Plus de 10 % des foyers français ont été infestés par des punaises de lit entre 2017 et 2022, selon des données récentes de l’Anses. Le fait de voyager étant un facteur de risque, la rentrée est une période propice à ces infestations. Il faut savoir faire le diagnostic, soulager le patient, lui donner les bonnes pistes et ressources pour s’en débarrasser.

Les punaises de lits (Cimex lectularius), qui avaient quasiment disparu en France dans les années 1950, sont en recrudescence ces dernières décennies, au point que l’Anses recommande aujourd’hui de travailler à un mécanisme de déclaration obligatoire, dans un rapport qui vient d’être publié. 

L’apparition de résistances aux insecticides et l’accroissement des voyages internationaux sont probablement en cause dans cette recrudescence. Les punaises peuvent en effet se propager « passivement » sur un hôte qui les transporte – bagages, linge, meubles… – vers un nouveau lieu de vie (v. encadré 1 pour des conseils de prévention en voyage).

Entre 2017 et 2022, plus d’un foyer sur dix en France a été infesté par des punaises de lit, d’après l’Anses. Ces infestations touchent toutes les catégories de la population : le niveau de revenu n’est pas associé à la probabilité d’être infesté ; en revanche, il est un facteur de persistance de l’infestation car la lutte contre ces insectes peut être coûteuse (866 € en moyenne par foyer). C’est pourquoi l’agence recommande la mise en place d’une prise en charge financière par l’État, surtout pour les ménages à faibles ressources.

D’autres facteurs de risque ont été identifiés par l’Anses : le fait de voyager ou de résider dans un logement partagé.

Les infestations dues à ces parasites hématophages sont à l’origine d’un grand nombre de consultations en médecine générale (plus de 70 000 consultations en 2019-2020, selon une enquête de l’Inserm). Si les lésions cutanées en sont le premier motif, les répercussions psychologiques ne doivent pas être négligées : 40 % des patients déclaraient une insomnie et/ou un retentissement sur la vie personnelle, professionnelle et sociale.

Détecter et soigner

Visibles à l’œil nu, ces insectes mesurent de 4 à 7 mm et sont généralement bruns ou beiges (sauf les larves, claires), plats et sans ailes (fig. 2). Ils ne sautent pas et ne volent pas, sont actifs surtout la nuit, fuient la lumière et s’abritent dans des endroits sombres, étroits et peu accessibles ; ils vivent principalement dans la chambre à coucher. Les piqûres sont le fait des deux sexes (jusqu’à 90 piqûres sont possibles en une seule nuit).

Des concentrations de leurs déjections – petits points noirs – peuvent être observées sur les matelas, lattes ou fentes du sommier, bois du lit, plinthes, angles des murs, etc., facilitant leur détection. Des traces de sang sur les draps sont aussi possibles, dues à l’écrasement des punaises lors du sommeil de la personne.

Signes cliniques et risques associés

Les piqûres sont souvent disposées en rang ou groupées au même endroit sur la peau (groupes de 3 à 5), localisées généralement sur les parties découvertes du corps : visage, cou, mains, pieds (fig. 1).

Les lésions érythémateuses et maculopapuleuses, de 5 mm à 2 cm de diamètre, ont un point hémorragique central ou une vésicule similaire à toute piqûre d’arthropodes (fig. 3). Elles peuvent provoquer des réactions allergiques plus ou moins localisées, mais le tableau varie selon la sensibilité de la personne : de l’asymptomatique au prurit paucisymptomatique ou important (maximal le matin) voire douloureux, jusqu’à un purpura avec lésions vésiculobulleuses ou une réaction généralisée.

Le diagnostic clinique n’est donc pas toujours aisé (d’autant plus que tout ce qui pique n’est pas une punaise !), et il n’existe pas de critère biologique d’orientation. Seul un interrogatoire rigoureux permet de poser un diagnostic de certitude, aidé par l’identification d’un spécimen apporté par le patient ou prélevé sur site.

