objectifs
Diagnostiquer un malaise grave du nourrisson.
Identifier les situations d'urgence et planifier leur prise en charge pré-hospitalière et hospitalière.
Expliquer la définition de la mort subite du nourrisson, son épidémiologie, les facteurs de risque et de prévention, et les principes de la prise en charge de la famille.

Malaise grave du nourrisson

Définition

Le malaise du nourrisson est défini comme un accident inopiné et brutal, associant à un degré variable des troubles du tonus (hypo- ou hypertonie) et/ou de la coloration des téguments (pâleur ou cyanose), avec ou sans modification du rythme respiratoire (bradypnée, tachypnée, apnées), avec ou sans perte de connaissance. Il s’agit essentiellement d’enfants de moins de 6 mois. Sa présentation clinique génère une anxiété familiale pouvant conduire, dans certains cas, à une impression de mort imminente ; cependant, l’évolution est généralement rapidement favorable et l’examen clinique initial de l’enfant souvent normal. Le malaise grave est associé à une détresse hémodynamique, ventilatoire et/ou neurologique.

Identifier les situations d’urgence

Il est essentiel de rechercher des critères de gravité objectifs par l’interrogatoire rigoureux de l’entourage et l’examen clinique minutieux du nourrisson afin d’adapter la prise en charge diag­nostique et thérapeutique.
L’identification d’un nourrisson gravement malade se fait selon les principes de l’ABCDE :
  • A : Airways (voies aériennes) ;
  • B : Breathing (évaluation respiratoire) ;
  • C : Circulation (évaluation hémodynamique) ;
  • D : Disability (état neurologique) ;
  • E : Exposure (exposition, environnement).
L’évaluation de l’état cardiovasculaire doit commencer systématiquement par l’évaluation de l’état des voies aériennes (A) et de la respiration (B).

Évaluer les voies aériennes : « airways »

Le médecin doit vérifier la liberté des voies aériennes en s’assurant de l’absence de sécrétions ou de corps étranger obstructif ; il évalue également leur sécurité : un enfant conscient a des voies aériennes sûres, le cas échéant l’enfant sera mis en position latérale de sécurité ou une canule de Guedel sera choisie en fonction de l’âge.

Évaluer la respiration : « breathing » (FTVO)

L’efficacité respiratoire de l’enfant comprend 4 composantes :
  • la fréquence respiratoire (F) : polypnée, bradypnée, apnées… ;
  • le travail respiratoire (T) : l’augmentation du travail respiratoire se traduit par des signes de lutte (tirage intercostal, sus -sternal ou sous-costal, entonnoir xyphoïdien, battement des ailes du nez, balancement thoraco-abdominal et/ou geignement expiratoire) ;
  • le volume courant (V) [ou expansion thoracique] est évalué par l’inspection (ampliation thoracique et symétrie) et l’auscultation thoracique (bruits surajoutés) ;
  • l’oxygénation (O) de l’enfant est estimée par la coloration cutanée et la saturation artérielle transcutanée en oxygène.

Évaluer l’état circulatoire : « Circulation » (Fc 4P)

Il s’évalue par :
  • la fréquence cardiaque du nourrisson (FC) ;
  • la pression artérielle (P) ;
  • l’amplitude des pouls distaux (radial, tibial, pédieux) et centraux (carotidien, brachial ou fémoral) [P] ;
  • la perfusion périphérique (coloration cutanée, temps de recoloration cutanée, température cutanée) [P] ;
  • la précharge (taille du foie, veines jugulaires, auscultation pulmo­naire) [P].
La perfusion des organes cibles, notamment la perfusion rénale (diurèse), est surveillée.

Évaluer l’état de conscience : « disability »

Le score « AVPU » permet l’évaluation rapide de l’état de conscience d’un enfant. Ce score se décline en 4 items :
  • A pour Alert, éveillé ;
  • V pour Voice, réponse à la voix ;
  • P pour Pain, réponse à la douleur ;
  • U pour Unresponsive, ne répond à aucun stimulus, inconscient.
Si l’enfant répond uniquement aux stimuli douloureux, il est comateux, une équipe médicale doit être déclenchée.
Un malaise grave est défini par une détresse hémodynamique, ventilatoire et/ou neurologique.

