Pour la première fois, une étude prospective avec un suivi sur plusieurs années montre un effet significatif de la pratique de cet art martial chinois sur l’évolution de la maladie de Parkinson… Explications.

Deuxième maladie neurodégénérative en France, la maladie de Parkinson (MP) touche près de 180 000 personnes ; plus de la moitié d’entre elles ont plus de 75 ans.

L’activité physique est un traitement à part entière de la MP, dès son diagnostic. Elle a pour objectif d’améliorer les manifestations cliniques motrices et non motrices, mais aussi de modifier à plus long terme la neuroplasticité et l’évolution au long cours de la maladie ; elle améliore également les fonctions cardiorespiratoires du patient. À ce titre, une activité régulière, d’environ 30 minutes par jour, est recommandée : cette recommandation concerne les activités d’endurance et de renforcement musculaire qui ont montré des effets positifs sur l’équilibre, la vitesse de marche, le risque de chutes, la mobilité fonctionnelle, etc.

Mais d’autres activités, telles que le tai-chi, le yoga ou la danse, sont aussi préconisées, ayant montré des bénéfices à court terme notamment sur l’équilibre et la marche. Toutefois, leurs effets sur le long terme et sur les autres manifestations de la MP ont été peu étudiés jusqu’à présent. Concernant le tai-chi, la plupart des études disponibles ont un suivi de seulement quelques semaines avec une évaluation des symptômes moteurs, mais n’examinent ni les non moteurs ni les complications (chutes, fluctuations, dyskinésies, troubles cognitifs, du sommeil, dysautonomie…), en lien avec la progression de la maladie – que les traitements antiparkinsoniens actuels ne permettent pas de ralentir.

Pour la première fois, une étude de cohorte prospective menée en Chine a évalué les effets au long cours de cette pratique sur les symptômes moteurs et non moteurs ainsi que sur les complications de la MP. Ses résultats, encourageants, viennent d’être publiés dans le Journal of Neurology, Neurosurgery, and Psychiatry.

Des bénéfices multiples, maintenus sur plusieurs années

Le tai-chi est un art martial chinois pratiqué aussi en guise de gymnastique. Il se caractérise par des mouvements très lents et précis, un travail sur l’équilibre et une maîtrise de la respiration lui conférant un caractère méditatif.

Dans cette étude observationnelle, 143 patients ayant une MP et pratiquant le tai-chi (deux sessions par semaine de 60 minutes chacune, avec un professeur) ont été comparés à 187 patients contrôle (MP, sans pratique d’activité physique), suivis pendant plusieurs années. L’âge moyen à l’inclusion était de 66,7 et 66,4 ans respectivement, et il y avait 45 % et 47 % de femmes respectivement dans chaque groupe.

Des évaluations ont été effectuées à plusieurs reprises – à l’inclusion (janvier 2016), en novembre 2019, octobre 2020 et juin 2021 –, utilisant plusieurs échelles pour examiner divers aspects de la MP : l’UPDRS (Unified Parkinson’s Disease Rating Scale) pour sa progression globale ; le TUG (Timed Up and Go test) pour la vitesse de la marche ; le MMSE (Mini-Mental State Examination) pour la fonction cognitive ; le SCOPA-AUT (Scales For Outcomes in Parkinson’s Disease-Autonomic questionnaire) pour les troubles dysautonomiques ; le NMS-Quest (Non-Motor Symptoms Questionnaire) pour les symptômes non moteurs, entre autres… Les médecins effectuant ces évaluations ne connaissaient pas l’assignation des patients à l’un ou l’autre groupe.

Les trois critères de jugement principal, permettant d’évaluer les effets de cette pratique sur la maladie au long cours, étaient : l’évolution annuelle du score UPDRS, l’évolution du traitement médicamenteux (en équivalent de la dose journalière de lévodopa) et le pourcentage de patients ayant eu besoin d’augmenter le traitement. Les critères secondaires comprenaient l’évaluation de symptômes moteurs et non moteurs, la qualité de vie et la différence de la prévalence des complications (dyskinésie, dystonie, syndromes des jambes sans repos…) entre les deux groupes.

Résultats : durant un suivi moyen de 4,3 années, l’augmentation du score UPDRS et du traitement antiparkinsonien étaient significativement plus bas dans le groupe tai-chi que dans le groupe contrôle, ainsi que le pourcentage de patients ayant eu besoin d’augmenter le traitement, suggérant une progression plus lente de la maladie dans le groupe tai-chi. Ce groupe affichait également une détérioration plus lente des symptômes moteurs et de la fonction cognitive, ainsi que des symptômes dysautonomiques, de la qualité du sommeil et de la qualité de vie. La prévalence globale des complications était aussi plus faible chez ces patients.

Par ailleurs, les effets indésirables le plus souvent rapportés (chutes, vertiges, douleurs dorsales) étaient plus fréquents dans le groupe contrôle. Les fractures, toutes survenues au cours des activités de la vie quotidienne (en dehors des séances de tai-chi), étaient aussi plus fréquentes dans le groupe contrôle. Les auteurs en concluent que la pratique du tai-chi n’augmente pas le risque de chute.

Au regard de ces multiples bénéfices et de l’absence de risques associés, les auteurs recommandent l’instauration d’une pratique de tai-chi pour les patients parkinsoniens dès le diagnostic de la maladie.

Toutefois des études randomisées et sur de plus grandes cohortes sont encore nécessaires pour démontrer formellement un lien causal entre ces améliorations et la pratique du tai-chi – lien que cette étude observationnelle ne permet pas d’affirmer.

Pour en savoir plus
Li G, Huang P, Cui S, et al. Effect of long-term Tai Chi training on Parkinson’s disease: a 3.5-year follow-up cohort study.  BMJ 5 septembre 2023.
À lire aussi :
Nobile C. Maladie de Parkinson : des avancées ! Rev Prat (en ligne) 18 avril 2023.
Azulay JP. Intérêt de l’activité physique dans la maladie de Parkinson.  Rev Prat 2018;68(5);513-4.
HAS. Prescription d’activité physique. Maladie de Parkinson. 13 juillet 2022.

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