Les causes de cette hypopigmentation acquise de la peau, de mécanisme auto-immun, ne sont pas bien connues, ainsi que le rôle des facteurs déclenchants environnementaux. Des recherches récentes menées par l’Inserm donnent une piste intéressante pouvant aboutir à des conseils de prévention…

Le vitiligo est une maladie auto-immune de la peau caractérisée par la perte de mélanocytes qui engendre des dépigmentations (macules blanches arrondies bien limitées et non prurigineuses). Sa prévalence mondiale est estimée à 0,5 %. Bénigne, elle peut néanmoins avoir d’importantes répercussions psychologiques pour les patients atteints.

Si ses mécanismes biologiques sont de mieux en mieux connus – impliquant notamment les lymphocytes T CD8 –, ses causes restent à élucider. Dans certains cas, la maladie peut être déclenchée par un stress (mécanique, physiologique ou psychologique), mais des facteurs environnementaux, encore mal connus, peuvent aussi jouer un rôle. L’exposition aux acariens pourrait-elle être un de ces facteurs ? C’est ce que suggère une étude récente menée par une équipe Inserm et publiée dans le British Journal of Dermatology .

Ces arachnides microscopiques pouvant engendrer des allergies, les chercheurs se sont demandé s’ils pouvaient être en lien avec les mécanismes immunitaires impliqués dans le vitiligo. Cette hypothèse a été renforcée par le fait que les acariens produisent un grand nombre de protéases (enzymes protéolytiques) ; or la perte des mélanocytes observée dans cette pathologie passe par la destruction des E‑cadhérines (protéines qui permettent l’adhérence entre les cellules).

Pour étudier l’effet d’une exposition aux acariens sur l’immunité cutanée et le détachement des mélanocytes, les auteurs ont donc prélevé des échantillons d’épiderme à des patients atteints de vitiligo et à des volontaires non atteints, qu’ils ont exposés à des acariens. Ils ont constaté, dans tous les échantillons, une augmentation dose-dépendante de la sécrétion de chimiokines et cytokines et de la concentration en protéases. En particulier, « les analyses moléculaires ont confirmé qu’une protéase d’acarien appelée Der p1 détruit la E‑cadhérine dans l’épiderme et provoque le détachement des mélanocytes », explique Méri Tulic, dernière auteure de l’étude. Or ce phénomène était environ cent fois plus important dans les échantillons issus de patients atteints de vitiligo que dans ceux des volontaires non atteints. Cela suggère une prédisposition de ces peaux aux effets délétères de l’exposition aux acariens, en raison peut-être de « jonctions cellulaires plus fragiles au niveau de l’épiderme et un système immunitaire plus réactif  », d’après la chercheuse.

Les acariens pourraient donc être un facteur environnemental contribuant à induire des poussées de vitiligo et à aggraver la maladie. À la suite de ces résultats, les chercheurs ont voulu tester un moyen de protéger l’épiderme contre ces effets : l’application (in vitro et ex vivo), sur des échantillons de peau préalablement exposées à des acariens, d’une crème à base de céramides (lipides naturellement présents dans l’épiderme et assurant la cohésion de ses cellules et le fonctionnement normal de la barrière cutanée). Ce procédé a permis de réduire significativement l’inflammation et la perte des mélanocytes induites par les acariens. Une éventuelle piste de prévention du vitiligo, à suivre…

Pour en savoir plus
Inserm. Les acariens suspectés d’induire le vitiligo chez certains patients.  28 septembre 2023.