Prise en charge


Prise en charge préhospitalière

L’évaluation par la famille au domicile est extrêmement difficile car associée à une panique importante. Une équipe médicale doit se déplacer en urgence au domicile en cas de détresse respiratoire (bradypnée, apnées, hypoxie), hémodynamique (tachycardie, bradycardie, insuffisance circulatoire périphérique, teint gris) ou neurologique (troubles de conscience, déficit neurologique, mouvements anormaux). La précocité de la prise en charge des fonctions vitales conditionne le pronostic. L’évaluation initiale se fera selon le principe ABCDE, détaillé ci-dessus.
En fonction des signes cliniques, les thérapeutiques suivantes seront envisagées :
  • oxygénothérapie au masque haute concentration en cas d’hypoxie, de signes de lutte ;
  • ventilation au masque en cas d’épuisement respiratoire, d’apnées ;
  • remplissage vasculaire au sérum physiologique (20 mL/kg en 20 min) en cas d’insuffisance circulatoire (après avoir vérifié l’absence d’hépatomégalie évoquant un choc cardiogénique) ;
  • intubation orotrachéale par une équipe entraînée si les voies aériennes sont à risque, en cas de défaillance neurologique ;
  • traitement spécifique des convulsions, sepsis sévère, hypo­glycémie…

Prise en charge hospitalière

À l’arrivée aux urgences pédiatriques, l’évaluation initiale se fera également selon le principe ABCDE. Après stabilisation des fonctions vitales, l’interrogatoire et l’examen clinique seront minutieux et complets.
Anamnèse
Tout d’abord, faire préciser à l’entourage le déroulement du malaise, c’est-à-dire les circonstances de découverte (lieu, position de l’enfant au moment du malaise, horaire du dernier repas), la durée du malaise et les manœuvres entreprises.
Il faut interroger l’entourage sur l’état de l’enfant au cours des heures et jours précédant le malaise : contexte infectieux, comportement alimentaire, comportement neurologique (somnolence, agitation, pleurs, geignements), gêne respiratoire, prise médicamenteuse…
Il est nécessaire de recueillir les antécédents personnels pendant la grossesse et depuis la naissance ainsi que les antécédents familiaux (malaise dans la fratrie, mort subite, consanguinité, cardiopathie).
Examen clinique
Il doit être précis et systématique. L’enfant est évalué à plusieurs reprises : durant le sommeil, éveillé, lors des repas, lors des pleurs… Il faut examiner l’enfant appareil par appareil, sans oublier la recherche de signes cutanés qui pourraient orienter vers l’existence de sévices corporels (hématomes, ecchymoses). Les mensurations du nourrisson devront être notifiées dans l’observation médicale et reportées dans le carnet de santé sur les courbes staturo-pondérale et de périmètre crânien.
Examens complémentaires
Des examens paracliniques sont systématiques en urgence, soit pour témoigner de la gravité du malaise (souffrance cellulaire, acidose), soit pour rechercher une cause rapidement traitable :
  • bilan biologique : numération formule sanguine (NFS)-plaquettes, ionogramme sanguin avec glycémie et calcémie, bilan hépatique et rénal, bilan infectieux, gaz du sang, lactates et créatine phosphokinase (CPK) ;
  • radiographie thoracique ;
  • électrocardiogramme (ECG), avec mesure du QT corrigé.
En dehors du bilan systématique prescrit lors de la prise en charge initiale du nourrisson, les autres examens complémentaires seront prescrits en fonction de l’anamnèse et de l’examen clinique.
Lorsque l’examen neurologique est anormal (hypotonie, signes de localisation, signes d’hypertension intracrânienne…), il est important de rechercher une lésion cérébrale (évoquer le syndrome du bébé secoué) et de réaliser un scanner cérébral en urgence ; voire un fond d’œil, un ECG, une ponction lombaire (PL) en fonction du contexte et de la symptomatologie. Il faut également rechercher dans ce contexte une maladie métabolique en réalisant un bilan métabolique de première ligne : glycémie, gaz du sang, lactacidémie, ammoniémie.
Certains examens sont demandés secondairement en fonction de l’orientation étiologique, tels que l’enregistrement Holter sur 24 heures, l’électroencéphalogramme, la pH-métrie œsophagienne…
Orientation
Tout malaise authentifié récent chez un nourrisson doit être hospitalisé durant 24-48 heures pour traiter une éventuelle détresse vitale, mener les investigations complémentaires, prévenir une récidive et rassurer les parents.

