à Polynucléaires neutrophiles (PN) < 1 700/mm3.1 Seul le chiffre absolu est à considérer. Notion d’inversion de formule : obsolète.
à Toute neutropénie contrôlée inférieure à 1 500/mm3 mérite d’être explorée.

Agranulocytose

à PN < 100/mm3, mais un chiffre < 500/mm3 justifie la même démarche.2
à Diagnostic fait sur l’hémogramme. Tout épisode infectieux grave, mais aussi banal (angine, aphtes buccaux), ne répondant pas à une antibiothérapie usuelle justifie une NFS.
à Risque d’infection bactérienne sévère et de choc septique.
à Hospitaliser en urgence pour trouver la cause.
à Myélogramme indispensable pour rechercher un envahissement médullaire leucémique, en particulier leucémie aiguë promyélocytaire (LAM3).
à Une neutropénie auto-immune peut exceptionnellement être en cause.
à Traitement préventif : isolement protecteur en milieu hospitalier.
à Si fièvre ou signes infectieux : antibiothérapie générale à large spectre, adaptée au terrain et au contexte sans attendre les résultats des prélèvements bactériologiques

Neutropénie sévère

à De 500 à 800 PN/mm3.
à Risque bactérien faible, mais risque fungique majoré, surtout si la neutropénie se prolonge, notamment après chimiothérapie, ou si portes d’entrée infectieuses (mucite, entérite, cathéter implantable), chez le sujet âgé dénutri et en cas de comorbidités (insuffisance rénale ou respiratoire).
à Neutropénie persistante (non médicamenteuse) : impose un myélogramme pour rechercher une leucémie aiguë, un syndrome myélodysplasique.
Neutropénies modérées
De 800 à 1 500 PN/mm3, les plus fréquentes.

Avec d’autres anomalies de l’hémogramme

à Thrombopénie : rechercher un hypersplénisme, le plus souvent par hypertension portale, cirrhose, thrombose porte, voire sur rate tumorale.
à Pancytopénie : évoquer une hémopathie et faire un myélogramme.
à Anémie macrocytaire : suspecter une carence en vitamine B12 ou folates, ou une atteinte médullaire débutante (syndrome myélodysplasique, leucémie).

Neutropénie isolée

à Bénigne, dite de margination : fréquente, jamais symptomatique, de découverte fortuite, modérée (de 1 200 à 1 700 PN/mm3) et oscillante.
à Liée à une anomalie de répartition des PN, en faveur du pool marginé.
à À évoquer devant chronicité (anciens hémogrammes), fluctuations avec des NFS normales entre 2 épisodes en l’absence d’autre cause.
à Ethnique : chez les Africains, Afro-Américains ou Antillais, les PN sont plus bas physiologiquement. Caractère permanent, retrouvé sur plusieurs hémogrammes.
Selon la cause

Maladies infectieuses

à Hépatites virales, grippe, rougeole, MNI, infections à CMV, parvovirus B19, entérovirus, VIH s’accompagnent de neutropénie en phase aiguë. Contexte et évolution régressive sont évocateurs.
à Typhoïde et brucellose, voire sepsis bactériens sévères : neutropénie parfois profonde.
à Leishmaniose viscérale : le myélogramme peut identifier le parasite.

Maladies auto-immunes

à Polyarthrite rhumatoïde (PR) dans le cadre d’un syndrome de Felty (moins de 5 % des PR) avec neutropénie parfois profonde (à risque infectieux) et splénomégalie.
à La PR peut aussi être associée à une hémopathie lymphoïde chronique ou leucémie à grands lymphocytes granuleux : dite pseudo-Felty (rare).
à Lupus érythémateux systémique : leucopénie fréquente, principalement liée à une lymphopénie < 1 000 PN/mm3 dans 5 % des cas.
à Syndrome de Sjögren : diverses cytopénies sont possibles. Environ 15 % de neutropénies.
à Maladie de Basedow : neutropénie s’améliorant sous antithyroïdiens de synthèse.
à Déficit immunitaire commun variable, caractérisé par un défaut de production d’immunoglobulines (gammaglobulinémie < 5 g/L), avec parfois thrombopénie auto-immune.
à Proliférations lymphoïdes B, plus rarement : leucémie lymphoïde chronique, maladie de Waldenström.
à Neutropénie auto-immune primitive de l’enfant : apparition habituelle dans la première année de la vie, rémission spontanée fréquente en 1 à 2 ans.
à Neutropénie isolée : rechercher des anticorps anti-polynucléaires neutrophiles.3

Médicaments

à À évoquer systématiquement.
à Selon la susceptibilité individuelle : agranulocytoses aiguës ou neutropénies moins profondes.
à Arrêt immédiat du médicament suspecté.
à Parmi les molécules récentes : anti-TNF alpha et rituximab. Ce dernier (anticorps anti-CD20), indiqué dans les lymphoproliférations B, est aussi utilisé dans certaines maladies auto-immunes (PR, purpura thrombopénique immunologique). Neutropénie survenant 3 à 4 semaines après la dernière perfusion.
à Parfois sévère et, avec l’immunosuppression due à la maladie causale, source d’infections graves.4

Neutropénies constitutionnelles

à Exceptionnelles, diagnostiquées habituellement dès l’enfance.
à Maladie de Kostmann : neutropénie constante, profonde, dès la période néonatale.
à Neutropénie cyclique : affection autosomique dominante liée à une mutation du gène de l’élastase. Fluctuation du nombre de neutrophiles par cycles de 21 à 28 jours avec risques infectieux au nadir des PN.5
Références

* Hors chimiothérapie.
Encadre

Antithyroïdiens : carbimazole (Néo-Mercazole), thiamazol (Thyrozol), benzylthiouracile (Basdène), propylthiouracile (Propylex)

Neuroleptiques : clozapine (Leponex)

Antidépresseurs : miansérine

Antibiotiques : bêtalactamines, cotrimoxazole (Bactrim), vancomycine, rifampicine

Antirétoviraux : zidovudine (Retrovir), lamivudine (Epivir, Zeffix, Combivir)

Antiprotéases : toute la classe

Antifungiques : fluconazole (Triflucan)

Diurétiques : furosémide (Lasilix), spironolactone (Aldactone, Spiroctan, Aldactazine)

Anti-agrégants plaquettaires : ticlopidine (Ticlid), clopidogrel (Plavix)

Anti-inflammatoire colique : sulfasalazine (Salazopyrine)

Biothérapies : infliximab (Remicade), étanercept (Enbrel), rituximab (Mabthera), tocilizumab (Roactemra)

* Hors chimiothérapie.
Références
1. Aoun C, Delarue R. Cytopénies d’origine médicamenteuse. Rev Prat Med Gen 2013;27:461-6.

2. Andrès E, Maloisel F. Agranulocytoses médicamenteuses idiosyncrasiques. Rev Med Interne 2006;27:209-14.

3. Autrel-Moignet A, Lamy T. Autoimmune neutropenia. Presse Med 2014;43(4 Pt 2):e105-18.

4. Wolach O, Balrey O, Lahav M. Late-onset neutropenia after rituximab treatment: case series and comprehensive review of the literature. Medicine (Baltimore)2010;89:308-18.

5. Donnadieu J, Fenneteau O. Neutropénies constitutionnelles et acquises. EMC Hématologie 2005;2:158-86.

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