Les infections sexuellement transmissibles (IST) concernent plusieurs millions de personnes chaque année. Aujourd’hui, elles restent toujours au centre des préoccupations. L’émergence des résistances, en particulier pour le gonocoque mais aussi pour le Mycoplasma genitalium, complexifie la prise en charge antibiotique.
Le développement de la prophylaxie pré-exposition (PreP) au virus de l’immunodéficience humaine (VIH) permet de réduire l’incidence de ce virus, mais laisse entrevoir une augmentation de l’incidence des autres IST devant l’arrêt de l’utilisation du préservatif. La gravité de la symptomatologie et du pronostic dépendra du type d’IST acquise.
Les principaux facteurs de risque d’IST sont : le multipartenariat (au moins 2 dans l’année), le changement de partenaire récent, une IST chez un partenaire, un antécédent d’IST, une autre IST active, l’homosexualité masculine, la prostitution et les violences sexuelles.
Chlamydia trachomatis est une bactérie intracellulaire. Elle est très souvent asymptomatique, mais peut entraîner des urétrites et des cervicites dans la semaine suivant le rapport à risque. Elles peuvent se compliquer de prostatite et d’épididymite chez l’homme, d’endométrite, de salpingite, de pelvipéritonite et d’infertilité chez la femme. Son dépistage doit être systématique chez les femmes sexuellement actives de 15 à 25 ans, y compris pendant la grossesse. Le dépistage est ciblé chez les hommes sexuellement actifs et femmes de plus de 25 ans avec des facteurs de risque, et chez les femmes consultant pour une interruption volontaire de grossesse (IVG). Le diagnostic repose sur une PCR/TAAN réalisée lors d’un auto-écouvillon vaginal ou un premier jet d’urine. La sérologie n’a pas d’intérêt. Le traitement consiste en 7 jours de doxycycline 100 mg 2 fois/j per os ou par azithromycine 1 g en dose unique per os en cas de crainte de non-observance. Un contrôle des sites atteints (vaginal, urétral, pharyngé, anal) est préconisé 3 à 6 mois plus tard.
L’urétrite à Neisseria gonorrheae ou gonocoque, encore appelée « chaude-pisse » est à l’origine d’un écoulement purulent caractéristique du méat urinaire chez l’homme dans les 2 à 7 jours après le rapport à risque. Cependant, de nombreuses formes sont asymptomatiques en particulier en dehors de l’urètre. Complications et diagnostic paraclinique sont similaires à ceux de Chlamydia trachomatis. En revanche, une culture en parallèle de la PCR est nécessaire à la recherche de résistances antibiotiques à cette bactérie. Son traitement repose sur la ceftriaxone 1 g IM ou IV en dose unique ; si contre-indication aux bêtalactamines : antibiothérapie guidée par l’antibiogramme (HAS, 2024)*. Un contrôle clinique à J7 est nécessaire.
Le Treponema pallidum est à l’origine de la syphilis. Toute ulcération des muqueuses doit faire suspecter un chancre syphilitique même si elle ne répond pas totalement à la description traditionnelle de celui-ci (circonscrit, unique, à fond propre, indolore et induré). Il définit la phase primaire qui apparaît en moyenne 21 jours (mais parfois jusqu’à 3 mois) après le rapport sexuel à risque. La phase secondaire est caractérisée par la roséole (1re floraison) passant souvent inaperçue, puis par l’apparition de syphilides (2e floraison). Ces syphilides peuvent mimer de très nombreuses autres pathologies dermatologiques, ce qui vaut à la syphilis d’être surnommée « la grande simulatrice », nécessitant de proposer une sérologie syphilitique au moindre doute. Le diagnostic de syphilis repose sur la positivité d’un test tréponémique (ELISA, EIA, TPHA…) et d’un test non tréponémique (VDRL, RPR). La syphilis latente se définit par la découverte d’une sérologie syphilitique positive sans lésion clinique. La date du rapport à risque, la mention d’un chancre ayant guéri, la preuve éventuelle d’une sérologie antérieure négative, permettront de définir le caractère précoce (< 1 an) ou tardif (> 1 an). Le traitement est la benzathine pénicilline G, 1 injection intramusculaire de 2,4 millions d’unités en dose unique en cas de syphilis précoce ; en cas d’incertitude (syphilis latente indatable) ou de certitude d’une évolution supérieure à 1 an, ce traitement sera renouvelé une et deux semaines après la première injection. En cas de contre-indication, la doxycycline 200 mg pendant 14 jours est proposée en cas de syphilis précoce, pendant 28 jours en cas de syphilis tardive. La surveillance de la syphilis après traitement repose sur la décroissance du test non tréponémique (VDRL, RPR). Sa guérison est définie par une division d’un facteur 4 en 6 mois de ce dernier.
Une quarantaine de papillomavirus humains se distinguent au niveau génital en HPV à haut risque oncogène (HPV 16, 18, 31, 33, 35 et 45) à l’origine de carcinomes épidermoïdes du col de l’utérus, de l’anus, des muqueuses génitales et du pharynx et ceux à faible risque oncogène (6 et 11 principalement) à l’origine des condylomes. Le diagnostic de condylome est clinique, celui des néoplasies intra-épithéliales et des carcinomes reste anatomopathologique. Deux frottis cervico-vaginaux à 1 an d’intervalle puis tous les 3 ans s’ils sont normaux sont recommandés désormais entre 25 et 30 ans chez les femmes. Entre 30 et 65 ans, un test HPV est réalisé tous les 5 ans. S’il est positif, alors il faudra réaliser un frottis cervico-vaginal. Si ce dernier est positif, une colposcopie sera effectuée, sinon un nouveau test HPV sera réalisé 1 an plus tard. L’immunodépression augmente l’incidence des infections à HPV, leur récurrence et leur gravité. Différents traitements employés par le médecin (chirurgie, électrochirurgie, laser CO2, acide trichloro-acétique, cryothérapie) ou auto-administrés par le patient (imiquimod, podophyllotoxine) sont proposés pour les condylomes. Une plus ample couverture vaccinale contre HPV permettra une large réduction de ces infections et cancers induits.
Le Trichomonas vaginalis est un parasite strictement humain dont le réservoir naturel est le vagin. Il est asymptomatique chez l’homme et symptomatique dans 15-20 % des cas chez la femme. Elles rapportent alors un prurit intense avec dyspareunie, urétrite et leucorrhées abondantes malodorantes. La culture est la technique de référence, même si la PCR est en pleine expansion sous forme d’association avec d’autres IST. Le traitement repose sur l’utilisation du métronidazole ou le secnidazole 2 g en dose unique.
Les IST regroupent également les infections par le VIH et Herpes simplex virus (HSV), les hépatites A, B et C, les ectoparasitoses (à Phtirius pubis et Sarcoptes scabei) et les infections à mycoplasmes (Mycoplasma genitalium, et selon les conditions, Ureaplasma spp).
Enfin, il reste important de retenir les 3 dogmes essentiels dans la prise en charge des IST :
- toute découverte d’une IST invite à dépister les autres IST ;
- toute découverte d’une IST chez un patient nécessite le dépistage des cas contacts ;
- en raison du risque de ne pas revoir le patient à sa consultation de remise de résultat, une forte suspicion d’IST incite à réaliser un traitement probabiliste.•
* La version numérique de cet article a été mise à jour en juillet 2024 avec des changements dans le traitement des infections à N. gonorrhoeae.