Parvovirus B19 (5^e maladie) : une épidémie inhabituelle en cours

Le parvovirus humain B19 est à l’origine d’une infection le plus souvent asymptomatique, mais aussi d’un érythème infectieux, le mégalérythème épidémique ou la cinquième maladie, surtout chez l’enfant. C’est un virus strictement humain transmis par voie respiratoire. L’incubation dure 14 jours en moyenne. L’exanthème débute au visage, avec un aspect souffleté des joues caractéristique (fig. 1) suivi, 24 h plus tard, d’une éruption du tronc à bords émiettés (« exanthème figuré en guirlande »), parfois associé à un érythème ou à un purpura en gants et chaussettes.

La régression de l’éruption est spontanée, en 10 à 15 jours. Des résurgences sont possibles en cas d’exposition solaire, d’exercice physique, de bain ou de changement de température. Les signes généraux sont classiquement discrets. 

Les complications sont principalement hématologiques, avec un risque de crise érythroblastopénique ou de cytopénies prolongées, etfœtales (en cas de transmission à une femme enceinte) avec un risque de fausse-couche et d’une anasarque fœtoplacentaire. Une myocardite ou une encéphalite peuvent parfois être observées. 

L’éviction scolaire n’est pas préconisée, mais il est recommandé d’informer les sujets à risque (immunodéprimés notamment) et les femmes enceintes lors de la survenue de cas groupés ou de cas en collectivité afin d’éviter les contacts. 

Le 31 juillet 2023, le service de pédiatrie du CHU Necker a signalé un nombre inhabituel d’hospitalisations pédiatriques graves liées à une infection à parvovirus B19 : 37 cas hospitalisés entre avril et juillet 2023, dont 21 (57 %) enfants atteints de drépanocytose et 5 (14 %) ayant nécessité une hospitalisation en service de réanimation.

Des données virologiques (CHU Cochin) montraient que le nombre de prélèvements positifs à parvovirus B19 avait triplé au cours des huit premiers mois de 2023 comparé à l’ensemble de l’année 2022. Dans le liquide amniotique, le nombre de prélèvements positifs était 10 fois supérieur. Ces premières données étaient en faveur d’une circulation communautaire plus intense du parvovirus B19 depuis le premier trimestre 2023 en Île-de-France. Après une baisse dans la période estivale, au moins d’octobre, des urgentistes ont signalé la persistance d’hospitalisations pour infections sévères à parvovirus B19, et des services de médecine périnatale des cas chez la femme enceinte. Ainsi, Santé publique France a mis en place une surveillance continue dès le mois de novembre 2023 afin de documenter l’évolution de l’épidémie en cours.

Les données biologiques (fig. 2) montrent l’augmentation du nombre de tests IgM positifs à partir du mois de mai 2023 dans les trois groupes de la population considérés : enfants de moins de 15 ans, femmes de 20 à 40 ans et autres personnes âgées de 15 ans ou plus ; l’incidence chez l’enfant est proche de 100 cas en mars 2024 (semaine 11), nettement supérieure à celle des quatre saisons précédentes, avec un taux de positivité chez l’enfant entre 30 et 40 % alors qu’il était < 20 % au cours des saisons précédentes (fig. 3). L’épidémie était observée dans toutes les régions de France, avec un début et une ampleur variable selon les régions. 

Les données de laboratoire montrent également des tests positifs pour le parvovirus B19 dans les prélèvements de liquide amniotique, et certains services de périnatalité indiquent une augmentation de fausses-couches et de morts fœtales en lien avec ces infections.

De même, le nombre de passages aux urgences pour suspicion d’infection à parvovirus B19 chez l’enfant ont augmenté à partir de début décembre 2023 (semaine 49), à un niveau très supérieur à celui des années précédentes (fig. 4). On note également une légère hausse des hospitalisations, mais les effectifs sont très faibles.

Même si le nombre de décès reste faible, il a augmenté de façon notable depuis 2022 en lien avec la circulation plus active du virus et affecte davantage les enfants : cinq décès sont déjà constatés chez des enfants depuis début 2024, un nombre inhabituellement élevé selon Santé publique France (il s’agit d’enfants âgés de moins de 1 an, dont quatre nouveau-nés à la suite d’une infection congénitale). 

Une épidémie d’infections à parvovirus B19 touche actuellement la France, affectant toutes les catégories d’âge et en particulier l’enfant.

Le pic épidémique de la saison 2023 - 2024 n’est vraisemblablement pas encore atteint avec des données montrant des incidences 2 à 3 fois supérieures à celles de la dernière saison prépandémique. Les raisons de cette épidémie ne sont pas claires, mais comme pour d’autres infections virales ou bactériennes, elle pourrait être liée à la levée des mesures sanitaires qui a suivi la pandémie de Covid.

Santé publique France a donc émis les recommandations suivantes :

• la « cinquième maladie » peut avoir des conséquences graves dans certaines populations : les personnes immunodéprimées, celles atteintes d’anémie chronique, enfants drépanocytaires, les femmes enceintes (risque de fausses couches et de morts fœtales) ;
• une infection par le parvovirus B19 doit être évoquée devant un cas de rougeole non confirmé par les examens biologiques. 
• éviter l’exposition des sujets à risque (notamment cas groupés)
• dans le contexte épidémique actuel, rappeler aux femmes enceintes de consulter rapidement un service spécialisé en cas diminution des mouvements actifs fœtaux.