objectifs
Diagnostiquer une obésité de l’enfant.
Argumenter l’attitude thérapeutique et planifier le suivi du patient.
L’obésité chez l’enfant représente un véritable enjeu de santé publique. Elle persiste le plus souvent à l’âge adulte et peut entraîner des conséquences sur la santé à plus ou moins long terme. C’est une maladie chronique qui ne bénéficie pas d’une thérapeutique médicamenteuse reconnue malgré quelques récents résultats prometteurs. Elle est cependant encore considérée la plupart du temps par les familles voire même par certains soignants comme une phase transitoire qui « ne devrait pas durer ». En plus d’être chronique, elle est d’évolution lente tant au niveau des complications que des résultats de la prise en charge.
La tendance mondiale actuelle concernant l’indice de masse corporelle (IMC) est une stabilisation (tout en restant à un niveau élevé) dans certains pays à haut revenu et, à l’inverse, une augmentation dans d’autres régions (certaines régions d’Asie). Pourtant, la prévalence de l’obésité augmente globalement dans le monde, tous âges confondus (de 5 à 19 ans) de 0,7 % (0,4-1,2) en 1975 à 5,6 % (4,8-6,5) en 2016 chez les filles et de 0,9 % (0,5-1,3) en 1975 à 7,8 % (6,7-9,1) en 2016 chez le garçon.
Même si, en France, la prévalence a tendance, depuis le milieu des années 2000, à se stabiliser (un peu moins de 1 enfant sur 5 en surpoids avec 3 à 4 % en obésité), des inégalités sociales et territoriales demeurent et de ce point de vue l’obésité infantile est un paradigme.

Comment définir le surpoids chez l’enfant

Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), le surpoids et l’obésité sont définis comme « une accumulation anormale ou excessive de graisse qui présente un risque pour la santé ».

IMC

Pour mesurer le surpoids chez l’adulte, l’OMS recommande d’utiliser l’indice de masse corporelle (IMC), exprimé en poids divisé par la taille au carré, en kg/m2. Le surpoids correspond à un IMC ≥ 25 kg/m2. L’obésité se définit par un IMC ≥ 30 kg/m2.
Chez l’enfant, l’obésité est plus complexe à définir en raison des variations de poids en fonction de l’âge.
En France, on utilise les courbes de référence françaises établies par Rolland-Cachera en 1991, qui sont dans les carnets de santé des enfants depuis 1995. Elles sont établies en centiles, permettant de définir les zones d’insuffisance pondérale (< 3e percentile), de normalité (3e-97e percentile) et de surpoids (> 97e percentile) depuis la naissance jusqu’à l’âge de 18 ans. En revanche, elles ne permettent pas de distinguer, parmi les enfants en surpoids, ceux qui présentent une obésité.
L’International Obesity Task Force (IOTF) a élaboré en 2000 une définition de surpoids et d’obésité chez l’enfant, en utilisant des courbes d’IMC établies à partir de données recueillies dans six pays disposant d’échantillons représentatifs. Fondées sur des données de morbi-mortalité à l’âge adulte, les courbes IOTF devraient avoir une valeur prédictive ; elles sont utilisées pour les études de prévalence. Disponibles de 2 à 18 ans, les seuils du surpoids et d’obésité sont constitués par les courbes de centiles atteignant respectivement les valeurs de 25 à 30 kg/m² à 18 ans (fig. 1). Les valeurs d’IMC au-dessus de l’IOTF-25 correspondent ainsi au surpoids incluant l’obésité, celles entre IOTF-25 et IOTF-30 correspondent au surpoids, obésité exclue, celles au-dessus de l’IOTF-30 définissent l’obésité et celles au-dessus de l’IOTF-35 définissent l’obésité sévère. La courbe IOTF-25 est proche de la courbe du 97e percentile des références françaises.

