Le traitement hormonal de la ménopause a amplement prouvé son efficacité contre le syndrome climatérique. Mais il n’est pas adapté à toute toutes les femmes : certaines ont des contre-indications (encadré ci-dessous), d’autres ne souhaitent pas prendre un traitement hormonal.
Des mesures non pharmacologiques telles que l’acupuncture, le yoga et l’hypnose ont fait la preuve d’une certaine efficacité, mais moindre : les alternatives font donc défaut, d’où l’intérêt de la recherche d’autres traitements non hormonaux.
Une nouvelle piste a récemment vu le jour : le fézolinétant, un antagoniste sélectif non hormonal des récepteurs de la neurokinine 3 (NK3). En effet, les neurones dans l’hypothalamus – centre de contrôle de la thermorégulation – sont stimulés par le neuropeptide neurokinine B, qui agit au niveau des récepteurs de neurokinine 3. L’effet inhibiteur des estrogènes dans ce mécanisme s’estompant durant la ménopause, l’action antagoniste du fézolinétant pourrait-elle s’y substituer, et se traduire ainsi par une amélioration des symptômes vasomoteurs de la ménopause ? C’est l’hypothèse qu’une équipe internationale de chercheurs a mise à l’épreuve dans un essai randomisé et contrôlé contre placebo, en double aveugle, conduite dans 7 pays (États-Unis, Canada, République tchèque, Lettonie, Pologne, Espagne et Royaume-Uni), et dont les résultats sont parus dans le Journal of Clinical Endocrinology and Metabolism .
Réduction significative des symptômes
Dans cette étude, 500 femmes âgées de 40 à 65 ans ayant des symptômes vasomoteurs modérés à sévères ont été réparties en trois bras : fézolinétant 30 mg, fézolinétant 45 mg, placebo. Le traitement était pris par voie orale une fois par jour, pendant 12 semaines.
Les critères de jugement principaux étaient le changement moyen dans la fréquence et dans la sévérité des symptômes vasomoteurs entre l’inclusion et les semaines 4 et 12 (les données étaient collectées quotidiennement par autodéclaration des patientes via des registres électroniques). Le critère secondaire était l’évolution de l’impact des symptômes sur la qualité du sommeil évalué par des questionnaires. Dans un second temps, le traitement a été étendu de 40 semaines supplémentaires (nouvelle randomisation pour recevoir soit la dose à 30 mg soit celle à 45 mg).
Le traitement par fézolinétant (aux deux doses) a significativement réduit la fréquence des symptômes :
- à la semaine 4 : diminution moyenne de 51,60 % pour le fézolinétant 30 mg et de 55,16 % pour la dose 45 mg (contre 33,60 % pour le placebo).
- à la semaine 12 : réduction de 58,64 % pour le fézolinétant 30 mg, de 64,27 % pour le fézolinétant 45 mg, contre 45,35 % pour le placebo.
Ces améliorations ont été observées dès la première semaine et se sont poursuivies jusqu’à la semaine 52. Enfin, des améliorations significatives dans la qualité du sommeil ont aussi été observées à la semaine 12 avec la plus forte dose.
Une bonne tolérance mais un impact hépatique à surveiller
Les effets indésirables graves rapportés étaient peu fréquents : 2 %, 1 % et 0 % dans les groupes 30 mg, 45 mg et placebo respectivement. Parmi les effets indésirables non graves rapportés, la céphalée était le plus fréquent (entre 2 et 4 % selon les groupes). Par ailleurs, si les élévations des transaminases hépatiques constatées étaient globalement peu fréquentes et asymptomatiques, 6 patientes (dont 5 appartenant aux groupes traités) ont eu une élévation des ALAT à des valeurs 3 fois supérieures à la normale, et 1 patiente dans le groupe fézolinétant 30 mg a eu des ALAT 5 fois supérieures à la normale. Selon les auteurs, ces changements sont toutefois restés asymptomatiques et temporaires, avec un retour à la normale dès l’arrêt du traitement.
« C’est une classe thérapeutique qui peut apporter une certaine efficacité chez les femmes ayant des bouffées de chaleur et ne pouvant pas bénéficier d’un THM », commente la Pr Geneviève Plu-Bureau (service de gynécologie, hôpital Cochin, Paris), avec deux bémols cependant : d’une part, « l’impact hépatique pourrait être vraiment problématique » ; d’autre part, « cette étude montre un effet placebo surprenant, nettement supérieur à ce qui est habituellement attendu dans ce type d’étude ».
En mai 2023, ce traitement a reçu l’autorisation de la FDA aux États-Unis, à la dose de 45 mg/jour, avec une mise en garde pour les patientes ayant des transaminases hépatiques élevées ou une lésion hépatique. Ainsi :
- un dosage sanguin des transaminases est ainsi recommandé avant la prescription, et tous les 3 mois durant les 9 premiers mois de traitement ;
- les patientes ayant des symptômes pouvant signer une lésion hépatique (nausées, vomissements, ictère…) doivent contacter leur médecin.
Contre-indications au traitement : prise concomitante d’inhibiteurs du CYP1A2 ; cirrhose ; insuffisance rénale sévère ou terminale.
Fin 2022, une dossier de demande d’AMM européenne a été soumis à l’EMA, à la dose de 45 mg ; l’AMM été octroyée fin 2023 pour le traitement des symptômes vasomoteurs modérés à sévères de la ménopause.
Contre-indications du THM
Les contre-indications absolues du THM sont les cancers hormonodépendants (sein, endomètre), les antécédents thromboemboliques artériels et veineux, les hémorragies génitales sans diagnostic établi et les affections hépatiques aiguës ou chroniques.
Contre-indication relative : antécédents familiaux de cancers hormonodépendants (apparentés au premier degré).
Attention : il faut instaurer un THM dans les premières années après le début de la ménopause (dans les 10 ans).
Poudou C, Fritel X. Ménopause et andropause - Partie : Ménopause. La Revue du Praticien, 2019;69(6);e203-207