La coqueluche est de retour en France. Santé publique France, le CNR et la DGS alertent sur une hausse marquée de la circulation depuis début 2024, qui devrait s’amplifier cet été (recrudescence saisonnière de la coqueluche et Jeux Olympiques). Les recos de la DGS pour renforcer la prévention et la CAT en cas de suspicion.

Une reprise intense de la circulation de la coqueluche

La coqueluche est une infection bactérienne très contagieuse dont la transmission se fait principalement dans la famille ou en collectivités.

Même si le nombre de cas a fortement diminué depuis l’introduction du vaccin, la bactérie continue de circuler. Une résurgence est observée dans plusieurs pays européens, comme l’ont rapporté l’ECDC récemment et Santé publique France. Des épidémies importantes sont en cours en Croatie, au Danemark et au Royaume-Uni, et des hausses significatives en Belgique, Espagne et Allemagne. Le nombre de cas rapportés par l’ECDC sur les 3 premiers mois de l’année 2024 est déjà supérieur à celui de toute l’année 2023 : 32 037 cas entre le 1er janvier et le 31 mars 2024 contre 25 130 en 2023. 

La coqueluche évolue par cycles de recrudescence tous les 3 à 5 ans. Selon les données de surveillance du réseau hospitalier de surveillance RENACOQ, le dernier pic en France a eu lieu en 2017 - 2018, avec 162 cas rapportés. Depuis, le nombre de cas n’a cessé de diminuer pour atteindre 34 cas en 2022, 4 en 2021, 45 en 2022 et 39 en 2023.

Si une recrudescence était donc attendue, le Centre national de référence de la coqueluche et autres bordetelloses la juge « particulièrement intense » (fig. 1), avec plusieurs cas de coqueluche grave chez des nourrissons nécessitant une prise en charge en réanimation. 

Aussi, les données du réseau OSCOUR et de SOS médecins montrent une très forte hausse avec un nombre de passages aux urgences, d’hospitalisations après passage aux urgences et d’actes SOS médecins pour coqueluche (figures). 

Par ailleurs, deux souches résistantes aux macrolides (azithromycine, clarithromycine) ont été identifiées en France en février et avril 2024, alors qu’une seule souche résistante avait été identifiée jusqu'à présent, en 2011. La résistance de B. pertussis à ces antibiotiques est très élevée dans les régions asiatiques (particulièrement en Chine), mais reste rare en dehors de cette zone.

La prévention avant tout : recos pour les MG

En prévision de la période estivale de recrudescence saisonnière de la coqueluche et des grands rassemblements prévus cet été (Jeux olympiques et paralympiques), la DGS rappelle l’importance de vacciner votre patientèle et particulièrement les femmes enceintes, chez qui la couverture vaccinale est insuffisante, pour protéger les nouveau-nés et jeunes nourrissons qui n’ont pas encore eu le temps d’être vaccinés et qui font les formes les plus graves voire mortelles de coqueluche. 

La politique vaccinale repose sur des stratégies complémentaires :

  • la vaccination des femmes enceintes, dès le second trimestre de grossesse, en privilégiant la période entre 20 et 36 SA ;
  • à défaut, la vaccination de la mère en post-partum et des personnes susceptibles d’être en contact étroit avec le nourrisson durant ses 6 premiers mois de vie (stratégie dite du cocooning)
  • la primovaccination précoce des nourrissons à partir de l’âge de 2 mois (schéma 2 puis 4 mois, puis rappel à 11 mois avec les vaccins combinés hexavalents). Ce schéma ne doit pas être différé.
  • l’administration des rappels à 6 ans, 11 - 13 ans et jusqu’à l’âge adulte (25 ans avec possibilité de rattrapage jusqu’à 39 ans) ;
  • attention : chez les professionnels de santé et de la petite enfance, les rappels à 25, 45 et 65 ans doivent désormais comporter la valence coquelucheuse (dTPca) ;
  • la vaccination est fortement recommandée chez les personnes immunodéprimées, les personnes travaillant en contact étroit et répété avec les nourrissons de moins de 6 mois, les étudiants des filières médicales et paramédicales, les assistants maternels et les personnes effectuant régulièrement du baby-sitting .

