Les Journées nationales de médecine générale ont eu lieu début octobre. Il est impossible de revenir en peu de mots sur l’intégralité des messages forts reçus durant les nombreuses sessions de formation. Le choix est donc ici porté sur quelques-uns des plus nouveaux et contre-intuitifs.

 

• Le tabac gagne encore du terrain chez les femmes, qui meurent aujourd’hui 6 fois plus de pathologies cardiovasculaires que du cancer du sein ! Et de la prévention au dépistage, il n’y a qu’un pas : la question se pose de le généraliser pour le cancer du poumon (un cas annuel par médecin généraliste en moyenne, hommes et femmes confondus), car « dépister une maladie curable n’est jamais du temps perdu » et la réalisation, chez les patients à risque, d’un scanner low dose non injecté tous les deux ans s’est montrée efficace.

• S’il est un conseil à donner aux patients, quels que soient leur âge, sexe, pathologies sous-jacentes et facteurs de risque, c’est de maintenir une activité physique adaptée (« ce n’est pas parce que le mouvement est douloureux qu’il abîme davantage les structures ») ! La lombalgie concerne 80 % de la population. Les trois sports ayant fait la preuve de leur bénéfice sur sa forme chronique sont la marche rapide (ou la course à pied), l’équitation et le tai-chi. Autre message contre-intuitif utile à diffuser en la matière : aucune imagerie n’est nécessaire devant une lombalgie commune aiguë et isolée du sujet entre 20 et 55 ans, au risque d’angoisser le patient et de chroniciser sa douleur (31 % des TDM ou IRM retrouvent des hernies discales chez le patient de 30 ans asymptomatique).

• « Ça ne me ferait pas de mal de maigrir, docteur ! » Quelle personne âgée n’a jamais affirmé cela à son médecin ? Or, à un âge avancé de la vie, perdre du poids signifie perdre de la masse musculaire. Le risque de dénutrition est majeur. Peser les patients est fondamental, car les variations pondérales sont bien plus informatives qu’un dosage de préalbuminémie.

Ainsi, une perte pondérale de 2 kg ou plus en un mois ou de 4 kg ou plus en six mois est un facteur de surmortalité et de risque de dénutrition.

• Adultes comme enfants doivent bénéficier d’une supplémentation vitaminique D avec une posologie la plus physiologique possible, en évitant donc les doses de charge. Le déficit en vitamine D, qui concerne 50 % de la population en moyenne, est en effet associé à des risques infectieux et fracturaires. Or il est facilement modifiable sans risque et à moindre coût.

• Après un accident vasculaire cérébral, outre la prévention des récidives, il faut prendre en charge les séquelles non (ou peu) visibles qui peuvent survenir : troubles praxiques, du schéma corporel, psychiques… Autant de symptômes invalidants au quotidien, sources potentielles de souffrance pour des patients dont le handicap n’est pas reconnu par la société.

• Chez la femme enceinte (qu’elle soit professionnelle de la petite enfance ou non), il n’y a pas de place pour une sérologie CMV systématique ! Seuls des conseils d’hygiène doivent être absolument donnés pour prévenir une séroconversion : éviter tout contact non protégé avec la salive et les urines des jeunes enfants, tant pour la future mère que pour son conjoint.

• Une question souvent posée est celle du matériel dont il faut disposer au cabinet médical pour gérer les urgences vitales. La seule obligation médico-légale est de pouvoir assurer l’administration immédiate de ceftriaxone injectable devant la constatation d’un purpura fulminans.1 Pour le reste, il est recommandé d’adapter son matériel en fonction de son mode d’exercice, son environnement et ses compétences, puisqu’aucun texte officiel ne fait foi.

• L’urgence chez l’enfant : la prévention ! L’augmentation des faits de violence largement décrits en ces temps de pandémie nous enjoint à être toujours plus vigilants : il est de notre devoir de repérer les facteurs de vulnérabilité (famille monoparentale, accouchement prématuré, grossesse pathologique, préexistence de maladies psychiatriques, handicap, isolement, difficultés socio-économiques, addictions…) afin d’accompagner au mieux les (futurs) parents, en réseau. Les aides possibles sont multiples et doivent être adaptées à chaque situation : mise en place d’un étayage (interventions à domicile, soins psychiatriques, accueil en collectivités, unités d’hospitalisation mère-bébé…), explications sur les besoins du nourrisson, sur la gestion de ses pleurs, sur les dangers qu’il encourt (couchage, secouement…).

Illustrés par des cas cliniques, des dizaines d’autres messages importants pour la pratique en médecine générale ont été transmis. Vous les retrouverez, tout au long de l’année, sur notre site internet et dans les pages de La Revue du Praticien Médecine générale.

Kristell Delarue, La Revue du Praticien

Notes :

1. Avis du Conseil supérieur d’hygiène publique de France, section maladies transmissibles, relatif à la conduite à tenir immédiate en cas de suspicion clinique de purpura fulminans (séance du 22 septembre 2006).

Pour aller plus loin, sur quelques-unes des sessions :

[En direct JNMG 2021] Covid : va-t-on s’en sortir ?

[En direct JNMG 2021] Vertiges : quand évoquer une maladie de Ménière ?

[En direct JNMG 2021] Toux chronique réfractaire : que faire ?

[En direct JNMG 2021] Après un AVC : quelle prise en charge rééducative ?

[En direct JNMG 2021] Recos de prise en charge du diabète de type 2 : du nouveau !