Z-score

Pour étudier des cohortes d’individus d’âge et de sexe différents avec plus de précision, on utilise le Z-score IMC selon l’OMS, exprimé en dérivation standard (DS) ; il permet de neutra­liser l’effet de l’âge et de la taille dans le calcul de l’IMC.
Les valeurs « M » (médiane), « S » (écart type) et « L » (facteur cor­rectif) utilisées pour les calculs sont celles des tables de référence françaises et dépendent de l’âge et du sexe de l’enfant.

L'IMC est-il suffisant pour définir surpoids et obésité ?

L’IMC se calcule à partir du poids corporel, qui correspond à l’association de la masse graisseuse, musculaire et osseuse. Les enfants très musclés ou trapus ont un IMC élevé qui n’est pas représentatif de leur masse grasse. L’IMC doit donc être ajusté avec le tour de taille (en cm) mesuré à la médiane entre le rebord costal inférieur et l’épine iliaque antérieure. Il permet de mesurer la graisse abdominale, qui est un facteur de risque méta­bolique. Il doit être rapporté à la taille de l’enfant (rapport tour de taille sur taille : TT/T) et est normalement inférieur à 0,5 (valable entre 3 et 18 ans). Si un enfant présente un TT/T < 0,5 et un IMC en zone de surpoids, on peut dire que l’IMC est surévalué et que l’enfant a une corpulence normale. À l’inverse, un enfant avec un TT/T > 0,5 et un IMC normal présente un risque métabolique accru.

Description de la courbe d’IMC

Plus que le niveau de corpulence en lui-même, il est important d’apprécier l’allure évolutive de la courbe : une réascension trop précoce de la courbe (avant 5 ans) est appelée rebond d’adiposité précoce et est un facteur de risque majeur d’obésité ultérieure. Le croisement des couloirs au-dessus du 50e percentile est également un signe d’alerte. Cette courbe représente donc un formidable outil de prévention (fig. 2), et la tracer permet d’éviter d’atteindre la zone de surpoids et de rechercher avec la famille les raisons de cette montée progressive.

Annonce

La courbe d’IMC est aussi un bel outil pédagogique permettant d’expliquer à l’enfant et aux parents la corpulence de leur enfant. La dynamique de la courbe et le moment où la courbe s’accélère aident la famille à faire des liens éventuels avec certains événements de vie. Elle leur permet aussi par un simple regard de les alerter de la possible gravité et de la nécessité d’une prise en charge rapide. Le mot « obésité » expliqué à partir de la courbe correspond simplement à un seuil : au-dessus de l’IOTF-30, ce qui permet de le dédramatiser et d’éviter qu’il prenne une connotation jugeante. Cette courbe permet ensuite de valoriser l’enfant en insistant sur la réussite même si elle peut paraître minime comme par exemple la pente ascendante de la courbe qui s’infléchit. L’IMC est repris, montré, expliqué et discuté à chaque consultation avec l’enfant et ses parents.

Facteurs associés au risque de surpoids et d’obésité commune de l’enfant et de l’adolescent

