Les addictions au tabac et à l’alcool sont la cause, chaque année, de 125 000 décès prématurés en France. Il s’agit de facteurs de risque évitables connus comme les plus importants, sur lesquels doivent se concentrer les politiques de santé publique. La perspective historique est indispensable pour comprendre les relations complexes qui existent entre ces deux toxiques et les sociétés modernes (pour l’alcool, se souvenir de son origine arabe « Al Khol » signifiant « ce qui est très subtil » …, du rôle des croisades qui ramenèrent les alambics ; pour le tabac se rappeler qu’il fut introduit par Christophe Colomb et transformé en produit « noble » par Jean Nicot ; importance, au fil du temps, des lois Veil, Evin, du décret Bertrand). Dans les dernières décennies, des efforts ont été faits pour lutter contre le fléau de l’alcoolisme et de l’addiction au tabac. Ces efforts ont sûrement été insuffisants, ils n’en ont pas moins été efficaces : les consommations ont sensiblement diminué.
Depuis 20 ans, de nouvelles formes d’addiction apparaissent dans les classifications, en particulier relevant du champ des addictions dites comportementales. Cette donnée, ajoutée à l’épidémie désastreuse actuelle de mésusage de médicaments antalgiques en Amérique du Nord, pourrait faire penser que les addictions seront le problème du XXIe siècle. Rien ne permet cependant de l’affirmer aujourd’hui. Le tabac et l’alcool, drogues licites, demeurent les produits les plus dommageables sur le plan populationnel. Il est important d’aborder le problème des addictions dans un esprit de modernité et de « maîtrise de soi », en évaluant avec une juste mesure des comportements qui ne sont pas toujours les plus favorables…Bruno Falissard, Observatoire français des drogues et toxicomanies, Académie nationale de médecine
2 mars 2021