Dans la maquette de troisième cycle de médecine générale, les stages ambulatoires sont essentiels ; cette filière d’enseignement professionnalisante doit en effet allier formations théoriques et pratiques. Le nombre d’internes en médecine générale est voué à augmenter, pour réduire le nombre de territoires dits « sous-dotés » en soins de premier recours. Il faudra donc également augmenter le nombre de lieux de stage ! L’idéal serait que ces nouveaux lieux de stage soient prioritairement ouverts dans ces territoires car, sans être une règle absolue, les internes ont tendance à s’installer près de leur lieu de stage, surtout si l’environnement socioculturel et les conditions d’installation y sont attractifs.
La Conférence nationale des doyens propose d’ajouter une quatrième année de formation à la filière de médecine générale, qui serait réalisée en ambulatoire. On ne peut imaginer que cette année supplémentaire se déroule obligatoirement en zones désertifiées, comme le souhaitent de nombreux politiques. Elle serait ainsi assimilable à une sorte de redevance envers l’État ou, selon les craintes de l’Intersyndicale nationale autonome représentative des internes de médecine générale (Isnar-IMG), à un remplacement qui ne dirait pas son nom. Une telle disposition aurait même toutes les chances d’être contre-­productive car elle risquerait de détourner les internes du choix de la médecine générale. L’objectif prioritaire de cette quatrième année doit vraiment être de parfaire les apprentissages de l’étudiant en confortant ses compétences pour le rendre autonome. Ces stages ne peuvent donc se concevoir sans supervision adaptée à ce nouveau contexte pédagogique.
Rien ne s’oppose cependant à ce que ces stages supplémentaires soient priorisés en zones sous-dotées, si c’est du libre choix de l’interne. Des incitations organisationnelles ou financières à l’installation pourraient être ensuite proposées. Sans être la seule piste d’amélioration de l’offre de soins primaires dans tous les territoires, de tels stages permettraient alors une majoration de l’offre de soins primaires. Cette quatrième année envisagée depuis longtemps par le Collège national des généralistes enseignants (CNGE) – voire par l’Isnar – trouverait ainsi toute sa pertinence, tant en termes de formation qu’en termes de service rendu à la population.
L’urgence du moment est donc bien d’augmenter le nombre et les compétences pédagogiques des maîtres de stage des universités (MSU) par une formation initiale et continue de qualité.
Or, le 22 décembre dernier, un arrêté1 a profondément modifié la formation des MSU en la limitant au strict minimum, en réduisant sa prise en charge par l’Agence nationale du développement professionnel continu (ANDPC) et en compliquant sensi­blement les conditions de renouvellement de leur agrément.
Sans attendre, étudiants, internes et enseignants de médecine générale2 ont vivement dénoncé ce texte3 vis-à-vis duquel ils avaient déjà exprimé leurs craintes et leur opposition.
L’application de l’arrêté du mois de décembre ne permettra qu’une formation insuffisante et parfaitement offensante pour ceux qui, depuis des années, ont œuvré pour une filière universitaire de médecine générale exemplaire. Pour conduire un interne à une parfaite autonomie de pratique, les MSU doivent absolument être formés à l’apprentissage des compétences utiles au généraliste, aux supervisions directes ou indirectes et aux objectifs du tutorat. Cela nécessite une véritable préparation à de nombreux outils pédagogiques.
D’après le CNGE, les conséquences de l’arrêté se font déjà largement ressentir : plus de 200 confrères auraient renoncé à devenir MSU ! Revoir cet arrêté serait une décision de bon sens.
Espérons que nos prochains ministres de tutelle seront plus clairvoyants, plus pragmatiques et véritablement à l’écoute des critiques des principaux intéressés, internes et enseignants de médecine générale…
Références
1. Arrêté du 22 décembre 2021 relatif aux modalités et conditions de l'agrément des maîtres de stage des universités accueillant des étudiants de deuxième et de troisième cycles des études de médecine. https://bit.ly/3B15zFJ
2. L’Association nationale des étudiants en médecine de France (Anemf), l’Intersyndicale nationale autonome représentative des internes de médecine générale (Isnar-IMG), le Syndicat national des enseignants en médecine générale (Snemg) et le Collège national des généralistes enseignants (CNGE)
3. CNGE. Communiqué de presse du 5 janvier 2022. https://bit.ly/3LnJ5Ub