Nous ne sommes pas tous égaux devant le risque de surpoids. Le Pr Froguel explique que « si, à l’échelle des populations, le mode de vie joue un rôle moteur dans l’épidémie actuelle d’obésité, ce sont bien nos susceptibilités individuelles (génétiques ou épigénétiques) qui déterminent notre destin pondéral et métabolique(cf.  études chez des dizaines de milliers de jumeaux de tout âge). Ainsi, 70 % des variations de l’IMC sont d’origine génétique, même si l’impact des gènes peut diminuer considérablement chez ceux qui s’astreignent à une activité physique intense ou privilégient une alimentation saine ».
À la jonction de cette part génétique, épigénétique et environnementale, on identifie un certain nombre de facteurs précoces, de la vie fœtale aux premières années de vie, qui jouent un rôle sur la prise de poids ultérieure.
Selon le rapport de la Haute Autorité de santé (HAS) de 2011, les facteurs de risque associés au surpoids et à l’obésité des enfants et adolescents sont les suivants :
  • surpoids et obésité parentale, notamment de la mère au début de la grossesse ;
  • prise de poids excessive pendant la grossesse. Pour cela, des recommandations en fonction de l’IMC de la mère avant la grossesse ont été émises (tableau 1) ;
  • grossesse : tabagisme maternel, diabète maternel quel que soit son type ; un déséquilibre de l’apport d’acides gras au détriment des oméga-3 chez la mère et l’exposition à certains polluants ;
  • excès ou défaut de croissance fœtale (parfois conséquence des facteurs précédents) ;
  • gain pondéral accéléré dans les deux premières années de vie ;
  • difficultés socio-économiques des parents et cadre de vie défavorable ;
  • manque d’activité physique et sédentarité : l’activité physique pratiquée régulièrement induit une diminution de la masse grasse et réduit les complications métaboliques. La sédentarité est la principale cause de la baisse des dépenses énergétiques. C’est un facteur de risque majeur d’obésité. Les écrans sont majoritairement responsables. Des recommandations ont été émises en fonction de l’âge (tableau 2) ;
  • manque de sommeil : plusieurs études ont mis en évidence un lien entre une réduction ou un excès de temps de sommeil en fonction de l’âge et l’IMC trop élevé. Trop ou pas assez de sommeil entraîne une perturbation des hormones de régulation de la faim et de la satiété. Des recommandations ont également été émises (tableau 3) ;
  • attitudes inadaptées de l’entourage (style parental) par rapport à l’alimentation (restrictives ou trop permissives) ;
  • facteurs psychopathologiques : dépression chez les filles, hyper­phagie boulimique ;
  • négligences ou abus physiques et sexuels dans l’enfance ou l’adolescence ;
  • handicap moteur ou mental. Les déterminants sont complexes : liés à la maladie elle-même, trouble de la satiété d’origine centrale, aux difficultés de comportement (alimentation réconfort), à l’environnement éducatif et aux traitements médicamenteux ;
  • l’allaitement maternel semble avoir un effet protecteur de faible importance.

Classification de l’obésité

L’obésité est caractérisée par une large hétérogénéité phénotypique. Le développement de l’obésité est le résultat d’une inter­action entre de multiples facteurs environnementaux (suralimentation, sédentarité…) et des facteurs génétiques. Grâce aux nouveaux outils de criblage génétiques, la connaissance des bases molécu­laires de l’obésité a énormément progressé ces dernières années. Et l’on peut dire que l’obésité est un continuum entre l’obésité monogénique (à début précoce) où les facteurs génétiques sont prédominants et l’obésité commune qui est une obésité à hérédité polygénique avec un effet cumulatif de facteurs de prédisposition génétique et de facteurs environnementaux (épigénétique).
Les obésités sévères à début précoce peuvent être classées en :
  • obésités monogéniques, liées à la présence d’une mutation unique sur un gène. Elles peuvent toucher un des huit gènes connus (LEP, LEPR, MC4R, POMC, PCSK1, BDNF, NTKR2, SIM1). Tous ces gènes conduisent à la synthèse de protéines clés d’une voie centrale dans la régulation de la prise alimentaire et du poids : la voie de la satiété déclenchée par la production d’une hormone, la leptine dans le tissu adipeux. Elles sont asso­ciées à un trouble du comportement alimentaire très précoce et des déficits hormonaux (hypogonadisme, déficit en adreno- cortico-trophic hormone [ACTH], etc.). De nouvelles thérapeutiques issues de ces connaissances semblent prometteuses pour le traitement physiopathologique de ces obésités ;
  • obésités syndromiques où le diagnostic est retenu devant une obésité associée à un autre signe tel qu’un retard du développement, une hypotonie néonatale, des déficits sensoriels, une dysmorphie faciale, une malformation congénitale, un trouble précoce du comportement alimentaire. La croissance staturale est parfois insuffisante, associée ou non à un hypogonadisme, et ces signes nécessitent des explorations hormonales.
Les obésités endocriniennes ne sont pas forcément précoces. Elles regroupent le syndrome de Cushing, l’hypothyroïdie, le déficit en hormone de croissance et le syndrome hypothalamique. On peut ajouter à ces obésités celles d’origine tumorale cérébrale qui provoquent une atteinte des centres hypothalamiques participant à la régulation de l’appétit. L’orientation est faite devant une prise de poids et une croissance insuffisante, et les signes à rechercher correspondent à la pathologie endocrinienne suspectée.
Une autre classe correspond aux obésités iatrogènes qui peuvent se voir avec certains traitements contre l’épilepsie (valproate de sodium), certains neuroleptiques, des traitements par corticoïdes au long cours.
Enfin, quel que soit l’âge, on retrouve les obésités communes. Avant de la déclarer commune, il sera nécessaire de faire un examen clinique complet précédé d’un entretien de compréhension.

