Le TDAH (trouble du déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité) est une affection fréquente. En France, sa prévalence est estimée entre 3,5 % et 5,6 % des enfants d’âge scolaire (Haute Autorité de santé, chiffres de 2015).
La psychoéducation de l’enfant et des parents et les interventions environnementales visant à limiter le retentissement des symptômes sont recommandées en première intention, et à envisager de façon systématique.
Si le retentissement du TDAH est sévère et/ou s’il persiste malgré ces interventions, le traitement médicamenteux indiqué est le méthylphénidate, dans une prise en charge globale (incluant donc des mesures psychologiques, éducatives et sociales). Cette molécule possède une AMM en France pour cette pathologie à partir de l’âge de 6 ans. Depuis 2021, sa prescription peut être initiée par certains spécialistes en ville (neurologues, psychiatres ou pédiatres) et renouvelée au cours de l’année par le médecin traitant. En cas d’inefficacité, d’intolérance ou de contre-indication aux psychostimulants, des traitements médicamenteux de deuxième ou troisième intention peuvent être envisagés, parmi lesquels des agonistes alpha- 2 -adrénergiques (A2A) tels que la guanfacine ou la clonidine.
Des données récentes ont montré que la prescription du méthylphénidate est en constante augmentation ces dernières années (hausse de l’incidence annuelle de 56,7 % entre 2011 et 2019, particulièrement chez les 6 - 11 ans : + 62,9 %), et qu’il est trop facilement prescrit hors AMM, en particulier chez les < 6 ans (plus de 5 000 prescriptions sur cette même période).
Une nouvelle étude américaine multicentrique s’est intéressée aux effets indésirables (EI) des A2A et du méthylphénidate chez les < 6 ans, compte tenu du fait que la majorité des enfants de cette tranche d’âge avec un diagnostic de TDAH aux États-Unis reçoivent un traitement médicamenteux par l’une ou l’autre de ces molécules (bien que le traitement de première ligne recommandé soit comportemental). Or la majorité des études sur les EI de ces médicaments concernent des enfants plus âgés.
Cette étude rétrospective a inclus 497 enfants ayant un diagnostic de TDAH et une prescription de l’une ou l’autre de ces molécules entre janvier 2013 et juillet 2017 ; ils étaient suivis jusqu’en février 2019. Leurs données ont été analysées pour comparer le type et la fréquence des EI associés à ces deux types de traitements médicamenteux. Les enfants recevant un psychostimulant, méthylphénidate notamment, étaient plus nombreux (N = 322, dont 81 % de garçons) que ceux recevant un A2A (N = 175, dont 84 % de garçons), majoritairement de la guanfacine. L’âge moyen à l’initiation du traitement était 62 mois (5,2 ans), mais il était inférieur pour ceux recevant un A2A par rapport à ceux prenant le méthylphénidate (56 mois vs 63 mois). Parmi les enfants traités initialement par un psychostimulant, 49 ont reçu par la suite un traitement par A2A seul. Inversement, 54 de ceux traités initialement par A2A ont reçu par la suite des psychostimulants.
Avec les A2A, les effets secondaires les plus fréquents étaient la somnolence diurne (39 %) – le seul qui soit significativement plus importante qu’avec les psychostimulants (4 %) –, l’irritabilité (30 %) et un comportement agressif (28 %). La somnolence diurne était plus importante avec la clonidine qu’avec la guanfacine.
Avec les psychostimulants, la fréquence de presque tous les autres EI étudiés était plus importante qu’avec les A2A, notamment : irritabilité (52 %), troubles du sommeil (24 %), perte d’appétit (36 %), les épigastralgies (12 %), perte de poids (7 %), repli sur soi (10 %) et lésions de grattage ou autres comportements répétitifs (13 %).
Dans les analyses ajustées, la somnolence diurne restait l’EI le plus important avec les A2A, tandis que les autres EI survenaient plus fréquemment avec les psychostimulants. Les céphalées étaient aussi un EI fréquent.
En analysant les résultats par sous-groupes selon l’âge, l’agressivité et les troubles du sommeil étaient plus fréquents chez les enfants plus jeunes par rapport aux plus âgés.
Dans une étude précédente de ces mêmes auteurs, une meilleure efficacité sur les symptômes du TDAH était rapportée avec les psychostimulants par rapport aux A2A, mais au prix d’EI aussi plus fréquents, comme le montrent ces données.
Si des études prospectives sont encore nécessaires pour les confirmer, ces résultats apportent des données importantes pour adapter au cas par cas le traitement du TDAH considérant la balance bénéfices – risques.
Nobile C. TDAH : les outils indispensables pour les généralistes ! Rev Prat (en ligne) 5 juillet 2022.