relaxation pour un abord corporel et une réduction du stress psychologique, avant remédiation cognitive... dans la coconstruction du projet d’insertion avec le patient.4
Une révolution
Les thérapies psychosociales actuelles constituent une révolution dans la prise en charge des troubles psychiatriques et vont sans nul doute modifier le paysage de la psychiatrie dans les années à venir, réduisant les rechutes, transformant la notion de handicap psychique et l’insertion des patients dans la communauté et dans la citoyenneté. Par ailleurs, elles remettent au premier plan les altérations de la cognition dans les maladies psychiatriques et sont un retour à la neuropsychiatrie dans toutes les composantes du neurodéveloppement.
Références
1. Franck N. Traité de réhabilitation psychosociale. Issy-les-Moulineaux : Elsevier Masson, 2018.
2. Schaefer J, Giangrande E, Weinberger DR, Dickinson D. The global cognitive impairment in schizophrenia: consistent over decades and around the world. Schiz Res 2013;150:42-50.
3. Fett AK, Viechtbauer W, Dominguez MD, Penn DL, van Os J, Krabbendam L. The relationship between neurocognition and social cognition with functional outcomes in schizophrenia: a meta-analysis. Neurosci Biobehav Rev 2011;35:573-88.
4. Amado I. Mise en œuvre de pratiques innovantes en réhabilitation en Île-de-France : des interventions personnalisées pour des modèles de créations intersectorielles de réhabilitation. L’information psychiatrique 2019;95;475-81.
5. Penadés R, González-Rodríguez A, Catalán R, Segura B, Bernardo M, Junqué C. Neuroimaging studies of cognitive remediation in schizophrenia: a systematic and critical review. World J Psychiatry 2017;7:34-43.
6. Amado I. Coûts et rapport investissement/bénéfices. In : Franck N. La remédiation cognitive (ch. 24), Issy-les-Moulineaux : Elsevier Masson, 2017.
2. Schaefer J, Giangrande E, Weinberger DR, Dickinson D. The global cognitive impairment in schizophrenia: consistent over decades and around the world. Schiz Res 2013;150:42-50.
3. Fett AK, Viechtbauer W, Dominguez MD, Penn DL, van Os J, Krabbendam L. The relationship between neurocognition and social cognition with functional outcomes in schizophrenia: a meta-analysis. Neurosci Biobehav Rev 2011;35:573-88.
4. Amado I. Mise en œuvre de pratiques innovantes en réhabilitation en Île-de-France : des interventions personnalisées pour des modèles de créations intersectorielles de réhabilitation. L’information psychiatrique 2019;95;475-81.
5. Penadés R, González-Rodríguez A, Catalán R, Segura B, Bernardo M, Junqué C. Neuroimaging studies of cognitive remediation in schizophrenia: a systematic and critical review. World J Psychiatry 2017;7:34-43.
6. Amado I. Coûts et rapport investissement/bénéfices. In : Franck N. La remédiation cognitive (ch. 24), Issy-les-Moulineaux : Elsevier Masson, 2017.