Pour la première fois, une étude publiée dans Brain montre que les symptômes de la maladie d’Alzheimer peuvent être transférés à un organisme en bonne santé via les bactéries intestinales.Neurodégénérescence démarrant dans l’hippocampe, la maladie d’Alzheimer touchait près de 900 000 personnes en France en 2019. Ses causes sont multiples et complexes, mêlant facteurs génétiques et environnementaux. Depuis quelques années, le microbiote intestinal émerge comme un facteur clé d’augmentation de la susceptibilité à cette maladie neurodégénérative, et plusieurs études ont mis en évidence des altérations spécifiques dans la composition du microbiote chez des patients qui en sont atteints. Cependant, l’existence d’un lien causal entre le microbiote intestinal et les symptômes cognitifs de la maladie d’Alzheimer reste à établir. Un article paru en octobre dans Brain vient d’apporter une première pierre à cette hypothèse.Dans cette étude, une équipe internationale de chercheurs a transplanté dans l’intestin de jeunes rats adultes sains soit le microbiote fécal de quatre patients atteints de la maladie d’Alzheimer (n = 16 rats transplantés), soit celui de quatre sujets sains d’âge similaire (n = 16 rats transplantés). Le microbiote intestinal des rats avait été préalablement éliminé par l’administration pendant une semaine d’eau autoclavée contenant un cocktail d’antibiotiques.Dix jours après l’inoculation du microbiote fécal humain, les rats transplantés ont subi différents tests cognitifs dont le labyrinthe de Morris, test comportemental connu pour être associé à la production de nouveaux neurones dans l’hippocampe chez l’adulte. Lors de ces tests, les rats transplantés avec le microbiote des patients Alzheimer ont montré un déclin cognitif significatif par rapport aux rats transplantés avec le microbiote des sujets humains sains.En outre, six semaines après transplantation, les rats du premier groupe ont une survie réduite des nouveaux neurones du gyrus denté, une portion du cerveau faisant partie de la formation hippocampique. « Nos résultats révèlent pour la première fois que les symptômes de la maladie d’Alzheimer peuvent être transférés à un organisme jeune et sain via le microbiote intestinal, confirmant son rôle causal dans cette maladie », concluent les auteurs.Si ces résultats sont confirmés, ils pourraient ouvrir la voie à de nouveaux traitements capables de cibler spécifiquement le microbiote afin de ralentir ou prévenir le déclin cognitif.

Références
BRAIN 2023:AWAD303. Grabrucker S, Marizzoni M, Silajdžić E, et al.Microbiota from Alzheimer’s patients induce deficits in cognition and hippocampal neurogenesis.PMID : 37849234