Les nitrites et nitrates sont ingérés par deux biais : d’une part, ils sont présents naturellement dans certains aliments (surtout légumes à feuilles vertes et betteraves), ainsi que dans l’eau et les sols, en raison notamment de l’utilisation d’engrais azotés ; d’autre part, ils sont utilisés en tant qu’additifs alimentaires – nitrite de potassium (e249) et de sodium (e250) et nitrate de potassium (e252) – dans les charcuteries, pour garantir une meilleure conservation (ils inhibent le développement de bactéries telles que salmonelles et listeria et des toxines produites par Clostridium botulinum) et sont aussi responsables de la couleur rose des charcuteries cuites. Ces composés sont présents dans plus de 15 000 produits sur le marché français.
L’association entre le risque de cancer colorectal et l’exposition aux nitrites et/ou aux nitrates a été confirmée en 2022 par l’Anses, qui recommande de limiter l’utilisation des additifs nitrés dans les viandes transformées et de limiter la consommation de celles-ci à 150 g par semaine.
Dans une nouvelle étude parue dans PLOS Medecine, des chercheurs de l’Inserm se sont intéressés au rôle de ces éléments dans la survenue du diabète de type 2. Ils ont utilisé les données de 104 168 participants de la cohorte française NutriNet-Santé (79,1 % de femmes ; âge moyen = 42,7 ans) recueillies entre 2009 et 2021. Les participants n’avaient pas de diabète de type 2 (DT2) à l’inclusion, et l’apparition de cette pathologie a été scrutée sur un suivi médian de 7,3 ans.
L’exposition aux nitrites et nitrates a été évaluée grâce à des questionnaires, en ce qui concerne l’ingestion via des additifs alimentaires : les participants devaient compléter à l’inclusion et tous les 6 mois trois questionnaires renseignant leurs consommations alimentaires sur 24 heures (avec noms et marques des produits). Pour les nitrates et nitrites provenant des sources naturelles (eau, sols, aliments non transformés), les niveaux d’exposition ont été estimés en utilisant les données de l’Autorité européenne de sécurité des aliments et celles du contrôle sanitaire français sur la qualité de l’eau du robinet, par région de résidence des participants. Les antécédents médicaux de ces derniers, leurs données sociodémographiques et les informations sur leur pratique d’activité physique et leur mode de vie étaient également pris en compte dans l’analyse.
Résultats : sur la période de suivi, 969 cas de DT2 ont été détectés dans la cohorte. L’analyse a révélé, après ajustement, une association entre l’exposition totale aux nitrites et une augmentation de 27 % du risque de développer un DT2 (HR = 1,27 ; IC95% : 1,04-1,54) ; l’exposition exclusivement via l’eau contaminée et les aliments non transformés affichait, quant à elle, un sur-risque de 26 % (HR = 1,26 ; IC95 % : 1,03-1,54). Par ailleurs, les participants ayant la plus haute ingestion de nitrites via les additifs alimentaires – en particulier le nitrite de sodium (e250) – avaient un risque augmenté de 53 % de développer un DT2, comparés aux personnes n’ingérant pas ces additifs (HR = 1,53 ; IC95% : 1,24-1,88). En revanche, aucune association entre l’exposition aux nitrates et un sur-risque de DT2 n’a été mise en évidence.
Bien qu’aucun lien causal ne puisse être affirmé à partir de cette étude – cette association devant faire l’objet davantage d’études prospectives et expérimentales –, ces résultats fournissent de nouveaux éléments dans le contexte des débats actuels sur la nécessité de réduire ces additifs dans les aliments transformés. Ils étayent également le besoin de disposer d’une meilleure réglementation sur la contamination des sols, concluent les auteurs.
Srour B. L’exposition alimentaire aux nitrites associée à un risque accru de diabète de type 2. Inserm 17 janvier 2023.