Cette glande est le principal site d’émergence des tumeurs salivaires.

Pathologies tumorales

Elles représentent 2 à 3 % des tumeurs de la tête et du cou et sont le plus souvent bénignes chez l’adulte (encadré).
La tuméfaction est classiquement nodulaire, prétragienne, rétro-angulo-mandibulaire, voire jugale (fig. 1). La clinique est parfois trompeuse, des lésions du pôle inférieur pouvant être confondues avec une adénopathie jugulo-carotidienne supérieure ; une localisation sur le prolongement pharyngien de la glande donnant une voussure parapharyngée.
Une paralysie faciale périphérique, une infiltration cutanée, une croissance rapide et/ou une adénomégalie cervicale homolatérale doivent être recherchées à l’examen et sont des critères d’agressivité évoquant un cancer (fig. 1). Cependant, les tumeurs malignes salivaires sont régulièrement de bas grade et ces signes ne sont pas tous obligatoirement présents. Cela justifie un bilan paraclinique exhaustif visant à détecter une éventuelle malignité et ainsi planifier le délai et les modalités de l’exérèse chirurgicale.

Bilan préthérapeutique

L’IRM parotidienne fournit une bonne présomption de la nature tumorale. Sa résolution est excellente pour les tissus salivaires, et la conjonction de séquences morphologiques et dynamiques permet de distinguer les tumeurs bénignes des malignes. Les séquences morphologiques autorisent l’analyse des contours, de l’homogénéité tumorale, de l’infiltration locale et la recherche d’adénopathies (fig. 2). Les clichés dynamiques en perfusion/ diffusion étudient la cellularité et la microcirculation tumorale.1 En cumulant ces informations, le radiologue décrit un profil compatible avec un adénome pléomorphe, un cystadénolymphome ou bien une tumeur maligne.
La cytologie analysée à partir d’une ponction (échoguidée ou non, après l’IRM) a également une valeur prédictive positive élevée, elle est systématiquement associée à l’IRM par de nombreuses équipes. Pour Fakhry et al., la spécificité de la cytologie parotidienne est de 89,5 %.2 Les techniques de biologie moléculaire, comme l’hybridation fluorescente in situ (FISH) permettent de déceler des altérations génétiques affinant le diagnostic (cassure PLAG1 pour l’adénome pléomorphe, fusion MYB-NFIB pour le carcinome adénoïde kystique et fusion MECT1-MAML2 pour les muco-épidermoïdes).
Avec ces données, les délais et modalités de la parotidectomie peuvent ainsi être définis, et exposés au patient.

LE TRAITEMENT EST ChirurgiCaL

En cas de bénignité, la parotidectomie est effectuée après repérage du nerf facial. L’exérèse glandulaire est totale, subtotale, exofaciale, voire inférieure selon l’histologie et la localisation de la tumeur. Celle-ci doit être retirée en monobloc avec marges. Le nodule étant régulièrement au contact du nerf facial et de ses branches, les marges seront minimes à cet endroit précis pour préserver son intégrité.
Lors de l’exérèse, une analyse extemporanée est préconisée afin de ne pas méconnaître une histologie plus agressive. En effet, si en peropératoire, on doute de la bénignité, cela conduit à la parotidectomie totale d’emblée afin de limiter au maximum une réintervention dans la loge parotidienne (à haut risque pour le nerf facial). Un diagnostic de malignité fera évidemment totaliser la parotidectomie et acquérir autant de marges carcinologiques que possible.
Selon les recommandations du réseau d’expertise français sur les cancers ORL rares (REFCOR), en présence d’un cancer parotidien, le sacrifice du nerf facial n’est indiqué qu’en cas de déficit clinique initial ou d’envahissement macroscopique peropératoire.3 Le curage cervical est indispensable s’il y a des adénopathies suspectes.3 En l’absence de cible ganglionnaire, ce dernier est indiqué en fonction du stade tumoral et du grade histologique.3 La radiothérapie postopératoire est recommandée si les marges de résection sont positives, en cas d’adénopathies métastatiques, ou de tumeurs de stade avancé et/ou de haut grade histologique.3 Le bilan d’extension d’une lésion maligne recherche des adénopathies et des métastases pulmonaires (les plus fréquentes).

