Depuis 2017, le logo français Nutri-Score peut figurer sur les emballages des aliments. Composé d’une échelle de 5 couleurs et 5 lettres, il est destiné à informer les consommateurs sur la qualité nutritionnelle des produits. Son intérêt et son efficacité dans l’amélioration de la santé des populations, particulièrement des plus défavorisées, ont été validés par de multiples études scientifiques.
Pourtant, cet outil de santé publique fait régulièrement l’objet de remises en cause et de campagnes de discrédit de la part de puissants lobbies de l’industrie alimentaire – soutenus par des politiques – car il menace leurs intérêts économiques.
Parmi les critiques faites à son égard et instrumentalisée par ces lobbies : le fait qu’il ne tient compte que de la composition nutritionnelle et non du degré de transformation des aliments, des additifs ou des résidus de pesticides. « Ce sont trois paramètres importants mais qu’on ne peut pas regrouper : comment juger les additifs, alors qu’il y a des effets cocktail ? Quel est le pourcentage qu’on attribue à ces trois dimensions dans le score final ? C’est impossible, d’un point de vue scientifique, de proposer un seul indicateur qui englobe tous les éléments », explique le Pr Serge Hercberg, qui dirige l’équipe à l’origine du Nutri-Score. En découle un second reproche : des aliments réputés sains comme l’huile d’olive sont moins bien classés (D ou E) que des produits comme les céréales de petit déjeuner, qui sont « moins saines », par exemple. Argument fallacieux, indique le Pr Hercberg : on ne peut comparer que ce qui est comparable, c’est-à-dire la qualité nutritionnelle des aliments qui ont une pertinence à se substituer entre eux (par exemple : beurre et huile d’olive).
Ainsi, pour permettre aux consommateurs de comparer encore mieux les produits selon leur qualité nutritionnelle, le Nutri-Score évolue en 2024. Les éléments pris en compte dans le calcul restent globalement les mêmes, mais les règles de calcul du score ont été revues :
- Pour les boissons spécifiquement, la présence d’édulcorants est désormais prise en compte afin d’éviter que les industriels utilisent ces additifs à la place du sucre pour améliorer la note de leurs produits. Les sodas lights contenant des édulcorants ne seront plus notés B, mais de C à E.
- La note de certains poissons gras et des huiles riches en bonnes graisses va s’améliorer alors que celle d’autres produits encore trop sucrés ou trop salés va se dégrader.
- Il sera plus facile de repérer les produits à base de farine complète, riches en fibres, qui auront désormais de meilleurs scores que leurs équivalents raffinés.
- Enfin, la volaille sera mieux classée que la viande rouge dont la consommation est à limiter.
Entre 30 et 40 % des produits sont concernés par ces changements de score.
Ces changements, qui s’appliquent par arrêté dans les sept pays ayant officiellement adopté le Nutri-Score (France, Allemagne, Belgique, Luxembourg, Pays-Bas, Espagne et Suisse), doivent être appliqués à partir de janvier sur les sites d’achat en ligne. Mais les industriels ont encore deux ans pour écouler leurs stocks avec les anciennes étiquettes.
Pour rappel, la Commission européenne avait annoncé en 2020 son intention d’adopter avant la fin de 2022 ce logo nutritionnel obligatoire pour l’Europe, mais cela n’a toujours pas été fait. Si la part de marché estimée des marques engagées n’a cessé d’augmenter (58 % des volumes de ventes en 2022), son apposition sur les produits repose encore aujourd’hui sur le volontariat des industriels.
Début 2024, 1 359 marques étaient engagées en faveur du Nutri-Score sur le marché français. La liste de ces marques est consultable sur le site de Santé publique France.
Hercberg S, Galan P, Kesse E, et al. Démystifier les fake news concernant Nutri-Score. Rev Prat 2022;72(6):599-604.
Nobile C. Entretien avec le Pr Serge Hercberg. Nutri-Score : effets sur la mortalité et le risque de cancer. Rev Prat (en ligne) 28 février 2021.
Hercberg S, Galan P, Egnell M, et al. Comment essayer de décrédibiliser un outil de santé publique qui dérange ? Rev Prat 2019;69(5):489-95.