Quoi de neuf dans la NASH ?
La grande nouveauté dans cette pathologie concerne sa terminologie, qui a changé tout récemment. En effet, l’ancien terme « non alcoholic fatty liver disease » (NAFLD) ou en français « stéatopathie hépatique non alcoolique » était vécu comme stigmatisant pour le patient et son diagnostic reposait sur l’élimination des autres causes de maladie du foie. La nouvelle terminologie comprend le terme général de « steatotic liver disease » (maladie du foie stéatosique) qui regroupe l’ensemble des affections hépatiques entraînant une stéatose (notamment la consommation d’alcool, l’atteinte métabolique, la stéatose d’origine iatrogène etc…). Chez les patients avec une dysfonction métabolique, au lieu de NAFLD et NASH (forme agressive), on parle maintenant de MASLD (metabolic dysfunction-associated steatotic liver disease) et de MASH (metabolic dysfunction-associated steatohepatitis), respectivement. Ces termes permettent de prendre en compte l’origine de la maladie hépatique, c’est-à-dire le dysfonctionnement métabolique. Au-delà de la pure terminologie, une série de critères diagnostiques positifs ont été définis dans les dernières recommandations érigées sous l’égide des associations européenne, américaine et sud-américaine d’hépatologie (encadré). Ainsi, le diagnostic de MASLD repose sur la présence d’une stéatose hépatique et un critère métabolique (encadré) associé une consommation d’alcool ≤ 2 verres/j pour la femme et ≤ 3 verres/j pour l’homme en l’absence d’autre cause de stéatose.
Autre point nouveau : nous savons que l’alcool a un rôle synergique avec les facteurs métaboliques sur la progression de la maladie hépatique. Ainsi, on parle d’une nouvelle pathologie, la MetALD (pour metabolic dysfunction and alcohol-associated liver disease) chez des patients ayant à la fois une stéatose d’origine métabolique et une consommation d’alcool au-dessus des recommandations de l’OMS, c’est-à-dire plus de 2 verres/j pour les femmes et de 3 verres/j pour les hommes. À noter qu’en cas de consommation d’alcool massive (> 5 verres/j pour la femme et > 6 verres/j pour l’homme, on parle d’hépatopathie associée à l’alcool, indépendamment de la présence de facteurs métaboliques). D’où l’intérêt d’évaluer régulièrement la consommation d’alcool des patients.
Qui faut-il dépister aujourd’hui en soins primaire et comment ?
L’identification précoce de la maladie métabolique du foie est essentielle pour mettre en place des mesures pour prévenir sa progression et ses complications. Cependant, il n’est pas recommandé de réaliser un dépistage systématique en population générale. Si toutes les recommandations s’accordent sur le fait qu’il faut cibler le dépistage sur les personnes les plus à risque, la définition de cette catégorie varie selon les diverses guidelines. Un certain consensus se dégage néanmoins sur certaines populations : les diabétiques (jusqu’à 19 % ont une fibrose avancée), les obèses, les patients ayant des troubles métaboliques (surpoids, HTA, dyslipidémie…), ceux ayant une consommation d’alcool supérieure aux recommandations OMS ou des antécédents familiaux de cirrhose liée à la stéatose.
Le score de prédiction le plus validé est le FIB- 4 . C’est un test simple calculé à partir de 3 paramètres biologiques simples : les transaminases ASAT/ALAT, les plaquettes et l’âge. Attention : le bilan hépatique seul n’est pas suffisant pour le dépistage : certains patients ayant une stéatopathie métabolique sévère ont des transaminases normales !
Quelle conduite à tenir en MG en pratique ?
Le FIB- 4 a une forte valeur prédictive négative : en dessous de 1,3, on peut exclure une fibrose avec plus de 80 % d’exactitude. Le test doit ensuite être refait tous les 2 ans chez les patients à risque. En revanche, en cas de résultat > 1,30, celui-ci n’est pas suffisamment performant pour affirmer une fibrose avancée. Il faut donc adresser le patient au spécialiste pour des examens complémentaires (Fibroscan, ou test sanguin spécialisé de fibrose hépatique).
Deux messages importants : il faut toujours tenir compte de la situation globale du patient et vérifier l’absence de faux positif des différents paramètres du FIB- 4 (par exemple, chez un patient sous chimiothérapie, le dépistage de la fibrose hépatique n’est pas forcément pertinent et en plus, une thrombopénie iatrogène peut faire faussement augmenter le FIB- 4) et penser à éliminer les autres causes de maladie chronique du foie (VHB, VHC…) en cas de cytolyse.
L’interprétation du FIB- 4 diffère-t-elle selon l’âge du patient ?
Un âge avancé pouvant faire surestimer le risque de fibrose (il s’agit d’un paramètre inclus dans le FIB- 4), certaines recommandations ont proposé un cut-off du FIB- 4 > à 2,0 pour les plus de 60 ans. Cependant, en France, on utilise le seuil de 1,3 quelque que soit l’âge. Au-delà de 75 ans, la performance du FIB- 4 est diminuée mais son intérêt est discutable : le dépistage a du sens lorsque le patient est encore assez jeune (50 - 60 ans), l’objectif étant une prise en charge précoce avant l’apparition des lésions du foie.
Quels nouveaux traitements ?
Il n’y pas de nouveau traitement pharmacologique spécifique ayant une AMM dans la MASH. Toutefois, certains médicaments prescrits pour les comorbidités des patients ont un effet positif également sur la maladie du foie. En particulier, le sémaglutide – un analogue du GLP- 1 – a montré une efficacité sur les lésions de MASH : son utilisation est donc intéressante chez les diabétiques, d’autant qu’il a montré un bénéfice en prévention cardiovasculaire.
Une nouvelle molécule, le resmétiron – agoniste oral du récepteur β de l’hormone de la thyroïde exprimé par les cellules hépatiques – a montré très récemment des résultats encourageants dans un essai randomisé de phase III : la résolution histologique de la MASH a été observée chez 26 %- 30 % des patients du groupe resmétiron contre 10 % du groupe placebo ; son profil de tolérance semblait favorable (nausées et diarrhée principalement). Cette molécule pourrait avoir une place prochainement dans le sous-groupe de patients ayant une fibrose avancée chez qui les mesures hygiénodiététiques ne sont pas suffisantes.
Quelles mesures ont fait leurs preuves aujourd’hui ?
On recommande :
- une perte de poids chez les patients en surpoids/obèses (une réduction de 8 à 10 % permet une résolution de la MASH dans 90 % des cas) ;
- une activité physique quotidienne (pensez à prescrire l’« activité physique adaptée », remboursée en cas d’affection de longue durée comme le diabète) ;
- un régime équilibré, riche en fibres et pauvre en sucres, privilégiant les gras insaturés (alimentation méditerranéenne +++) ;
- la correction de chacun des facteurs de risque cardiovasculaire/métabolique (tabac, hypertension, LDL…) ;
- de limiter au maximum la consommation d’alcool.
Enfin, en cas de diagnostic de cirrhose du foie, il faut impérativement prescrire une échographie abdominale tous les 6 mois pour dépister un carcinome hépatocellulaire et adresser le patient à un spécialiste.
Rinella ME, Neuschwander-Tetri BA, Siddiqui MS, et al. AASLD Practice Guidance on the clinical assessment and management of nonalcoholic fatty liver disease. Hepathology 2023;77(5):1797-835.
Canivet CM, Boursier J. NASH : l’activité physique est essentielle. Rev Prat Med Gen 2020;34(1047);656-8.