Pathologie obstructive

La tuméfaction parotidienne est le plus souvent intermittente. Si elle est de courte durée, rythmée par la salivation, indolore, il s’agit d’une hernie. La colique salivaire est, elle, douloureuse et plus durable. Enfin, si l’obstruction se prolonge, une parotidite aiguë s’installe : la glande est inflammatoire en contexte fébrile avec douleurs vives et lancinantes et issue purulente par la papille du Sténon. Le double palpé jugal sent le canal dilaté sous la forme d’un cordon induré. Un trismus est possible.
Ces obstructions sont volontiers récidivantes.
De façon plus rare, une parotidite chronique peut s’exprimer par une parotidomégalie permanente, isolée et sensible.
La principale étiologie est la lithiase. Autres mécanismes : sténose canalaire ou encombrement de bouchons muqueux comme lors de parotidites récurrentes juvéniles ou encore de parotidites chroniques post-irathérapie.

Bilan préthérapeutique

En première intention et en phase aiguë, l’échographie est accessible et non invasive. Elle peut montrer une hypertrophie glandulaire, une dilatation canalaire, un calcul (surtout si > 2 mm) et une sialadénite du fait de l’hypervascularisation authentifiée en mode doppler.
À visée diagnostique mais également thérapeutique, la sial-endoscopie occupe une place de choix dans la prise en charge des obstructions parotidiennes chroniques.4, 5 En effet, l’endoscopie salivaire pratiquée après dilatation de la papille du Sténon (fig. 3) fait le diagnostic de lithiase(s) [fig. 4], de sténose(s) ou de bouchons muqueux et traite dans le même temps (sans « agression » du nerf facial). Elle remplace avantageusement la sialographie mais ne détecte pas les calculs intraparenchymateux.

Traitement

En cas d’obstruction aiguë, lorsqu’une lithiase est documentée, voire fortement suspectée, le patient doit éviter les sialogogues qui majorent la rétention salivaire. Une bonne hydratation est recommandée assortie d’un traitement anti-inflammatoire, voire antispasmodique, s’il est très symptomatique. Face à une parotidite aiguë, une antibiothérapie à diffusion salivaire (pristinamycine 1 g 2 à 3 x/j, amoxicilline 1 g 2 à 3 x/j, spiramycine 3 MUI 2 à 3 x/j) est licite.
La sialendoscopie pratiquée en dehors d’un épisode infectieux, au bloc opératoire, permet souvent de lever l’obstacle :
– extraction lithiasique endocanalaire (si calcul < 4 mm) [fig. 4] ;
– éventuellement associée à un abord chirurgical combiné endobuccal, voire transjugal, ou bien précédée d’une fragmentation (lithiase plus volumineuse) ;
– dilatation de sténoses ;
– et irrigation canalaire systématique permettant un rinçage glandulaire au sérum physiologique cortisoné.
Selon l’indication et la tolérance, le geste peut être conduit sous anesthésie générale ou locale.4

Maladies d’expression salivaire

Les sialoses sont les affections chroniques non inflammatoires et non tumorales au sein desquelles on décrit les sialadénoses et les maladies de système telles que le syndrome de Gougerot-Sjögren, la sarcoïdose, l’amylose, les infections par le VIH et l’hépatite C, et le diabète.5
Les sialadénoses provoquent généralement une parotidomégalie bilatérale et symétrique, indolore. Principales étiologies : alimentation riche en amidon, malnutrition, trouble du comportement alimentaire, obésité, éthylisme chronique, cirrhose, certaines médications…
De nombreuses pathologies systémiques peuvent avoir une expression salivaire. Il faut y penser lors de symptômes évocateurs avec atteinte multifocale : tuméfaction permanente éventuellement associée à une sensibilité glandulaire et/ou un syndrome sec (asialie, xérophtalmie, sécheresse des autres muqueuses).
Les explorations initiales sont : hémogramme, protéine C réactive, bilan hépatorénal, électrophorèse des protéines sériques, sérologies VIH, VHC, anticorps antinucléaires et anti-antigènes nucléaires solubles ou anti-ENA (anti-SSA, SSB…) ; radiographie thoracique ; biopsie des glandes salivaires accessoires. L’avis d’un confrère médecin interniste est utile.
Notons que s’il y a une symptomatologie obstructive, une sialendoscopie avec irrigation de sérum cortisoné peut permettre une amélioration fonctionnelle avec une diminution de fréquence et d’intensité des hernies et coliques parotidiennes.
Encadre

Histologie

Les tumeurs bénignes prédominent (80 % des cas). Les types histologiques sont nombreux.

