Le magnésium, qui existe le plus souvent sous la forme du cation Mg2 + , est le second cation intracellulaire le plus abondant après le potassium et joue un rôle central dans des centaines de réactions enzymatiques du métabolisme cellulaire. Il est notamment un cofacteur de l’adénosine triphosphate (ATP) – molécule clé de l’énergétique cellulaire – et participe à la synthèse de l’ARN et de l’ADN. Les apports de magnésium recommandés par l’Anses sont de 380 mg/j chez l’homme adulte et 300 mg/j chez la femme adulte.
Présent dans presque tous les types d’aliments, il est particulièrement abondant dans les oléagineux, les céréales, les fruits secs et les légumes verts (v. tableau 1), car c’est un composant central de la chlorophylle. Toutefois, la concentration en magnésium – et en d’autres minéraux – dans ces produits a baissé au cours des dernières décennies, probablement en raison d’un appauvrissement des sols lié à l’utilisation d’engrais à base de phosphate.
La carence isolée est néanmoins rare car, lorsque les apports alimentaires en magnésium sont suspendus, le rein s’adapte en en excrétant moins dans les urines – à rebours de l’idée, répandue par l’industrie des compléments alimentaires, que nous serions tous carencés en raison d’une alimentation occidentale pauvre en magnésium.
Qui est à risque d’hypomagnésémie ?
La magnésémie normale se situe entre 1,7 et 2,4 mg/dL (0,7 et 1,0 mmol/L). Au niveau systémique, le magnésium est principalement régulé par trois organes : l’intestin, les os et les reins.
Une hypomagnésémie peut ainsi survenir dans un contexte d’alimentation insuffisante sur une longue durée (anorexie, dénutrition sévère, nutrition entérale ou parentérale…), de malabsorption ou de fuite excessive du magnésium (cirrhose décompensée, insuffisance rénale, syndrome de malabsorption intestinale, diarrhée chronique, pancréatite aiguë, brûlures étendues…). C’est le déséquilibre électrolytique le plus fréquent chez les sujets ayant un trouble de l’usage de l’alcool.
Si sa prévalence en population générale se situe entre 3 et 10 %, elle peut atteindre jusqu’à 30 % chez les patients diabétiques de type 2 et jusqu’à 60 % chez les patients hospitalisés, en particulier en soins intensifs.
De nombreux médicaments (v. tableau 2) peuvent également être responsables d’hypomagnésémie.
L’hypomagnésémie a été associé dans plusieurs études à un risque accru de complications du diabète de type 2 , de mortalité chez les patients atteints d’une pathologie cardiovasculaire et à une durée plus importante du séjour en unité de soins intensifs.
Quels symptômes ?
L’hypomagnésémie est souvent asymptomatique, mais elle peut entraîner des symptômes peu spécifiques, tels qu’une asthénie, des crampes ou une faiblesse musculaire.
Une carence prononcée (< 0,5 mmol/L) peut se manifester par des symptômes neuromusculaires plus sévères (convulsions, tremblements), cardiovasculaires (arythmies, vasoconstriction), voire des troubles métaboliques (insulinorésistance, chondrocalcinose).
Quand doser ?
Le dosage du magnésium sérique n’est préconisé qu’en présence de perturbations cliniques ou biologiques. Il doit être prescrit :
- Dans tout contexte à haut risque de déplétion, et notamment en cas de crampes, troubles du comportement, convulsions, troubles du rythme...
- Dans le bilan d’une hypocalcémie ou d’une hypokaliémie, puisque ces déséquilibres électrolytiques sont souvent associés.
Par ailleurs, bien qu’il s’agisse du paramètre le plus simple et le plus utilisé, il n’est pas un marqueur entièrement fiable d’un état de carence, puisque moins de 1 % du magnésium présent dans l’organisme circule dans le plasma. Un dosage de magnésium sérique normal n’exclut pas l’existence d’une déplétion en magnésium, en cause notamment chez le sujet dénutri (éthylique chronique par exemple). Dans ce cas, le diagnostic repose donc essentiellement sur l’anamnèse.
En cas de doute, la mesure de la magnésurie des 24 heures permet de déterminer l’origine de l’hypomagnésémie (rénale si > 2 mmol/24 h ; extrarénale si ≤ 1 mmol/24 h).
Quel traitement ?
S’il n’est pas interdit de supplémenter en magnésium un patient chez qui on suspecte des restrictions alimentaires, ce sont surtout les carences avérées qu’il s’agit de traiter. En l’absence de consensus, le traitement dépend de la sévérité de la carence et des symptômes.
Une supplémentation par voie orale est indiquée pour les cas peu sévères. De nombreuses présentations pharmaceutiques sont disponibles, avec des taux variables puisque les sels de magnésium sont plus ou moins bien absorbés selon leur hydrosolubilité : privilégier les sels de magnésium organiques (citrate, aspartate, glycinate, gluconate, lactate, pidolate, glycérophosphate). Il convient de débuter à faible dose, avec une augmentation progressive pour minimiser le risque laxatif.
Une supplémentation parentérale est indiquée en cas d’hypomagnésémie réfractaire au traitement oral, notamment dans des cas sévères (syndrome du grêle court, crises d’épilepsie, était hémodynamiquement avec arythmies, hypokaliémie et/ou hypocalcémie associées…).
Le remboursement des spécialités à base de magnésium accordé à titre dérogatoire dans certaines pathologies à haut risque de déplétion n’est plus d’actualité (SMR jugé insuffisant). Pour les patients à faibles revenus, il faut donc désormais avoir recours à une demande de prestation complémentaire, limitée à 150 euros par an.
Blanchard A. Hypomagnésémie : quand explorer et supplémenter ? Rev Prat Med Gen 2021;35(1059):333-4.
Pietrasz G. Prise en charge de l’hypomagnésémie en médecine générale : une revue de la littérature. HAL 13 octobre 2022.