Si la transmission de pathogène n’a jamais été prouvée in vivo, il existe un risque de surinfection bactérienne comme pour toute piqûre d’arthropodes, notamment par grattage avec des mains contaminées.

Une spoliation sanguine (anémie ferriprive si infestation sévère) est possible. Des effets psychologiques également, liés à la privation de sommeil et au traumatisme d’être envahi et piqué par des insectes « invisibles » ; certains patients, même en cas de succès dans l’éradication, ont des séquelles (cauchemars, reviviscence, évitement et isolement).

Quels soins ?

Les soins dermatologiques sont fonction de la gravité : crème apaisante grand public, antihistaminique, dermocorticoïdes, corticoïdes oraux, voire hospitalisation.

Les conseils pour la lutte sont indispensables : celle-ci ne doit pas débuter « tête baissée et insecticide à la main », mais doit s’adapter au lieu infesté, aux occupants et à leur budget. Il n’existe pas de quantité résiduelle acceptable. L’éradication est compliquée et parfois longue à atteindre, les lieux de repos, ponte et copulation étant souvent difficiles d’accès.

Mesures efficaces pour l’éradication

Le développement des punaises est rapide : il est important d’intervenir vite pour limiter l’étendue de l’infestation. Si la propreté d’une habitation n’est pas un facteur protecteur vis-à-vis d’une première contamination, une bonne hygiène et une détection rapide permettent d’éviter les hyperinfestations. Des conseils généraux de prévention sont listés dans l’encadré 1 ci-dessous.

Lutte mécanique (sans insecticide)

Elle est fortement conseillée et primordiale dans un premier temps, voire suffisante dans certains cas. L’Anses recommande en effet de privilégier les méthodes non chimiques, comme le traitement par la chaleur sèche (pour traiter une pièce dans son ensemble) ou la congélation (vêtements ou de petits objets infestés), et de réserver le recours aux produits chimiques aux cas de persistance de l’infestation (v. ci-après).

Le lit et le canapé sont à examiner en premier. Ensuite : rideaux, plinthes, prises électriques à proximité. La recherche se poursuit de façon centrifuge à partir de ces deux sites. Attention, toutefois, à ne pas déplacer les objets, au risque d’aggraver la situation. Lorsqu’ils sont trop infestés, les jeter en les déclarant au service d’enlèvement (s’assurer qu’ils ne seront pas récupérés !) ; ne pas les entreposer dans les parties communes de l’immeuble, au risque de contaminer les voisins.

Aspirer avec un embout fin pour capturer œufs et insectes. Attention ! L’aspirateur ne les tue pas : le conduit doit être nettoyé et le sac emballé dans un sac plastique et jeté dans une poubelle extérieure. 

Brosser à sec ou avec un nettoyant de surface certains recoins ou tissus est un geste complémentaire pour supprimer les œufs ou les jeunes insectes difficiles à mettre en évidence (mais le brossage ne les tue pas, il faut donc y associer l’aspirateur ou un grand nettoyage du sol).

Laver à la machine (à 60 °C) vêtements, oreillers et linge de maison, puis séchage au sèche-linge (mode chaud au moins 30 minutes). Le linge et les vêtements ainsi lavés doivent être conservés dans des sacs plastiques scellés jusqu’à la fin de la désinfestation.

Congeler à – 20°C pendant 72 heures minimum le linge et les petits objets, voire le sac de voyage.

Le nettoyage à la vapeur à 120 °C détruit tous les stades de punaises de lits au niveau des recoins ou des tissus d’ameublement.

Obturer les fissures et les fentes se trouvant entre les plinthes, sur les cadres de lit en bois et sur les murs, en les calfeutrant ; réparer ou enlever le papier peint qui se décolle, resserrer les plaques d’interrupteur, etc. (plinthes, moquette, fentes dans les murs sont des sites potentiels de repos et de reproduction).