Entretien de compréhension

Comme le soulignent les recommandations de la HAS de 2011, on part du patient et de sa famille avec un entretien de compréhension recueillant les données afin d’élaborer le diag­nostic éducatif. Ce diagnostic éducatif aborde les questions suivantes :
  • « Qui est-il ? ». Repérage de signes éventuels de souffrance psychologique, en particulier troubles de l’estime de soi ;
  • « Qu’est-ce qu’il a ? ». Correspond à la partie clinico-biologique avec recherche des antécédents personnels (facteurs néonataux, chirurgie, notamment adénoïdectomie et amygdalectomie qui peuvent être un facteur déclenchant de la prise de poids, cure chirurgicale de cryptorchidie, trouble des apprentissages, prise de médicaments, âge de la marche : ronfle-t-il la nuit, présente-t-il une énurésie, s’endort-il dans la journée), et des antécédents familiaux notamment de diabète de type 2 chez les apparentés de 1er et 2e degrés, antécédents d’obésité dans la famille (on s’attachera à demander le poids maximum des parents car de plus en plus de parents de poids normaux ont subi une chirurgie bariatrique et ne le précisent pas toujours), déroulement de la grossesse. Il faut également s’assurer que les parents ne sont pas consanguins (importance dans les obésités monogéniques) ;
  • « Qu’est-ce qu’il fait ? ». Au niveau de l’alimentation, de la pratique sportive et de la sédentarité, temps d’écrans, combien de temps dort-il ? ;
  • « Qu’est-ce qu’il sait ? » ;
  • « Qu’est-ce qu’il croit ? » ;
  • « Que ressent-il ? » ;
  • « Quel est son projet ? » ;
  • « Quelle est sa demande ? ».
Cette approche inclut :
  • la reconnaissance par l’enfant et sa famille du rôle des facteurs environnementaux (et notamment l’entourage familial) ;
  • l’identification des attentes de l’enfant ;
  • l’évaluation de ses compétences dans la pratique de l’exercice physique, l’alimentation, etc., et des compétences d’adaptation qui les soutiennent (avoir confiance en soi, prendre des décisions, se fixer des buts et faire des choix, etc.) ;
  • l’appréciation de sa motivation et de celle de sa famille à apporter des changements à leurs habitudes de vie.
À partir de 8-10 ans et en fonction de la maturité de l’enfant, il peut être intéressant de prévoir, en plus des entretiens en famille, des temps d’entretien séparés pour les enfants et les parents.
Chez l’adolescent, il est recommandé que ces temps séparés soient systématiquement proposés. Cet entretien a pour but d’identifier les leviers sur lesquels il est possible d’agir pour modifier les habitudes de vie ayant contribué au développement et au maintien de l’obésité (sédentarité, temps passé devant les écrans, stress familiaux, conditions de prise des repas, courses, etc.).