Étiologie

Les causes de malaise grave du nourrisson sont nombreuses. Quatre d’entre elles dominent par leur fréquence :
  • la douleur aiguë, par exemple en cas d’invagination intestinale aiguë, d’hémorragie cérébrale, de traumatisme ; l’hypertonie vagale (sur œsophagite, par exemple) peut également entraîner un malaise grave ;
  • les apnées obstructives, secondaires à un vomissement, une rhinite obstructive ou une fausse route ;
  • les malaises d’origine neurologique tels que convulsion voire épilepsie débutante, hématome cérébral, hypertension intra­crânienne ;
  • les fièvres mal tolérées sur infections virales ou bactériennes.
D’autres causes plus rares doivent également être recherchées, telles que l’asphyxie par enfouissement facial, l’intoxication (monoxyde de carbone, médicaments…), les troubles du rythme cardiaque (cardiomyopathie obstructive, syndrome du QT long), les anomalies des voies aérodigestives supérieures…

Mesures préventives

Le pronostic du malaise dépend de l’affection causale qu’il faut si possible diagnostiquer et traiter. Il arrive qu’aucune cause ne soit identifiée. Dans tous les cas, il faut systématiquement revoir les conditions de couchage des nourrissons et proscrire le décubitus ventral ou latéral, l’ajout de coussin dans le lit ou de tour de lit. Dans certains cas très particuliers, l’absence de cause retrouvée devant un malaise grave du nourrisson peut conduire à proposer un monitoring cardiorespiratoire à domicile, mais les indications restent exceptionnelles. Quelle que soit la cause du malaise, il est important d’accompagner les parents durant l’hospitalisation et d’assurer un suivi ambulatoire ultérieur.

Mort inattendue du nourrisson

Définition

La « mort inattendue du nourrisson » (MIN) est définie comme « le décès subit d’un enfant âgé de 1 mois à 1 an jusqu’alors bien portant, alors que rien dans ses antécédents connus ni dans l’histoire des faits ne pouvait le laisser prévoir » ; au terme du bilan étiologique exhaustif (anamnèse, examen du lieu de décès, examen clinique, prélèvements biologiques, imagerie, autopsie) recommandé par la Haute Autorité de santé (HAS), cette MIN peut être attribuée à une origine infectieuse, génétique, cardiaque, métabolique, traumatique, accidentelle, etc. ; en l’absence d’explication (environ 40 à 50 % des cas), on parle alors de mort subite du nourrisson (MSN).

Épidémiologie

En France, chaque année environ 300 à 400 bébés décèdent de MIN, qui représente la première cause de mortalité infantile dans les pays développés, notamment en France (0,4/1 000 naissances), un des pays européens où la prévalence est la plus élevée. Malgré une diminution de plus de 75 % du nombre de décès à la suite des campagnes nationales « Je dors sur le dos » et aux conseils de prévention autour du couchage dans les années 1990, le nombre de décès stagne depuis les années 2000 ; on estime actuellement qu’encore 50 % des cas de MIN seraient évitables si les mesures de prévention recommandées, notamment en termes d’environnement de couchage, étaient respectées.