Par ailleurs, comme pour toute épidémie d’infections respiratoires, la DGS rappelle que le port du masque est fortement recommandé à toutes les personnes ayant les symptômes d’une infection des voies respiratoires (rhume, maux de gorge, toux, fièvre). Par ailleurs, afin de réduire le risque de diffusion au sein de la population, le port du masque est recommandé chez les professionnels de santé travaillant en contact avec des populations vulnérables. 

Quand évoquer une coqueluche ?

La coqueluche est un diagnostic différentiel d’une bronchite aiguë, notamment en cas de persistance de la toux pendant plus de 7 jours après le début des symptômes.

Certains éléments, bien qu’inconstants, sont évocateurs :

  • absence de fièvre, contrastant avec les bronchites à germes standard ou virales ;
  • toux précédée d’une phase catarrhale, avec rhinite et éternuements ;
  • phase quinteuse ensuite ; la toux est alors paroxystique, survenant en quinte avec recrudescence nocturne accompagnée de difficultés de reprise inspiratoire. Elle peut être également émétisante ;
  • la phase finale est dite de résolution, avec diminution progressive de la fréquence et de la sévérité des quintes. L’hyperréactivité bronchique résiduelle peut durer plusieurs mois et mime volontiers un asthme.

L’interrogatoire doit systématiquement rechercher la notion de vaccination et de contage. Chez un adulte vacciné ou anciennement infecté, le tableau est souvent atypique et atténué.

En cas de suspicion de coqueluche, une confirmation biologique est requise.

Le choix du test diagnostique dépend de l’ancienneté des symptômes (figure 2). L’examen de référence est la PCR Bordetella qui est sensible et spécifique : il s’agit de l’examen de choix en cas de symptômes présents depuis moins de 21 jours. Le prélèvement est obtenu par aspiration ou plus pratiquement par écouvillonnage nasopharyngé. Par ailleurs, dans les 15 premiers jours de la toux, en plus de la PCR spécifique, une culture sur milieu spécifique peut être réalisée pour augmenter la rentabilité diagnostique.

Au-delà des trois premières semaines, la sensibilité du test PCR diminue et il n’est plus recommandé. Le diagnostic est alors essentiellement clinique, le test sérologique Bordetella n’étant plus indiqué ni remboursé.

Quelle conduite à tenir ? Quand déclarer ?

La coqueluche n’est pas une maladie à déclaration obligatoire mais les cas sont à signaler à l’ARS dans deux situations spécifiques :

  • en cas d’infections nosocomiales ;
  • lors de la survenue de cas groupés (à partir de 2 cas) qu’ils soient intrafamiliaux ou en collectivités.

Le traitement repose sur les macrolides, comme l’azithromycine ou la clarithromycine, qui permettent d’écourter la symptomatologie et de réduire la contagiosité.

Par ailleurs, la mise en œuvre des mesures vis-à-vis du cas et de son entourage a été rappelée dans l’avis du HCSP du 18 novembre 2022, en particulier pour les personnes à risque (immunodéprimés, femmes enceintes) et dans des collectivités à risque : 

  • mise en place de mesures barrières (lavage des mains et port du masque),
  • mise en œuvre d’un traitement antibiotique (macrolides),
  • éviction du cas pendant sa période de contagiosité (3 semaines après le début des symptômes si aucun traitement antibiotique adapté n’a été prescrit ou jusqu’au 3e ou 5e jour du traitement selon l’antibiotique choisi),
  • mise à jour de la vaccination de la population exposée, avec un vaccin contenant la valence coquelucheuse (dTPca),
  • antibioprophylaxie des sujets contacts proches non protégés par la vaccination (enfants non ou incomplètement vaccinés selon l’âge, ou dont la dernière dose date de plus de 5 ans, adultes non vaccinés ou dont la vaccination remonte à plus de 5 ans) et des contacts occasionnels à risque de forme grave et non protégés par la vaccination.

Pour en savoir plus
Santé publique France. Résurgence de la coqueluche en France : les mesures de prévention sont essentielles pour éviter des cas graves et des décès chez les nourrissons. 7 juin 2024.
Institut Pasteur. Coqueluche et autres bordetelloses. 5 mars 2024.
Santé publique France. Recrudescence de la coqueluche en Europe, appel à une vigilance renforcée en France. 18 avril 2024.
HCSP. Conduite à tenir autour d’un ou plusieurs cas de coqueluche. 5 janvier 2023.
Pour toute information complémentaire, conseils cliniques ou microbiologiques, vous pouvez contacter le CNR : coqueluche@pasteur.fr.

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