Examen clinique

Il comprend :
  • la mesure du poids et de la taille. Tracer la courbe de taille est indispensable ;
  • la courbe d’IMC. Tracer la courbe est également indispensable et permet de situer le rebond d’adiposité. L’absence de rebond ou un rebond précoce est en faveur d’une obésité monogénique ou syndromique ;
  • la mesure du périmètre crânien : il permet d’évaluer si l’enfant présente une macro- ou microcéphalie, ce qui doit faire évoquer une obésité syndromique ;
  • les signes dysmorphiques : recherche d’anomalie du visage (oreilles mal ourlées, bouche en chapeau de gendarme, orientation des fentes palpébrales, grosses incisives…), acromicrie, brachymétacarpie, doigts allongés et fuselés, etc. ;
  • l’examen des téguments : acanthosis nigricans préférentiellement dans les zones du cou et axillaires qui témoignent d’une insulinorésistance et donc d’une prédisposition au diabète. Recherche de mycose dans les zones des plis. Vergetures des bras, des cuisses, etc. Palpation de nodules sous-cutanés en faveur d’une pseudo-hypoparathyroïdie. Évaluation de la pilosité chez la fille pubère dans les zones androgéno-dépendantes ;
  • le rapport tour de taille sur taille (TT/T) ;
  • l’auscultation cardiaque et la prise de tension artérielle avec un brassard adapté ;
  • l’examen buccal afin d’évaluer le volume des amygdales ;
  • l’examen pubertaire : développement des organes génitaux externes dans les 2 sexes et chez le garçon mesure de la verge qui est le plus souvent enfouie. Gynécomastie chez le garçon pubère et adipomastie chez la fille prépubère ;
  • l’examen orthopédique : examen des hanches, du dos, des genoux et des pieds.

Bilan

Dans les surpoids sans comorbidité : pas de bilan.
Dans les surpoids avec comorbidités ou obésité (IMC ≥ IOTF-30) : bilan hépatique, glycémie à jeun, bilan lipidique complet.
En cas de suspicion d’obésité syndromique :
  • recherche des anomalies neurosensorielles : bilan ophtalmologique (avec ERG/FO), consultation ORL (± audiogramme) ;
  • évaluation neuropsychologique devant un retard de développement, des troubles des apprentissages, troubles du comportement, troubles du comportement alimentaire, etc.) ;
  • troubles de l’oralité : bilan phoniatre ;
  • anomalies malformatives (scoliose, polydactylie, etc.) : bilan radiologique, échographie rénale, abdominale, cardiaque et imagerie par résonance magnétique (IRM) cérébrale ;
  • anomalies endocriniennes (retard statural, hypogonadisme, etc.) : bilan biologique et hormonal ;
  • génétique :
. si déficience intellectuelle et/ou troubles comportementaux : caryotype HR, profil de méthylation chromosome 15 (syndrome de Prader-Willi), X fragile, CGH-array,
. si dystrophie rétinienne : BBS/Cohen/Alström,
. si obésité précoce avant 3 ans ou avant 10 ans avec anomalies endocriniennes : POMC, LEP, LEPR, MC4R,
. si obésité sévère et précoce avec antécédents familiaux : MC4R.