Physiopathologie et facteurs de risque

La MIN, depuis plusieurs années considérée comme d’origine plurifactorielle, répond au modèle du « triple risque » mettant en avant : 1) un enfant vulnérable par son histoire (prématuré, petit poids de naissance…) ; 2) une période critique de son développement neurologique, respiratoire et cardiaque (de 1 à 4 mois – 70 % des décès survenant avant les 6 mois de l’enfant) ; 3) une exposition à des facteurs de « stress » environnementaux (décubitus ventral ou latéral, tabagisme passif, couchage sur une surface inadaptée, objets dans le lit, infections…). Ces 3 facteurs associés constituant une situation à risque majeure pour l’enfant.
Si des facteurs de risque intrinsèques sont connus, dont le sexe masculin (sex-ratio à 1,86), la grande prématurité et un petit poids de naissance, de nombreuses études ont permis d’isoler plusieurs facteurs de risque extrinsèques de MIN, notamment environnementaux, pour lesquels des mesures préventives sont envisageables. Parmi ces facteurs, le principal est le couchage en décubitus ventral ou latéral qui représente le facteur de risque majeur de MIN (odds ratio de 8,7 à 45,4), lié au risque d’obstruction mécanique des voies aériennes supérieures ; de même, la présence d’objets dans le lit (couverture, couette, oreiller, doudous, peluches, tour de lit…). Le couchage sur un matelas mou, un canapé augmentent aussi le risque d’enfouissement ou de confinement du visage de l’enfant.
Sur un plan anatomique, contrairement à une idée reçue, le décubitus dorsal n’augmente pas le risque de régurgitation même en cas de reflux gastro-œsophagien avéré et, du fait de la position antérieure des voies aériennes, diminue même le risque d’inhalation ; il est maintenant reconnu que la position proclive dorsale lors du sommeil est non seulement inutile pour limiter les reflux mais peut également compromettre la liberté des voies aériennes de l’enfant s’il glisse vers le bas du lit.
L’exposition au tabac pendant la grossesse et après, considérée comme le 2e facteur de risque de MIN, expose non seulement le fœtus à une intoxication au monoxyde de carbone et aux cyanides, anorexigènes et vasoconstricteurs placentaires, responsables d’un défaut de développement cérébral fœtal, mais également à une intoxication nicotinique qui altère la différenciation et l’apoptose neuronale et modifie l’ultrastructure des récepteurs cholinergiques nicotiniques (nAChRs) du cerveau fœtal et le relargage présynaptique de neuromédiateurs (acétylcholine, dopamine, noradrénaline, sérotonine, GABA, et glutamate) à l’origine d’une possible dysautonomie postnatale avec incapacité d’auto-ressuscitation cardiorespiratoire du bébé. On estime qu’un tiers des MIN seraient évitables en l’absence de tabagisme maternel anténatal.
Le partage du lit est également un facteur de risque multipliant par 5 le risque de MIN chez les moins de 3 mois ; le partage de la chambre des parents (au moins jusqu’à l’âge de 6 mois) serait en revanche bénéfique et diminuerait le risque de MIN de 50 % probablement en facilitant la surveillance de l’enfant, son accessibilité et un repositionnement plus facile dans son lit en cas d’allaitement.

Étiologie

Au terme d’un bilan étiologique le plus exhaustif possible, les causes retenues les plus fréquemment sont principalement infectieuses, virales ou bactériennes (respiratoires, septicémies), cardiaques et environnementales (accidents de couchage inadapté). Les causes traumatiques ne représenteraient que moins de 10 % des MIN.
D’autres causes ont été identifiées : génétiques, métaboliques, neurologiques, physiologiques (altération des mécanismes d’éveil, du fonctionnement intrinsèque du système nerveux autonome…), et c’est possiblement la combinaison de plusieurs d’entre elles qui conduit au décès.
C’est seulement en l’absence de cause identifiée après réalisation du bilan étiologique exhaustif recommandé par la Haute Autorité de santé (environ 50 % des cas) que ces décès sont alors considérés comme mort subite du nourrisson.