Lutte chimique

C’est une étape réservée préférentiellement aux professionnels. Les punaises de lit ont en effet développé des résistances à la quasi-totalité des insecticides en vente libre. De surcroît, ces derniers peuvent avoir des risques importants vis-à-vis de la santé humaine et de l’environnement lorsqu’ils sont utilisés sans précaution.

En cas de persistance de l’infestation, il est ainsi recommandé de faire appel à un spécialiste de la lutte antiparasitaire ou aux services d’actions de salubrité ou d’hygiène de la mairie. Deux interventions au minimum sont préconisées, voire trois, à environ 15 jours d’intervalle

Pour bien choisir un professionnel de la désinsectisation, s’assurer qu’il soit labellisé “punaises de lit”. Une liste d’entreprises qualifiées et formées est disponible en ligne sur des sites gouvernementaux et sur cs3d-expertise-punaises.fr (v. encadré 2). Le professionnel doit être en possession d’un certificat Certibiocide en cours de validité délivré par le ministère de la Transition écologique. Pour rappel, c’est le propriétaire du logement qui doit payer la désinfestation.

Rester vigilant durant une période de 1 à 2 mois après l’intervention, afin de s’assurer de l’élimination totale des punaises. Prévoir le cas échéant des visites de contrôle avec le professionnel.

Encadre

1. Comment éviter une infestation par des punaises de lits ?

Chez soi :

– Éviter d’encombrer les espaces pour réduire le nombre d’endroits où les punaises de lit peuvent se cacher.

– Après l’achat de vêtements d’occasion, les laver à plus de 60 °C et/ou les placer au sèche-linge au cycle le plus chaud durant au moins 30 minutes, ou les congeler pendant 72 heures.

– Nettoyer avec un appareil à chaleur spécialisé (disponible en location) les meubles récupérés dans la rue ou achetés en brocante avant de les introduire dans son logement.

En voyage :

– Ne pas déposer ses bagages sur le sol ou sur le lit, et encore moins sous le lit : les ranger sur un support à bagage inspecté au préalable et les laisser fermés hors utilisation.

– Vérifier minutieusement lit, meubles et murs.

– Ne pas poser ses vêtements sur le lit ou dans les armoires sans les avoir examinés au préalable.

Au retour d’un voyage :

– Bien vérifier qu’il n’y a pas de punaises de lit dans les bagages, les vêtements et les effets personnels ; ne jamais les poser sur les lits ou fauteuils.

– Laver les vêtements et tout article en tissu à 60 °C, qu’ils aient été portés ou non. Pour les articles non lavables : sèche-linge ou congélation.

– Laver la valise : selon sa forme, dans la machine à laver, sous la douche ou dans la baignoire, en brossant la fermeture éclair.

– Passer l’aspirateur dans les valises et jeter immédiatement le sac de l’aspirateur dans un sac en plastique bien fermé.

Encadre

2. Ressources pour les patients

– Un numéro téléphone pour répondre aux questions et renseigner sur les bons gestes : 0806 706 806

– « Punaises de lit ? L’État vous accompagne » (site gouvernemental) : infographies, vidéos, conseils, liste des entreprises qualifiées et formées…

– Site https://cs3d-expertise-punaises.fr/, partenaire du ministère de la Ville et du Logement, qui liste les professionnels agréés par département.

Pour en savoir plus
Delaunay P, Bérenger JM. Punaises de lit : s’en débarrasser en 10 étapes.Rev Prat Med Gen 2020;34(1044);509.
Delaunay P. Punaise des lits : en recrudescence.Rev Prat Med Gen 2017;31(979);284-5.
Anses. Punaises de lit : des conséquences sur le budget et la qualité de vie des Français. 19 juillet 2023. 
Ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires. Punaises de lit ? L'État vous accompagne. 26 juin 2023.
Ministère de la Santé. Punaises de lits. 8 avril 2022.

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