Complications et prise en charge

On distingue les complications :
Psychopathologiques : à type d’anxiété, de dépression, de trouble du comportement et trouble du comportement alimentaire, addiction : nécessitent une consultation spécialisée.
Cutanées :
  • les vergetures simples, les mycoses : traitement local ;
  • les vergetures violacées et verticales : nécessitent un avis endo­crinologique ;
  • l’hypertrichose chez la jeune fille, notamment dans les zones androgéno-dépendantes : demande un avis endocrinien, à la recherche d’une hyperandrogénie ;
  • l’acanthosis nigricans : nécessite un avis endocrinologique, à la recherche d’une insulinorésistance et, si l’âge est supérieur à 10 ans dans le cadre d’une obésité, un test d’hyperglycémie per os (HGPO) fait partie des recommandations de l’Association du diabète américain (ADA).
Orthopédiques : épiphysiolyse de la tête fémorale, pieds plats, genu valgum, syndrome fémoro-patellaire, antétorsion fémorale, rachialgies, troubles de la statique vertébrale, épiphysite de croissance : nécessitent un avis orthopédique.
Cardiorespiratoires :
  • hypertension artérielle : holter tensionnel si les valeurs de tension sont élevées ;
  • asthme : souvent associé et pouvant être aggravé par l’obésité : avis spécialisé si non contrôlé ;
  • déconditionnement à l’effort : consultation spécialisée et épreuve fonctionnelle respiratoire et/ou test d’aptitude à l’effort ;
  • troubles respiratoires dont les apnées du sommeil : consultation ORL, enregistrement polysomnographique et consultation spécialisée du sommeil.
Endocriniennes :
  • puberté avancée chez la fille : le plus souvent adipomastie et puberté lentement évolutive ne nécessitant pas de traitement de freination pubertaire ; mais ne pas hésiter si le pronostic de taille est en jeu à demander un avis endocrinologique ;
  • syndrome des ovaires polykystiques dans un contexte métabolique (spanioménorrhée, hypertrichose + acné) : recherche d’insulinorésitance + avis endocrinologique ;
  • retard pubertaire, verge de taille insuffisante : avis endocrinologique afin d’éliminer un hypogonadisme ;
  • gynécomastie : souvent très mal vécue chez le garçon en période pubertaire (discuter d’une chirurgie plastique en fin de puberté).
Métaboliques :
  • dyslipidémie :
  • hypertriglycéridémie : mesures diététiques, diminuer les sucres ;
  • hypercholestérolémie au profit du LDL-cholestérol avec un HDL abaissé : augmenter l’activité physique et mesures diététiques ;
  • stéatose hépatique : échographie hépatique et consultation gastro-entérologue ;
  • insulinorésistance, intolérance au glucose, diabète de type 2 (recommandations de l’ADA pour enfant de plus de 10 ans) : en cas d’antécédents familiaux de diabète et présence de l’un des facteurs suivants : obésité, syndrome des ovaires polykystiques, retard de croissance intra-utérin, population prédisposée, obésité abdominale, acanthosis nigricans : prévoir un test d'hyperglycémie per os et avis endocrino-diabétologique.

Prise en charge

Du diagnostic éducatif découlera la prise en charge. Il est réajusté à chaque consultation. Le médecin aide l’enfant et sa famille à trouver eux-mêmes des solutions en évitant de leur imposer son propre point de vue. Ils choisissent ensemble un nombre limité d’objectifs précis, impliquant un changement de comportement qu’ils se sentent capables de réaliser et envisagent les stratégies permettant de les atteindre ; ces stratégies impliquant le plus souvent les parents et suscitant ainsi des changements à l’échelle familiale. Chaque objectif est adapté aux besoins et attentes identifiés, aux compétences et à la vie quotidienne de l’enfant et de sa famille, point de départ de la prise en charge. Les compétences de chacun sont donc évaluées dans tous les domaines, et en fonction de ces constats est proposé et discuté un type de prise en charge. C’est à ce niveau que les programmes d’éducation thérapeutique du patient (ETP) et les séjours de soins de suite et de réadaptation (SSR) interviennent, permettant aux enfants et leurs parents d’acquérir les compétences manquantes. Enfin, il est indispensable de préparer la transition vers le secteur adulte, et des consultations conjointes « pédiatre-médecin d’adulte » sont proposées.