Mesures de prévention

La prévention reste actuellement le meilleur moyen pour réduire le nombre de décès.
Les recommandations de l’American Academy of Pediatrics (AAP), mises à jour en octobre 2016, reposent sur des données scientifiques basées sur les preuves (evidence based medecine) et proposent les mesures de prévention à adopter permettant de créer un environnement de sommeil plus sûr. L’AAP recommande de coucher les nourrissons strictement en décubitus dorsal, dans une turbulette adaptée à leur taille et à la saison, sur un matelas ferme et dans un lit à barreaux, sans coussin, drap, couette, oreiller, matelas surajouté, cale-bébé, tour de lit ni autres objets (doudous, peluches…) qui puissent recouvrir, étouffer ou confiner l’enfant ; la chambre ne doit pas être surchauffée et l’air doit circuler. Il est conseillé de faire dormir l’enfant dans la chambre de ses parents au moins les 6 premiers mois, voire la première année. Les effets bénéfiques de l’allaitement maternel les 6 premiers mois sont également mis en avant, l’effet protecteur étant majoré en cas d’allaitement maternel exclusif et de durée prolongée. Bien que de mécanisme non précisé, la tétine aurait aussi un effet protecteur lorsqu’elle est positionnée au moment de l’endormissement et non fixée à l’enfant (risque de strangulation…).
En dehors d’indications médicales ciblées, le monitorage à domicile des fratries d’un bébé décédé n’est pas recommandé, tout comme l’utilisation systématique d’appareils ou de matelas d’autosurveillance visant à détecter apnées et bradycardie.
Concernant les berceaux collés au lit, il n’existe pas d’étude permettant d’indiquer (ou déconseiller) cette pratique, il est cependant indispensable de respecter les règles habituelles de couchage.
L’AAP rappelle enfin l’effet protecteur de la vaccination sans majoration du risque de MIN.
Les consignes de couchage sur le dos strict sans contrainte physique ne sont pas en contradiction avec les conseils de prévention des déformations crâniennes positionnelles ou « plagiocéphalies » qui reposent sur le respect de la motricité libre, sur l’alternance des positionnements de la tête du nourrisson dans son lit mais aussi sur l’utilisation de tapis d’éveil avec des jeux au sol et du portage parental afin que le champ de vision à l’éveil soit élargi.

Prise en charge en France

Elle repose sur les recommandations de la Haute Autorité de santé publiées en 2007.

Centres de référence régionaux

La circulaire interministérielle du 14 mars 1986 a défini des centres de référence régionaux de la mort inattendue du nourrisson (CRRMIN) afin de prendre en charge dans une structure hospitalière adaptée les enfants de moins de 2 ans décédés de mort inattendue du nourrisson et réaliser les investigations diag­nostiques post mortem. Ces centres de référence ont aussi pour mission d’accompagner les familles, de développer des axes de recherche visant à améliorer la compréhension de cette patho­logie, de participer à la prévention et formation des professionnels de santé et des familles.
En 2013, les CRRMIN français se sont réunis au sein de l’Association nationale des centres de référence de la mort inattendue du nourrisson (ANCReMIN) pour soutenir la recherche et mieux diffuser les informations cliniques, physiologiques, scientifiques et soutenir les actions de prévention et de santé publique en lien avec la MIN, les morts fœtales tardives inexpliquées et les décès en salle de naissance.
Pour permettre un suivi épidémiologique actualisé concernant les MIN sur le territoire français, un Observatoire national des morts inattendues du nourrisson (OMIN) a été créé en 2015, avec pour mission de recueillir les données épidémiologiques, socio-environnementales, cliniques, paracliniques et pharmacologiques de tous les enfants décédés de MIN pris en charge dans l’un des centres référents MIN français.

