Les règles sur le droit de conduire des personnes atteintes de certaines pathologies ont évolué, avec la parution d’un arrêté le 28 mars dernier qui fixe une nouvelle liste d’affections incompatibles, ou compatibles avec des aménagements ou restrictions. Point sur les évolutions et le rôle du médecin traitant.

Conduire est une activité mettant en jeu des compétences cognitives, sensorielles et motrices. Un certain nombre de pathologies (ophtalmologiques, ORL, cardiovasculaires, neurologiques…) et/ou de traitements médicamenteux peuvent altérer l’une ou l’autre de ces compétences, et sont donc considérées comme incompatibles avec la conduite ou pouvant nécessiter un aménagement du permis après avis d’un médecin agréé.

La liste des pathologies concernées vient d’être mise à jour et publiée au Journal officiel le 28 mars 2022 : ce texte apporte aux médecins des définitions plus précises des inaptitudes à la conduite ou aptitudes avec ou sans condition, facilitant les échanges avec les patients.

Les incompatibilités à la conduite les plus fréquentes sont l’épilepsie, les problèmes de vision importants, les troubles cognitifs et les pathologies cardiaques les plus lourdes (risque de malaise au volant ou état de fatigue incompatible avec la conduite), ainsi que les troubles causés par les addictions à l’alcool ou aux produits stupéfiants, mais tout problème médical pouvant interférer avec la conduite doit être pris en considération (v. ci-dessous).

Le vieillissement, en particulier, s’accompagne d’une prévalence accrue des affections neurologiques et des troubles de la vue (cataracte sénile, dégénérescence maculaire liée à l’âge…) pouvant altérer l’aptitude à la conduite automobile – en témoigne l’augmentation avec l’âge du risque d’accidents de voiture (pondéré par le nombre de kilomètres parcourus). Le dépistage de ces affections chez les conducteurs âgés est donc important pour prévenir les accidents de la route.

Quelles sont les principales évolutions ?

Des innovations scientifiques et technologiques ont accru les possibilités d’aménagements des véhicules et d’appareillage des conducteurs, permettant ainsi d’ouvrir la conduite à des personnes qui ont des incapacités locomotrices lourdes, y compris des véhicules lourds (poids lourds, véhicules de transport en commun...). De plus, le permis des véhicules lourds est également ouvert aux personnes qui ont un handicap auditif profond.

Les personnes ayant un diabète dont le traitement ne génère pas de risque d’hypoglycémie ne sont plus soumises, pour la conduite des véhicules légers, à un contrôle médical par un médecin agréé (jusque-là obligatoire).

Enfin, pour les pathologies neuro-évolutives type maladie d’Alzheimer et apparentées, le texte actualise l’incompatibilité définitive avec la conduite. Ces patients ne doivent plus conduire dès l’apparition d’un déclin cognitif.

Une liste détaillée des affections incompatibles avec la conduite ou requérant des adaptations, selon la catégorie de permis, est disponible en annexe de l’arrêté.

Le généraliste : rôle de « vigie »

Le médecin traitant joue un rôle essentiel, en identifiant ces différentes situations, pour informer le patient et émettre des recommandations, dont il doit assurer la traçabilité dans le dossier médical (dans le strict respect du secret médical). Il peut, le cas échéant, lui conseiller de s’adresser à un médecin agréé pour l’aptitude médicale à la conduite (liste sur le site des préfectures), qui donne un avis d’incompatibilité temporaire ou définitive ou de compatibilité avec ou sans condition.

Si l’avis du médecin traitant est seulement consultatif, le patient qui continuerait à conduire malgré cela, sans voir un médecin agréé, engage alors sa responsabilité civile et pénale. Ainsi, ce rôle de « vigie » est crucial car aucun examen systématique n’est aujourd’hui prévu en France lors du renouvellement du permis B tous les 15 ans, et ce quel que soit l’âge de la personne. En d’autres termes, s’il a une pathologie compromettant son aptitude à la conduite automobile, c’est au patient de consulter un praticien expert, mais c’est à son médecin traitant de l’informer de cette obligation.

À noter que, avant l’expertise, le médecin traitant peut orienter le sujet vers une consultation pluridisciplinaire spécialisée d’évaluation de l’aptitude à la conduite. Celles-ci ont lieu dans des centres pouvant organiser, en partenariat avec des auto-écoles, un test sur route, qui est l’évaluation de référence. Le bilan comprend un examen médical et, au cas par cas, une évaluation neuropsychologique et ergothérapique. Il permet de préciser si des aménagements du véhicule sont justifiés. Le compte rendu de ces évaluations comportant un avis sur la conduite est remis au patient. L’avis doit ensuite être validé auprès d’un médecin expert.

Les patients peuvent aussi consulter sur le site www.securite-routiere.gouv.fr une liste synthétique des pathologies invalidantes pour la conduite.

Pour en savoir plus :

Sécurité routière. Diabète, Alzheimer, handicaps locomoteurs ou auditif lourds… 3 avril 2022.
Bodaghi B, Remond AL. Conduite automobile et troubles de la vision.Rev Prat 2017;67(7):767-73.
Benisty S. Pathologies neurologiques du sujet âgé et conduite automobile.Rev Prat Med Gen 2016;30(956):146-7.

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