Depuis que l’OMS a classé, le 10 mai, le variant B.1.617 (dit « indien ») comme un variant préoccupant du fait de sa plus grande contagiosité, les interrogations sur un possible échappement aux vaccins se font pressantes, d’autant plus que cette souche représenterait aujourd’hui près de 10 % des contaminations au Royaume-Uni. Deux nouvelles études montrent des résultats encourageants…

 

La première étude a comparé les capacités neutralisantes du sérum de patients convalescents infectés par la souche dite « sauvage », d’une part, et du sérum des patients vaccinés par Pfizer et Moderna, d’autre part, contre des pseudovirus munis des mutations de la protéine Spike propres aux deux sous-types du variant indien (B.1.617 et B.1.618). Ces deux sous-types ont montré une résistance partielle contre les anticorps neutralisants du sérum de patients convalescents (augmentée d’un facteur 2,3 et 2,5 respectivement) : une résistance similaire à celle qui avait été observée pour le variant sud-africain B.1.351, et attribuée aux mutations L452R et E484Q pour B.1.617 et à la mutation E484K pour B.1.618 (une mutation qu’il partage justement avec le variant sud-africain, mais aussi brésilien [P.1]).

Quant à la réponse des anticorps neutralisants issus des sérums de patients vaccinés, le même profil de résistance que pour le sérum de patients convalescents a été décelé : B.1.617 montrait une résistance 4 fois plus importante et B.1.618 une résistance 2,7 fois plus importante (avec toutefois des titres d’anticorps 5 fois plus importants globalement chez les sujets vaccinés par rapport aux patients convalescents). Somme toute, une résistante modérée qui suggère que les vaccins à ARN demeurent efficaces pour protéger contre le variant indien.

La seconde étude a utilisé un virus B.1.617.1 isolé d’un patient en Californie afin d’étudier sa résistance aux anticorps neutralisants issus du sérum de patients convalescents et de sujets vaccinés par Pfizer et Moderna. Les chercheurs ont utilisé, d’une part, le sérum de 24 patients convalescents infectés par la souche dite USA-WA1/2020 (comportant la mutation D614G, c’est-à-dire le génotype dominant dans la pandémie depuis la fin de l’année 2020), collecté 31 à 91 jours après le début des symptômes ; d’autre part, les sérums de 15 sujets vaccinés par Moderna, 35-51 jours après la 2e dose, et de 10 sujets vaccinés par Pfizer, 7-27 jours après la 2e dose.

Les échantillons de sérum convalescent ont montré une diminution des titres par rapport à la réponse observée contre la souche USA-WA1/2020 (titres moyens de 514 versus titres moyens de 79 contre le variant B.1.617.1). Une diminution a également été observée avec ceux des patients vaccinés (pour Moderna : titres moyens de 1 332 contre USA-WA1/2020 versus 190 contre B.1.617.1 ; pour Pfizer : 1 176 versus 164) [v. figures ci-dessous].Cependant, malgré une résistance partielle du variant indien ainsi établie à un facteur de 6 à 8 contre les anticorps neutralisants de patients infectés et vaccinés, les chercheurs ont montré que 79 % des échantillons de patients convalescents et la totalité de ceux des sujets vaccinés ont réussi à neutraliser le variant, suggérant que l’immunité conférée par les vaccins à ARNm est conservée face au B.1.617.1.

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Ces études sont dans la lignée d’autres preprint qui suggéraient aussi une modeste résistance de ce variant face aux vaccins à ARN. Tous ces résultats sont encore à confirmer en vraie vie, mais ils restent encourageants quant à la capacité des vaccins à protéger contre ce nouveau variant qui depuis des semaines n’est plus cantonné à l’Inde…

Enfin, cette efficacité serait-elle aussi conservée pour les vaccins à vecteur viral ? Des résultats préliminaires d’un essai in vitro avec du sérum de personnes ayant reçu le vaccin indien Covaxin (à virus inactivé) suggéraient que les capacités neutralisantes, bien que diminuées d’un facteur 2 par rapport à la réponse contre le variant britannique B.1.1.7 et le prototype B1 (D614G), étaient conservées. Mais qu’en est-il des vaccins AstraZeneca et Janssen utilisés en France – et, pour le premier, massivement au Royaume-Uni où ce variant est présent ?

Laura Martin Agudelo, La Revue du Praticien

Pour en savoir plus

Tada T, Zhou H, Dcosta BM, et al. The Spike Proteins of SARS-CoV-2 B.1.617 and B.1.618 Variants Identified in India Provide Partial Resistance to Vaccine-elicited and Therapeutic Monoclonal Antibodies. bioRxiv 2021.05.14.444076.

Edara VV, Lai L, Sahoo MK, et al. Infection and vaccine-induced neutralizing antibody responses to the SARS-CoV-2 B.1.617.1 variant. bioRxiv 2021.05.09.443299.

Subbaraman N. COVID vaccines can block variant hitting Asia, lab study finds. Nature News 17 mai 2021.

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Covid-19 : que sait-on du variant indien ? Rev Prat (en ligne) 11 mai 2021. 

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