Protocole de prise en charge d'une mort inattendue du nourrisson

Le centre 15 doit être contacté pour toute suspicion ou décès d’un nourrisson, et une prise en charge médicalisée sur place est systématique ; si l’arrêt cardiorespiratoire paraît récent, une réanimation cardiopulmonaire (RCP) est entreprise ; si le décès est évident, il est recommandé de limiter ou de ne pas poursuivre la RCP, d’expliquer aux parents les gestes qui ont été pratiqués et pourquoi le médecin décide de ne pas poursuivre les manœuvres de réanimation. Il appartient au médecin sur place de se charger de l’annonce du décès, en prenant du temps et en respectant le rythme de réceptivité des interlocuteurs, dans un endroit calme, de préférence différent de celui où l’enfant a été découvert, en faisant preuve d’empathie. Si les parents ne sont pas sur place, le médecin intervenant doit les contacter (en évitant si possible d’annoncer le décès par téléphone sauf s’ils posent clairement la question) et attendre leur arrivée. Proposer sans restriction un rapprochement physique avec le corps du bébé si les parents le souhaitent.
Les informations à collecter sur le lieu de décès concernent :
  • l’enfant : examen complet de l’enfant, température rectale avec heure de prise, rigidité, lividités, traces cutanées et muqueuses, fontanelles, déshydratation, dénutrition… ;
  • l’environnement : lieu de découverte, position de découverte, literie et conditions de couchage, vêtements, objets, animaux, température ambiante, tabagisme, possibilité d’intoxication au monoxyde de carbone, médicaments… schéma ou photos avec accord des parents ;
  • les circonstances de décès.
Ces informations sont retranscrites sur la fiche d’intervention « Mort inattendue de l’enfant de moins de 2 ans » de la Haute Autorité de santé (2007). Il est important que cette fiche accompagne l’enfant au CRRMIN et figure dans son dossier médical.
Un entretien avec toutes les personnes présentes est réalisé en notant leurs remarques, les éventuelles incohérences… et en récupérant le carnet de santé et les ordonnances récentes.
Si l’événement a lieu alors que l’enfant était confié à un tiers, celui-ci est pris en charge avec la même attention que les parents.
Si d’autres enfants sont présents (fratrie ou tiers), les éloigner du lieu de décès. S’ils ont pleine conscience du tableau, prendre le temps de leur expliquer la gravité de la situation avec un vocabulaire adapté.
Il est indispensable d’informer les parents que le transport du nourrisson vers le CRRMIN est recommandé de façon systématique et vise à réaliser des investigations médicales pour comprendre ce qui s’est passé, rechercher la cause du décès et accompagner la famille. Il n’est pas souhaitable à ce stade d’évoquer la question de l’autopsie qui leur sera proposée et expliquée au CRRMIN. En cas de refus des parents, au cas par cas, un « obstacle médico-légal » peut être coché. Dans ce cas, l’autorité judiciaire est alertée et peut décider d’ouvrir une enquête judiciaire.

Prise en charge hospitalière au CRRMIN

Elle est assurée par un médecin référent et comporte :
  • un entretien avec la famille, qui précise :
. les circonstances de décès, l’anamnèse, notion contage infectieux ;
. les antécédents de l’enfant (personnel, familiaux) ;
. l’habitus (environnement de couchage, conditions de garde, modalités d’alimentation…).
Il est important de déculpabiliser les parents et répondre à leurs interrogations. Il informe des investigations médicales et recueille les consentements nécessaires ;
  • un examen clinique complet de l’enfant décédé (température rectale avec heure de prise, rigidité, lividités, traces cutanées et muqueuses, fontanelles, signes de déshydratation, dénutrition…,) un fond d’œil ;
  • les examens paracliniques recommandés :
. biologie : numération formule sanguine (NFS)-plaquettes, protéine C réactive, 2 hémocultures, ponction lombaire,
. prélèvement d’humeur vitrée (ionogramme, taux de sucre, peptide C, éventuellement toxiques),
. examen cytobactériologique des urines (ECBU),
. analyses bactériologiques : nez, pharynx, trachée, selles,
. analyses virologiques : nez, pharynx, trachée (virus respiratoire syncytial [VRS], influenza, para-influenza, adénovirus, entérovirus), selles,
. analyses toxicologiques : sang, urines, liquide gastrique, bile, cheveux avec racines,
. sérum pour profil des acylcarnitines plasmatiques,
. prélèvements à visée conservatoire (sang, sérum, liquide céphalo-­rachidien, urines, sang sur papier buvard),
. en cas d’orientations particulières : culture de peau, recherche génétique de QT long,
. examens radiologiques : radiographie thoracique, radiographies de squelette corps entier et imagerie cérébrale voire du corps entier (tomodensitométrie [TDM] ou imagerie par résonance magnétique [IRM]),
. une autopsie est systématiquement proposée ; il est important de bien expliquer son intérêt aux parents ; elle n’a aucune obligation légale et nécessite l’accord écrit des parents ; leur refus peut conduire selon le contexte à réaliser un signalement judiciaire ; une autopsie médicolégale est alors pratiquée.
En cas de MIN d'un enfant jumeau, il convient de considérer le second jumeau comme à risque et de proposer un examen clinique médical, voire une hospitalisation de courte durée selon le contexte, pour surveillance médicale et réassurance parentale.

