Impact parfois majeur, avec risques de complications psychopathologiques sérieuses.
En général, simple à identifier à l’interrogatoire : forte appréhension, excessive et systématique avant et pendant certaines situations d’interaction avec autrui (
Solutions psychothérapeutiques ou médicamenteuses : efficaces et très utiles.
Épidémiologie
Deux fois plus fréquente chez la femme, personnalités anxieuses et timides le plus souvent.
Favorisée par des facteurs psychologiques et éducatifs : faible sociabilité des parents, dénigrement ou maltraitance au sein de la famille ou à l’école, ou situations sociales traumatisantes.
Amélioration, voire disparition, avec le temps : non constante.
Retentissement fonctionnel et psychologique variable selon l’intensité du trouble, des évitements et l’étendue des situations redoutées.
Phobies sociales généralisées : les plus péjoratives. Altération de la qualité de vie, taux élevé de célibat, moindre niveau professionnel et de ressources que la population générale, et complications psychiatriques plus fréquentes.2
Dépressions, environ 50 % des phobiques, et addictions (à l’alcool surtout ou aux benzodiazépines) dans 20 % des cas.
Identifier le trouble
Poser des questions du type « Êtes-vous très gêné quand vous devez prendre la parole en public ? » ou « Êtes-vous anxieux quand vous devez parler avec un inconnu ? ». Puis explorer d’autres situations sociales, en évaluant si le patient ressent une forte anxiété impactant sa vie quotidienne.
Attention aux principaux diagnostics différentiels, qui peuvent aussi exister en comorbidité (
Faire preuve d’empathie et de connaissances sur ce diagnostic facilite l’expression du trouble et de ses conséquences.
Repérage plus difficile chez les enfants et les adolescents, plus réticents à l’évoquer du fait d’un fort sentiment de honte.
Comment traiter ?
Avant tout : thérapie comportementale et cognitive (TCC)
Objectif : s’habituer à se confronter au regard de l’autre sans chercher à s’en protéger ni à masquer ses émotions, avec des amis, des collègues ou des inconnus, dans des situations variées.
Progressivité et répétition réduisent l’anxiété conditionnée par ces interactions et assouplissent les pensées négatives (du type « Tout le monde va voir que je suis nul »).
Si besoin, enseigner des techniques d’affirmation de soi et de communication pour remplacer inhibition ou agressivité réactionnelle par des attitudes « assertives » consistant à faire respecter ses propres droits et souhaits tout en respectant ceux des autres.
Quand prescrire un médicament ?
Pas de benzodiazépines du fait du risque de dépendance et des effets sédatifs et amnésiants, notamment dans les situations demandant des efforts intellectuels et attentionnels.
Bêtabloquants (propranolol, 40 mg), 2 heures avant une situation redoutée chez certains patients gênés par des symptômes neurovégétatifs marqués, tremblements ou palpitations. Mais pas d’intérêt en traitement de fond continu.
Plusieurs antidépresseurs (paroxétine, escitalopram, sertraline et venlafaxine) : efficaces en traitement de fond.
Indiqués dans les formes généralisées à l’impact fonctionnel important, avec ou sans dépression associée.
Par exemple escitalopram à 10 mg/j, jusqu’à 20 mg/j en cas de réponse insuffisante.
Effet attendu : réduction de l’anxiété anticipatoire, des pensées négatives et des signes anxieux lors des confrontations au regard de l’autre.
Attendre au moins 2 ou 3 mois avant de l’évaluer.
Traitement poursuivi au moins 6 mois, voire 1 an si efficace, puis réduction progressive en surveillant les risques de rechute.
Si réapparition des symptômes : prescrire pour plusieurs années si bonne tolérance et acceptation du patient.
TCC en parallèle très utile pour obtenir une rémission durable et arrêter plus facilement le médicament.
À dépister précocément
Important d’y penser, notamment chez les patients atteints de dépression ou d’addictions, car peu évoqué spontanément par ces personnes.
Phobie sociale : un handicap parfois majeur
La peur du regard de l’autre est sous-tendue par la crainte d’un jugement négatif, non pas du fait de mauvaises intentions d’autrui mais en raison de défauts de tout type (physique, comportemental, intellectuel…) que le sujet s’approprie lui-même. Ainsi, une forte anxiété anticipatoire se manifeste dans les heures, voire les jours précédant la confrontation, puis l’angoisse au moment de l’échange peut aller jusqu’à la panique. Suit un sentiment de honte, voire d’humiliation, parfois prolongé.
Ces peurs génèrent des comportements d’évitement, consistant à fuir les situations sociales redoutées, ou à rester très en retrait quand elles ne sont pas évitables.
Circonstances déclenchantes : situations sociales formelles, notamment prise de parole en public, passage d’un examen, prestation devant un jury ou entretien d’embauche, qui exposent réellement au jugement des interlocuteurs. Certains sujets redoutent de la même façon une simple conversation improvisée, des échanges lors d’un repas ou d’une soirée, le fait d’être observé en écrivant ou en marchant…
Craintes principales : peur de paraître ridicule, de ne pas être crédible ou à la hauteur de la situation, de ne rien avoir à dire ou de bégayer, de rougir ou de trembler, comme par exemple l’éreutophobie, phobie centrée sur la peur obsédante de rougir en public.
2. Nagata T, Suzuki F, Teo AR. Generalized social anxiety disorder: A still- neglected anxiety disorder 3 decades since Liebowitz’s review. Psychiatry Clin Neurosci 2015;69:724-40.
3. Andrews G, Bell C, Boyce P, et al. Royal Australian and New Zealand College of Psychiatrists clinical practice guidelines for the treatment of panic disorder, social anxiety disorder and generalised anxiety disorder. Aust N Z J Psychiatry 2018;52:1109-72.
4. Stangier U. New developments in cognitive-behavioral therapy for social anxiety disorder. Curr Psychiatry Rep 2016;18:25.
Pour en savoir plus
Pelissolo A. Phobie sociale : repérer pour traiter efficacement. Rev Prat 2019;69:988-9.