Les épisodes de prolifération massive de cyanobactéries dans les lacs, les étangs et certains cours d’eau – de plus en plus fréquents – ont des conséquences écologiques, sanitaires et économiques. Quels sont les voies d’exposition et les risques pour la santé ? Comment les prévenir ? Comment éviter les intoxications ?

Cyanobactéries : de quoi parle-t-on ?

Présentes sur Terre depuis deux à trois milliards d’années, les cyanobactéries sont des micro-organismes qui se développent dans les milieux terrestres et aquatiques, dans les eaux douces comme dans les eaux salées.

Lorsque les conditions environnementales – température, nutriments – leur sont favorables, elles peuvent proliférer de manière massive et rapide, parfois en quelques jours seulement (efflorescence). Dans certains cas, cela provoque un changement de couleur de l’eau (rouge, vert, etc.), une odeur nauséabonde et/ou l’accumulation de cyanobactéries à la surface de l’eau.

Certaines espèces produisent des toxines : microcystines, nodularines, cylindrospermopsines, anatoxines, saxitoxines...

Selon leur mode de vie, les cyanobactéries se divisent en deux groupes :

  • les planctoniques se maintiennent en suspension dans la colonne d’eau grâce à des vésicules gazeuses intracellulaires qui leur confèrent des propriétés de flottabilité ;
  • les benthiques se développent au fond des cours d’eau, sur des substrats minéraux (blocs, galets, sable, sédiment, etc.) ou sur des plantes aquatiques.

En France, les cyanobactéries prolifèrent entre le mois de mai et le mois d’octobre, dans des eaux calmes et riches en nutriments comme les lacs, les étangs et certains cours d’eau.

Sous les climats tropicaux et subtropicaux, les proliférations peuvent être observées toute l’année.

Quelles conséquences ?

La prolifération massive de cyanobactéries devient une préoccupation internationale croissante. En effet, elle peut :

  • affecter la santé des écosystèmes, conduisant à une désoxygénation de l’eau, entraînant une mortalité massive de poissons et d’invertébrés ;
  • via la production de cyanotoxines, représenter un risque pour la santé des humains et des animaux qui consomment de l’eau contaminée, qui sont en contact direct (baignade, activités nautiques) ou indirect (consommation de denrées animales ou végétales contaminées) avec l’eau contaminée ;
  • conduire à une limitation des usages aquatiques tels que la baignade, le nautisme ou la pêche, liée à l’aspect repoussant des plans d’eau.

Dans certains cas extrêmement rares à ce jour, l’inhalation ou l’ingestion accidentelle de cyanobactéries peut être mortelle. Au Brésil, en 1996, 60 personnes atteintes d’insuffisance rénale sont décédées après une hémodialyse ayant utilisé de l’eau contaminée par des microcystines.

En France, à cette date, aucune intoxication humaine létale associée aux cyanotoxines n’a été enregistrée, mais des décès de chiens y sont régulièrement attribués depuis 2005.

Quelles sont les voies d’exposition et les risques pour la santé ?

Les cas d’intoxication humaine sont plus rares que les intoxications animales, notamment en raison de la maîtrise du risque d’exposition (contrôle sanitaire des eaux destinées à la consommation humaine et des sites de baignade). Toutefois, l’exposition humaine aux cyanotoxines est possible par différentes voies dont les principales sont :

  • l’ingestion d’eau potable mal traitée ou d’eau non traitée (en particulier dans les pays du Sud) ;
  • l’inhalation, l’ingestion accidentelle d’eau ou le contact cutané avec des cyanobactéries et des cyanotoxines lors d’activités récréatives (aviron, ski nautique, canoë…) ;
  • la consommation de denrées végétales contaminées par l’eau d’irrigation ;
  • la consommation de denrées animales (poissons) provenant d’eaux contaminées ;
  • la prise orale de compléments alimentaires contaminés ;
  • la voie intraveineuse (hémodialyse).

Les symptômes les plus fréquents sont : signes gastro-intestinaux, états fébriles et irritations cutanées. L’ingestion ou l’inhalation de cyanobactéries peut également provoquer des toxicités hépatiques et des neurotoxicités (tremblement, fourmillement, paralysie, etc.). Les délais d’apparition des symptômes varient de quelques minutes à quelques heures pour les symptômes cutanés et les troubles neurologiques, à plusieurs heures pour les manifestations hépatiques.

En France, 95 cas d’intoxication humaine ont été recensés par les centres antipoison entre le 1er janvier 2006 et le 31 décembre 2018. Ce nombre est probablement très sous-estimé du fait d’un manque de connaissance de ce phénomène et de symptômes peu spécifiques.

Comment prévenir leur prolifération ?

Pour se développer, les cyanobactéries ont besoin de concentrations élevées en phosphore et en azote dont les apports peuvent avoir des origines multiples : effluents d’élevage, compost, boues de station de traitement des eaux usées, engrais épandus sur les sols, rejets d’eaux usées insuffisamment traités, lessivage des sols lors d’épisodes pluvieux importants.

La réduction des apports de phosphore et d’azote dans les eaux de surface reste aujourd’hui la seule façon durable de protéger et/ou de restaurer ces écosystèmes vis-à-vis de leur prolifération.

Comment éviter des intoxications ?

Dans les zones de développement et d’accumulation de cyanobactéries, il est recommandé de :

  • éviter les activités nautiques (baignade, ski nautique, aviron, canoë, paddle…) ;
  • surveiller les jeunes enfants pour éviter que ceux-ci jouent avec les amas de cyanobactéries accumulés en surface, sur les rives, les pierres et les cailloux en bordure de plans d’eau et de cours d’eau ;
  • tenir les chiens en laisse pour ne pas les laisser accéder aux plans et cours d’eau ;
  • en cas d’apparition de signes cliniques suspects (gastro-entérite, démangeaisons, rougeurs, conjonctivite, vertiges,) après baignade ou activité nautique, prendre une douche et consulter son médecin.

De manière générale, concernant la consommation des poissons d’eau douce :

  • étêter et éviscérer les poissons avant de les consommer (ou avant de les congeler) ;
  • ne pas consommer entiers les petits poissons d’eau douce (fritures) ;
  • limiter au maximum la consommation de poissons en provenance de milieux régulièrement concernés par des proliférations de cyanobactéries.

Pour en savoir plus
Anses. Les cyanobactéries en questions. 23 septembre 2020.

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