Prise en charge post-hospitalière

Dans les semaines suivant le décès, elle comporte un suivi régulier des familles, organisé par l’équipe référente afin de communiquer et expliquer l’ensemble des résultats aux parents, mais aussi de leur proposer, ainsi qu’à la fratrie, un soutien psycho­logique, une orientation vers des associations de parents et un accompagnement médical, préventif et psychologique en cas de grossesse ultérieure.
Points forts
Malaise grave du nourrisson et mort subite

POINTS FORTS À RETENIR

Le malaise du nourrisson est défini comme un accident inopiné et brutal, associant à un degré variable des troubles du tonus (hypo- ou hypertonie) et/ou de la coloration des téguments (pâleur ou cyanose), avec ou sans modification du rythme respiratoire (bradypnée, tachypnée, apnées), avec ou sans perte de connaissance. Le malaise grave y associe une détresse hémodynamique, ventilatoire et/ou neurologique.

Tout malaise grave du nourrisson nécessite une hospitalisation minimale de 24-48 heures pour monitoring cardiorespiratoire.

L’anamnèse rigoureuse et l’examen clinique minutieux sont fondamentaux dans la démarche étiologique.

La prise en charge initiale se fera toujours selon l’approche ABCDE, pour assurer le maintien des fonctions vitales.

Un bilan biologique standard, une radiographie thoracique et ECG seront systématiquement réalisés.

Recommandations de couchage pour les nourrissons :

– coucher le bébé exclusivement sur le dos ;

– dans une turbulette adaptée à sa taille et la saison ;

– seul dans un lit à barreaux, sur un matelas ferme ;

– sans objet (pas de couette, couverture, peluches, tour de lit…) dans le lit qui puisse recouvrir et étouffer ou confiner l’enfant ;

– dans une pièce non surchauffée (18-20 °C) ;

– si possible dans la chambre des parents jusqu’à l’âge de 6 mois ;

– sans exposition au tabac.

Recommandations de prise en charge des MIN

Les modalités de prise en charge des MIN en France reposent sur les recommandations de la Haute Autorité de santé publiées en 2007 ; elles comprennent : une prise en charge préhospitalière sur le lieu du décès où sont recueillies les circonstances de décès, les données cliniques et environnementales et cliniques de l’enfant et sa famille ; une prise en charge hospitalière au CRRMIN (entretien avec la famille, examen clinique complet de l’enfant décédé, examens biologiques, bactériologiques, virologiques, métaboliques, génétiques, toxicologiques, fond d’œil, examens radiologiques, imagerie cérébrale) ; et sollicitent une autopsie scientifique, une prise en charge post-hospitalière, avec un suivi régulier des familles.

Message auteur

Malaise grave du nourrisson et mort subite

Les malaises sont un motif fréquent de consultation aux urgences pédiatriques.

Il est important d’identifier le malaise grave (connaître le principe d’évaluation d’un enfant selon l’ABCDE et les signes cliniques de gravité).

Par ailleurs, il est fondamental de connaître les facteurs de risque et protecteurs de mort subite du nourrisson ainsi que les modalités de prise en charge des enfants décédés de mort inattendue du nourrisson.

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