Qu’elle soit claire ou purulente, l’otorrhée est fréquente chez l’enfant. Dans la grande majorité des cas, les signes cliniques et l’examen otoscopique suffisent pour faire le diagnostic. La conduite à tenir en MG.

L’otorrhée est fréquente en pédiatrie.

L’interrogatoire doit préciser :

  • le caractère uni- ou bilatéral ;
  • l’ancienneté ;
  • les symptômes associés (douleurs, fièvre, prurit, hypoacousie, vertiges) ;
  • les caractéristiques macroscopiques : gouttes de liquide clair et gluant ? traces au méat acoustique externe ? écoulement de pus malodorant ?
  • les antécédents généraux et ORL (aérateurs trans-tympaniques ?)

Écoulements issus de l’oreille externe

Cérumen

L’écoulement de cire n’est pas pathologique : en effet, la présence de cérumen dans le conduit auditif externe, physiologique, est nécessaire pour protéger la peau et maintenir l’équilibre bactérien. Chez les enfants ayant des bouchons obstructifs réguliers provoquant une baisse de l’audition, et uniquement dans ce cas, on peut envisager des mesures pour prévenir les bouchons : irrigation régulière des conduits auditifs externes sous la douche ou par des gouttes ou un spray auriculaire.

Attention : ne pas utiliser de coton-tige en raison du risque de blessure et d’aggravation (compaction du cérumen).

Otite externe

Inflammation du conduit auditif externe, elle est favorisée par la macération (climats chauds et humides) et la présence d’une dermatose préexistante (eczéma…). S. aureus et P. aeruginosa sont souvent en cause.

Elle se manifeste par des douleurs violentes pulsatiles, augmentées par la mastication et la mobilisation du pavillon de l’oreille (signe spécifique), sans fièvre. Elle peut être accompagnée par une otorrhée purulente.

L’otoscopie montre un conduit auditif externe inflammatoire, œdématié et douloureux (fig. 1). Si le tympan est visible, il est normal.

Le traitement est local : application de gouttes auriculaires contenant des antibiotiques non ototoxiques ayant l’AMM pour les otorrhées purulentes dans les otites externes, matin et soir, pendant 5 à 7 jours (si sténose totale ou sub-totale, mettre en place une mèche expansive pour assurer le contact permanent avec les topiques). On y associe un traitement antalgique symptomatique.

Les formes dites malignes d’otites externes (sur terrain pathologique : diabète, immunodépression) nécessitent une prise en charge urgente mais elles sont rarissimes chez l’enfant.

Otomycose

Une infection mycotique du conduit provoque en général une otorrhée de faible abondance, associée à un prurit et à une sensation de gêne. L’otoscopie met en évidence des filaments mycéliens (fig. 2). Le traitement est local par antifongique (ex : nystatine, associée à de la dexaméthasone), sur tympan fermé, pendant 1 à 2 semaines.

Un prélèvement microbiologique peut être envisagé en cas de récidives ou de chronicisation. Attention, un aspect d’otomycose légère asymptomatique après une antibiothérapie locale prolongée ne requiert pas de traitement (il faut attendre que la flore du conduit se rééquilibre).

Eczéma du conduit auditif

L’otorrhée est claire et de très faible abondance, et les enfants se plaignent surtout de prurit. D’autres localisations sont généralement retrouvées. L’otoscopie montre un conduit auditif externe un peu œdématié, avec de petites desquamations sèches.

Écoulements issus de l’oreille moyenne

Otite moyenne aiguë

C’est la cause principale d’écoulements issus de l’oreille moyenne. Inflammation aiguë d’origine infectieuse de l’oreille moyenne, elle est très fréquente chez l’enfant, surtout entre 6 et 24 mois, en raison des particularités anatomo-physiologiques de la trompe d’Eustache. Le tableau associe fièvre et otalgie, généralement modérée. À l’examen otoscopique, on distingue 3 stades :

  • congestif : le tympan est rouge mais les reliefs sont conservés ;
  • collecté : les reliefs ont disparu car le tympan bombe (fig. 3) ;
  • suppuré : le pus s’écoule au travers d’une perforation (qui cicatrise le plus souvent).
 

Le traitement d’une otite moyenne aiguë collectée repose sur une antibiothérapie orale selon les dernières recommandations : antibiothérapie à base d’amoxicilline, prescrite d’emblée ou après un délai de 48 à 72 h (si persistance des symptômes), selon l’âge de l’enfant et la sévérité. La durée est de 10 jours pour les moins de 2 ans, 5 jours après cet âge.

Cholestéatome

L’otite chronique cholestéatomateuse est définie par la présence au sein de l’oreille moyenne d’une matrice épidermique dotée d’un double potentiel de lyse osseuse et de desquamation. Elle peut faire le siège d’infections et d’otorrhées récidivantes, souvent malodorantes. Dans la majorité des cas, l’examen otoscopique fait le diagnostic en montrant les squames épidermiques dans l’oreille moyenne qui émergent d’une perforation ou d’une poche de rétraction tympanique (fig. 4).

Le traitement est chirurgical. 

Otorrhée sur aérateurs

L’écoulement de l’excès de glu issue de l’oreille moyenne (liquide épais, un peu collant et filant, mais inodore et non purulent) n’est pas pathologique.

En revanche, un pus franc qui s’écoule de l’oreille moyenne via l’aérateur évoque une otite moyenne aiguë (à traiter). Enfin, l’écoulement peut parfois venir de la périphérie de l’aérateur lui-même, quand celui-ci est posé depuis longtemps et devient le siège d’une colonisation bactérienne importante. C’est un diagnostic d’élimination pouvant motiver le retrait et le remplacement de l’aérateur.

Tumeurs

Un écoulement anormal, de faible abondance et parfois teinté de sang, est possible en cas de tumeurs de l’oreille externe ou moyenne, qu’elles soient bénignes (histiocytose) ou malignes (sarcomes). L’otoscopie montre des lésions atypiques, charnues, irrégulières, qui doivent alerter, a fortiori si elles sont accompagnées par des adénopathies ou une parésie facile. Au moindre doute, adresser chez l’ORL pour biopsie.

Qu’en retenir ?

Une otorrhée purulente est due le plus souvent à une otite moyenne aiguë perforée.

Une mobilisation très douloureuse du pavillon évoque une otite externe.

Un écoulement de glu chez les enfants porteurs d’aérateurs trans-tympaniques n’est pas inquiétant.

La répétition des épisodes doit motiver une consultation ORL.

Pour en savoir plus
Leboulanger N. Otorrhée purulente de l’enfant : conduite à tenir.  Réalités Pédiatriques 13 février 2024.
Infectiologie.com. Item 150. Otites infectieuses de l’adulte et de l’enfant. 2 avril 2023.
HAS. Otite moyenne aiguë purulente de l’enfant. Juillet 2021.
Le Clerc N. Otite externe : que faire ?  Rev Prat Med Gen 2016;30(956);149-50.
Polonovski JM. Item 150 (ancien 147). Otites infectieuses de l’adulte et de l’enfant.  Rev Prat 2018;68(1);e15-24.

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