Différents recours

Différents recours peuvent être proposés en fonction de l’état des lieux initial (fig. 3).
Le premier recours correspond à une prise en charge de proximité de l’enfant en surpoids ou obésité sans complication et de sa famille par le médecin traitant. Il peut nécessiter des ressources complémentaires de proximité (diététicienne, etc.). L’importance étant l’interdisciplinarité, c’est-à-dire faire le lien entre les différents intervenants avec une attitude cohérente de soin. Le Réseau de prévention et de prise en charge de l’obésité pédiatrique (RéPPOP) est un appui du premier recours lorsqu’il existe.
Le deuxième recours correspond à une prise en charge multidisciplinaire organisée à l’échelle d’un territoire, faisant appel à des professionnels spécialisés, pour des enfants présentant une ascension rapide de l’IMC ± des comorbidités ± un contexte familial défavorable ± une problématique psychologique et/ou sociale. Les programmes d’ETP ou les SSR ont ici leur place.
Le troisième recours est organisé à une échelle régionale (centre spécialisé obésité [CSO]) et correspond à une prise en charge coordonnée par un médecin et une équipe spécialisés dans un centre hospitalier universitaire (CHU). On parle de centre intégré obésité (CIO) lorsque le CSO regroupe plusieurs établissements de soins et des structures de recherche et de formation. Le centre de référence du syndrome de Prader-Willi et autres syndromes avec troubles du comportement alimentaire s’occupe des maladies rares avec obésité et est intégré au CIO.
Ce troisième recours s’adresse à des enfants et adolescents présentant une obésité sévère avec de multiples échecs ± comorbidités dans un contexte psychosocial défavorable, avec ± des troubles du comportement alimentaire et le(la) psychiatre a un rôle primordial. Ces situations demandent aussi le plus souvent de travailler avec le secteur social de proximité afin de proposer, en fonction de la situation, une aide éducative ± une travailleuse d’intervention sociale et familiale. Des séjours prolongés en SSR sur l’année scolaire peuvent être proposés, d’autant plus si l’enfant est déscolarisé. Dans le cadre du RéPPOP Midi-Pyrénées, nous avons mis en place des modules internat qui sont une alternative à ces séjours. Ils sont issus d’un partenariat entre l’Éducation nationale et le RéPPOP, et proposent de scolariser l’adolescent dans un milieu ouvert en internat durant la semaine. S’il ne veut pas quitter le milieu familial ou si un séjour précédent n’a pas été une réussite, des expérimentations d’hospitalisation à domicile afin de travailler avec la famille les causes de(s) échec(s) ont été proposées. Dans le cadre du troisième recours, une expérimentation nationale OBEPEDIA en lien avec le ministère de la Santé va démarrer en 2018. Dans les cas extrêmes, la chirurgie bariatrique peut être discutée et nécessite la mise en place d’une transition avec l’équipe adulte experte. La décision de chirurgie doit être prise en CSO pédiatrique en suivant les procédures détaillées de la fiche de synthèse élaborée et diffusée par la HAS.
Le suivi des enfants et adolescents peut être soutenu par l’utilisation d’objets connectés permettant de rendre le patient plus acteur de sa prise en charge grâce à l’utilisation de nouvelles technologies qui lui sont familières.
L’obésité est une pathologie complexe qui nécessite une prise en charge sur le long terme avec une équipe formée en éducation thérapeutique et ayant une maîtrise de l’organisation des soins (fig. 4). La réussite de la prise en charge passe par une concertation des différents professionnels autour de l’enfant et de sa famille et demande du temps, c’est une médecine « lente ». Les parents sont au cœur de la prise en charge. Ce sont eux qui conditionnent la réussite par leur accompagnement éducatif permanent et par la valorisation des efforts même les plus modestes que met en place l’enfant. Les parents ont ainsi besoin d’être eux-mêmes soutenus. Pour cela, ils doivent acquérir des connaissances, une autonomie, retrouver un sentiment d’auto-efficacité et de maîtrise pour pouvoir accompagner et guider leur enfant sur le long terme.
Points forts
Obésité de l’enfant et de l’adulte (voir item 69) Partie : Enfant

La prévention de l’obésité : passe par le tracé des courbes d’indice de masse corporelle (IMC) et la recherche d’un rebond d’adiposité précoce, l’absence de rebond ou un croisement des couloirs.

Le rapport tour de taille sur taille (TT/T) : permet d’ajuster l’IMC et, lorsqu’il est > 0,5, de dépister un risque métabolique accru.

L’éducation thérapeutique du patient est au cœur de la prise en charge et implique des soignants formés avec initialement un recueil des besoins du patient et l’élaboration d’un diagnostic éducatif complet ajusté au cours du suivi.

L’implication des parents dans la prise en charge de leur enfant est incontournable et est le point clé de la réussite.

L’interdisciplinarité entre professionnels de proximité et entre la ville et l’hôpital est essentielle pour permettre une cohérence des soins et élaborer avec l’enfant et sa famille des objectifs communs de prise en charge.

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