Le mésusage des inhibiteurs de la pompe à protons (IPP) concernerait entre 40 et 80 % des patients, selon une enquête de l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) de 2015 et une étude de l’Assurance maladie de 2019. Ces médicaments sont aujourd’hui consommés par environ un quart des Français (16 millions de patients), avec un volume en augmentation au cours des 5 dernières années. La Haute Autorité de santé (HAS) recadre la prescription des IPP et réévalue leur place dans la stratégie thérapeutique.

 

Conclusion : elle maintient son avis favorable pour leur remboursement, sans restriction de durée, dans les indications de son autorisation de mise sur le marché (AMM), à savoir : 

– le traitement du reflux gastro-œsophagien (RGO) et de l’œsophagite par RGO ; 

– le traitement des lésions gastroduodénales dues aux anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) ;

– la prévention des lésions gastroduodénales dues aux AINS chez les patients à risque (âge > 65 ans, ou antécédents d’ulcère gastroduodénal, ou traitement par antiagrégant plaquettaire, anticoagulant ou corticoïdes) ;

– l’éradication d’Helicobacter pylori et le traitement des ulcères gastroduodénaux.

Mais elle juge indispensable de changer les pratiques des professionnels et les habitudes des patients pour éviter une utilisation injustifiée : elle estime urgent de favoriser une prescription raisonnée et d’engager une dynamique de « déprescription » de ces médicaments.

Leur mésusage concerne principalement les 3 situations suivantes :

– en prévention des lésions gastroduodénales dues aux AINS chez des patients non à risque de complications gastroduodénales (l’ANSM a estimé que cet usage injustifié concernait 80 % des patients ayant débuté un traitement en association systématique avec un AINS) ;

– une durée de prescription dans le traitement du RGO trop longue : la durée initiale doit être de 8 semaines maximum ; une réévaluation régulière de la poursuite du traitement est ensuite nécessaire, en tenant compte du soulagement obtenu chez le patient, du profil de tolérance et des résultats des examens complémentaires (après les 8 semaines la posologie est éventuellement réduite, et une fibroscopie est nécessaire si les symptômes persistent) ;

– une prescription trop fréquente chez les personnes les plus âgées, les nourrissons et les jeunes enfants : dans le premier cas, la pertinence doit être évaluée, notamment en cas de traitement prolongé, en raison des risques d’effets indésirables et d’interactions médicamenteuses ; dans le second cas, les IPP sont rarement justifiés et ne sont pas utiles en cas de régurgitation non compliquée.

HAS. Les IPP restent utiles mais doivent être moins et mieux prescrits. Communiqué de presse du 12 novembre 2020.

À lire sur ce sujet

Macaigne G. IPP : pas sans danger ? Rev Prat Med Gen 2018;32:830-1.

Les IPP sont-ils dangeureux ? Entretien vidéo avec le Dr Gilles Maccaigne (Journées nationales de médecine générale, 2019).

Zerbib F. IPP : modalités de prescription (aide à la décision). Rev Prat Med Gen 2020;34:185-6.

L.M.A., La Revue du Praticien