L’adénome pléomorphe représente 60 % des tumeurs parotidiennes. Récidivant, il a un potentiel de dégénérescence maligne.

Le cystadénolymphome ou tumeur de Warthin (5 à 15 %) est volontiers superficiel et situé dans le pôle inférieur parotidien. Il touche plutôt les hommes, quinquagénaires au moins, souvent fumeurs.

La liste des tumeurs malignes est également très longue : carcinomes salivaires mais aussi lymphomes et extensions ganglionnaires intraparotidiennes de primitifs cutanés, sinusiens, voire rhinopharyngés.

Les grades de malignité sont très variables, parfois au sein d’une même histologie (par exemple : carcinomes muco-épidermoïdes, à cellules acineuses et adénocarcinomes pouvant être de grade bas, intermédiaire ou haut). Les carcinomes canalaires infiltrants et les épidermoïdes sont agressifs tandis que ceux développés sur adénome pléomorphe sont plutôt de bas grade, surtout si la capsule nodulaire est respectée.

Principaux critères pronostiques : stade et grade tumoraux, engainements périnerveux, qualité de l’exérèse chirurgicale. Ainsi, il est primordial que le bilan clinique et paraclinique soit optimal afin de limiter le risque de méconnaître un cancer lors de la chirurgie.

Encadre

Que dire à vos patients

• Le bilan et la chirurgie d’une tumeur parotidienne sont justifiés par le risque de méconnaître un cancer.

• L’exérèse comprend une identification puis une dissection minutieuse du nerf facial, indispensables pour préserver son intégrité.

• Les obstructions parotidiennes responsables de hernies et/ou coliques salivaires peuvent nécessiter une sialendoscopie.

Pour en savoir plus
1. Yabuuchi H, Matsuo Y, Kamitani T, et al. Parotid gland tumors: can addition of diffusion-weighted MR imaging to dynamic contrast-enhanced MR imaging improve diagnostic accuracy in characterization? Radiology 2008;249:909-16.

2. Fakhry N, Antonini F, Michel J, et al. Fine-needle aspiration cytology in the management of parotid masses: evaluation of 249 patients. Eur Ann Otorhinolaryngol Head Neck Dis 2012;129:131-5.

3. REFCOR. Tumeurs malignes primitives des glandes salivaires. Argumen- taire. http://bit.ly/2C7oZss
4. Vergez S, Vairel B, Chossegros C, De Bonnecaze G, Faure F. Chirurgie endoscopique des glandes salivaires. EMC – Techniques chirurgicales – Tête et cou 2016 ;11 :1-11 [Article 46-541].

5. Vergez S, Vairel B, De Bonnecaze G, Astudillo L. Pathologies salivaires médicales. EMC – Oto-rhino-laryngologie 2014 ;9 :1-15 [Article 20-628-A-10].

Fiches d’information du Collège des enseignants ORL :

– avant réalisation d’une parotidectomie. http://bit.ly/2E6aQgV
– avant réalisation d’une sialendoscopie. http://bit.ly/2FPGK1s

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essentiel

Les tumeurs parotidiennes sont majoritairement bénignes.

Un nodule requiert une IRM avec injection de gadolinium, suivie d’une consultation avec un chirurgien ORL, en vue – le plus souvent – d’une parotidectomie.

L’échographie est l’examen de première intention devant une inflammation parotidienne, une symptomatologie obstructive ou une parotidomégalie.

Les lithiases parotidiennes sont accessibles à une prise en charge endoscopique au bloc opératoire.

Gougerot-Sjögren, sarcoïdose, amylose, diabète peuvent avoir une expression parotidienne habituellement bilatérale.